Peut-on réduire le risque de grossesse multiple après fécondation in

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Peut-on réduire le risque de grossesse multiple
après fécondation
in vitro
?
Pierre Jouannet ([email protected])1, Patricia Fauque2, Catherine Patrat3
1/ Centre de Recherche Sens, Éthique, Société (UMR 8137), CNRS-Université Paris Descartes, Paris, France
2/ Cecos, CHU de Dijon, CNRS UMR 3215, Inserm U934, Paris, France
3/ Service de biologie de la reproduction, Hôpital Bichat, AP-HP ; Université Paris-Diderot, Paris, France
Résumé / Abstract
Depuis 20 ans, on assiste à une augmentation régulière des taux de
naissances obtenus après fécondation in vitro (FIV). Malgré la réduction
progressive du nombre d’embryons transférés, les taux de naissances
gémellaires restent très élevés dans de nombreux pays, ce qui n’est pas
sans risque pour la santé des mères et des enfants. Le transfert sélectif d’un
seul embryon, choisi selon des critères morphologiques stricts, associé à un
programme de congélation embryonnaire efficace pourrait permettre
d’éviter les naissances multiples sans diminuer les chances d’avoir un
enfant, au moins chez les femmes les plus jeunes et les plus fertiles.
Is it possible to reduce multiple pregnancy risk after
in vitro fertilization?
For the last 20 years, birth rates after in vitro fertilization (IVF) have been
increasing steadily. Although the number of transferred embryos was reduced,
twin birth rates remain high in most countries with deleterious consequences
for mother and child health. Elective transfer of a single embryo selected
according to strict morphological criteria associated to an efficient freezing
embryo program could reduce the risk of multiple births without lowering
the chance of having a child, at least in younger and most fertile women.
Mots-clés / Key words
FIV, taux de naissance, naissances multiples, transfert mono-embryonnaire
/ IVF, birth rate, multiple births, single embryo transfer
Introduction
Environ 1% des grossesses consécutives à une
procréation naturelle se terminent par l’accouche-
ment de plus d’un enfant. En France, le taux de
grossesses gémellaires, qui était de 8,8/1 000 en
1972, est passé à 15/1 000 en 2001 [1]. Si cette
augmentation peut être en partie liée à l’âge plus
avancé de la maternité [1], le recours de plus en
plus fréquent à des traitements médicaux pour
favoriser la procréation peut aussi l’expliquer, qu’il
s’agisse de traitements inducteurs de l’ovulation
associés ou non à une insémination artificielle ou
de fécondations
in vitro
(FIV). Les grossesses mul-
tiples entraînent des coûts économiques, sociaux
et psychologiques considérables [1;2]. Aussi, de
nombreuses études ont été menées depuis une
quinzaine d’années pour déterminer dans quelle
mesure et comment il serait possible de réduire le
risque de grossesses multiples après assistance
médicale à la procréation (AMP). La revue pré-
sentée ici se limite aux grossesses multiples consé-
cutives à une FIV1, la technique d’AMP la plus
encadrée dans de nombreux pays et ayant fait
l’objet du plus grand nombre d’études.
La méthode utilisée pour cette analyse a été
d’interroger la base de données
Medline
au moyen
des mots-clefs : «
IVF/Multiple birth/Single embryo
transfer/Double embryo transfer
», sans limitation
sur la période d’interrogation. Parmi les 54 articles
sélectionnés identifiés, auxquels ont été ajoutés
éventuellement d’autres articles cités dans leur
bibliographie, les travaux les plus significatifs, tenant
compte de leur originalité et de leur qualité
scientifique, ont été retenus pour constituer la base
de la revue présene ci-dessous.
1 Sans ou avec ICSI, micro-injection de spermatozoïdes (
Intra
Cytoplasmic Sperm Injection
).
