xv. la crise des guerres de religion

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XV. LES GUERRES DE RELIGION
(1559 - 1610)
XV. LA CRISE DES GUERRES DE RELIGION
(1559-1610)
Catholiques et protestants se déchirent pendant près de quarante ans au cours d'un conflit
que l'on appelle à juste titre les « guerres de Religion », mais qui est en même temps une très
grave crise nationale favorisée par la faiblesse de l'autorité royale sous les trois fils d'Henri
II. La sagesse politique d'Henri IV amène le rétablissement de la paix, en 1598, avec ledit de
Nantes.
XV.
LA CRISE DES GUERRES DE RELIGION.........................................................1
XV.A. LES GUERRES DE RELIGION, CRISE NATIONALE ........................................................2
XV.a.i. La crise religieuse...............................................................................................2
XV.a.ii. La crise politique .............................................................................................2
XV.a.iii. La crise économique. .......................................................................................3
XV.B. LES PREMIÈRES GUERRES DE RELIGION (1562-1584) ...............................................4
XV.b.i. Le début de la guerre ..........................................................................................4
XV.b.ii. La Saint-Barthélémy ........................................................................................4
XV.b.iii. Union calviniste et Sainte Ligue.......................................................................5
XV.C. LA CRISE DE 1584-1598..........................................................................................5
XV.c.i. La guerre des trois Henri. ...................................................................................5
XV.c.ii. Henri IV...........................................................................................................6
XV.D. LE RELÈVEMENT DU ROYAUME SOUS HENRI IV (1598-1610) ...................................7
XV.d.i. L'édit de Nantes. .................................................................................................7
XV.d.ii. La restauration de l'autorité royale..................................................................8
XV.d.iii. Sully et le redressement financier et économique. ............................................8
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XV. LES GUERRES DE RELIGION
(1559 - 1610)
XV.a.
Les guerres de Religion, crise nationale
XV.a.i.
La crise religieuse.
Entre la mort accidentelle d'Henri II en 1559 et la signature de l'édit de Nantes en 1598,
la France connaît, durant près de quarante ans, une des périodes les plus dramatiques de son
histoire. L'opposition violente des catholiques et des protestants s'affrontant en des guerres
indécises constitue l'aspect le plus spectaculaire de cette grave crise nationale, à la fois
religieuse, politique, économique et sociale. Les progrès du calvinisme sous Henri II et la
conversion de nombreux gentilshommes constituent, en 1559, une menace directe pour la paix
et l'unité du royaume, puisque, conformément aux idées du temps, il ne doit exister dans un
État qu'une seule religion, celle du prince. C'est ce principe (cuius regio, eius religio) qui a
triomphé en Allemagne en 1555 et conduit à la coexistence dans l'Empire d'États catholiques
et d'États protestants. Toute minorité pratiquant une religion différente de celle du souverain
est une menace pour l'unité de l'État et doit être éliminée. Si la minorité s'estime assez forte et
sûre d'elle pour devenir quelque jour majorité, elle résistera en attendant d'éliminer
l'adversaire. C'est ce qui explique la durée et l'acharnement du conflit qui déchire la France
dans la seconde moitié du 16e siècle. A part quelques voix isolées et vite couvertes par le
fracas des armes (Michel de L'Hospital, Duplessis-Mornay), chaque camp ne se donne d'autre
but et ne voit d'autre solution que l'élimination de l'adversaire, après que l'échec du colloque
de Poissy, en septembre 1561, eut démontré l'impossibilité d'un rapprochement entre les deux
confessions.
XV.a.ii.
La crise politique
Cette guerre, doublement fratricide puisque ce sont des chrétiens et des Français qui
s'entr'égorgent en un déchaînement de fanatisme et de cruauté, est d'autant plus grave que le
roi se révèle incapable de jouer le rôle d'arbitre qui devrait lui revenir. Cela est dû d'abord au
fait qu'à Henri II succède son fils François II (1559-1560), qui n'a que seize ans, et qui,
malade, meurt après dix-huit mois de règne. Son frère Charles IX (1560-1574) n'ayant que dix
ans à son avènement, le pouvoir est exercé par sa mère Catherine de Médicis comme régente.
Quelles que soient ses qualités politiques, qui sont grandes, celle-ci est une princesse
étrangère qui a du mal à s'imposer. Elle essaie de jouer sur la rivalité du parti catholique, qui
s'organise derrière le connétable de Montmorency et le duc François de Guise, et du parti
protestant, dont les chefs sont Antoine de Bourbon, Louis de Condé et l'amiral de Coligny.
