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trois fois rien
possible déclencheur. Robert Filliou avec La Joconde est dans l’escalier revendique cet en deçà de l’œuvre
qui nous semble récurrent dans l’exposition et qui fonctionne à la fois comme ironie sur la notion même
d’œuvre et comme un impulse visuel. De même tout en rappelant qu’auraient pu être présentés les «travaux»
présentés par les quatre membres de l’éphémère mais déterminant groupe BMPT lors de l’exposition de
la Jeune Peinture en 1966, notre choix s’est porté plus précisément sur un travail de Niele Toroni qui à la
différence des autres membres du groupe, s’en est tenu au même principe de ne produire sous des modalités
et des supports multiples que des variantes d’empreintes de pinceau N° 50.
Nous avons associé deux artistes issus du Mouvement Supports/Surfaces : Noël Dolla, dont seront présen-
tés un étendoir, une bande et une croix ; exemplaires d’une économie du peu et du choix d’une réduction
volontaire des constituants de la pratique picturale qui en passe aussi par l’usage de matériaux et de médiums
« pauvres ». Dans la même logique le châssis et les échelles de Daniel Dezeuze matérialisent au plus juste
ce souhait de simplifier au maximum la production picturale et d’en déconstruire les moments pour aller à
leurs constituants premiers, ce dans le souci d’ouvrir au possible sans être parasité par le trop plein. Il faut y
ajouter Pierre Buraglio qui sans en faire partie en a été proche par nombre de ses préoccupations. Gauloises
ou des morceaux de fenêtres (fenêtres ramassées sur les chantiers de démolition, choisies, sélectionnées,
exposées selon leur état, telles ou ragréées), Pierre Buraglio poursuit. Toute une part de son œuvre porte sur
une pratique de la peinture qui s’appuie sus des matériaux ou objets empruntés à son environnement matériel
tout en évoquant l’objet même de la peinture (plan couleur, « fenêtre »). Ici aux côtés des œuvres proposées
(fenêtres, Metro) il faudra garder en souvenir les Gauloises Bleues de 1978 « pas vraiment grand chose et en
même temps un moment fort »(PB) et son bleu qui nous fait aller de Giotto à Hantaï.
Nous avons enfin choisi de présenter TV Spots (1987) de Stan Douglas, figure majeure de l‘art vidéo, série de
petites séquences TV qui montre une économie du travail vidéo travaillant ce qui serait le seuil minimum d’un
récit ou son épuisement dans le quasi indiscernable. Il y a dans ce travail une proximité avec certaines œuvres
de la littérature comme celle de Beckett et une proximité avec les « Events » de Brecht. L’œuvre de Douglas
se trouve à la croisée de préoccupations conceptuelles et contextuelles qui lui font souvent pratiquer le
collage visuel et user de références précises( free jazz européen, blues américain, spots publicitaires de la
télévision, etc.) pour fonctionner à partir de ready-made visuels.
Nous y avons associés des artistes singuliers comme François Bouillon qui travaille toujours avec une écono-
mie de moyens extrême et met en forme des fictions très épurées et de petits rituels symboliques, Pol Pierart
et ses mots doubles peints, Roberto Elia avec son affection pour l’infra mince, Marie-Claude Bugeaud pour
ses petit riens peints qui font images et peintures ou encore Jean-Loup Cornilleau pour ses objets et images
fragiles fais de chutes et de bouts de ficelles du réel.
Quant aux générations plus jeunes présentes ici, elles en sont les héritières mais sans dogmatisme. Et pour
certains cela ne concerne qu’une part de leur production dont le propos peut excéder le champ couvert par
cette exposition. C’est donc délibérément qui nous avons ici porté notre choix sur un aspect précis de leur
travail. Certains viennent de l’abstract comme Damien Cabanes (pour les œuvres choisies), Fabienne Gaston
-Dreyfus, Colombe Marcasiano, Isabelle Ferreira ou Jean Laube. D’autres sont un rapport avec l’usage du mot
et du récit ou du temps. Mais aussi de l’objet. La référence à l’art conceptuel, au minimalisme, à Fluxus ou
au néo-dadaïsme est perceptible chez Patrick Dekeyser, Patricio Gil Flood, Jean-François Guillon ou Lucrecia
Lionti, Antoinette Ohannessian, Anu Tuominen et Pierre-Yves Freund.
Ce sont ces croisements de genres qui charpenteront l’exposition. On y découvrira une appétence à conden-
ser du réel, du sensible, du vécu et de la pensée dans un usage subtil d’objets ou matériaux au rebut. C’est
l’univers de la condensation, de l’ellipse, du reste, du fragment et de l’infime mouvement du monde qui nour-
rit ces œuvres la fragile présence fait toute la richesse : Une façon de redonner ses lettres de noblesse au
banal et au presque rien. L’expérience sensible qu’elles cristallisent témoigne d’un art d’aménager les restes,
qui se marie avec un refus de l’esprit de sérieux. Et qui nous rappelle que parfois c’est dans la partie qu’on
pressent le tout ; et que le moins est souvent mieux que le plus.
Le 19, Centre régionaL d’art Contemporain de montbéLiard
19 avenue des Alliés, 25200 Montbéliard | tel 03 81 94 43 58 | www.le19crac.com
Mardi-samedi : 14h-18h, dimanche : 15h-18h | Le 19 est membre de DCA et TRAC.
Vernissage vendredi 13 septembre à 18h30
Directeur | Philippe Cyroulnik