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MARGUERITE - Regardez ! (elle pose le carton ouvert sur une petite table. Les autres
s’approchent et regardent, inquiètes)
SYLVIE - C’est... c’est une chaussure de tennis !
JULIETTE- - De basket, pour être exacte, et énorme... une chaussure de basket… énorme...
je n’en ai jamais vu comme ça !
MARGUERITE - Oui, regardez, il y a la marque, et l’étiquette de la pointure : 66... non, 68 !
SYLVIE - 68 ? Mais personne ne chausse du 68 dans le quartier.
MARGUERITE - Ni même ailleurs. Ce n’est pas une vraie chaussure... Et pourtant il y a tout :
les lacets, le logo, même un peu de terre sur le dessus...
(elles s’arrêtent et se tournent vers Michel. Leur texte est terminé. Il se lève, et se dirige vers
elles)
MICHEL – Bravo mes chéries. Fin de la scène 1 ! C’est très bien. Sauf un petit trou pour
Juliette, votre texte vient. C’était super, Marguerite, ton entrée à petits pas, avec le carton que
tu tiens en avant comme une offrande.
(il approche sa chaise. En parlant, ils s’installent tous les quatre pour discuter)
Bon ! Maintenant... j’ai besoin de vous. Comme je vous l’ai dit, j’ai écrit seulement jusque là. Et
pour la suite, je suis... je suis... un peu en panne !
SYLVIE - Oui, ben Pour nous, c’est pas drôle de travailler sur un bout de texte comme ça. On a
du mal à cerner les personnages...
JULIETTE- Et Michel, sans te fâcher, j’ai peur que ton espèce de concours d’écriture, ce soit
un piège à con ! Ecrire un acte dans un salon de coiffure, passe encore, ça peut faire un cadre
intéressant, mais à quoi ça rime d’y insérer une chaussure... de pointure 68 !
SYLVIE - Ca n’existe même pas dans la réalité !
MARGUERITE - Peut-être chez les basketteurs américains...
MICHEL - Mais c’est justement ça le défi ! Autrement c’est du boulevard... des bonnes femmes
qui se racontent leurs mésaventures amoureuses dans un salon de coiffure... Alors que, avec
cette chaussure étrange, invraisemblable, il faut trouver quelque chose... je ne sais pas, moi...
de fantastique, de poétique...
(les trois femmes hochent la tête, elles boudent un peu)
MICHEL - Par exemple, quand Madame Ribastin pense que ça peut être une bombe, on a un
début de piste intéressant.
SYLVIE - Ouais... un attentat terroriste déguisé en « Nike », c’est une piste qui n’ira pas loin.
MARGUERITE - D’autant qu’en regardant dans la boîte, comme tu l’as écrit, on aurait vu
quelque chose de suspect.
MICHEL - Mais quand même, c’est une allusion sympa à l’actualité... et je pense que le public
aime bien ces clins d’œil... (un silence...) Bon, je suis d’accord, on peut laisser tomber cette