la fin de cette vie… - Pallia-Vie

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LA FIN DE CETTE VIE…
Quelques repères
Petit guide à l’intention des proches d’un patient en fin de vie
COMPASSION
RESPECT
DIGNITÉ
Elle est loin l’époque où l’on veillait ses morts chez soi, où tous les proches du
défunt faisaient cortège derrière le corbillard. Maintenant, la mort est le plus
souvent affaire d’institution. Elle a déserté notre quotidien. On vit à 100 milles
à l’heure en oubliant que nous sommes tous mortels.
L’approche de la mort, que ce soit la nôtre ou celle d’un proche, nous prend
donc souvent par surprise. Elle nous choque et nous bouleverse. Elle change
notre perception de nous-mêmes, nos perspectives, nos espoirs et nous oblige
à revoir nos priorités tant matérielles, qu’affectives et même spirituelles. Elle
peut accentuer le vécu religieux, notre soif de sens, d'infini.
Être admis à la Maison de soins palliatifs c’est accepter de se confronter à
l’inconnu, aux derniers moments de la vie et au mystère de la mort. Cela peut
susciter bien des réactions, réveiller nos peurs, nos appréhensions et nous
donner l’impression d’être bien démunis. Il est donc normal de vivre des
émotions intenses, de ressentir du stress et même de l’impuissance.
Voilà pourquoi nous avons élaboré ce petit guide. Nous vous y parlons des
signes et des symptômes que nous allons surveiller et que nous tenterons de
soulager. Il sera aussi question de l’état de conscience et des signes
annonciateurs d’une mort imminente.
Il ne faut cependant pas oublier que chaque personne est unique et, que
conséquemment, chaque fin de vie l’est également. Ainsi, certains patients
présenteront plusieurs symptômes alors que d‘autres n’en présenteront que
quelques-uns.
Nous espérons que la lecture de ce petit guide vous éclairera sur ce que peut
vivre votre proche malade et vous aidera à mieux vivre ensemble cette
dernière étape.
Nous espérons également qu’il contribuera à ce que vous vous sentiez partie
prenante de cette grande équipe où personnel infirmier, médecins,
psychologue, accompagnateurs spirituels, bénévoles et personnel de soutien
se dédient à la qualité de la vie jusqu’au bout de cette vie.
La maladie a déjà beaucoup évolué et elle continuera de le faire au cours des
heures, des jours et peut-être des semaines à venir. À quel rythme ? Bien
humblement, nous l’ignorons. La mort, comme la naissance, arrive à son
heure. Cependant, nous pouvons vous assurer que peu importe le temps qu’il
reste, nous nous efforcerons de soulager l’être aimé, nous nous assurerons de
son bien-être et cela, dans le plus grand respect de ses choix, de ses croyances
et de son histoire.
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Vous l’avez probablement accompagné et soutenu au cours de sa maladie. Ici,
il vous est encore possible de poursuivre votre implication. Dans la mesure où
vous le souhaitez, vous pourrez participer aux soins de confort qui lui seront
prodigués. Mais si vous préférez vous en abstenir, pour ne reprendre que votre
place de proche aidant, sachez que votre décision sera respectée.
Vous serez également invité à vous préoccuper de votre propre bien-être, à
prendre soin de vous, à respecter vos limites, à reprendre votre souffle, etc.
Accompagner un proche en fin de vie demande beaucoup d’énergie. Plus vous
serez en équilibre, plus vous serez en mesure d’offrir une présence de qualité
et plus vous serez satisfait de ces derniers moments partagés.
Enfin, soyez assurés qu’au fur et à mesure que la situation évoluera, nous vous
informerons de ce que nous observerons, mais également, de ce que nous
ferons.
L’équipe de soins
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1 à 3 mois avant la mort
Détachement
La personne malade commence à se retirer, à se détacher du monde qui
l’entoure. Elle peut se désintéresser de l’actualité, des journaux, de la
télévision. Elle n’a pas nécessairement le goût d’aller à l’extérieur même s’il
fait très beau.
En fait, le regard qu’elle porte sur ce qui l’entoure est différent de celui des
bien-portants. Elle peut insister sur l’accomplissement de tâches concrètes
non réglées, sur son bilan de vie ou sur le dénouement de conflits qui
perdurent depuis longtemps. Elle peut souhaiter obtenir ou demander pardon.
Il est souhaitable de respecter le travail de bilan et de détachement qu’elle
entreprend, ses priorités et ses préférences. Graduellement, l’énergie
nécessaire pour entretenir plusieurs relations, aussi agréables soient-elles, est
de moins en moins là. Elle peut donc commencer à réduire le cercle des gens
autour d’elle.
