sur un fond de retenue qu’on ne retrouve pas dans l’analyse de Ray Soudah. Cette
analyse est d’ailleurs surprenante puisqu’elle est faite au moment même où la
«déprime» des bourses ne correspond pas aux fondamentaux et où les commentateurs
s’accordent à souligner leur caractère irrationnel. La valorisation des titres devrait
logiquement se produire et elle ne se produit pas. Pourquoi? Personne ne peut vraiment
le dire.
La valeur d’une entreprise cotée en bourse n’est certes pas dépendante de sa
capitalisation boursière. Elle n’en est toutefois pas complètement indépendante non plus.
Autrement dit, entrer en bourse, c’est aussi entrer dans un champ où la valorisation
dépend, comme cela se produit en ce moment, de facteurs relativement irrationnels.
C’est en raison de cet élément d’irrationalité inhérent au marché boursier que certaines
entreprises ont décidé de ne pas entrer sur ce marché. Des chasseurs de tête célèbres,
par exemple, dont la culture d’entreprise exige la plus grande discrétion, excluent la
possibilité de faire appel au marché des capitaux par une telle entrée. Chez les
banquiers privés genevois, on retrouve la même caractéristique. Leur culture, liée non
seulement à la discrétion mais aussi à la stabilité, à la confiance, à une tradition, ne les
prédispose pas vraiment à une capitalisation publique qui les rendrait dépendants
d’actionnaires et du cours de leurs actions.
La fusion LODH ne s’inscrit pas dans une rationalisation
Il y a, en économie, non seulement des éléments irrationnels tels que ceux qu’on trouve
sur le Nasdaq ou le Dow Jones, mais aussi immatériels, ce qui n’est pas la même chose.
On connaît l’importance de cette immatérialité pour tout ce qui concerne les marques, ce
qu’on appelle le «branding». Pour les banquiers privés genevois, ces éléments
immatériels sont particulièrement importants, parce que leur structure d’associés à
responsabilité illimitée s’appuie sur une très forte tradition et inspire confiance au client.
En une époque où le capitalisme est souvent décrit comme une jungle, ces éléments
immatériels propres aux banquiers privés genevois sont d’autant plus importants qu’ils
leur permettent de prendre leurs distances à l’égard des pratiques douteuses. On
s’étonne de voir Ray Soudah ne faire aucune mention de cet extraordinaire avantage
compétitif.
Certes, les attaques contre l’économie de marché sont rarement légitimes et il ne s’agit
pas d’en profiter, mais de récentes affaires montrent bien que des entreprises, même
cotées en bourse et donc tenues à la transparence, se conduisent plus comme des
requins que comme des dauphins. Dans un tel contexte, la gestion de fortune à la
genevoise prend toute sa valeur et la nécessité d’une «rationalisation» dans les termes
où elle est recommandée par Ray Soudah est si loin d’être évidente que la fusion
Lombard Odier – Darier Hentsch n’entre même pas dans cette catégorie. Que les
banquiers privés genevois ne doivent pas se complaire dans leur tradition et dans
l’avantage compétitif que nous venons d’évoquer, c’est certain. Mais oublier cette
tradition au nom d’une rationalisation présentée comme une recette universelle serait
tout aussi négatif. La fusion entre Lombard Odier et Darier Hentsch tient justement
compte de cette tradition. Elle témoigne aussi de la confiance que ces deux banques
mettent dans la place financière genevoise et suisse
Les banquiers privés sont bien placés pour relever les défis à venir
Il est indubitable que, dans une économie de marché, il faut croître. Le jeu de la
concurrence l’exige. Cela dit, cette croissance a de multiples visages et peut prendre
divers chemins. C’est même tout le charme du libéralisme que de ne pas prescrire de
recettes en cette matière et de laisser une large marge de manœuvre à des entreprises
de nature très diverse. Certaines échouent, alors que les meilleurs experts s’étaient
penchés avec attendrissement sur leur berceau, tandis que d’autres réussissent
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rime
18.06.2002htt
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