FIV et grossesses multiples
Quand les procédures de FIV se sont répandues
dans les années 1980, les taux de réussite étaient
relativement faibles [2]. Afin d’améliorer les résultats,
il a été rapidement propo d’augmenter le nombre
d’ovocytes disponibles pour la fécondation en
amenant plusieurs follicules ovariens à maturité par
des stimulations hormonales appropriées. Il a été
ainsi possible d’obtenir plusieurs embryons par
tentative de FIV. Mais comme le transfert d’un seul
d’entre eux dans l’utérus restait peu efficace, méde-
cins et patients ont encouragé les pratiques de
transfert de plusieurs embryons, notamment quand
les techniques de congélation embryonnaire
n’étaient pas encore disponibles ou peu perfor-
mantes. Une nette amélioration des taux de
grossesses et de naissances a alors été constatée,
mais aussi une augmentation considérable des
naissances multiples. Ainsi, parmi les 81 915 tenta-
tives de FIV/ICSI
(Intra Cytoplasmic Sperm Injection)
pratiqes en 2000 aux États-Unis qui ont permis
d’obtenir 37% de grossesses, 28% d’entre elles
étaient des grossesses gémellaires et 7,5% des
grossesses triples ou plus [2]. Dans ce pays, le
nombre d’embryons transférés à chaque tentative
est resté longtemps très éle puisque en 2000, lors
des tentatives de FIV/ICSI alies pour des femmes
de moins de 35 ans, 63% des transferts étaient faits
avec trois embryons ou plus, et même 6,5% avec
cinq embryons ou plus. Dans ce dernier cas, 2,5%
des grossesses obtenues étaient triples ou plus [2].
Pourtant, des progrès relativement importants ont
été accomplis depuis le début des anes 1980, que
ce soit en matière de traitements pour contrôler
la maturation folliculaire et ovocytaire, ou de
techniques de laboratoire permettant d’obtenir des
embryons ayant de meilleures capacités de velop-
pement. Il en a résulté une amélioration des taux
de grossesses, mais la proportion de naissances
multiples est rese très élevée malg la baisse du
nombre d’embryons transférés dans l’urus. Dans
le dernier rapport publié par l’ESHRE
(European
Society of Human Reproduction and Embryology)
portant sur 222 354 tentatives de FIV/ICSI avec
transfert embryonnaire réalisées en 2006 dans
27 pays européens, le taux d’accouchements de plus
d’un enfant était de 20,8%, avec cependant des
variations ts importantes d’un pays à l’autre (de
5,8% à 44,2%), le taux étant surieur à 20% dans
59% des pays [3].
En France, le guide de bonnes pratiques élaboré par
l’Agence de la biomédecine et publié sous forme
d’arté ministériel en 2008, recommande de limiter
autant que possible le nombre d’embryons trans-
s à deux [4]. En 2008, en France, plus de 86%
des transferts ont été faits avec un ou deux embryons
après FIV/ICSI [5]. Bien que le nombre moyen
d’embryons transférés ait diminué au cours des
anes récentes, le taux d’accouchements n’a pas
chuté, au contraire. Le taux de naissances multiples
est resté élevé, atteignant 20% après FIV/ICSI
(tableau 1).
Grossesses multiples : un risque
de complications maternelles
et infantiles majoré après FIV ?
Les grossesses multiples en ral comportent un
risque non négligeable de complications obsté-
tricales et néonatales. La femme enceinte est davan-
tage à risque d’hypertension, de préclampsie ou
d’anémie. Les accouchements sont plus souvent
prématus et le taux de césariennes est plus éle.
L’enfant prématua un poids de naissance plus
faible. La grande prématurité est associée à un
risque plus important de syndrome de détresse
respiratoire, d’entérocolite nécrosante, d’morragie
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cérébrale avec un risque accru de mortalité néo-
natale et, à plus long terme, de lésions neuro-
logiques, qu’il s’agisse de troubles du veloppe-
ment ou même quelquefois d’infirmité motrice
brale [6]. Récemment, une étude réalie dans
l’unité de soins intensifs de l’pital Royal Victoria
de Montréal a montré que, sur les 75 enfants qui
avaient été admis pendant une riode de deux ans
en 2005-2007 et qui étaient issus de grossesses
multiples consécutives à une FIV (17% des admis-
sions), 6 (8%) étaient s, 5 (6,7%) avaient eu
une hémorragie intraventriculaire, 5 (6,7%) une
dysplasie bronchopulmonaire et 4 (5,3%) avaient
être opérés pour une rétinopathie [7].