Sommeil
Les heures passées à dormir sont de plus en plus nombreuses. Les siestes sont
plus fréquentes même si la nuit a été bonne. Le simple fait d’aller au bain peut,
tout en la détendant, lui prendre toute l’énergie qu’elle avait.
Alimentation
Autre signe que la maladie évolue, l’appétit n’est plus toujours au rendez-vous.
Quand la personne malade mange, quelques bouchées peuvent lui suffire.
Parfois, même ses mets préférés ne l’attirent plus.
Accompagner quelqu'un ce n'est pas le précéder, lui indiquer
la route, lui imposer un itinéraire, ni même connaître la
direction qu'il va prendre. C'est marcher à ses côtés en le
laissant libre de choisir son chemin et le rythme de son pas.
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1 à 2 semaines avant la mort
Détachement
Le détachement se poursuit. À cette étape, la personne aimée n’a plus
vraiment envie de voir beaucoup de personnes. Elle n’en conserve que
quelques-unes dans son entourage. Elle n’a plus le goût de parler longuement
et d’échanger. Ce n’est pas nécessairement qu’elle veuille absolument être
seule, bien qu’il arrive parfois que certaines personnes désirent s’isoler
complètement. Désormais, la communication doit se vivre d’une manière
différente. À ce stade, la personne parle moins fort et moins longtemps, mais
elle apprécie habituellement votre présence discrète et calme.
Le repli sur soi s’accentue de jour en jour et confirme que bientôt le silence
s’imposera la majeure partie du temps. La personne entreprend de se détacher
du monde extérieur pour se centrer sur son monde intérieur où il y reste du
travail à faire, un bilan à dresser et un trait à tirer sur toute une vie. Or, pour
cette révision intérieure, il n’y a de place que pour soi.
Sommeil
Elle se fatigue plus vite. Il n’est pas rare qu’après 20 minutes, la personne
malade soit épuisée. Il devient nécessaire de respecter cette nouvelle limite.
Les mobilisations peuvent maintenant être difficiles et on doit l’aider dans ses
déplacements. Si elle n’a plus la force de se rendre à la toilette, l’utilisation de
la chaise d’aisance lui permettra de préserver plus longtemps son autonomie
et sa dignité.
Sa capacité physique continue de diminuer. Elle souhaite demeurer de plus en
plus longtemps dans son lit pour, finalement, ne plus en sortir. Elle peut être
de plus en plus somnolente et dormir plus de 20 heures sur 24. Il est
cependant encore possible de la réveiller.
Respecter cet état de grande faiblesse et de somnolence de la personne
malade témoignera de votre compréhension de la tâche essentielle qu’elle
accomplit et de votre délicatesse à son égard en dépit du fait qu’elle ne puisse
plus partager avec vous son cheminement.
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Nourriture
Son rapport à la nourriture continue de se modifier. Elle n’a plus d’appétit. Il
n’est pas rare que les liquides soient la seule chose qu’elle accepte encore de
prendre. Elle peut avoir de la difficulté à avaler et il peut arriver qu’elle
s’étouffe.
Même s’il s’agit d’une étape souvent difficile pour les proches, il est préférable
de ne pas insister pour faire boire ou manger. Il faut se rappeler qu’il ne s’agit
pas d’une personne en convalescence, mais bien d’une personne en fin de vie.
Son corps n’a plus l’énergie pour gérer ces apports d’aliments.
La personne est à la recherche d’une autre forme d’énergie plus spirituelle.
Elle peut avoir soif d'infini. Nous pouvons contribuer à ce qu’elle se nourrisse
d’éléments plus intangibles comme de calme, d’amour, de sérénité, de
solidarité, de respect, etc. Le toucher et le non verbal se chargent de sens.
Certains rites, gestes ou symboles peuvent être significatifs pour la personne
et contribuer à l'apaiser au-delà des mots.
Délirium
Une certaine désorientation dans le temps et dans l’espace est fréquente. Cela
arrive surtout lorsque la personne malade se réveille. Elle ne sait plus où elle
est, ni quel jour ou quelle heure il est. On l’aide alors en la resituant dans le
temps et dans l’espace.
Parfois, cette désorientation s’accentue et la personne devient confuse et/ou
agitée. On parle alors de delirium.
Il peut arriver que ses propos soient inappropriés, que ses comportements
soient inadéquats ou qu’elle ait des hallucinations. Elle peut réclamer de
retourner à la maison, avoir peur de rester dans son lit et chercher à en sortir
à tout prix, ne pas vouloir rester seule, se sentir menacée, ne plus reconnaitre
les membres de sa propre famille, voir des choses ou des gens qui ne sont pas
là, etc.
