Les Colloques UNAFAM 16

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Les Colloques UNAFAM 16
« L' Accompagnement dans le Parcours de Soins de
la personne en situation de Maladie Psychique »
Première rencontre
Avec la participation du Centre Hospitalier Camille Claudel
Trois thèmes :
- L'alliance thérapeutique : une nécessité
- L'accompagnement de la personne malade
par la famille
- L'accompagnement de la personne malade
vers le soin : Qu'en est-il de la prévention ?
12 Mars 2015
Cité Internationale de la Bande Dessinée et de l'Image
121 Route de Bordeaux-16000 Angoulême
Unafam16 – 73 Impasse Joseph Niepce - CS 92417 -16024 ANGOULEME Cedex
06 07 36 42 21
www.unafam16.org
[email protected]
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L'Accompagnement dans le Parcours de Soins de la
personne en situation de Maladie Psychique
Sommaire
Ouverture
M-F Raillard : Présidente-Déléguée UNAFAM16
Introductions
Luc Thiel : Directeur du CHCC de la Couronne
Martine Pinville : Députée de le Charente
Xavier Bonnefont : Maire d'Angoulême
Modérateur
Denys Robiliard : Député du Loir et Cher.
Rapporteur de la mission d'information sur la santé mentale
et l' avenir de la psychiatrie à l' Assemblée Nationale.
« Le dispositif de prise en charge psychiatrique organisé
autour du secteur : Préconisations et moyens de sa
rénovation »
I – L'Alliance Thérapeutique : Une nécessité
Claude Finkelstein
Présidente Nationale de la FNAPSY
« Témoignage du vécu de patients »
Marie-Françoise Raillard
« Parcours des aidants familiaux ayant un proche souffrant
de maladie psychique »
Anne-marie Julia, Olivier Pinault, Georgette Saintonge
Respectivement Directrice-Adjointe, référente du Pôle des
Usagers, Cadre Supérieur Socio-éducatif, Coordinateur du
Pôle des Usagers, Bénévole de l'UNAFAM87
« La démocratie sanitaire au service de l'alliance thérapeuthique : Retour d'expérience du C H Esquirol de Limoges »
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II – L'Accompagnement de la personne malade par la famille
Hélène Davtian
Psychologue clinicienne, doctorante de l' Université de
Nanterre
« La notion d'aidant en psychiatrie et ses effets sur la
famille »
Yann Hodé
Psychiatre au Centre Hospitalier de Rouffach
« Pro-Famille : La psychoéducation des familles »
Martine Bungener
Directrice de recherche émérite au CNRS
« L'accompagnement des familles : Quel changement en 20
ans. Regards sur 2 enquêtes menées avec l'UNAFAM »
III – L'accompagnement de la personne malade vers le soin :
Qu'en est-il de la prévention ?
Antoine Pelissolo
Professeur de Psychiatrie, Chef de Service à l'Hôpital Henri
Mondor
« Les troubles anxieux et phobiques sévères : Quelle prévention et quel accompagnement ? »
Marie-Odile Krebs
Professeure de Psychiatrie à Paris-Descartes, DirectriceAdjointe au C. P. N. à l'Hôpital Sainte-Anne, Prix de la
Fondation Philippe et Maria Halphen
« L'objectif de la Fondation Philippe et Maria Halphen et
focus de la prévention dans les troubles schizophréniques »
IV- Conclusions et perspectives en direction de la seconde rencontre en
Mars 2016
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OUVERTURE
« L'accompagnement dans le Parcours de Soins de la personne en situation
de Maladie Psychique »
Madame Marie-Françoise Raillard : Présidente Déléguée UNAFAM 16
Madame la Présidente de la FNAPSPY, Claude Finkelstein
Madame la Directrice de Recherche au CNRS, Martine Bungener
Madame la Professeure, Marie-Odile Krebs,
Madame la Doctorante, Hélène Davtian,
Madame la Rédactrice en Chef de l'UNAFAM, Anne Pierre-Noel
Mesdames Anne-Marie Julia, Georgette Saintonge, Monsieur Olivier Pinault du Pôle des Usagers
de l'Hôpital Esquirol de Limoges,
Monsieur le Professeur Antoine Pelissolo,
Monsieur le Docteur Yann Hodé,
Monsieur le Directeur du CHCC, Luc Thiel,
Monsieur le Maire, Xavier Bonnefont
Madame la Députée, Martine Pinville
Monsieur le Député, Denys Robiliard
Monsieur le Directeur Général Adjoint de l'ARS, François Fraysse
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Mesdames et Messieurs de la Préfecture, du Conseil Général, de la DDCSPP, de la DRJSCS, de
l'ORS
Mesdames et Messieurs,
« Quelles sont les possibilités d'activité réflexive, de dialogue, avec soi et avec les autres, quand on
est débordé par les émotions, c'est à dire par la perturbation de la chimie de nos neuro-transmetteurs
cérébraux, comme on peut l'être sous l'emprise des effets psychotropes de produits toxiques tels que
l'alcool ou les drogues diverses ?
Qui parle alors ? Qui agit dans ces conditions ? Où est passé le sujet humain, c'est à dire capable de
contrôle, de discernement et de choix ? Être débordé par ses émotions ne veut pas dire que ce sujet
ait totalement disparu, mais qu'il assiste impuissant à la prise de pouvoir par un inconnu. Est-ce
cela la folie ?
La folie n'est pas une essence en soi, pas plus qu'une structure, mais plus prosaïquement une
maladie. Une maladie biologique, c'est à dire somatique, mais très particulière, en ce qui concerne
l'expression des émotions et le traitement par le cerveau de ces émotions. De ce fait, elle met à
l'épreuve la relation du sujet avec lui-même et avec le monde qui l'entoure. Elle altère ce qui fait la
spécificité de l'homme, ce qu'on appelle son psychisme, c'est à dire cette capacité réflexive qui
conditionne la représentation qu'il a de lui-même et qu'il pense que les autres ont de lui.
Cependant, sauf cas extrême, cela ne marche pas en tout ou rien. Une part de conscience réflexive
demeure le plus souvent, tapie au fond de soi, qui sait bien que tout ceci n'est peut-être pas aussi
vrai, que quelque chose déborde qui est soi et qui n'est pas soi.
La maladie psychique est une contrainte appauvrissante par les limites qu'elle impose, d'autant plus
triste et inacceptable qu'elle concerne toujours un sujet particulièrement riche par sa sensibilité et le
plus souvent par son intelligence.
Le sujet ne choisit pas sa maladie. Il peut, si cela lui est possible, se donner les outils nécessaires
pour ne plus en subir les contraintes. Mais, pour pouvoir choisir, encore faut-il qu'un minimum de
confiance en soi et dans les autres soit retrouvé. »
Nous, UNAFAM, parents et amis ayant un proche souffrant de maladie et/ou de handicap
psychique, nous vérifions chaque jour dans leur humanité abîmée ,la vérité de ces propos du
Professeur Philippe Jeammet que je viens de vous citer.
La question de la connaissance de la maladie psychique, du parcours de soins et de
l' accompagnement du malade jusqu'à son inclusion dans la société est alors posée avec une acuité
particulièrement vive dans le contexte actuel.
En effet, en 2020, l'OMS estime qu'une personne sur quatre connaîtra la maladie psychique dans sa
vie et que le handicap psychique sera devenu la première cause de handicap.
Une enquête faite par IPSOS en avril 2014 pour la fondation FondaMental révèle que 58% des
français se disent concernés de près ou de loin par la maladie psychique et que 84% d'entre eux
expriment largement manquer de repères face à ces maladies, d'informations au sujet de leur
prévention, au sujet des conduites à tenir en cas de troubles suspects, et au sujet de la prise en
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charge post-diagnostic.
De plus, prenant sa source dans le manque de connaissance de ces maladies, leur stigmatisation
s'avère élevée, puisque, toujours selon l'enquête IPSOS, 45% de nos concitoyens pensent que ces
malades sont dangereux pour autrui, alors que leur dangerosité est légèrement inférieure à celle de
la population dite normale.