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Mais, ce faisant, elle permet aux deux factions de se renforcer, grâce notamment à tous les
nobles réduits à l'inaction par la paix du Cateau-Cambrésis, et surtout elle amène François de
Guise à conclure que le parti catholique ne peut compter sur le pouvoir royal pour extirper
l'hérésie et qu'il doit donc s'en charger lui-même. Charles IX devient majeur en 1564, mais sa
mère n'en conserve pas moins la réalité du pouvoir. Coligny essaie de profiter de l'ascendant
qu'il a pris sur le roi pour faire triompher les huguenots, mais il est éliminé à l'instigation de la
reine mère. Après la mort de Charles IX en 1574, son frère Henri III monte sur le trône. Il est
intelligent, cultivé, conscient de ses devoirs. Mais la prolongation du conflit rend sa solution
de plus en plus difficile, dans la mesure où elle renforce les positions et les ambitions des
partis en présence. C'est ainsi qu'Henri de Guise, dit « le Balafré », fils de François et chef des
catholiques intransigeants, songe à substituer sa famille à celle des Valois sur le trône de
France. La religion sert de paravent à l'ambition politique.
De même, les événements favorisent le réveil des autonomies provinciales et locales,
tenues en bride au temps de François Ier et d'Henri II. Les gouverneurs de certaines provinces,
souvent soutenus par les états provinciaux, se conduisent en chefs quasi indépendants,
Montmorency en Languedoc, Lesdiguières en Dauphiné, Mayenne en Bourgogne, Mercœur
en Bretagne. Par ailleurs, la crise de l'autorité royale et les besoins financiers nés de la guerre
expliquent la fréquente réunion des états généraux (1560, 1561, 1576, 1588), sous la pression
de l'un ou l'autre des partis : les états font preuve d'une audace croissante, mais, n'ayant ni
périodicité régulière ni attributions définies, ils ne peuvent contribuer à la solution des
problèmes. Les interventions de l'étranger dans les affaires françaises témoignent, elles aussi,
de la gravité de la crise nationale que traverse le royaume. L'Angleterre d'Elisabeth et les
princes protestants allemands aident, à différentes reprises, les calvinistes, notamment par
l'envoi de troupes. De son côté, Philippe II, le très catholique roi d'Espagne, intervient
directement dans la dernière phase du conflit.
XV.a.iii.
La crise économique.
La crise religieuse et politique se double d'une crise économique et sociale. En effet,
outre les effets d'une série de crises de subsistances, la guerre civile a, directement ou
indirectement, des conséquences désastreuses sur toute l'activité économique. Les gens de
guerre qui parcourent le royaume en tous sens laissent derrière eux la ruine, la peste et la
mort. Les impôts royaux et seigneuriaux ne cessent d'augmenter. La production agricole et
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artisanale diminue. Le commerce intérieur est en partie ruiné. Cette situation aggrave les
tensions sociales. Si les grandes familles aristocratiques et quelques groupes restreints (les
riches financiers notamment) profitent de la situation, par contre le clergé, spolié et accablé de
dons gratuits1, la petite noblesse campagnarde et les masses populaires urbaines et rurales sont
les victimes de cette longue crise. La population elle-même, qui a continué à croître depuis la
fin du 15e siècle, tend à reculer à partir des années 1560-1580.
XV.b.
Les premières guerres de Religion (1562-1584)
XV.b.i.
Le début de la guerre
Le massacre des protestants de Wassy, en Champagne, le 1er mars 1562, par les
hommes de François de Guise marque le début de la lutte armée. L'historiographie
traditionnelle distingue huit guerres de Religion, mais c'est toujours le même combat qui se
poursuit, entrecoupé de trêves plus ou moins longues (voir DOCUMENT XV.b.). A chaque
campagne, les protestants, qui resteront toujours très minoritaires, sont généralement battus,
notamment à Dreux en 1562, à Jarnac et à Moncontour en 1569, mais arrachent à la cour, par
leur obstination, des conditions de paix chaque fois plus favorables, ce qui provoque
l'exaspération du parti catholique, qui, après avoir reconstitué ses forces, reprend la lutte.
Ainsi, l'édit de pacification d'Amboise, en 1563, accorde aux huguenots la liberté de culte
dans les faubourgs d'une ville par bailliage. Il est confirmé en 1568 par la paix de
Longjumeau. La guerre reprend, et les protestants, à nouveau vaincus, ne doivent qu'à
l'habileté politique de Coligny les avantages que leur procure en 1570 l'édit de Saint-Germain,
notamment le droit de tenir quatre places fortes, dont La Rochelle. Mais, entre-temps, les
principaux chefs des deux camps ont été éliminés, soit tués au combat (Antoine de Bourbon
en 1562, Montmorency en 1567), soit assassinés (François de Guise en 1563, Condé en
1569).
