PROSPECTIVE | COMITE DE VEILLE |
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Quelles approches pour entrer
dans l’ère écologique ?
L’entrée dans l’ère écologique peut être pensée à
partir de différentes approches. Si ces approches
sont imbriquées, elles ne suivent cependant pas
toujours les mêmes objectifs ni n’empruntent les
mêmes chemins.
L’approche de l’écologie industrielle
Pour Suren Erkman, « l’écologie industrielle
s’intéresse à l’évolution à long terme du
système industriel dans son ensemble, et pas
seulement aux problèmes d’environnement »3 :
elle est une composante opérationnelle du
développement durable. Elle cherche à stopper
le fonctionnement linéaire des systèmes
industriels classiques qui agissent comme si les
ressources étaient infinies et produisent des
déchets en quantité illimitée, pour y substituer
des systèmes éco-industriels dont le
fonctionnement s’inspire des écosystèmes
naturels. Le terme « industriel », par son origine
américaine, désigne ici l’ensemble des activités
économiques dans la société industrielle, au-
delà donc du seul secteur secondaire. Le terme
écologie renvoie lui à la science qui étudie le
fonctionnement des systèmes vivants.
L’écologie industrielle vise autant à
reconceptualiser l’ensemble des activités qu’à
faire évoluer le système industriel.
En effet, dans le système industriel classique, la
contrainte environnementale est considérée en
aval, en fin de processus (« end of pipe »), et
consiste surtout à « réparer » en traitant la
pollution, ce qui nécessite des équipements
(pour traiter déchets, eau, polluants), des
infrastructures (pour le fonctionnement de ces
équipements) et des services associés (suivi,
conseil…). Dans cette perspective on s’attache à
minimiser les impacts du système industriel sur
l’environnement, vu comme extérieur à l’activité
économique. Pour utile et nécessaire que soit
cette approche, elle n’en reste pas moins :
- sectorielle séparant l’air, l’eau, les sols, et
pouvant donc induire des transferts de
3 Suren Erkman, Vers une écologie industrielle, Ed.
Charles Leopold Mayer, 1998 ; voir également
R. Frosch et N. Gallopoulos, « Des stratégies
industrielles viables », Pour la Science, 1989
pollution dans une biosphère qui est, elle, de
nature systémique ;
- incrémentale se traduisant par des petites
améliorations successives au niveau de
l’activité économique - et non par des
innovations radicales - et des coûts de plus en
plus élevés pour une efficacité augmentant
faiblement ;
- avec des effets économiques pervers : ces
activités sont comptabilisées dans le PIB, donc
augmentent la croissance économique, et leurs
technologies sont exportées dans les pays en
développement comme s’il s’agissait d’une voie
de développement à suivre ;
- et des effets incitatifs insuffisants, invitant les
entreprises à une attitude essentiellement
réactive, visant à satisfaire a minima aux
exigences de législation environnementale,
plutôt qu’à adopter une approche proactive et
préventive.
L’écologie industrielle porte à la fois une vision
très différente, le système économique étant
conçu comme un sous-système de la biosphère
dont il dépend, et un changement radical,
l’action se situant en amont et à l’échelle
systémique des activités : on cherche à
rapprocher le fonctionnement des industries de
celui, « cyclique » ou « circulaire », des
écosystèmes naturels. Cette rupture avec le
fonctionnement linéaire implique, d’une part,
une gestion optimisée des flux de matière et
d’énergie à travers la mise en œuvre de
synergies et de mutualisations de ces flux (au
niveau d’un groupe d’entreprises, de filières…),
et, d’autre part, la mise en place de filières de
recyclage, valorisation, réemploi… des produits.
À l’instar des écosystèmes naturels, les déchets
ou résidus des uns deviennent les ressources des
autres. Les actions entreprises peuvent ainsi
concerner : l’écoconception des produits, la
diminution de la consommation des ressources
naturelles, la réduction des déchets, l’éducation
à l’environnement, les certifications, le
développement des énergies renouvelables…
Pour fonctionner, l’écologie industrielle doit
prendre appui sur des coopérations entre
acteurs divers et complémentaires, agissant
dans un périmètre de proximité.