Face à la souffrance de nos proches que nous ne pouvons que chercher à alléger, face à la
prévalence de ces maladies, aux besoins d'informations qu'elles suscitent, à la nécessité d’amorcer
un changement dans les mentalités, nous, UNAFAM-Charente, nous vous remercions
chaleureusement d'être venus si nombreux aujourd'hui pour partager, et réfléchir sur ce sujet.
Chacun, selon nos secteurs de compétences, quelles soient, relationnelles dans un contact avec le
proche-malade, médicales, médico-sociales, sociales ou autre, nous avons, chacun à notre juste
place, à échanger, chercher, mettre au travail nos idées, pour ensemble dans une dynamique
constructive accompagner la personne en situation de maladie psychique sur son chemin jusqu'à sa
réhabilitation.
Je souhaite à tous, un excellent colloque.
INTRODUCTIONS
Monsieur Luc Thiel : Directeur du Centre Hospitalier Camille Claudel
Mr Thiel excuse Madame Marie-Josée Rousseau, Psychiatre, Présidente de
la CME qui ne pourra intervenir au colloque pour cause de maladie.
Le CHCC est un dispositif de soins en psychiatrie et en santé mentale pour
l'ensemble du département de la Charente.
Au cours des années, ceci a poussé l'hôpital à faire une véritable évolution,
à sortir de ses murs pour être présent sur l'ensemble du territoire.
Intervenant en santé mentale, sa clientèle s'est diversifiée : A côté du soin de la psychopathologie
traditionnelle, l'hôpital accueille la population en souffrance mentale dans ce qui la caractérisent
actuellement : jeunes présentant des états limites, personnes souffrant d'addictions......Mais la
psychiatrie ne pouvant pas tout prendre en charge, en plus du travail avec les familles, elle a signé
des partenariats avec les établissements médico-sociaux et les services sociaux du département....
Cette évolution interroge la psychiatrie sur son savoir et sur ce qu'elle peut faire. A sa déclinaison
médicale, s'ajoute une déclinaison médico-sociale, sociale, éducative....
Soigner efficacement les personnes dans leurs parcours de vie, demande à ce que l'hôpital continue
d'évoluer dans ses pratiques, qu'il travaille avec d'autres, qu'il s'ouvre aux méthodes de soins de tous
les pays, et à toutes idées.
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Madame Martine Pinville : Députée de la Charente
L'examen en commission des affaires sociales du projet de loi de
modernisation de notre système de santé débute le 16 Mars. Des réponses à ce
texte sont attendues dans les domaines :
- d'allongement de la durée de vie,
- de développement de maladies chroniques,
- d'inégalités sociales dans l'accès aux soins.
Le parcours de soin est au centre de ce projet de loi. C'est un enjeu
fondamental pour la personne en situation de maladie psychique, chaque
situation nécessitant une réponse différente et adaptée. L'objectif est d'assurer
la continuité des soins pour tous.
Deux dispositions répondent à ces enjeux dans ce projet de loi :
– La création de communautés territoriales de santé, chargées après diagnostic préalable,
d'établir un parcours de soin. Ces communautés sont organisées par les professionnels en
équipe de soin primaire. Des liens sont établis entre spécialistes acteurs sociaux et médicosociaux. Le dialogue, avec les représentants des patients et avec les collectivités qui veulent
s'y engager, est favorisé pour répondre à l'amélioration des parcours de soin.
– Le renforcement de l'organisation territoriale de la santé mentale par une meilleure
articulation avec les acteurs sociaux et médico-sociaux dans une logique transversale de la
santé mentale, de soin et d'insertion des personnes en situation de maladies psychiques.
Nous formulons un vœu que nous voulons mettre en place : Favoriser le décloisonnement entre
structures de soin et d'accompagnement médico-social, parce que la psychiatrie ne peut apporter
seule des réponses, à l'ensemble des personnes en situation de maladie psychique.
Dans cette loi, le rôle des patients sera accru, leurs initiatives valorisées, l'accès aux données de
santé sera ouvert, l'action de groupe en santé sera instaurée pour permettre aux malades psychiques
d'avoir le sentiment d'être acteur de leur parcours de soin.
Monsieur Xavier Bonnefont : Maire d'Angoulême
La ville d'Angoulême et les élus locaux sont mobilisés dans le quotidien des
familles dont un proche souffre de maladie psychique. L'impact de ces
maladies est important et fait appel à la capacité de la société à reconnaître et
prendre en compte les difficultés de ces personnes.
Aussi, la ville d'Angoulême accompagne-t-elle ces familles par ses actions et
en étant un relais de la politique de santé :
- Le CLS facilite l'intégration des malades psychiques dans la ville.
- La ville intervient dans les établissements scolaires : ouverture en milieu
ordinaire de l'école Ronsard pour les enfants autistes.
- L'insertion professionnelle des malades psychiques, qui est un facteur de
cohésion sociale, est une priorité de la municipalité.
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Pour conclure, le CLS dans lequel Mme Lagrange , Chargée de la Santé et des questions du
Handicap pour la ville est fortement impliquée, conduit un travail avec le CHCC dans les domaines
de la prévention du mal être et de la souffrance psychique. Également, le CLS inclut :
– deux projets dans le soutien aux familles confrontées à la maladie psychique, ceci en lien
avec l'UNAFAM
– un projet qui concerne une cellule expérimentale en santé mentale à laquelle participe
actuellement le CHCC, OMEGA, le CCAS
MODERATEUR
Monsieur Denys Robiliard : Député du Loir et Cher
Rapporteur de la Mission d'Information sur la Santé Mentale à l'Assemblée
Nationale
« Le dispositif de prise en charge psychiatrique organisé autour du secteur :
Préconisations et moyens de sa rénovation »
Un député n'est pas un expert : C'est un citoyen. Il se forge une opinion à
partir du travail des auditions des personnes et ceci dans la recherche de
l'intérêt commun. Ce fut le cas pour l'étude du dispositif psychiatrique de
secteur et des conditions de sa rénovation.
Le secteur caractérise la psychiatrie française. A son origine François
Tosquelles et Lucien Bonnafé pensent le secteur dans une conception désaliénante en lien avec le territoire : le patient est positionné au milieu de la
cité. Ce message politique continue d'exister.
Mais les secteurs ne sont pas tous identiques et pas tous parfaits.Une
préoccupation existe : Celle d'offrir au patient une palette de soins médical, hospitalier, ambulatoire,
médico-social et des possibilités d'hébergement dans la cité. Ce souci est mal pris en compte pour
deux raisons :
– un problème d'identification de la maladie et de dialogue entre les acteurs du soin,
– le secteur est trop souvent hospitalo-centré, alors qu'il doit être pensé dans un rapport avec le
territoire, les CLS en étant la traduction mais n'existant pas partout.
En conséquence, le secteur doit être rénové :
– pour faire fonctionner l'articulation entre le soin médical et médico-social,
– parce que le parcours de soin du patient doit tenir compte de son parcours de vie, ceci dans
le but de gérer la chronicité et permettre à la personne de rester chez elle,
– pour organiser le cadre territorial de soin dans une dimension adaptée à la maladie et en
fonction de la densité de population du territoire concerné,
– pour réaffirmer, re-légitimer le secteur qui fut contesté dans son existence en 2009 ( loi
HPST, conseillers de la cour des comptes...)
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A cause du développement des maladies chroniques dues au vieillissement de la population, des
déserts médicaux, du fait que 40% des psychiatres atteindront l'âge de la retraite dans les 4 années à
venir, le gouvernement met en place un service territorial de santé. Ces territoires seront définis par
l'ARS région par région.
Pour la psychiatrie ces territoires peuvent être de grande taille, ce qui a conduit à prendre la
décision d'articuler deux territoires de santé : Un territoire de santé qui sera la base commune à
l'organisation du service territorial de santé, et un territoire de santé propre à la psychiatrie qui est le
secteur, dans le but de permettre d'assurer la continuité des soins psychiatriques.
Une question se pose à la gouvernance du secteur et à l'articulation de cette gouvernance avec la
gouvernance générale du territoire de santé : S'il est prévu un CLS et un Conseil de Territoire de
Santé au niveau du territoire de santé, si la santé mentale fait partie de la santé, à cause de la
stigmatisation des maladies psychiatriques, souvent la santé mentale est oubliée.
