LE CONTAMINANT Module maladies transmissibles : Ghislaine Béchamp Nicole Bouchard Pauline Clermont Isabelle Kirouac Vol. 14 No 2 Mars 2004 LE RETOUR EN FORCE DU LAVAGE DES MAINS C’est en 1846 qu’Ignaz Semmelweis a fait la démonstration que l’antisepsie des mains pouvait réduire le taux de fièvres puerpérales dans une unité de maternité. Depuis, il a maintes fois été démontré que le lavage des mains est la mesure la plus efficace pour la prévention des infections en milieu de soins. Il est difficile de comprendre qu’il faille encore faire la promotion de cette mesure simple et accessible. ¾ Flores de la peau La peau des mains contient, toutes espèces confondues, entre 102 et 104 bactéries par cm2. La flore transitoire est acquise par le personnel soignant au cours de contacts directs avec un usager colonisé ou infecté ou par contact indirect avec l’environnement contaminé autour de l’usager. Elle comprend les organismes les plus susceptibles de causer des infections nosocomiales. La flore transitoire est facilement enlevée par le lavage routinier des mains. Les micro-organismes de la flore résidente survivent et se multiplient sur la peau et se concentrent surtout dans les espaces interdigitaux et dans les zones sous-unguéales. Il est plus difficile de s’en débarrasser mais ces micro-organismes sont moins souvent la cause d’infections nosocomiales. Les antiseptiques (iodophores, hexachlorophène, triclosan et chlorhexidine) ont une activité antimicrobienne. Ils sont préférables au savon en présence de bactéries multirésistantes. Les préparations à base d’alcool exercent leur action antimicrobienne par dénaturation des protéines. Seulement de 3 à 5 ml de préparation à base d’alcool suffisent pour réduire de 104 à 106 fois le nombre de micro-organismes présents sur les mains : bactéries gram positif et négatif, y compris les bactéries multirésistantes, les mycobactéries, les champignons et plusieurs virus. Des préparations à base d’alcool contiennent des émollients comme de la glycérine, des agents de réhydratation ou des dérivés de corps gras pour adoucir, hydrater, assouplir et imperméabiliser la peau : plusieurs études ont démontré que les préparations à base d’alcool causaient moins d’irritation et de sécheresse de la peau que le lavage des mains au moyen de savons ou d’antiseptiques. ¾ Les agents utilisés pour le lavage des mains Les matières organiques comme le sang peuvent diminuer l’efficacité des préparations à base d’alcool. En présence d’une forte contamination bactérienne, d’une quantité appréciable de matières organiques ou lorsque les mains sont visiblement souillées, il faut d’abord les laver avec de l’eau et du savon avant d’utiliser des préparations à base d’alcool. Les savons nettoient principalement par action mécanique; leur activité bactéricide est faible, sinon nulle. Ils réduisent le nombre de micro-organismes sur les mains par un facteur de 10. Les préparations à base d’alcool se comparent avantageusement au lavage des mains : accessibles partout, mieux tolérées, application plus rapide, technique plus simple, activité Verso Le Contaminant Mars 2004 antimicrobienne immédiate et différée, lavabo, savon et méthode de séchage non nécessaires. Les préparations à base d’alcool se sont révélées plus efficaces pour réduire le nombre de microorganismes sur la peau que le lavage des mains, même lorsque des antiseptiques étaient utilisés. De plus, l’adhésion plus grande du personnel soignant à l’asepsie des mains en raison des avantages des préparations d’alcool contribue à diminuer les infections nosocomiales. ¾ Le cas particulier du Clostridium difficile Plusieurs établissements de soins en région ont eu à faire face à des éclosions de Clostridium difficile cette année. Le Clostridium difficile est la bactérie responsable de la colite pseudo-membraneuse. Elle peut faire partie de la flore normale intestinale, mais elle est le plus souvent acquise en milieu de soins. Sa prolifération désordonnée est encouragée par la modification de la flore intestinale résultant de l’utilisation d’antibiotiques. En ce sens, la diarrhée à Clostridium difficile est une maladie iatrogénique. La bactérie se transmet par voie fécale-orale, en particulier à de la clientèle vulnérable, presque toujours à un usager traité aux antibiotiques. Dans l’environnement, elle prend la forme de spores extrêmement résistantes. Le personnel soignant risque de la transporter à la suite d’un contact direct avec un usager infecté ou son environnement contaminé. Agence de services de santé et de services sociaux (08) Tous les antibiotiques peuvent prédisposer à une infection par le Clostridium difficile : la clindamycine, l’ampicilline, l’amoxicilline et les céphalosporines sont le plus souvent impliqués. Les symptômes commencent généralement pendant le traitement mais, chez environ le tiers des usagers, ils apparaissent de un à dix jours après la fin du traitement. Lorsque c’est possible, il faut cesser le traitement antibiotique en cours. Le traitement initial de choix de la colite à Clostridium difficile est le métronidazole. La vancomycine est réservée pour les cas les plus graves. Dans 20 % des cas, il y a récidive après un traitement adéquat et, parmi ces derniers, plus de 40 % présentent plusieurs épisodes sans que cela soit attribuable à une résistance au traitement mais plutôt à une déficience de la réponse de l’hôte. Les spores de cette bactérie bien nommée résistent à tous les agents reconnus pour l’hygiène des mains (alcools, savons et agents antiseptiques). La prévention et le contrôle de cette infection en milieu de soins comprennent : • • • • Le spectre clinique de l’infection est large allant de l’infection asymptomatique au mégacôlon toxique. Environ les deux tiers des personnes infectées sont asymptomatiques; il n’est pas recommandé de les traiter. Chez les personnes qui présentent des diarrhées sans colite, l’arrêt seul des antibiotiques règle généralement le problème sans autre forme de traitement. La colite fulminante survient chez 2 à 3 % des personnes infectées. • l’utilisation rationnelle des antibiotiques; la durée de traitement antibiotique la plus courte possible; les précautions contre la transmission par contact, c’est-à-dire blouse, gants et lavage de mains (préparation à base d’alcool ou eau et savon) après avoir retiré les gants; l’entretien rigoureux de l’environnement de l’usager avec un désinfectant reconnu; en présence d’une éclosion de Clostridium difficile dans un milieu de soins, il faut temporairement demander au personnel soignant de se laver les mains à l’eau et au savon après avoir pris soin d’un usager infecté : c’est l’action mécanique de l’eau et du savon qui réduit le nombre de spores sur la peau. GARDE EN SANTÉ PUBLIQUE : Du lundi au vendredi de 8 h 30 à 16 h 30 : 764-3264 En dehors des heures ouvrables (demander la personne de garde en santé publique) CHRN : 764-5131 Un télécopieur, à l’usage exclusif des membres du module maladies transmissibles, permet la déclaration des maladies à déclaration obligatoire pendant les heures ouvrables en toute sécurité : (819) 764-4537