La détérioration de son état général et les nombreux médicaments qu’elle
reçoit contribuent parfois au développement de ces manifestations qui peuvent
être pénibles pour tous.
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Si vous observez ou entendez ce genre de chose, il est important de nous en
parler rapidement. Votre connaissance de la personne malade et de son
histoire vous permettra peut-être de déceler avant nous les débuts de ce
delirium. Il faut savoir que ces états peuvent être transitoires et fluctuants, et
que plus on intervient tôt, plus grandes sont les chances d’améliorer la
situation.
Chez certains patients, cependant, ces symptômes sont dus à une atteinte
cérébrale découlant directement de l’évolution de la maladie. Les possibilités
de corriger la situation sont alors plus limitées.
Changements physiques
Au niveau des changements physiques, on note que le teint devient plus pâle
et que la maigreur s’accentue. Le pouls s’accélère, devient plus faible, parfois
irrégulier. La respiration peut, elle aussi, devenir irrégulière.
Habituellement, nous respirons de 16 à 20 fois par minute. Chez la personne
en fin de vie, ce rythme peut s’accélérer à plus de 30 fois par minute, ou au
contraire, diminuer à 6 ou 8 fois par minute, avec des pauses respiratoires de
10 à 20 secondes. Ces pauses sont plus fréquentes durant le sommeil.
Un embarras respiratoire intermittent peut également apparaître. Il s’agit de
sécrétions que le patient a maintenant plus de difficulté à éliminer. Le réflexe
de la toux est moins présent, le patient bouge de moins en moins et les
sécrétions s’accumulent et épaississent. Cette congestion rend la respiration
bruyante. Nous surveillerons ce symptôme et tenterons de le soulager. Lever
la tête du lit ou changer la position du patient peut aider, mais les râles
reviendront probablement. La médication nécessaire lui sera aussi
administrée.
Quelques jours et quelques heures avant la mort
Le niveau de conscience passe par plusieurs étapes. La personne peut
demeurer lucide et consciente presque jusqu’à la fin, mais la plupart du temps,
il y a une altération de l’état de conscience qui peut être progressive ou rapide,
une inconscience qui advient naturellement ou qui a été provoquée par la
médication.
Votre présence continue d’être précieuse, mais il vous faut la manifester
autrement. Si la personne aimait être touchée, vous pouvez lui tenir la main,
la toucher doucement, mettre votre main sur son front.
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Tous ces petits gestes parlent de votre présence et permettent de maintenir
la relation et la communication. Conserver une atmosphère calme dans la
chambre contribue au repos du patient et au respect de sa très grande
faiblesse.
Vous pouvez lui parler même si elle semble dans le coma. En effet, nous
croyons que la personne en fin de vie entend, car l’ouïe est le dernier sens à
disparaître avant la mort. Il est donc important de choisir nos propos en sa
présence. Au besoin, n’hésitez pas à quitter la chambre quelques minutes pour
régler certaines situations délicates.
Profitez du fait que même en fin de vie la personne malade est toujours là,
vivante, avec vous. Vous pouvez prendre le temps de lui faire vos adieux
personnels, vous étendre à ses côtés, lui parler. Certains ressentent le besoin
de donner à leur proche la permission de partir. Vous pouvez aussi lui faire le
cadeau de la rassurer sur votre capacité à faire face à son départ et à prendre
soin de vous et de votre famille.
Ne cachez pas vos larmes. Ne vous en excusez pas. Pleurer est sain. C’est
une façon naturelle de s’apaiser et de se dire au revoir. Nos larmes sont
l’expression de l’amour. Il serait encore plus désolant qu’une personne quitte
ce monde sans que quiconque verse une larme.
Sursaut de vitalité
Il peut arriver que quelques heures avant de mourir, la personne malade
présente un regain d’énergie. Elle peut s’éveiller, parler, demander à se lever,
à boire et à manger. Elle peut même souhaiter revoir parents et amis. Cela
peut durer quelques heures ou même une journée. Durant cette période,
même la douleur semble moins présente.
Ce sursaut de vitalité peut faire naître de l’espoir chez les proches, mais il
s’agit en fait d’une dernière poussée d’énergie avant le décès qui approche.
Très souvent, on ne le reconnaît qu’après coup.
Après ces quelques heures, l’état de très grande faiblesse revient et on assiste
au retour des symptômes de fin de vie. Un état d’inertie peut s’installer. L’état
de conscience se détériore, les yeux peuvent devenir larmoyants ou vitreux,
la respiration peut être irrégulière et le pouls plus rapide.