Pour éviter ce problème, il est important de prévoir la généralisation des CLSM (Conseil Local de
Santé Mentale). Les élus qui les président sont des vecteurs de dé-stigmatisation, et des clés d'entrée
aux dispositifs de droits communs pour les patients.
Aux CLSM doivent être présents les usagers et leurs familles, tous les acteurs médicaux et médicosociaux. C'est le lieu des liens d'articulation entre les différents acteurs.
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I - L'ALLIANCE THERAPEUTIQUE :
Une nécessité
Madame Claude Finkelstein : Présidente de la FNAPSY
(Fédération Nationale des Anciens Usagers de la Psychiatrie)
«Témoignage du vécu des patients »
Madame Finkelstein parle de son vécu : Elle a été élevée par une tante maternelle qui souffrait de
schizophrénie et dont elle s'est occupée. Jeune femme, Madame Finkelstein était entreprenante. Un
accident de vie est survenu de façon violente et grave et elle a basculé dans la maladie psychique.
Dans les années 2000 à 2005, ce vécu lui a permis de constater une évolution positive importante
de la politique de la santé mentale. Depuis, une phase de fermeture s'en est suivie : Actuellement,
c'est pratiquement toujours par la crise qu'une personne rentre dans le soin psychiatrique, ce qui
conduit à dire que la prévention a besoin d'être développée en France.
Une question se pose alors : Quels sont les manques constatés face aux maladies psychiques ?
– Quand une personne tombe malade, elle et sa famille reçoivent peu ou pas d'information sur
la maladie psychique. Pourtant, permettre à une personne de comprendre qu'elle est malade
pour accepter sa pathologie est un cheminement obligatoire pour vivre aussi bien que
possible avec. Il n'en reste pas moins que les malades sont des citoyens et ont envie d'être
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–
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reconnus comme tels. Aussi, pour cette raison la FNAPSY ne participe pas à la Mad Pride :
« On ne peut pas être fier d'être fou ».
Dans son travail sur les articles 12 et 13 de la loi de santé, la FNAPSY note qu'elle est gênée
par le glissement de la psychiatrie vers la santé mentale. La FNAPSY demande d'abord, un
soin rapide et de qualité, et que la personne qui est en danger soit amenée à l'hôpital, car
celle-ci ne se rend pas compte de son état, même quand elle a accepté sa maladie.
Dans le travail fait pour la mission Lafourcade, la FNAPSY demande que des soins de
qualité et humains soient pratiqués partout en France, qu'il y ait une évaluation des pratiques
des résultats et de la qualité des soins, ceci avec les personnes concernées.
En démocratie sanitaire, dans la représentation des usagers, de nombreux problèmes se posent
aussi :
– Comment trouver des représentants des usagers, quand ceux-ci se battent pour vivre, pour
travailler, dans la fédération, dans les missions, même s'ils désirent rendre à leurs pairs ce
qu'ils ont reçu d'eux ?
– Comment trouver des représentants de l'hôpital quand ceux-ci ne peuvent pas être
représentants d'un hôpital du département où ils sont soignés ?
– Comment avoir un regard « correct » en CDSP quand le représentant des usagers y revit ce
qu'il y a vécu ?
– Comment faire vivre la fédération quand en 2014 la subvention de la FNAPSY est de
23000€ pour 61 associations dont les membres vivent avec les minimas sociaux ?
– Dans les représentations il est demandé une attitude presque professionnelle, mais trop
souvent les usagers répondent ce qu'on leur demande de dire, ce qui n'est pas de la
démocratie sanitaire ?
Si la parole publique prône que l'usager doit être au centre du dispositif de soin, dans la réalité
l'attitude sociétale ne favorise pas cette ouverture.
Madame Marie-Françoise Raillard : Présidente-Déléguée UNAFAM 16
« Parcours des aidants familiaux ayant un proche souffrant de maladie psychique »
Parler de maladie psychique demande à l'aidant familial de prendre du recul.
Chacun ayant une histoire singulière, la manifestation des signes précurseurs de la maladie au
moment de l'enfance est d'ordre différent, ce qui représente un facteur d'inquiétude pour les parents.
A l'adolescence, période de mutations dans les représentations psychiques, le jeune avec sa famille
entre progressivement dans la maladie. Au début les parents se leurrent et identifient les signes du
mal-être du jeune comme étant une caractéristique de cette tranche de vie perturbante.
Les parents en éprouvent un sentiment de désarroi, et cherchent à mettre en place des stratégies qui
échouent les unes après les autres. Peu à peu l’incompréhension s'installe et l'angoisse face à
l'imprévisible des situations finit par envahir le quotidien.
Le temps qui est compté pour un soin rapide qui permettrait, on le sait maintenant, de limiter la
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dégradation de la sphère du cerveau où siègent les processus cognitifs se perd.....Pourtant ce temps
est nécessaire aux parents, pour comprendre et admettre la maladie, ce qui advient, soit par une
prise de conscience, soit par un premier épisode psychotique....
La découverte de cette maladie qui est complexe, amène les parents à devenir des « experts », mais,
à leur manière.
Pour permettre à leur proche d'accéder aux soins, les parents vont affronter plusieurs difficultés :
– le déni (défaut d'insight)
– le fait de devoir représenter physiquement ce cadre psychique que leur « enfant » ne peut
plus soutenir,
– le fait de devoir partir dans une démarche de recherches multiples pour trouver un moyen
pour convaincre leur proche de se faire soigner......et à un moment donné, où cela finit par
marcher.
Tout au long de ce parcours la famille comprend progressivement qu'il lui faut être un « veilleur
vigilant » pour accompagner le jeune: Alors, au fur et à mesure de ce suivi,
– elle souligne les effets provoqués par les traitements,
– elle cherche à faire partie de l'alliance thérapeutique,
– elle favorise les ré-hospitalisations en détectant les signes des rechutes,
– elle se positionne dans l'idée qu'un être humain ne se limite pas à sa maladie,
– elle l'introduit dans un projet de vie adapté à son « statut d'adulte »,
– elle l'épaule pour qu'il ait une vie sociale,
– elle l'accompagne vers le monde du travail, si cela est possible.
Pourtant, dans certains cas, le degré de gravité de la maladie ne permet pas la stabilisation : Alors,
après un lourd combat intérieur, l'aidant endosse un rôle de rempart.
Dans la situation inverse, en cas de stabilisation de la maladie :
– le lien familial se reconstruit peu à peu,
– le jeune retrouve des habilités sociales perdues,
– à nouveau des signes de l'intelligence, du sens de l'humour, et le sourire réapparaissent,
– des manifestations de son « bien-être » semblent exister par moments....
Tout au long de ce chemin, au nom de l'expérience vécue, la famille perçoit :
– que les institutions médicales, médico-sociales, sociales sont indispensables au
rétablissement de la personne malade,
– que l’aménagement de ces institutions est nécessaire pour répondre au mieux aux besoins
d'accompagnement de ces personnes.....
Cette description du parcours des aidants s'est ici attachée à l'encadrement d'un proche souffrant de
schizophrénie, mais le besoin de soutien et d'accompagnement est identique quelle que soit la
maladie psychique : bipolarité, dépression grave récidivante, TOC...
Dans tous les cas, la famille est le lieu premier où naît et se comprend la maladie. Son rôle de
protection en est réactivé. Porteuse de l'histoire de son proche, elle devient le fil conducteur, la
mémoire du vécu souffrant de son proche.
De sa constance dans le soutien, de sa recherche personnelle pour tenter d'explorer de nouvelles
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pistes de prise en charge quand cela est possible, de sa réflexion pour entrer en relation avec son
proche-malade, la famille est un acteur incontournable du non-effondrement, voire de la
stabilisation, ou de l'évolution positive de la personne en situation de maladie psychique.