Le risque peut être influencé par difrents facteurs,
comme l’âge de la femme. L’influence éventuelle de
l’AMP sur les risques périnataux ou la sandes
enfants issus de grossesses multiples est un sujet
controversé. Une étude australienne portant sur
tous les jumeaux nés en Australie occidentale entre
1994 et 2000, soit après AMP (n=700), soit aps
conception naturelle (n=4 097), a mont que les
risques d’accouchement par sarienne, de préma-
turité, de faible poids de naissance étaient plus
élevés en cas de grossesse gémellaire obtenue par
FIV/ICSI qu’en cas de grossesse gémellaire consé-
cutive à une conception naturelle. De plus, les
jumeaux dizygotes ont é plus souvent hospitalisés
au cours des deux premres années de la vie quand
ils étaient issus d’une FIV [8]. Bien que l’âge des
femmes ayant eu des enfants par AMP était légè-
rement plus élevé, il est impossible de savoir si la
morbidi et les hospitalisations plus fquentes des
enfants peuvent être expliquées par la procédure
d’AMP, par l’infertili des parents ou par une plus
grande inquiétude de parents ayant longuement
si leurs enfants.
En 2003, quelques-uns des principaux responsables
des programmes de FIV/ICSI à travers le monde se
sont réunis pour traiter la question des grossesses
multiples liées à l’AMP [2]. Après avoir obser que
« les grossesses multiples dues aux traitements de
l’infertili étaient un enjeu physique, psychologique
et financier majeur pour les couples et leurs enfants
ainsi que pour la société toute entière », cette
conrence d’experts internationaux avait souligné
la cessité d’empêcher la survenue de grossesses
triples et de diminuer le risque de grossesses gémel-
laires. Pour cela, elle a proposé d’évaluer l’intérêt
respectif du transfert d’un ou de deux embryons
pour obtenir une naissance vivante, tout en souli-
gnant que l’amélioration de l’évaluation de la
qualité embryonnaire et de la réceptivité utérine
restaient des défis permanents [2]. Lors d’une
réunion similaire organie en France en 2004, un
groupe d’expert nationaux concluait de la même
manre que la diminution du taux de grossesses
multiples passe par la diminution du nombre
d’embryons transs et que la réduction embryon-
naire n’était qu’un « pis-aller » [1].
Transférer un seul embryon
après FIV/ICSI :
avantage ou handicap ?
Le transfert d’un embryon unique peut être envisagé
dans deux types de circonstances. Soit il n’y a pas
d’autre possibili, en général le taux de grossesses
est alors près de deux fois plus faible [9] car la
situation est péjorative du fait d’une fonction
ovarienne déficiente qui n’a pas permis de recueillir
un nombre d’ovocytes suffisant et/ou parce que les
caractéristiques des embryons sont très altérées. Soit
plusieurs embryons sont transrables mais il peut
êtrecidé de n’en transférer quun pour éviter une
grossesse multiple. On parle alors de transfert
sélectif d’un embryon unique (
elective single embryo
transfer
, e-SET).
La première étude réalisée en Finlande et publiée
en 1999 a compa les résultats du transfert de deux
embryons, d’un seul embryon quand aucun autre
n’était disponible et d’un embryon sélectionné
(e-SET). Les taux de grossesses ont été de 29,7%,
20,7% et 29,7% respectivement, avec 23,9% de
grossesses mellaires dans le premier groupe et
aucune dans le second et le troisme [10].
Par la suite, de nombreuses études ont été publes,
montrant que les résultats de l’e-SET étaient tout à
fait satisfaisants et proches de ceux des transferts
de deux embryons à condition de proposer cette
technique aux femmes les plus fertiles [6].
