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Les fractures ouvertes de jambe
Pr. M. Kihal
I. Généralités - Définition :
Ce sont les fractures intéressant les 2 os de la jambe mais principalement le
tibia, qui sont situées entre :
- 5 cm au dessous de l’interligne du genou et
- 5 cm au dessus de l’interligne tibio-talien, et qui s’accompagnent d’une
ouverture cutanée en regard ou à distance du foyer de fracture d’importance variable.
Ce sont les fractures ouvertes les plus fréquentes de l’appareil locomoteur.
Elles sont graves pronostiquant l’avenir fonctionnel de la jambe en raison de
l’important risque d’infection osseuse microbienne à travers l’ouverture cutanée.
Une antibioprophylaxie précoce et massive est automatiquement prescrite
devant toute fracture ouverte pour empêcher l’installation de l’infection.
Les germes en cause sont ceux du patient lui-même ; germes saprophytes
(staphyloccoque…).
Si l’infection osseuse se pérennise au niveau du foyer de fracture, la guérison
sera très longue à obtenir.
Le traitement des fractures ouvertes de jambe est chirurgical, le progrès des
techniques de levers de lambeaux de couverture cutanée a beaucoup amélioré les chances de
guérison.
II- Anatomie-Pathologie :
Certains faits anatomiques rendent la jambe (le tibia) vulnérable :
1. L’existence de zone de faible résistance à l’union du supérieur - moyen
du tibia.
2. La face médiale du tibia est mal vascularisée particulièrement au ¼ inférieur de
la jambe (zone de passage de tondons et non d’insertion musculaire).
3. La proximité du tibia avec la peau du coté médial représente un risque
potentiel d’ouverture cutanée ou un risque de contusion et de délabrement (ecchymoses
fréquentes).
4. Les pseudarthroses sont fréquentes au niveau du ¼ supérieur et du ¼ inférieur
du tibia.
5. Les pseudarthroses infectées et les retards de consolidation sont fréquents
après les fractures ouvertes.
Il ne pas oublier une autre complication redoutable qui est le syndrome des
loges (c’est l’équivalent du syndrome de Volkmann pour le membre supérieur) qui peut
survenir en post traumatique ou en post opératoire et en dehors de toute immobilisation
plâtrée et même après une fracture ouverte.
L’embolie graisseuse est par contre moins fréquente lors de la fracture
ouverte.
a) canisme :
Ce sont les 4 grands mécanismes décrits au chapitre des fractures diaphysaires,
nous les rappelons :
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1. La flexion :
C’est un mécanisme habituellement direct, comme lorsqu’un piéton est percuté au
niveau de sa jambe par le pare-choc d’un véhicule ou lorsqu’un joueur de football
tacle violement son adversaire.
La flexion de la diaphyse entraine une fracture transversale ou une fracture
transversale avec un 3ème fragment appelée la fracture "en coin de flexion".
L’illustration peut se faire lorsqu’on veut casser en deux un bâton de craie.
2. La tension :
C’est un mécanisme également direct par effet de traction ou d’incurvation de la
diaphyse. L’illustration parfaite en est la fracture en « aile de papillon ».
3. La torsion :
C’est la rotation du cylindre diaphysaire dans deux sens opposés l’un par rapport à
l’autre. La torsion entraine par effet de rotation une fracture spiroïde. Le bâton de
craie peut également le bien illustrer.
4. La compression :
C’est une impaction longitudinale dans le grand axe de la diaphyse.
L’exemple type, est la chute d’un lieu élevé avec réception sur les 2 pieds. Elle
entraine une fracture complexe dite comminutive ou un éclatement longitudinal du
cylindre osseux.
La compression peut être modérée et occasionner seulement une
fracture oblique (fig.1 b).
Il faut noter que ces 4 mécanismes peuvent s’y associer ou se combiner.
b) Le trait de fracture (classification anatomo-pathologique) :
Egalement nous rappelons les 7 types de trait de fracture (fig.1) :
1) La fracture transversale :
Le trait est généralement perpendiculaire à l’axe diaphysaire.
Les "dents de scie" qui marquent le rebord du foyer de fracture témoignent de la
succession in-situ de mouvements de traction et de cisaillement dus à la force vulnérante du
traumatisme.
2) La fracture transversale avec 3ème fragment ou fracture "en coin de flexion " :
Le trait principal reste perpendiculaire à l’axe diaphysaire, avec l’existence d’un 3ème
fragment témoignant d’une force vulnérante plus grande.