Mesdames Anne-Marie Julia, Georgette Saintonge,
Monsieur Olivier Pinault :
« La démocratie sanitaire au service de l'alliance thérapeutique :
Retour d'expérience du Centre Hospitalier Esquirol de Limoges »
Madame Anne-Marie Julia : Directrice Adjointe, Référente du Pôle des Usagers
La création d'un dialogue continue entre les représentants des usagers et les professionnels de
l'hôpital, est une aventure qui dure depuis dix ans. Elle est le fruit de la rencontre de deux hommes :
le Directeur de l'Hôpital et le Président de l'UNAFAM 87, dont l'objectif était de développer la
démocratie sanitaire et l'alliance thérapeutique. Ce cheminement a permis de passer d'une
représentation classique des usagers à une représentation foisonnante et forte qui a abouti à un
changement profond faisant vivre l'alliance thérapeutique.
En 2005, à l'initiative du Directeur, la maison des usagers voit le jour. Puis, deux fois par an, le
psychiatre de la CME propose un premier temps d'échange collectif par le biais de questionsréponses avec un psychiatre.
En 2006, le Comité des Usagers du Centre Hospitalier Esquirol est créé et réunit dix associations.
C'est à ce moment là que les réunions du Directoire, qui ont lieu deux fois par an, incluent des
usagers qui fixent l'ordre du jour. Dans ce lieu, des réponses sont données aux questions posées, des
messages de fond sont délivrés qui modifient la culture institutionnelle.
La représentation des usagers se développent alors tout azimut, engageant un dialogue entre
professionnels et usagers. Mais malgré tout, les choses avancent lentement car les cinq premières
années, la fréquentation de la maison des usagers est faible.
En 2009, les usagers participent à la Commission des Incidents-Accidents, ce qui conduit les
professionnels à accepter cette transparence.
Autre étape, le Directeur crée une Permanence d'Avocat à la Maison des Usagers, financée par
l'hôpital. Cela suscite de nombreuses questions, sans qu'aucun inconvénient n'en résulte, bien au
contraire.
En 2012, se met en place un rappel par SMS des rendez-vous des patients, pour éviter la rupture des
soins.
La même année se crée la Commission Permanente des Usagers et des Personnels, et plusieurs
formations professionnelles sont ouvertes aux représentants des usagers, sur le thème de la bientraitance et de la crise suicidaire, provoquant ainsi l'ouverture d'un dialogue avec les soignants et la
possibilité d'établir des projets en commun.
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Toujours en 2012, des représentants des usagers participent au CREX (Comité de Retour
d'Expérience) qui succède à la Commission des Incidents-Accidents. Les représentants des usagers
amènent des cas en CREX et les dysfonctionnements sont regardés ensemble.
En 2012-2013, la création d'un programme Pro-Famille constitue une étape essentielle.
En 2013, la fréquentation de la Maison des Usagers restant faible, il est décidé que les infirmiers
dans leurs entretiens en parleraient aux patients, pour qu'ils puissent y venir à leur sortie de l'hôpital.
Ceci crée l'impression que l'ensemble de l'hôpital passe à la Maison des Usagers.
En 2014, le projet du parcours de soin des usagers est intégré au projet d'établissement. C'est aussi
l'année de la création du Pôle des Usagers au sein du dispositif de l'hôpital avec :
– un chef de pôle et un contrat de pôle,
– des axes d'amélioration et des projets,
– des moyens : un petit temps de secrétariat pour les permanences ,
– des locaux.
Par ce pôle, les usagers sont au cœur de l'hôpital, ce qui transforme l'appropriation de l'alliance
thérapeutique et produit un ensemble d'évolutions :
– multiplication par dix de la fréquentation de la maison des usagers,
– association systématique des usagers,
– changement dans les pratiques professionnelles, changement d'attitudes, de regards, de mots.
Pour en témoigner, les Réunions de Synthèses associant patients, aidants, professionnels de l'hôpital
et partenaires extérieurs de la prise en charge, fleurissent de plus en plus.
Une telle évolution a pu se mettre en place, car elle a été favorisée par :
– l'obstination du Directeur de l'hôpital et du Président-Délégué de l'UNAFAM 87,
– l'implication des bénévoles au quotidien malgré leur faible nombre,
– la patience de ces bénévoles qui ont attendu que la confiance s'instaure et que les
professionnels soient convaincus du bien-fondé de ce changement.
Madame Georgette Saintonge : Bénévole de l'UNAFAM 87
La Maison des Usagers se situe au cœur de l'hôpital. C'est un lieu confidentiel où l'UNAFAM tient
ses permanences. Les familles y arrivent désemparées, révoltées. Les bénévoles sont là pour les
écouter, les encadrer et les orienter vers les professionnels. Les patients y viennent aussi pour passer
un bon moment.
Depuis 2009, des renseignements au sujet des droits pénal, civil, de la famille, du travail, et au sujet
de la privation de liberté sont fournis par un avocat, aux patients hospitalisés sans consentement qui
le désirent.
Enfin pour éviter les ruptures de soins des malades, la direction de l'hôpital rappelle les personnes
quelques jours avant leur rendez-vous, ce qui est très productif.
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Monsieur Olivier Pinault : Cadre Supérieur Socio-Educatif,
Coordinateur du Pôle des Usagers
Pour faire vivre cette alliance thérapeutique, l'ensemble des acteurs de l'hôpital et des territoires de
proximité doivent se sentir impliqués. Certains leviers l'ont particulièrement consolidée.
En 2013, le programme Pro-Famille, a fortement amélioré l'efficacité des soins et a démontré que
l'alliance thérapeutique fonctionnait vraiment bien, en permettant aux familles de prendre un peu de
recul, de mieux comprendre le fonctionnement de l'hôpital et de mieux l'utiliser, d'être plus efficace
au quotidien auprès de leurs proches.
Au travers de la Commission Permanente Usagers-Professionnels, la coopération entre ses
membres à renforcer l'alliance thérapeutique : Se réunissant une fois par trimestre, elle promeut
l'amélioration de l'accueil et la prise en charge des patients et leurs familles.
Pour favoriser la continuité des soins, chaque patient à sa sortie se voit remettre une carte où est
noté son unité de référence avec l'hôpital et les numéros de téléphone de cette unité.
Un temps d'écoute est entrain de s'organiser au sein de l'hôpital pour qu'il n'y ait plus
d'hospitalisation sans que les proches soient reçus par les soignants : Il est important que l'hôpital ait
une vision du patient dans sa globalité de vie, dans l'hôpital comme dans la cité.
Le risque de maltraitance potentiel, surtout dans les soins sans consentement est évalué dans un
partage avec les professionnels.
Le CREX est l'occasion d'une démarche collective entre usagers, représentants des usagers, et
professionnels. Les causes des dysfonctionnements du système de soins y sont étudiés dans le but
de mettre en place des actions correctives.
Les réunions de synthèse qui se développent de plus en plus permettent d'établir un lien étroit entre
projet de soin et projet de vie. Dans ce temps de rencontre se crée un langage commun entre
patients, soignants et professionnels qui permet de dépasser le secret professionnel qui fait souvent
obstacle à cette démarche.
Pour avoir un langage commun, toutes les formations proposées aux professionnels sont maintenant
ouvertes aux représentants des usagers.
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II - L'ACCOMPAGNEMENT DE LA PERSONNE MALADE PAR LA
FAMILLE
Hélène Davtian : Psychologue Clinicienne,
Doctorante de l'Université de Nanterre
« La notion d'aidant en psychiatrie et ses effets sur la famille »
Les propos d'Hélène Davtian s'appuient sur une longue expérience
d'accompagnement des parents, mais aussi des frères et sœurs et des enfants de
personnes malades psychiques dont on parle peu. Or, dans la psychiatrie
contemporaine, les soins ont souvent lieu au domicile familial.
Pour comprendre la notion d'aidant familial, un retour en arrière est nécessaire.
Au cours du temps, cette notion a évolué :
– 1° étape : la famille a d'abord été pensée comme responsable de la
maladie de son proche : Donc, pour soigner le malade, le soin de la
famille s'impose.
– 2° étape : C'est l'ensemble de la famille qui est supposé malade : Pour
soigner le malade, il faut alors soigner la famille.
– 3° étape : La famille est considérée comme ayant une certaine
compétence : Pour soigner le malade, on a besoin de la famille : la notion d'alliance thérapeutique
apparaît.
– 4° étape qui est l'étape actuelle : La maladie mentale est une maladie comme les autres :
La famille n'a pas de besoin particulier et doit participer aux soins : C'est l'émergence de
la notion d'aidant familial.