cemment, les sultats de huit études rando misées
ont été ré-analysés à partir des données individuelles
de chaque patiente [11]. Au total, les résultats obte-
nus chez 683 femmes ayant eu un e-SET deux ou
trois jours après une tentative de FIV/ICSI ont été
comparés à ceux d’un groupe de 684 femmes chez
lesquelles deux embryons ont été transs (DET)
dans les mêmes conditions. Les deux groupes étaient
semblables pour les caractéristiques des femmes,
l’origine de l’infertili, les traitements et le suivi. Les
e-SET ont conduit à 27% de naissances contre 42%
aps DET. Les taux de grossesses gémellaires ont
été de 2% et 29% respectivement, avec un taux
d’accouchements avant la 34ème semaine inférieur à
4% après e-SET contre 16% après DET et une pro-
portion denfants de poids < 2 500 g de 8% et 24%
respectivement à la naissance. Ainsi, d’après les résul-
tats de cette étude multicentrique, l’e-SET diminue
les chances d’avoir un enfant mais réduit aussi le
risque de prématurité. De plus, dans deux des centres
participants, il a été également possible d’analyser
les sultats du transfert d’un embryon supplémen-
taire qui avait été conge dans le groupe e-SET. Dans
ce cas, le taux de succès cumulé des naissances était
de 38% aps e-SET contre 42% aps DET, avec 1%
et 32% de grossesses gémellaires respecti vement.
Ces sultats montrent que le transfert successif de
deux embryons (un imdiatement après la FIV/ICSI
et l’autre ultérieurement) est pratiquement aussi
efficace que le transfert de deux embryons immédia-
tement après la FIV/ICSI, avec un risque nul de gros-
sesse mellaire.
En France, dans une étude menée à l’hôpital Cochin
à Paris, il a été proposé à 151 couples, dont le pronostic
paraissait très favorable du fait de lâge de la femme,
de sa fonction ovarienne et de l’absence dun nombre
élevé de tentatives antérieures, de procéder au trans-
fert d’un seul embryon après la FIV/ICSI quand les
critères morphologiques du développement embryon-
naire étaient optimaux. Quand les couples refusaient
(n=98), deux embryons étaient transférés. Dans cette
population très sélectionnée, les taux de naissance ont
été très élevés et semblables dans les deux groupes
(tableau 2) [12]. Il n’y a pas eu de naissance de
jumeaux après le transfert dun embryon, mais le taux
de naissancesmellaires a été de 41,5% après DET,
ce qui n’a pas été sans conséquences pour la santé
des enfants (tableau 3). Le nombre d’enfants de faible
poids de naissance et/ou ayant être hospitalisés
était gèrement plus élevé chez les singletons issus
dun DET que ceux sultant d’un e-SET (tableau 3),
mais la différence nétait pas significative. Cependant,
il ne peut être exclu que l’environnement utérin était
moins favorable en cas de DET puisque, par ailleurs,
le taux d’implantation embryonnaire était signifi-
cativement plus faible.
Quels critères considérer
pour décider du transfert électif
d’un embryon ?
Depuis les premiers essais d’e-SET, et afin d’opti-
miser les résultats, les équipes concernées ont
toujours chercà identifier l’embryon ayant les
meilleurs chances de conduire à la naissance d’un
enfant en bonne santé afin de le transférer.
Tableau 1
Activités d’assistance médicale à la procréation (AMP) et taux et types d’accouchements
obtenus en France en 2003 et 2008a /
Table 1 Assisted reproductive technology (ART) activities, delivery
rates and types in France, 2003 and 2008a
IIUbFIVcICSId
2003 2008 2003 2008 2003 2008
Nombre de cycles de traitement 47 663 40 858 20 971e19 327e25 876e31 161e
Nombre moyen d’embryons transrés 2,1 1,9 2,2 1,9
Taux d’accouchements 8,2% 10,0% 16,5% 18,9% 18,1% 20,6%
Proportion d’accouchements de 2 enfants 10,7% 10,3% 21,9% 19,3% 19,8% 17,6%
Proportion d’accouchements de 3 enfants 0,5% 0,3% 0,5% 0,5% 0,5% 0,4%
a Dones du rapport dical et scientifique de la procréation et de la génétique humaines en France, 2008, Agence de la
biomédecine. Disponible à : http://www.agence-biomedecine.fr/annexes/bilan2009/donnees/procreation/01-amp/01_intra/
synthese.php
b IIU : Inmination artificielle intra-urine ;
c FIV : fécondation
in vitro
;
d ICSI :
Intra cytoplasmic sperm injection
;
e Cycles avec ponctions d’ovocytes.