Le 3ème fragment subit ici un dépériostage important qui compromet sa consolidation.
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3) La fracture oblique :
C’est un aspect intermédiaire entre la fracture transversale et celui de la fracture "en
coin de flexion". Le trait principal est plutôt oblique et non strictement perpendiculaire à l’axe
diaphysaire.
Il existe souvent dans ce type de fracture une ébauche de 3ème fragment qu’il faudra
rechercher minutieusement sur les radiographies préopératoires.
4) La fracture spiroïde :
Cette forme de fracture comme son nom l’indique possède une ou deux spires. C’est
le mécanisme de torsion ou de rotation qui détermine la spire.
C’est une fracture effectivement instable car il n’y a pas ici de « dents de scie » qui
peuvent impacter le foyer de fracture.
On peut cependant nuancer cette affirmation avec l’intégrité des éléments périostés et
aponévrotiques péri-fracturaires qui peuvent conférer une certaine stabilité du foyer de
fracture.
Lors d’une intervention chirurgicale à foyer ouvert, il y a un risque important de
dépériostage du foyer de fracture en raison de l’existence de spires.
5) La fracture spiroïde avec 3ème fragment :
Le 3ème fragment spiroïde témoigne également d’une force vulnérante plus grande.
Ce 3ème fragment contrairement à la fracture transversale et la fracture en « coin de
flexion », garde souvent ses connections périostées et ne demande qu’à consolider.
6) La fracture bifocale ou multifocale :
Il s’agit habituellement d’une fracture à 2 niveaux ou à 2 étages sur le même segment
diaphysaire. La fracture bifocale ou trifocale est réputée par sa lenteur de consolidation, un
foyer consolide au détriment des autres.
L’enclouage centromédullaire à foyer fermé pour éviter tout dépériostage est le bon
choix thérapeutique.
7) La fracture comminutive :
Cette fracture est l’apanage des traumatismes violents.
C’est une fracture qui associe plusieurs types de traits et dont la complexité ou la
comminution peut s’étendre sur toute la circonférence de la diaphyse.
Si cette fracture reste bien alignée malgré sa comminution, le traitement orthopédique
par immobilisation plâtrée peut être une bonne option thérapeutique.
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(a) (b) (c) (d) (e) (f) (g)
Fig.1 : Les 7 types de fractures diaphysaires. La fracture transversale (a), la fracture
oblique (b), la fracture à 3ème fragment (c), la fracture spiroïde (d), la fracture spiroïde à 3ème
fragment (e), la fracture comminutive (f), et la fracture bifocale (g).
c) Le déplacement :
Les extrémités fracturaires se déplacent sous l’action de forces nombreuses :
- La force vulnérante du traumatisme.
- Les tensions musculaires.
- La pesanteur.
- Le moyen de stabilisation (plâtre ; broches, agrafes…).
Il existe plusieurs types de déplacement (fig.2) :
1) La translation :
C’est un déplacement d’un fragment par rapport à l’autre selon un axe transversal et
dans un sens latéral.
2) Le chevauchement :
C’est un déplacement d’un fragment par rapport à l’autre selon un axe longitudinal et
dans un sens vertical.
3. Le décalage :
C’est un déplacement d’un fragment par rapport à l’autre selon un axe vertical dans et
dans un sens rotatoire. Celui-ci peut passer inaperçu sur la radiographie, il faut toujours
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vérifier la rotation éventuelle du fragment distal par rapport au fragment proximal (l’un est vu
de face et l’autre est vu de profil, fig.2 d).
I. L’angulation :
Soit dans un plan frontal :
- Le valgus : qui est une angulation à sommet médial et sinus latéral
- Le varus : qui est une angulation à sommet latéral et sinus médial.
-
Soit dans un plan sagittal :
- Le flessum : qui est une angulation a sommet antérieur et sinus
postérieur.
- Le curvatum : qui est une angulation a sommet postérieur et sinus
antérieur.
(a) (b) (c) (d)
Fig.2 : Les différents types de déplacement des fractures de jambe.
La translation (a), le valgus (b), le chevauchement (c), et le décalage (d).
d) Les lésions associées :
Les lésions associées sont ici dominées par les lésions cutanées.
1. Les lésions cutanées :
Elles témoignent d’un traumatisme plus violent que dans les fractures
fermées et les dégâts occasionnés au niveau de la peau, les muscles, les vaisseaux et
les nerfs peuvent être considérables.
Il existe souvent une comminution osseuse dans de tels traumatismes et
à la contamination bactérienne fort probable vient s’ajouter une dévascularisation
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