On peut donc dire que dans la troisième étape la famille peut participer, alors que dans la quatrième
étape elle doit participer. Le changement de paradigme est ici radical : « Dans ce contexte de
désinstitutionnalisation, la famille qui était considérée comme la cause de la maladie psychique de
son proche, est devenue une solution pour maintenir la personne dans son milieu. » (cf Norman
Carpentier)
Ce changement de paradigme redéfinit les places entre la famille et le lieu de soin :
– La famille avec son proche malade psychique vit le flou, la confusion, et ce n'est pas parce
que les symptômes s'émoussent que la maladie n'est plus là. Pour faire face, l'aidant familial
qui est souvent seul, assure une présence quotidienne non limitée dans le temps.
– A l'hôpital, les soignants en équipes interviennent face aux symptômes lors des crises. Leur
intervention est limitée dans le temps.
Dans le plan santé mentale, la famille est définie comme un veilleur au quotidien, ce qui veut dire
que son action est illimitée, et, si le passage du lieu de soin vers la famille se fait facilement, dans la
situation inverse, il faut la crise pour que le malade soit hospitalisé.
En 2003 Hélène Davtian fait une enquête pour l'UNAFAM national qui porte sur 600 frères et
sœurs de patients : Cette relation au sein de la fratrie est la relation la plus longue de la vie. Souvent
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les frères et sœurs âgés de 10 à 21 ans ont énoncé des phrases dont le sens est le suivant : « J'ai
absorbé ses délires comme une éponge » ou bien « J'étais le confident de ses délires ». Le soin à
domicile ne peut donc pas être banalisé.
La loi du 5 juillet 2011 introduit les soins sans consentement à domicile alors que des personnes
vulnérables mineurs peuvent s'y trouver : Dans ce cas, les frères et sœurs ne se sentent pas perçus
dans l'expérience de cette situation personnelle. Les effets subis de la maladie psychique sur
l'entourage du mineur ne sont pas pris en compte : C'est pourtant une question de santé publique : «
Mes parents sont au front et moi, je suis réserviste » (jeune de 19 ans) ;
L'accompagnement dans le parcours de soins nécessite donc une attention de tous les liens. C'est de
cette façon qu'une personne psychotique peut être soignée : Pour cela, il faut réfléchir à une
articulation plus fluide entre l'hôpital et la cité.
Il serait aussi important de penser à soutenir les relations familiales, de développer des lieux pour
les familles avec la possibilité de faire entendre leurs limites pour éviter la maltraitance.
« Chacun doit rester à sa place » C'est cela qui soigne la psychose.
Monsieur le Docteur Yann Hodé : Psychiatre au Centre Hospitalier de Rouffach
« Pro-Famille : La psychoéducation des familles »
La psychoéducation est une façon particulière d'aider les familles ayant un
proche souffrant de schizophrénie. C'est un mode non médicamenteux qui
provoque une amélioration du malade grâce à l'intervention auprès des
familles.
Pourquoi et comment intervenir auprès des familles ? :
– Quand une famille participe à un programme de psychoéducation, les
ré-hospitalisations du malade sont divisées par deux, ce qui réduit les
dégradations du cerveau : Cette prévention n'est donc pas
anecdotique.
– La moitié des familles accompagnant un proche schizophrène ont une
symptomatologie dépressive avérée. Or, le taux de rechutes d'un
patient schizophrène, augmente avec le niveau d'émotions exprimées
par la famille. En effet, le malade est sensible au niveau de stress, ce qu'il ne sait pas gérer.
De plus le stress est le facteur prédictible de rechute le plus élevé après l'arrêt du traitement.
Et si la dépression des familles est surtout dû au caractère inconstant des troubles du
malade, la personne déprimée a un taux de mortalité deux fois plus élevé que la normale.
– Également, la dépression chronique abîme les neurones, ce qui contribue à l'altération des
fonctions cognitives, et peut favoriser l'apparition précoce de la maladie d’Alzheimer.
En conclusion,les familles qui ont un proche ayant une schizophrénie souffrent, et cette souffrance a
des conséquences néfastes sur leur santé, leur qualité de vie, mais aussi sur la personne malade.
L'absence de prise en charge appropriée des familles représente une perte de chance pour le malade
et aggrave les coûts de la santé :
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par perte des capacités d'aide de la famille qui doivent être alors compensées par les services
de santé,
par l'augmentation des ré-hospitalisations du malade en réduisant ses chances d'autonomie.
Si elles ne sont pas prises en charge, les familles sont donc condamnées à cette double peine, au
niveau de leur santé et au niveau de celle de leur proche. Or ces prises en charge n'existent que très
peu actuellement.
En 1980 est crée le programme de psychoéducation des familles.
Ce programme est efficace sur une durée suffisante. Des effets positifs sur le malade sont observés
au bout d'un an d'apprentissage du programme. Après 2 à 3 ans, l'autonomie du patient et les effets
sur son travail sont améliorés.
La psychoéducation des familles est efficace parce que ce programme contient:
– des informations sur la maladie,
– des apprentissages de techniques, pour mieux communiquer avec le malade, et mieux gérer
son stress.
Ce programme comporte 2 modules :
– un module de 14 séances
– un module de 4 séances avec animateur et 4 séances sans animateur.
En grande majorité, les familles qui ont suivi un programme pro-famille disent leur satisfaction face
à l'amélioration constatée de la vie avec leur proche. Tout au long de l'apprentissage du programme,
l'humeur des familles s'améliore. A la fin, il est constaté que les personnes sont moins déprimées
qu'au début et que l'état du malade s'est amélioré.
Madame Martine Bungener : Directrice de Recherche Émérite au CNRS
« L'accompagnement des familles : Quel changement en 20 ans,
regards sur 2 enquêtes menées avec l'UNAFAM »
Dans les années 1960 à 1990, à cause du mode de médicalisation en vigueur, le
regard n'était plus orienté sur ce que la famille pouvait apporter pour son
proche. Cela ne voulait pas dire que la famille ne poursuivait plus son rôle
d'accompagnement, surtout dans les cas d'atteintes chroniques de la personne
malade.
Aussi, pour mettre en évidence cet état de fait, l'institution UNAFAM chercha à
provoquer la réduction de cette invisibilité des familles et à faire connaître leur
implication : C'est ainsi qu'en 1991, la démarche d'une première enquête fut
décidée, et les adhérents de l'UNAFAM furent interrogés pour savoir où étaient
domiciliés leurs proches.
Les résultats confirmèrent cette invisibilité pressentie, car la majorité des personnes malades
vivaient au domicile de leurs familles.
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En 2011, une seconde enquête révèle l'appel explicite fait aux familles, dans le cadre d'une politique
nationale, de remplir un rôle d'aide d'auxiliaire à la prise en charge des malades.
A vingt ans d’intervalle, la famille apparaît alors, comme étant le premier et ultime cercle de
solidarité :
– le premier cercle de solidarité, car elle héberge et accompagne le proche,
– l'ultime cercle de solidarité, car c'est le cercle de secours de ces personnes dans les domaines
affectif, psychologique, financier, matériel, la famille assurant aussi leur vigilance.
Avec des objectifs similaires, ces 2 enquêtes cherchent à connaître l'évolution de la situation de ces
personnes :
– en interne, en sachant où demeurent les malades, et en mesurant les difficultés et les attentes
des familles,
– en externe, pour avoir des éléments chiffrés des formes de vie de ces personnes et de leurs
familles, et pour aider à la prise en considération politique des situations et des besoins.
Il en résulte que dans ces deux enquêtes au protocole similaire, le tableau des répondants et des
patients s'avère identique.
Par contre, en vingt ans, une évolution majeure positive s'est fait jour : La cohabitation parentsenfants qui était massive en 1991, semble avoir sensiblement reculée en 2011, et la cohabitation non
souhaitée en 1991 (38%) n’apparaît plus en 2011. De plus, la mise à disposition d'un logement
personnel pour le malade a considérablement augmenté (46%).