XV.b.ii.
La Saint-Barthélemy
Vers 1570, Charles IX, qui a vingt ans et est soucieux de se démarquer de sa mère, fait
entrer Coligny au Conseil. Celui-ci préconise une politique anti-espagnole et une intervention
aux Pays-Bas, révoltés contre Philippe II. Catherine de Médicis, qui est favorable à une
entente avec l'Espagne, se rapproche du jeune Henri de Guise impatient de venger la mort de
Don gratuit. Contribution financière accordée au roi de France par les assemblées du clergé et par les états
provinciaux ; elle est, en fait, fixée par le pouvoir royal et n'est donc gratuite que de nom.
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son père. Or, le 22 août 1572, Coligny échappe à un attentat fomenté sans doute par Henri de
Guise. La reine mère, soit qu'elle ait redouté une violente réaction des huguenots, soit qu'elle
ait voulu devancer une émeute de la population parisienne violemment antiprotestante et
excitée par les Guises, arrache à son fils l'ordre d'exécution des principaux chefs protestants
venus à Paris pour le mariage d'Henri de Bourbon-Navarre, fils d'Antoine de Bourbon et de
Jeanne d'Albret, avec Marguerite, sœur du roi. Le massacre de la Saint-Barthélemy, le 24
août, fait 3 000 victimes à Paris, dont Coligny, et est suivi de massacres semblables dans
plusieurs grandes villes. Ce crime, voulu par Catherine et Henri de Guise et approuvé par
Charles IX, n'arrange rien, bien au contraire : les protestants, furieux de la disparition de leurs
chefs, décident d'organiser solidement le parti huguenot autour d'Henri de Navarre.
XV.b.iii.
Union calviniste et Sainte Ligue.
Henri III (1574-1589), qui a succédé à son frère en 1574, se trouve bientôt dans une
situation quasi désespérée. Les protestants, regroupés en une puissante Union calviniste,
arrachent au roi, à l'issue d'une nouvelle guerre indécise, l'édit de Beaulieu (1576), qui leur
rend la liberté de culte et porte à huit le nombre de leurs places de sûreté. Les catholiques,
estimant que le roi ne soutient pas suffisamment leur cause, s'organisent bientôt en une Sainte
Union des catholiques ou Sainte Ligue, dont Henri de Guise cherche à faire un instrument de
ses ambitions personnelles. Entre les deux, les « politiques » ou « malcontents » regroupent
des catholiques modérés, notamment des officiers souhaitant que la royauté se place au-
dessus des partis. Ils sont soutenus par le dernier fils d'Henri II, François, duc d'Alençon,
ambitieux et brouillon, qui mène de surcroît une politique personnelle et intrigue contre son
frère. Vers 1580, une sorte d'équilibre semble atteint entre la Ligue et l'Union calviniste,
chacune s'organisant en État quasi indépendant dans les parties du royaume qu'elle contrôle.
XV.c.
La crise de 1584-1598
XV.c.i.
La guerre des trois Henri.
La mort de François d'Alençon, le 10 juin 1584, remet cet équilibre en question. En
effet, Henri III n'ayant pas d'enfant et peu de chances d'en avoir un, son héritier est
désormais Henri de Bourbon, roi de Navarre, descendant du dernier fils de Saint Louis. La
perspective de voir un protestant monter sur le trône de France répugne à la très grande
majorité des Français et amène Henri de Guise, soutenu par ses frères le duc de Mayenne et
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le cardinal de Lorraine, à signer avec Philippe II un traité, aux termes duquel le roi
d'Espagne promet d'aider financièrement la Ligue à écraser en France le parti protestant.
Henri III essaie de faire face. Mais les troupes royales sont battues par Henri de Navarre à
Coutras en novembre 1587, alors que, quelques jours plus tard, Henri de Guise est vainqueur
d'une autre armée protestante à Auneau. Sa popularité s'accroît d'autant et le prestige du roi
est un peu plus entamé. La population parisienne, farouchement ligueuse et entretenue dans
ces sentiments par la prédication des moines mendiants, acclame le Balafré et, à l'issue de la
journée des Barricades, le 12 mai 1588, force Henri III à s'enfuir de sa capitale. Cédant aux
pressions de la Ligue, celui-ci convoque à Blois les états généraux, dociles au duc. Rien ne
semble plus devoir arrêter les Guises, lorsque le roi de France décide de les éliminer pour
sauver sa couronne : il fait assassiner le duc de Guise par ses gardes le 23 décembre 1588 et
le cardinal de Lorraine le lendemain.