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Tableau 2
Issue de grossesses après transfert de 1 ou 2 embryons de bonne qualité chez des femmes
sélectionnées (début des tentatives, <35 ans, bonne fonction ovarienne). D’après [12] /
Table 2 Pregnancy
outcomes after transfer of 1 or 2 high quality embryos in selected women (beginning of attempts at <35
years, good ovarian function). From [12]
Nombre d’embryons transs
1 2
Nombre de femmes 53 98
Nombres de grossesses cliniques 26 (49,1%) 50 (51,0%)
Nombre d’accouchements 22 (41,5%) 41 (41,8%)
Nombre d’accouchements gémellaires 0 17 (41,5%)
Tableau 3
Santé des enfants après transfert de 1 ou 2 embryons de bonne qualité chez des femmes
sélectionnées (début des tentatives, <35 ans, bonne fonction ovarienne). D’après [12] /
Table 3 Children
health after transfer of 1 or 2 high quality embryos in selected women (beginning of attempts at <35 years,
good ovarian function). From [12]
Type d’accouchement
Nombre d’embryons transs
1 2
Singleton Singleton Jumeaux
Nombre d’enfants 22 24 34
Poids de naissance 1 500 g à 2 500 g 0 4 (16,7%) 15 (44,1%)
Poids de naissance <1 500 g 0 1 (4,2%) 3 (8,8%)
Score APGAR 6 (1 minute) 0 1 (4,2%) 7 (20,6%)
Admission en néonatalogie 0 1 10 (29,1%)
Enfants mort-s 1 0 0
sonatal 0 0 1
varier d’un centre à l’autre ou d’un pays à l’autre
en fonction des exriences, du type de populations
traitées et des objectifs de réduction du taux de
grossesses multiples [6]. Néanmoins, dans certains
pays, le transfert d’un seul embryon est la pratique
la plus pandue après FIV/ICSI (tableau 4).
Des stratégies sont-elles
envisageables pour réduire
le risque de survenue
de grossesses multiples
après FIV/ICSI ?
Suite aux recommandations professionnelles de
duire le nombre d’embryons transférés qui ont é
exprimées depuis le but des années 2000 [17;18],
les naissances de trois enfants et plus sont devenues
très rares dans la plupart des pays. Cependant, le
taux de naissances gémellaires reste encore souvent
très élevé comme le montre le bilan européen [3].
La France fait partie des pays à fort taux de
naissances multiples après FIV/ICSI (tableau 4). Les
pays nordiques ont é les premiers à promouvoir
à grande échelle le transfert d’un seul embryon, ce
qui a entraîune baisse spectaculaire des nais-
sances multiples sans compromette les taux de
naissance qui sont ress similaires à ceux de pays
comme la France ou le Royaume-Uni pour des
populations de femmes d’âge équivalent (tableau 4).
Le cas de la Suède est particulrement intéressant.
Au début des anes 1990, plus de 70% des trans-
ferts y étaient réalis avec au moins trois embryons
et le taux de naissances multiples était supérieur
à 30% [19]. En 1993, les centres de FIV suédois
ont collectivement et volontairement décidé de
réduire le nombre d’embryons transférés de trois
à deux. Les naissances triples ont disparu mais le
taux de naissancesmellaires est resté très élevé.
Sur la base des résultats d’une étude multicen-
trique qui a démontré l’intérêt de l’e-SET associé
au transfert ultérieur d’embryons congelés, la
réglementation et les recommandations profes-
sionnelles ont évolué, le transfert d’un embryon
unique devenant la norme à respecter à partir
de 2003, au moins chez les femmes les plus jeunes
et de bon pronostic. Cette mesure a abouti à un
taux de naissances multiples 4 fois plus faible que
dans les autres pays (tableau 4) [19].