Tout ceci n'exprime pas nécessairement une mise à distance entre les familles et leurs proches, et la
partition des lieux de vie se divisent en 3 tiers :
– un tiers des dyades famille-malade ont un logement indépendant mais dans une grande
proximité,
– pour un tiers des familles, les logements des familles et des malades sont dans la même ville,
– et pour le dernier tiers, les logements des familles et des malades sont éloignés.
Cependant, l'implication entre la famille et le proche reste très forte et en 2011, dans la moitié des
situations :
– l'implication est quotidienne,
– l'aidant est présent dans 62% des cas dans les démarches administratives ou financières,
– seule, la position par rapport aux tutelles a un peu changé.
En 2011, les préoccupations et le souci du malade restent la peur de l'avenir (26%), l'imprévisibilité
constante de la situation (20%), l'absence de perspectives d'avenir dans l'après-soi (16%), l'absence
de solution adaptée (15%), la peur par anticipation d'une crise (14%).
Alors que l'ampleur de la charge psychologique et affective agit sur les familles, leurs réponses
s'appuient sur des ressources qu'apportent la cohésion familiale (49%), l'activité professionnelle
(43%), ou l'activité associative (39%).
En 2011, les proches revendiquent être principalement :
– Un soutien affectif en veillant sur le proche malade, une aide ciblée, un acteur pour rompre
l'isolement inciter et stimuler le proche malade.
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Ils refusent clairement d'être un soignant profane, le dernier recours du malade, l'hébergeur,
l'auxiliaire de vie, le contrôleur des dérives.
Leur souhait est que le médico-social les relaie efficacement et que leur charge familiale soit
plus maîtrisée.
Ils veulent garder un rôle de facilitateur pour leur proche mais que le malade ne soit plus un
fardeau.
Ils veulent aider leur proche de façon à ce qu'il acquiert une citoyenneté reconnue.
Sur le plan de la maladie, ils veulent connaître, comprendre, être informés et reconnus par
les professionnels.
Sur le plan de la vie en société, ils désirent une vie sociale pour leur proche ou des lieux
conjuguant vie et accompagnement, et que leurs proches puissent exprimer des choix
personnels.
Leurs revendications ciblent l'essentiel des besoins, à savoir, une meilleure continuité des soins, une
réponse efficace en cas de crise, des logements et une offre d'activité adaptée (GEM).
En conclusion, dans ces deux enquêtes, la population de personnes malades concernée est identique.
L'hôpital reste un élément de va et vient très important. En vingt ans, l'hôpital et le foyer parental
sont devenus beaucoup moins le lieu de vie exclusif des malades. Enfin, ne plus cohabiter avec ses
parents ne signifie pas s'en éloigner, ni vivre de façon autonome.
Des questions restent cependant à élucider :
– Pourquoi certaines familles réussissent-elles à aménager leur relation avec leur proche
quand d'autres vivent de façon contrainte ?
– Comment identifier les moments à risque dans le parcours de vie des malades et des
familles ?
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III – L'ACCOMPAGNEMENT DE LA PERSONNE MALADE
VERS LE SOIN :
QU'EN EST-IL DE LA PREVENTION ?
Monsieur leProfesseur Antoine Pelissolo :
Professeur de Psychiatrie, Chef de Service à l'Hôpital Henri Mondor
« Les troubles anxieux et phobiques sévères : Quelle prévention et quel accompagnement ? »
Toute personne est concernée par l'anxiété qui se manifeste par
l'émotivité, l'inquiétude dans la façon de se projeter dans l'avenir, la
timidité, les peurs spécifiques à l'encontre d'un objet donné, les
somatisations, les « manies » qui sont un registre proche des obsessions
et des rituels.
La majorité des gens ont une anxiété normale, mais certaines personnes
sont handicapées par une anxiété douloureuse qui est pathologique : Ce
continuum de l'anxiété est à l'origine de la difficulté du repérage de ces
troubles par les familles, les personnes elles-mêmes, et les
professionnels.
Pour définir la phobie, l'appréhension et l'évitement de la personne en
rapport avec l'objet phobique doivent être mesurés. S'il en résulte des répercussions fortes sur la
personne, une prise en charge est à lui proposer.
Dans les troubles anxieux, on distingue :
– les phobies simples qui provoquent rarement une souffrance quotidienne (phobie des
araignées....),
– Les phobies sociales, les agoraphobies, les troubles obsessionnels compulsifs (TOC), les
troubles paniques, les états de stress post-traumatiques, l'anxiété généralisée : Tous ces
troubles engendrent des effets handicapants et des souffrances pouvant être lourdes.
Si ces troubles ont tendance à être banalisés par l'entourage, souvent ils disparaissent d'eux mêmes,
quand ceux-ci se déclarent dans la jeune enfance, ou dans l'entrée dans l'autonomie du jeune adulte,
ou autour de l'âge de 40 ans au moment où se déclare une difficulté inhérente à la vie.
Pour 10% de la population, une évolution plus péjorative et durable commence dans l'enfance avec
une tendance à l'amélioration avec l'âge, ce qui demande 20 ou 30 ans et est préjudiciable.
Seuls, quelques pourcentages des troubles anxieux ont une évolution maligne qui s'accentue dans le
temps, troubles bien souvent associés à des maladies psychotiques :
– La gravité de ces troubles se caractérisent par une souffrance au quotidien surtout pour les
phobies sociales, et par des incapacités causées par la peur de faire certaines choses.
– Ceci entraîne des complications : des dépressions dans 1/3 des cas, ou des addictions dans
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20 à 30 % des cas.
Ils peuvent être la traduction de prémices d'une schizophrénie (psychose), ou de troubles de
la personnalité, et concourent à l'aggravation de la pathologie de la personne.
Les troubles anxieux les plus potentiellement sévères et les plus fréquents dans la population sont :
– les phobies sociales
– les TOCS.
I – LES PHOBIES SOCIALES :
Les phobies sociales sont :
– liées à la peur du regard de l'autre et à la peur de l'échange avec l'autre,
– basées sur la peur du jugement négatif de l'autre : la personne concernée en éprouve alors un
sentiment de gène, de honte, voire d'humiliation ;
– à l'origine d'un impact négatif sur la vie quotidienne.
Pour comprendre les enjeux qui se situent derrière ces phobies, celles-ci sont regroupées en 4
grands types de situations génératrices qui sont :
– avoir une conversation avec autrui,
– parler en public,
– être observé (par exemple en mangeant),
– affronter l'autre dans un conflit, ce qui a à voir avec l'affirmation de soi.
Les symptômes en sont :
– une anxiété anticipatoire (peur d'avoir peur..)
– des symptômes physiques de stress, d'angoisse, des troubles de la concentration, des troubles
de la communication,
– de la rumination, de la culpabilité, de la mésestime de soi
– des évitements qui peuvent être massifs.
Dans la grande majorité des cas, la résolution de ces troubles peut-être progressive. Fréquemment
ils atteignent les célibataires, et les emplois de ces personnes sont inférieurs à leurs capacités par
rapport à ce qu'ils seraient en droit d'en attendre, ce qui crée de la frustration.
Les conséquences en sont l'isolement affectif et social. Les personnes sont démoralisées car il s'agit
d'un combat au quotidien, ce qui fait que certaines d'entre elles tombent dans la dépression ou dans
la dépendance. Leur entourage peut en être alerté par les changements d'habitude de ces personnes,
leur tristesse et leur repli, leurs plaintes physiques, leurs manifestations agressives.....
Des hypothèses générales sont formulées sur l'origine de ces phobies :
– peur profonde qui est inhérente à l'espèce humaine,
– peur du regard et de l'agressivité d'autrui,
– peur de l'exclusion et du déclassement,
– évolution de notre société très attachée à l'idée de donner une bonne image de soi.
Sur un plan plus individuel, les causes sont liées à :
– un tempérament émotif,
– un facteur éducatif : familles sur-protectrices ou maltraitantes,
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des événements traumatisants,
des troubles psychologiques : hyper-conscience de soi, perfectionnisme, mésestime de soi.
Le traitement de ces troubles fonctionne plutôt bien: il s'agit des thérapies comportementales et
cognitives (TCC) et des antidépresseurs.
