lui-même lorsqu’il parle de la liberté reli-
gieuse déclare reprendre la doctrine tradi-
tionnelle (Dignitatis humanæ, n. 1). Mais si,
‘a posteriori’, il n’en était pas ainsi? La hié-
rarchie actuelle, “les Pasteurs du moment”,
n’auront certainement aucune difficulté,
alors, à reconfirmer et inculquer des docu-
ments comme l’encyclique Quas primas
contre le laïcisme et l’état non confessionnel,
l’encyclique Quanta Cura et le Syllabus
contre la liberté religieuse, l’encyclique
Mortalium animos contre l’œcuménisme, les
nombreuses bulles papales sur les juifs déi-
cides et peuple non plus élu mais réprouvé
par Dieu… Je m’arrête là, mais la liste serait
infinie. Il y a plus. Dans le cadre des “mea
culpa” à répétition, Jean-Paul II a déclaré
combien dans le passé la praxis de l’Eglise
avait “offusqué le visage du Christ”. N’est-ce
pas faire sienne – mais en ce qui concerne le
passé et non le présent – cette proposition
condamnée du Synode de Pistoie? Déjà
Vatican II doit admettre, toujours dans la
déclaration sur la liberté religieuse que dans
le passé “il y a eu des manières d’agir moins
conformes voire même contraires à l’esprit
évangélique” (n. 12), tandis que la déclara-
tion conciliaire Nostra Ætate est peut-être le
seul document “ecclésiastique ” qui n’a pas
pu apporter en sa propre faveur – au moins
pour le chapitre 4 sur les juifs – une seule ci-
tation du magistère. Toutes ces choses ne
sont-elles pas des indices, pour ne pas dire
des admissions implicites, de l’“impossible”
contradiction? Messori écrit, à juste titre,
qu’il est impossible que l’Eglise “à laquelle le
Christ a promis une assistance permanente”
ait “si longtemps et si gravement” détourné
du chemin le peuple de Dieu. Mais pourquoi
est-ce que, s’il est impossible que ce soit arri-
vé dans ces dernières quarante années, ce
serait advenu dans les siècles passés? Serait-
ce que l’Eglise hiérarchique, quand elle niait
– Papes et Evêques unanimement – tout
droit à la liberté religieuse, demandant à
l’Etat l’intervention du bras séculier, aurait
“si longtemps et gravement conduit hors du
chemin” le peuple chrétien? Ou bien, si elle
ne l’a pas fait, (et elle ne l’a pas fait) com-
ment doit-on juger ceux qui – dans les docu-
ments officiels du “magistère” – condam-
nent au moins implicitement l’Eglise du
passé? S’il n’est pas licite d’accuser l’Eglise
du présent de donner du poison à ses en-
fants (comme le disait Mgr Lefebvre, attri-
4
buant à l’Eglise l’œuvre de Paul VI) il n’est
pas non plus licite de le dire de l’Eglise du
passé qui était – alors – l’Eglise du présent,
assistée elle aussi de l’Esprit Saint.
Bref, l’indéfectibilité de l’Eglise est mise
en péril aussi bien par le “traditionalisme”
de Mgr Lefebvre, que par le “progressisme”
de Jean-Paul II. Dans les “contradictions in-
solubles”, ils y tombent tous les deux.
En faisant nôtre tout l’enseignement et la
discipline de l’Eglise du passé, nous évitons
la contradiction de Jean-Paul II, que ce
passé condamne implicitement. En démon-
trant que les erreurs de Vatican II, de Paul
VI et de Jean-Paul II ne sont pas attri-
buables à l’Eglise, nous évitons la contradic-
tion du “traditionalisme”. Mais il reste une
objection, terrible celle-là, que l’on peut
adresser à tout “sédévacantisme”: les portes
de l’enfer ont donc prévalu contre l’Eglise?
Jésus-Christ n’est donc plus avec elle, alors
qu’il a promis de l’être jusqu’à la fin des
siècles? Alors Dieu peut permettre que les
fidèles soient ainsi trompés?
La réponse est évidente: non. Les portes
de l’enfer ne peuvent prévaloir. Jésus-Christ
ne peut abandonner l’Eglise. Il ne peut pas
permettre que tous les fidèles soient trompés.
Cette dernière contradiction, le “sédéva-
cantisme” strict ne sait pas la résoudre, lui
non plus. Mais il semble que la thèse théolo-
gique du Père Guérard des Lauriers sur l’au-
torité, et c’est celle de Sodalitium, le puisse
faire.
L’Eglise, le Pape, ne peuvent enseigner
l’erreur, tromper les fidèles: Messori a rai-
son. Mais l’élu d’un Conclave qui n’est pas
cependant Pape légitime, peut enseigner
l’erreur et tromper (beaucoup) de fidèles:
c’est ce qu’enseigne le magistère de l’Eglise
(Pape Paul IV, Bulle Cum ex apostolatus).
Dieu ne peut permettre que les fidèles
soient tous attirés dans le piège en suivant
un faux Pape: Messori a raison. Mais dans
notre cas les fidèles peuvent avec certitude
éviter le piège, en adhérant justement à l’en-
seignement déjà défini infailliblement par
l’Eglise, ce qui les préserve d’accepter l’er-
reur qui contredit (au lieu d’approfondir et
d’actualiser) l’enseignement précédent.
Dieu ne peut permettre que l’Eglise soit
vaincue par l’enfer, soit finie, soit totalement
privée de hiérarchie: Messori a raison. Mais
Dieu peut permettre que – sans que l’Eglise
soit vaincue, ou privée totalement et défini-