Dans certains pays, des considérations éthiques ont
été pdominantes dans les choix stratégiques. Ainsi
en Italie, il est interdit de féconder plus de trois
ovocytes, ce qui réduit les chances d’obtenir un
embryon ayant les meilleures chances de se ve-
lopper, et il est interdit de congeler les embryons, ce
qui incite à transférer tous les embryons obtenus
(tableau 4). Ce choix et l’âge plus avancé des
femmes traitées expliquent très probablement les
faibles taux de naissances observés dans ce pays
le taux de naissances multiples est parmi les
plus élevés (23,8%) (tableau 4) [3]. Dans d’autres
pays, des aspects économiques et sociaux ont
été prioritaires. En Belgique, le remboursement de
six tentatives de FIV/ICSI, instit à partir de 2003,
a été subordonné au transfert d’un seul embryon
chez les femmes de moins de 36 ans lors de la pre-
mière tentative sans prise en compte de la qualité
Quand le transfert a lieu deux ou trois jours aps
la condation, l’évaluation de l’embryon est faite
sur des critères morphologiques, facilement
accessibles à l’observation et qui peuvent être
standardisés et intégs dans des scores [6;11-13].
Les caractéristiques des autres embryons doivent
aussi être prises en compte : en effet, le fait
d’appartenir à une cohorte où se trouvent plusieurs
embryons réunissant les meilleurs critères morpho-
logiques améliore le pronostic si un seul dentre eux
est transféré [14]. La bonne maîtrise des techniques
de congélation peut aussi favoriser le transfert
électif d’un embryon. En effet, les taux cumulatifs
de grossesses et de naissances observés aps un
e-SET suivi du transfert d’embryons congelés sont
similaires à ceux obtenus quand deux embryons
sont initialement transfés [6;11;12]. Les embryons
les moins aptes à se velopper sistant mal à la
culture prolone jusqu’au stade blastocyste, il a été
proposé que l’e-SET soit pratiqué 5 ou 6 jours aps
la fécondation. Une analyse rétrospective des
registres australiens et o-zélandais indique que
cette stragie peut être efficace [13].
Dans l’avenir, il est probable que la mise au point
de techniques de vidéo-microscopie en continu pour
suivre le développement des embryons dans les
enceintes de culture ainsi que de microtechniques
permettant de caractériser les propriétés méta-
boliques, transcriptomiques, protéomiques et épi-
génétiques de lembryon préimplantatoire, permettra
d’identifier encore mieux les embryons les plus aptes
à se velopper normalement.
Les critères embryonnaires sont donc essentiels, mais
les facteurs féminins jouent aussi un le important.
La plupart des études comparant les résultats de-SET
et de DET ont été réalisées chez des femmes de
moins de 35 à 37 ans et
a priori
les plus fertiles car
n’ayant pas eu d’échec de FIV auparavant [6;11;12].
Parfois, un critère supp mentaire d’inclusion était
une fonction ovarienne normale évaluée par dosages
hormonaux [12]. Dautres crires connus pour amé-
liorer les résultats de la FIV peuvent aussi être pris
en compte. Il a été ainsi montré que l’obésité et la
consommation de tabac de la femmeduisaient les
chances d’obtenir une naissance après le transfert
d’un seul blastocyste [15].
Au total, la plus ou moins grande rigueur des critères
embryonnaires et féminins exigés va conditionner
la proportion de femmes susceptible de pouvoir
bénéficier du transfert électif d’un embryon. En
l’absence de l’ensemble des données disponibles
pour des populations importantes, il est difficile
d’estimer précisément le nombre de femmes qui
pourraient être concernées. À partir des données
disponibles sur les tentatives de FIV réalisées aux
États-Unis en 2001, il avait été estimé qu’un e-SET
aurait pu être alisé pour 30% des cycles de trai-
tement cette année [16]. Les critères peuvent
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embryonnaire [6]. Cette mesure, qui était basée sur
l’hypothèse que les dépenses engagées pour le
remboursement seraient largement compensées
par les économies induites par la diminution des
naissances multiples, a été relativement efficace
(tableau 4). Plusieurs études ont évalué les
conquences financières de stratégies de transferts
embryonnaires en appréciant aussi les soins procus
à plus ou moins long terme aux enfants en cas de
grossesses multiples ou non. Elles confirment en
général que le meilleur rapport coût/efficacité est
obtenu en pratiquant un e-SET suivi de transferts
d’embryons congelés chez les femmes de bon
pronostic [20]. cemment, une étude finlandaise a
comparé de manre rétrospective les conquences
financières de politiques de transferts électifs d’un
embryon unique ou de deux embryons. Cette étude
a trouvé que l’e-SET entraînait une économie de
19 889 euros par naissance vivante à terme, et que
si l’analyse incluait le coût des soinsdiatriques et
maternels de la période néonatale, l’économie
s’élevait à 36 889 euros [21]. À partir des sultats
acquis dans une unité de soins intensifs à Montal,
il a été estimé que l’application d’une politique
d’e-SET à l’ensemble du Canada éviterait 729 admis-
sions en soins intensifs, 35 220 joures d’hospita-
lisation et 30 s d’enfants, et permettrait d’éco-
nomiser 40 millions de dollars chaque ane [7].