La prévention et l'accompagnement ne font pas appel à des recettes miracles. L'accompagnement
de l'enfant à la socialisation doit être personnalisé, son apprentissage doit être favorisé. Dès qu'il y a
des aspects psychologiques (troubles de l'estime de soi, dépression, traumatisme..), il convient de
procéder à une évaluation psychologique par un psychologue. Les notions d'écoute et de
bienveillance du jeune restent la prévention la plus réaliste.
II – LES TOCS
Les tocs sont la peur envahissante de mal faire, ou de perdre la maîtrise de soi ou des choses (peur
de mal se laver les mains, peur de mal penser ce qui conduit la personne à se contrôler
constamment...).
L'idée du contrôle est d'éviter de provoquer une catastrophe ou de faire une faute morale. La
personne va alors mettre en place des réflexes, en répétant de façon irrépressible certains gestes
pour mieux contrôler ses pensées, ses comportements, et son environnement. Cela devient
pathologique quand l'équilibre émotionnel et la vie quotidienne de la personne en sont perturbés.
L'évaluation du caractère pathologique est déterminé par une perte de temps d'au moins d'une heure
par jour à faire le même geste.
Les formes classiques des TOCS sont :
– les obsessions d'erreur et les compulsions de vérification et de répétition,
– les comptages,
– les obsessions de souillure, les rituels de toilette, de ménage,
– les obsessions d'ordre, les compulsions de rangement et de positions,
– les obsessions impulsives (peur de faire mal à l'autre....).
Les personnes atteintes de ces tocs savent que tout ceci n'est pas vrai et est inutile, ce qui se résume
par une phrase souvent énoncée: « C'est plus fort que moi ».
Les tocs débutent généralement chez les jeunes, et assez souvent chez les garçons. Ils peuvent durer
quelques mois, ou quelques années, ou toute la vie. Une personne sur deux est dépressive.Ils
peuvent être un élément inaugural de la schizophrénie ou d'un trouble psychotique.
Ces troubles atteignent 2 % de la population, avec des conséquences importantes en perte de temps
allant de 1 à 12 heures par jour. Ils provoquent une tension nerveuse, de l'angoisse, un épuisement,
et sont à l'origine de l'isolement de la personne.
Si dans le cerveau il existe un système de contrôle, pour les personnes souffrant de tocs ce système
est déréglé en ce qui concerne le déclenchement et l'arrêt des gestes répétitifs. Parfois ce
dérèglement est dû à des anomalies cérébrales (lésion du cerveau).
Le traitement qui fonctionne plutôt efficacement, recourt aux thérapies comportementales et
cognitives pour éviter les comportements excessifs, et aux antidépresseurs pour supprimer
l'envahissement par la pensée. Pour les formes sévères et réfractaires, un protocole d'électroLes Actes du colloque UNAFAM 16
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stimulation intra-cérébrale sur certaines zones du cerveau peut être pratiqué, ce qui est encore de
l'ordre de la recherche actuellement.
La prévention comprend le dépistage des troubles le plus tôt possible pour éviter l'aggravation des
rituels. Également elle consiste à être à l'écoute, à observer les changements de comportements, et à
engager un dialogue à ce propos. Elle cherche aussi à atténuer la pression du stress chez les
personnes les plus sensibles.
Face aux tocs il est conseillé :
– de limiter dans le temps le toc, ce qui le désamorce,
– de ne pas faire à la place de la personne qui a un toc,
– de consulter pour faire un diagnostic.
Dans les consultations, ce qui permet de dire qu'une personne présentant des tocs s'achemine vers
un trouble psychotique sont les observations suivantes :
– quand le sens d'un rituel ou d'une obsession paraît absurde,
– quand les préoccupations sont corporelles et de façon appuyées,
– quand les idées de persécution sont présentes,
– quand la mise à distance de la pensée n'existe pas,
– quand l'isolement est manifeste.
Pour avancer dans ce domaine, la Fondation FondaMental a monté un réseau d'évaluation pour
effectuer un travail de recherches avec 4 centres : Créteil, Poitiers, Bordeaux, Grenoble. L'adresse
mail est la suivante : [email protected]
Madame la Professeure Marie-Odile Krebs : Professeure de Psychiatrie à
Paris-Descartes
Directrice-Adjointe au Centre de psychiatrie et Neurosciences à Sainte-Anne
Grand Prix de la Fondation Philippe et Maria Halphen
« Focus de la prévention dans les troubles schizophréniques »
I – La Fondation Philippe et Maria Halphen
En l'absence de Madame Maria Halphen qui devait être présente
au colloque, Madame la Professeure Krebs qui a obtenu le
premier Grand Prix de la Fondation Philippe et Maria Halphen,
présente la Fondation.
La Fondation Philippe et Maria Halphen a un large rayonnement
international notamment en Australie et en Suède. Elle entretient
des liens avec l'association « Meeting for Minds » (Australie) et
se spécifie par une approche anglo-saxonne dans le
développement de projets.
Les objectifs principaux de la Fondation cherchent à :
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–
soutenir la recherche fondamentale en santé mentale afin d'aider les personnes souffrant de
schizophrénie, de troubles bipolaires et de dépression résistante,
soutenir la recherche interdisciplinaire en favorisant la collaboration entre chercheurs,
cliniciens, malades et entourage des malades,
placer le malade et ses proches au cœur du dispositif de la recherche pour concevoir des
programmes scientifiques et psycho-thérapeutiques.
Ses actions consistent à :
– décerner tous les ans le Grand Prix de la Fondation avec le concours de l'Académie des
Sciences,
– encourager l'alliance thérapeutique entre tous les acteurs par le biais de conférences
d'éducation et de sensibilisation,
– créer des événements conduisant à la dé-stigmatisation des malades,
– travailler à une plus grande coopération scientifique par l'intermédiaire d'une communauté
médicale entretenant des liens internationaux, notamment avec Israël.
II - La schizophrénie, une maladie cognitive liée à un trouble du
développement : Implication scientifique et thérapeutique (Premier Grand Prix de la
Fondation Philippe et Maria Halphen).
La schizophrénie est une maladie fréquente invalidante qui présente un impact humain et sociétal
phénoménal. C'est une pathologie avant tout hétérogène, ayant un taux de patients résistants
d'environ 30%, et provoquant des troubles cognitifs importants. Quelques programmes de
prévention laissent espérer d'en prévenir l'évolution.
La schizophrénie est une maladie neuro-développementale qui se joue avant la naissance et dans les
deux premières années de la vie. Le facteur génétique intervient également car certaines anomalies
du neuro-développement augmentent le risque de développer un trouble psychotique. Cependant le
neuro-développement se poursuivant surtout dans la période de l'adolescence, la destinée de la
personne n'est donc pas tracée d'emblée. En effet, aujourd'hui, il est reconnu que l'évolution du
neuro-développement peut être modifiée quand la vulnérabilité de la personne est dépistée (déficit
subtil....).
Pour comprendre la physiopathologie de la schizophrénie, il faut s'intéresser à l'aspect neurodéveloppemental, à l'aspect génétique et il faut y ajouter une étude sur un certain nombre de
patients porteurs de micro-mutations :
– Pour l'aspect neuro-developpemental, il s'agit là de regarder les altérations sur le
développement normal, notamment les signes neurologiques mineurs dont le score est plus
ou moins important, ce qui pourraient se traduire par cette anomalie du développement
cérébral. D'ailleurs différents travaux ont montré que le repérage de ces signes
neurologiques mineurs informent sur :
la précocité du début de la maladie,
l'importance des troubles cognitifs,
la résistance au traitement, ce qui permettrait d'aller plus vite vers les molécules qui sont
connues comme ayant une meilleure efficacité (Leponex).
– Pour l'aspect génétique, la schizophrénie est associée à une multitude de marqueurs
génétiques impliqués dont l'association permet de voir la pathologie. C'est ce qu'on appelle :
variation fréquente de gènes associés à maladie fréquente.
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Pour un certain nombre de patients qui sont porteurs de micro-mutations (CNV : Copie du
nombre de variantes) l'étude a permis de comprendre que si la schizophrénie a une origine
génétique elle n'est pas héritée. La reconnaissance d'un excès de mutations de neurones dans
la schizophrénie, et la mise en cause de la dopamine et du glutamate ouvrent des voix au
développement thérapeutique.