Une certaine agitation peut également s’installer et la difficulté de
communiquer contribue parfois à cette agitation. Est-ce parce qu’elle est
souffrante, qu’elle a peur ou qu’elle est inconfortable que la personne s’agite
ainsi ?
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Nous serons attentifs à ces questions. Nous observerons son visage pour y
déceler des signes d’inconfort ou de douleur. Si tel est le cas, si son front est
crispé ou si elle grimace, nous nous ferons un devoir de la soulager
promptement. Nous observerons également sa respiration. Si elle est
embarrassée ou trop rapide, nous administrerons la médication nécessaire.
Nous la repositionnerons, nous nous assurerons que sa culotte n’est pas
souillée, nous lui parlerons doucement et, jusqu’à la fin, nous lui expliquerons
ce que nous faisons.
Peu avant la mort
La peau devient fraîche et moite au toucher.
Les genoux sont violacés, les pieds et les mains sont pâles et froids.
Le pouls faiblit. Il devient filant et difficilement perceptible au niveau du
poignet.
Le patient urine peu, parfois plus du tout.
La transpiration augmente, la fièvre peut s’installer.
L’embarras respiratoire peut s’accentuer. Le bruit émis peut être dérangeant
pour les proches.
Les périodes d’apnée (arrêt de la respiration) sont souvent plus fréquentes et
peuvent durer plus longtemps.
La respiration peut devenir haletante, superficielle.
Tout cela nous parle du très grand dérèglement de tous les organes internes.
Le corps est allé au bout de ses forces.
Puis, c’est l’arrêt des fonctions vitales.
La circulation ne se fait plus, les poumons ne font plus leur travail.
Il y a cyanose des ongles, des pieds, des mains et des lèvres.
Le visage devient pâle et cireux.
La respiration s’arrête et le cœur ne bat plus.
Les yeux sont entrouverts, la bouche est ouverte et les pupilles sont dilatées
et fixes.
Certaines personnes peuvent attendre le bon moment, comme l'arrivée d'un
être cher ou, au contraire, le moment où personne n'est à son chevet pour
lâcher prise.
La plupart des proches vivent comme un cadeau le fait d'être autorisés à être
présents lors de la mort de l'être aimé.
Vous serez peut-être déçus si le décès survient à un moment où vous vous
étiez momentanément absenté. C'est parfois le désir profond de la personne
de ne pas déranger, de ne pas laisser de mauvais souvenir ou de ne pas faire
de peine qui peut les pousser à lâcher prise alors qu'ils sont sans témoin.
Quoi qu'il en soit, nous n'avons pas vraiment de contrôle sur le moment venu
du décès. La mort survient quand le corps termine son processus naturel
d'arrêt et que l'esprit boucle son processus naturel de réalisation.
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Après le décès, l’infirmière pourra se retirer pour vous laisser vivre ce moment
à votre manière et à votre rythme. Elle demeurera cependant disponible
jusqu’à ce que vous quittiez la Maison.
Rien ne presse. Prenez tout le temps dont vous avez besoin pour vivre les
émotions que vous ressentez et que vous avez besoin d’exprimer. Vous pouvez
toucher la personne aimée, vous coller, lui parler, rester seul avec elle. Ce
moment unique vous appartient et nous le respecterons.
Le médecin viendra constater le décès un peu plus tard. Pendant que vous
contacterez vos proches, l’infirmière viendra débarrasser l’être aimé de tout le
matériel médical qu’il porte. Elle lui fera également une toilette sommaire,
l’habillera d’un vêtement de votre choix et lui mettra une culotte d’incontinence
propre. Si vous le désirez, le patient pourra alors être transféré au Salon des
Adieux.
C’est à vous qu’il revient de contacter les gens du salon funéraire de votre
choix. Ils sont disponibles de jour et de soir. Si le décès survient la nuit, vous
pourrez faire cette démarche le lendemain matin.
CONCLUSION
La mort, comme la naissance, arrive à son heure.
Parfois, tout se déroule en douceur. On voit venir les choses, on apprivoise
peu à peu la réalité de la mort qui approche.
Parfois, elle nous bouscule et nous surprend. On croyait avoir plus de temps
devant nous…
Parfois, elle se fait attendre et elle prend tout son temps.
Mais dans un cas comme dans l’autre, toute l’équipe de la Maison de soins
palliatifs de la Rivière-du-Nord : personnel infirmier, médecins, psychologue,
accompagnateurs spirituels, bénévoles et personnel de soutien, tient à vous
dire qu’elle est là aussi pour vous, si vous le désirez.
Elle vous assure de sa disponibilité, de son écoute et de son soutien pour vous
accompagner sur ce chemin parfois difficile qui conduit à la perte d’un être
cher.
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