Ce double meurtre déchaîne contre le roi toute la France ligueuse. A Paris, le comité
des Seize, formé de ligueurs extrémistes, presque tous hommes de loi, avocats ou procureurs
au parlement, confie au duc de Mayenne la lieutenance générale du royaume, cependant que
la Sorbonne délie les sujets de leur devoir d'obéissance au roi. Celui-ci se rapproche alors
d'Henri de Navarre, héritier présomptif, et leurs forces conjointes mettent le siège devant
Paris. Mais le 1er août 1589, à Saint-Cloud, le moine dominicain Jacques Clément poignarde
le roi, qui meurt quelques heures plus tard, après avoir reconnu Henri de Navarre comme son
successeur.
XV.c.ii.
Henri IV
Mais celui-ci, devenu Henri IV, roi de France et de Navarre, a beau promettre de
maintenir la religion catholique et d'étudier la possibilité de se convertir, même les
catholiques royaux restés fidèles à Henri III l'abandonnent. Le nouveau roi doit donc
envisager la conquête de son royaume à la tête des troupes protestantes. Il bat à deux reprises
le duc de Mayenne en Normandie (Arques, septembre 1589 ; Ivry, mars 1590) et revient
assiéger Paris, mais doit lever le siège à l'approche de Mayenne et de renforts espagnols
commandés par Alexandre Farnèse (avril-septembre 1590). Cependant, dans la capitale, des
dissensions ne tardent pas à se faire jour entre les ligueurs. Si tous sont d'accord pour refuser
un roi hérétique, les uns, peu nombreux, sont prêts à accepter un prince étranger (l'infante
Isabelle, fille de Philippe II et petite-fille d'Henri II, ou le duc de Savoie), alors que d'autres
souhaitent un prince français (le cardinal de Bourbon, oncle d'Henri IV, un moment reconnu
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roi sous le nom de Charles X, mais qui meurt en janvier 1593, ou le duc de Mayenne). Mais
les Seize, extrémistes et démagogues, entretiennent l'agitation et exercent même, un moment,
une véritable terreur. Des états généraux réunis à Paris par Mayenne refusent, en avril 1593,
la solution espagnole, par référence à la loi salique, mais surtout par sursaut national.
Or, le 25 juillet 1593, Henri IV abjure le protestantisme et, le 27 février 1594, se fait
sacrer à Chartres (Reims étant aux mains des ligueurs). Désormais, ce qu'il n'avait pu obtenir
par les armes devient possible, la lassitude aidant : Paris lui ouvre ses portes le 22 mars 1594
et, en province, les ralliements se multiplient, les uns facilement obtenus, les autres négociés
et achetés. Le dernier rallié, en mars 1598, est le duc de Mercœur, un cousin des Guises,
gouverneur de Bretagne. Quant aux Espagnols, Henri IV les bat à Fontaine-Française, en
Bourgogne, le 5 juin 1595, et, en septembre 1597, leur reprend Amiens, dont ils s'étaient
emparés six mois plus tôt.
XV.d.
Le relèvement du royaume sous Henri IV (1598-1610)
XV.d.i.
L'édit de Nantes.
Le 2 mai 1598, le traité de Vervins rétablit la paix avec l'Espagne, en confirmant les
clauses du traité du Cateau-Cambrésis. Quelques jours plus tôt, le 13 avril, Henri IV a signé
l'édit de Nantes. On désigne généralement sous cette expression à la fois l'édit proprement dit
et deux groupes d'articles secrets signés le 2 mai. Ces textes, qui reprennent certaines
stipulations d'édits antérieurs, accordent à « ceux de la religion prétendue réformée »
(l'expression est significative), outre la liberté de conscience, la liberté de culte, mais assortie
d'importantes restrictions, puisque celui-ci n'est autorisé que dans deux villes par bailliage et
dans les demeures des seigneurs hauts justiciers. Par ailleurs, l'accession à tous les emplois
est garantie aux protestants, et des chambres mixtes, dites « mi-parties », sont instituées dans
six parlements. Cependant, le fait qu'Henri IV ait jugé nécessaire d'octroyer à ses anciens
coreligionnaires le droit de tenir des assemblées et de conserver cent cinquante et une places
fortes pour leur permettre d'imposer éventuellement leurs droits montre bien que l'édit de
Nantes est un acte de réalisme politique de la part du roi et non pas la traduction d'un
véritable climat de tolérance. La violente opposition des parlements à l'enregistrement de
l'édit, les résistances acharnées des milieux catholiques les plus divers et même le
mécontentement de nombreux huguenots témoignent dans le même sens. Du moins le geste
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XV. LES GUERRES DE RELIGION
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d'Henri IV mettait-il fin à près de quarante ans de guerre civile et allait-il permettre aux
protestants français d'exercer en paix leur religion.