De plus, au regard de la notion de vulnérabilité de la personne, des facteurs génétiques et des
facteurs environnementaux précoces peuvent mener à un tableau de vulnérabilité et à une évolution
possible vers la psychose (environ une personne sur dix si rien n'est fait). Or en terme de
développement cérébral, la maturation pubertaire est extrêmement importante : C'est la période où
la substance blanche se développe. Et dans la schizophrénie, une réduction importante de la
substance grise a été constatée dans les zones frontale et temporale du cerveau :
– Une interaction possible a été étudiée avec la consommation de cannabis et l'influence du
stress a l'adolescence. Les jeunes exposés à la consommation de cannabis et qui ont dans
leurs familles des antécédents de schizophrénie présentent un risque plus élevé de
développer la maladie : Suite à une étude sur 3000 étudiants exposés au cannabis, celle-ci a
permis de constater que des éléments psychotiques apparaissent avec la consommation au
cannabis.
– Certains facteurs génétiques sont associés avec un risque plus élevé de développer une
schizophrénie.
Il peut donc être dit, que l’interaction des facteurs génétiques venant appuyer la question
environnementale au moment de la période pubertaire intervient dans la transition psychotique,
ouvrant sur la phase active de la schizophrénie.
La détection précoce se situe donc dans la phase prodromique avant la transition psychotique. Mais
comment intervenir, quand globalement les patients consultent après un ou deux épisodes
psychotiques, quand la transition psychotique a été effectuée ? Ceci pose la question générale de
l'accès aux soins et de l'organisation de ces soins.
En terme de recherche, connaître les bio-marqueurs prédictibles de la maladie ( bio-marqueurs
staging de gradation en fonction des différents stades prodromes), et comprendre ce qui se passe
dans la transition psychotique s'avèrent indispensable pour avoir des médicaments et des stratégies
adaptées à cette période prodromique :
– Dans l'étude sur la cohorte ICAAR s'intéressant à des sujets à haut risque prodromique de
transition psychotique (sujet UHR) :
- La première stratégie consiste à prédire ce que vont devenir les troubles sur des sujets
UHR en comparant les sujets qui ont développé un trouble avec ceux qui n'en ont pas
développé.
- La deuxième stratégie est d'essayer de comprendre l'émergence de la psychose et on va
comparer avant et après la transition psychotique avec les sujets n'ayant pas fait cette
transition.
– Une étude réalisée en collaboration avec Cambridge sur les bio-marqueurs avec la cohorte
ICAAR et celle des militaires USA permet de penser que la prédiction de l'évolution vers la
maladie sera possible.
Donc en multipliant les études, il sera vraisemblablement possible dans l'avenir de prédire
l'évolution des personnes.
Autre élément : L'étude faite sur un certain nombre de marqueurs épigénétiques (traduction au
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niveau du génome d'un certain nombre de marqueurs environnementaux) : La comparaison est
établie entre les sujets qui ont fait la conversion psychotique avant et après cette conversion
psychotique avec les sujets qui ne l'ont pas faite. Il en résulte que des modifications épigénétiques
apparaissent chez les sujets ayant fait la conversion psychotique. La modification épigénétique
pouvant être un marqueur de l'entrée dans la maladie est donc en passe d'être démontrée.
Tout les travaux amènent à penser qu'il est possible de rentrer dans une psychiatrie personnalisée et
prédictible :
– Personnalisée en terme de profil de réponse, de marqueurs d'anomalies développementales
dans le but de permettre une approche thérapeutique et de remédiation cognitive adaptée à
un profil clinique.
– L'approche prédictive ouvre à plus d'espoir :
. dans le cas de fratrie dont l'un des membres est atteint de schizophrénie,
. avec le contrôle des risques liés au cannabis,
. avec le contrôle du stress par les TCC qui démontrent leur efficacité pour réduire la
transition psychotique.
Actuellement, le retard de soin étant d'environ de deux ans, la question de l'intervention précoce se
pose car ce temps sans intervention est prédictible :
– de mauvais pronostic,
– de moins bonne réponse au traitement,
– d'altérations cérébrales provoquant un isolement social, un décrochage scolaire, un haut
risque suicidaire.
Ceci justifie l'existence de programmes de prévention.
Mais comment repérer les personnes en phase prodromique ? Pour cela, il existe des marqueurs :
– Les marqueurs prodromiques précoces sont : le retrait social ; la détérioration du
fonctionnement, l'humeur dépressive, la diminution de la concentration et de la motivation,
les troubles du sommeil, l'anxiété, la méfiance.
– Les marqueurs prodromiques proches de la psychose sont : le comportement étrange, la
diminution de l'hygiène personnelle, les affects inappropriés, le discours vague ou trop
élaboré, les croyances bizarres, les expériences perceptibles inhabituelles.
Mais pour faire une prévention précoce, il faut penser se trouver face à une maladie sévère, penser
que le diagnostic peut être amélioré, que les co-morbidités peuvent être limitées, que la période
prodromique est suffisamment longue pour permettre d'intervenir. Également, il faut avoir des
traitements efficaces ou les bénéfices sont supérieurs aux effets indésirables.
Un problème thérapeutique se pose : Il faut déterminer un traitement spécifique en fonction de la
phase prodromique en sachant que les anti-psychotiques sont inefficaces avant la transition
psychotique.
Les traitements sont :
– les TCC, la remédiation cognitive, les entretiens motivationnels pour diminuer la
consommation de cannabis,
– éventuellement les thérapies familiales pour réduire la source de stress portée par
l'environnement familial,
– l'oméga 3 qui est un neuro-protecteur et les antidépresseurs.
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Malheureusement notre système de soins n'est pas fait pour attirer les personnes en phase
prodromique. Améliorer le diagnostic fonctionne en limitant la sévérité de la maladie. Pour cela, il
faut une forte articulation entre structures de soins spécialisés avec le monde médico-social et
scolaire...pour que le repérage soit possible et établir un traitement efficace à la suite d'une
évaluation disciplinaire en centre spécialisé
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IV – CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES EN DIRECTION DE LA
SECONDE RENCONTRE LE 17 MARS 2016
La Délégation UNAFAM-Charente, tient tout particulièrement à remercier tous les intervenants du
colloque pour la qualité de leurs prestations mais aussi tout le public pour l'intérêt porté à cette
journée, ce qui s'est traduit dans les tables rondes par la pertinence des questions et réflexions.
Elle fut sensible à l’accueil et à la collaboration du Centre Hospitalier Camille Claudel tout au long
de l'élaboration de ce projet, et regrette que le Docteur Marie-Josée Rousseau n'ait pas pu intervenir
dans le colloque pour cause de maladie.
Enfin, elle remercie chaleureusement tous ses sponsors qui ont couvert le financement de cette
manifestation : la MGEN, la Ville d'Angoulême, le Conseil Général, l'ARS, l'Assemblée Nationale.
Sans leur participation, ce projet n'aurait pu se réaliser.
Ce premier colloque sur « l'accompagnement dans le parcours de soins de la personne en situation
de maladie psychique » a abordé les questions relatives à l'alliance thérapeutique, à
l'accompagnement fait par la famille, à la prévention dans les troubles anxieux phobiques sévères et
dans les schizophrénies.
La Délégation espère que les apports de ce colloque vous ont permis d'acquérir un certain savoir
pour mieux connaître ces maladies psychiques si invalidantes, et qu'il vous seront utiles pour mieux
comprendre les personnes en situation de maladies psychiques que vous accompagnez ainsi que
leurs familles.
Pour poursuivre dans cet objectif, le 31 Mars 2016 à l'espace FRANQUIN d'Angoulême se
déroulera le prochain colloque toujours sur le thème de « l'accompagnement dans le parcours de
soins de la personne en situation de maladie psychique ».
Nous parlerons alors de l'accompagnement dans le soin des schizophrénies, des bipolarités et des
troubles anxieux sous l'angle des traitements et des thérapies complémentaires.
La délégation se réjouit de vous y accueillir dans une salle plus vaste que celle du CIBDI.
AU 31 MARS 2016 à l'Espace FRANQUIN pour un nouveau colloque
riche en Partages et Informations.
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