Enfin, la stratégie à adopter pour le transfert des
embryons après FIV/ICSI ne peut ignorer l’attitude
des médecins et des patients. Si un nombre croissant
de praticiens pensent qu’il est souhaitable de duire
les taux de grossesses multiples concutifs à lAMP,
d’autres pensent qu’il faut encourager les grossesses
gémellaires pour satisfaire le plus rapidement
possible le désir de femmes de plus en plus âgées
et infertiles d’avoir plusieurs enfants [22]. Les
couples infertiles sont d’ailleurs plus enclins à
accepter les risques des grossesses multiples que les
couples fertiles [23]. Cependant, ils ne sont pas
toujours bien infors des risques et leur attitude,
qui est très influene par celle des équipes médi-
cales, peut évoluer rapidement [24].
Conclusion
Il existe maintenant de nombreux arguments
montrant que le taux de grossesses multiples et
leurs inconnients pour la femme et pour l’enfant
peuvent être réduits après FIV/ICSI. La prise en
compte attentive des situations cliniques des
femmes et des caracristiques morphologiques et
évolutives des embryons, associée à des techniques
efficaces de congélation embryonnaire, permet
d’obtenir des taux très éles de naissances après
transfert d’un seul embryon. Le transfert d’un
embryon unique après FIV/ICSI tend à devenir la
norme, au moins chez les femmes les plus jeunes
et les plus fertiles.
Références
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2010;25(8):1851-62.
[4] Arrêté du 3 Août 2010 modifiant l’ar du 11 avril
2008 relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques
et biologiques d’assistance médicale à la procréation.
Disponible à : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.
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&categorieLien=id
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Tableau 4
Activité de fécondation
in vitro
(FIV) et d’ICSIa dans 6 pays européens en 2006 et nombre
d’embryons non congelés transférés. D’après [3] /
Table 4 In vitro fertilization (IVF) and ICSIa activity
in 6 European countries in 2006 and number of non frozen transferred embryos. From [3]
Belgique Finlande France Italie Royaume-
Uni Suède
Nombre de centres 18 18 102 202 70 14
Nombre de cycles de traitement b 15 547 4 655 50 776 32 821 31 668 9 496
Taux de transferts dun embryon 49,2% 54,7% 20,0% 18,7% 11,6% 69,3%
Taux de transferts de 3 embryons 8,8% 0,3% 16,7% 50,9% 4,8% 0
Taux d’accouchements 18,5% 21,2% 19,7% 12,6% 26,1% 24,6%
Taux d’accouchements >1 enfant 13,4% 12,0% 20,6% 23,8% 23,8% 5,8%
FIV
Nombre de cycles de traitement b 3 619 2 770 20 409 7 429 15 530 4 917
% cycles pour des femmes <35 ans ND c 54,8% 52,6% 36,7% 39,4% 46,8%
% cycles pour des femmes 40 ans ND 12,6% 14,4% 23,6% 17,6% 12,7%
ICSI
Nombre de cycles de traitement b 15 547 1 885 30 367 25 392 16 138 4 579
% cycles pour des femmes <35 ans ND 58,2% 59,8% 38,2% 45,7% 55,0%
% cycles pour des femmes 40 ans ND 9,5% 10,9% 23,9% 14,6% 8,8%
a
Intra Cytoplasmic Sperm Injection.
b Les cycles de traitement correspondent à des cycles avec prélèvement d’ovocyte.
c Non détermi.
1 / 4 100%