XV.d.ii.
La restauration de l'autorité royale.
Le roi, qui a les qualités d'un grand souverain - courage physique, autorité et bonhomie,
sens de la dignité royale -, peut alors s'employer à la restauration du pouvoir monarchique et
au relèvement financier et économique du royaume. Il sait s'entourer de serviteurs fidèles,
comme le protestant Maximilien de Béthune, qu'il fera duc de Sully, ou des catholiques qui se
sont ralliés à lui dès le temps de la Ligue. Reprenant l'œuvre interrompue de François Ier et
d'Henri II, il surveille étroitement les grands corps de l'État. Les parlements ne peuvent
présenter de remontrances qu'après enregistrement des édits royaux. Les états généraux ne
sont plus réunis. Le clergé est invité à mieux contribuer aux dépenses publiques. La haute
noblesse est contrainte à l'obéissance : en 1602, le duc de Biron, qui a comploté avec
l'Espagne, est jugé et exécuté. Les gouverneurs de province voient leurs pouvoirs réduits aux
seules attributions militaires. L'envoi de commissaires permet de contrôler les officiers.
XV.d.iii.
Sully et le redressement financier et économique.
Sully, nommé surintendant des Finances, réussit à redresser la situation financière grâce
à un étroit contrôle des dépenses et des recettes. Celles-ci sont accrues par la création de la
paulette2, droit annuel payé par les officiers en échange de l'hérédité de leur office. Le
relèvement économique est rapide, attestant la vitalité profonde du royaume en dépit de l'état
lamentable dans lequel se trouvent certaines régions vers 1598. Henri IV et Sully se rallient
au mercantilisme 3, selon lequel il faut vendre à l'étranger plus qu'on ne lui achète afin de
dégager un solde positif d'or et d'argent. Les industries de luxe notamment sont encouragées,
soieries, tapisseries, cristalleries. Le réveil de l'activité économique se manifeste aussi par la
reprise des échanges commerciaux, à l'intérieur comme à l'extérieur : réfection du réseau
Paulette. Droit créé en 1604, levé sur les titulaires d'offices et appelé ainsi du nom du financier Paulet, qui en
afferma le premier la perception. Les officiers qui s'acquittaient de ce droit annuel, égal au soixantième du prix
de leur office, pouvaient transmettre celui-ci à leur héritier. Ainsi se trouvait consacrée, après la vénalité,
l'hérédité des offices.
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Mercantilisme. Ensemble de pratiques économiques en Europe aux 16e et 17e siècles plus que véritable
doctrine, le mercantilisme vise à développer la puissance du roi en enrichissant le royaume. Or la richesse de
l'État se mesurant à l'abondance d'or et d'argent, il convient de vendre le plus possible à l'étranger et de lui
acheter le moins possible. L'État doit donc intervenir par une réglementation de la production en vue de
l'exportation, par l'établissement de tarifs douaniers protecteurs, par le développement du commerce extérieur.
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routier, début de la construction du canal entre Loire et Seine, reprise du trafic des ports, au
premier rang desquels Saint-Malo, Rouen, Marseille, qui assurent un indispensable cabotage
et un fructueux trafic avec l'étranger. En 1608, Champlain fonde, sur les bords du SaintLaurent, Québec, noyau de la Nouvelle-France.
Pourtant, l'œuvre de redressement reste incomplète et des menaces subsistent tant à
l'intérieur du royaume que sur ses frontières. Les membres de la haute noblesse ne sont
soumis qu'en apparence. Les protestants restent sur la défensive et entendent bien tirer parti
des avantages militaires que leur accorde l'édit de Nantes. Le clergé et certains milieux
catholiques s'inquiètent de la politique royale hostile aux Habsbourg. En outre, si la cession
de la Bresse et du Bugey en 1601 par le duc de Savoie assure une meilleure protection de
Lyon, la frontière reste vulnérable face à la Franche-Comté et aux Pays-Bas espagnols. Alors
que la menace que fait peser sur le royaume la Maison d'Autriche subsiste, en dépit de sa
division en deux branches depuis l'abdication de Charles Quint en 1556. En 1609, Henri IV
est même à deux doigts d'une guerre avec l'empereur à propos de la succession du duché de
Clèves. Mais, le 14 mai 1610, il est assassiné par Ravaillac, catholique exalté qui affirmera
avoir agi seul (voir DOCUMENT XV.c.).
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