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NOUVELLE SERIE
Diffusion de linformation sur lAmérique latine
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CUBA
D 2302 Cu7
16-30 juin 1999
MOTS-CLÉFS
Église catholique
Église-État
Politique ecclésiale
Ingérence
Embargo
Hommage
Humanisme
Révolution
QUAND L’ÉGLISE REGARDE CUBA
Le présent dossier contient trois documents sur Cuba tel
quil est vu par certains membres de lÉglise catholique,
notamment plusieurs évêques. Le premier rappelle, de
façon synthétique, quelques données historiques de base.
Le second exprime le point de vue dévêques latino-améri
cains unis à Cuba en vrier 1999 lors dune union du
Conseil épiscopal latino-américain (CELAM). Le troisme,
dun style entièrement difrent, est lœuvre de Pedro
Casaldàliga, à la fois poète et évêque de Sào Félix de
-Araguaia (Brésil). Alors que, de ce té-ci de /’Océan, la
presse ne parle plus guère de Cuba que pour dénoncer, à
juste titre, certains durcissements du gime en place en
matre de liber, le prestige de Fidel Castro reste consi
dérable en Amérique latine, y compris chez beaucoup de
gens qui restent très critiques vis-vis de son gime. Cest
que Fidel symbolise envers et contre tout la sistance infa
tigable au grand voisin du Nord qui a toujours considé
lAmérique latine comme une chasse gardée où rien ne doit
se produire qui puisse porter de lombre à ses ints. Que
le plus petit reste pratiquement le seul à sopposer au plus
grand, voilà qui suscite ladmiration. De plus, dans un conti
nent soumis à une vague néolibérale implacable, Cuba
continue de symboliser, sinon une alternative, du moins la
tentative de maintenir une bche, alors même que laven
ture est jugée fort imparfaite, voire même désespée.
Enfin, par ses réussites en matre de san et déducation,
Cuba reste aujourdhui en te des pays pauvres pour son
bon indice en matre de “développement humain”, selon le
classement effectué par le Programme des Nations unies
pour le développement (PNUD). Seule la prise en compte
de la totalité de ces éments - positifs et négatifs - peut
expliquer que le langage de tant de Latino-Américains - et
parmi eux celui de nombreux évêques - ne se limite pas à
un point de vue gatif comme cest souvent le cas de
té-ci de lOcéan. Les documents ci-dessous ont é
publiés par CENCOS-IGLESIAS, avril 1999 (Mexique).
LÉglise et la Révolution à Cuba : de 1959 à 1995
Depuis 1959, le gouvernement des
États-Unis considère Cuba comme une
menace, et depuis lors il a essayé par
tous les moyens de renverser le gou
vernement de Fidel Castro Ruz.
La dernre offensive a été lapproba
tion de la loi Helms-Burton, dans le
but de renforcer le sge économique
impodepuis plus de trois décennies :
des sanctions sont pvues contre les
pays tiers faisant du commerce avec
lîle, les bateaux accostant dans ses
ports et les entreprises de tous pays
implantant des succursales, ce qui
bafoue la liberté du commerce.
À cela s’ajoute le harcèlement poli
tique, puisque le gouvernement des
États-Unis s’engage à aider les indivi
dus et les organisations non gouverne
mentales qui veulent un changement
démocratique non violent dans lîle.
Malg tout, la Révolution résiste, et
bien que Fidel Castro occupe le centre
dun système bureaucratique qui
impose lobéissance, - un sysme qui
est apparu quand la Révolution neut
pas dautre solution que de se fermer
pour se fendre contre lagression
des États-Unis -, il est considéré
comme un symbole de dignité nationa
le et même de dignité latino-aricai
ne. Le peuple fait confiance à sa probi
et à son courage moral pour assumer
les erreurs quil commet.
Au milieu de ces événements, le rôle
jo par lÉglise catholique ne
manque pas d’être méritoire : pendant
36 ans, elle a essayé de se rénover sans
perdre son identité et elle est restée
proche du peuple, dans une attitude de
service et de disponibilité. Elle a
donné des réponses pastorales sages,
(5)Dossier 2302 page 1
prudentes, honnêtes, critiques, essayé de répondre aux besoins et aux
sereines, clairvoyantes, politiques, urgences du moment. Un autre mérite
etc., en prenant en compte le contexte particulier de la hiérarchie [catho-
social, politique et économique du lique] cubaine est qu’elle a rendu
pays. Des ponses qui en leur temps visible lunité de lÉglise et aussi à
produisirent des conséquences et, se caractériser par sa proximité avec
simultanément, de nouveaux fis les fidèles, laccueil fraternel, la sim-
dans la façon de s’exprimer et de vivre plici, la délicatesse, lintelligence et
la foi. le don de plaire.
Foule cubaine en liesse
À partir de la chute du bloc des pays
socialistes (1989), la Révolution tra
verse une de ses pires crises internes, à
cause des mesures économiques prises
pour remédier à la situation et de
quelques secteurs révolutionnaires qui
veulent des changements dans les
structures de pouvoir existantes.
Cependant, ces secteurs ne veulent pas
un modèle impo de lexrieur, pré
fabriq, attac au olibéralisme,
mais un mole qui naisse des buts
atteints par la Révolution.
Ces dernières années, lÉglise a repris
de la vitaüté, on constate une augmen
tation des religieuses et - à moindre
échelle - des prêtres qui sont venus
dans le pays, un accroissement des
vocations masculines et minines, la
promotion du diaconat permanent, etc.
Ce qui est frappant aussi, c’est laug
mentation des baptêmes denfants, de
jeunes et de couples adultes, ainsi que
les relations de fraternité que l’on
observe entre éques, prêtres et laïcs.
Quant au travail des évêques, il a été
très riche, surtout parce qu’ils ont
appris à connaître leurs brebis et ont
En 36 ans de gouvernement socialiste,
on peut distinguer six événements qui
ont produit des changements impor
tants dans lactivi de lÉglise catho
lique cubaine, trois de type politique et
trois de type religieux.
A. Les événements
de type politique
1. Le début d’une utopie (1959)
Pour la majorité du peuple cubain, la
Révolution a marq un changement
socio-politique positif de grande
ampleur et la possibilité de participer
directement à la transformation de son
histoire. Létape volutionnaire com
mence le 1er janvier 1959, vue d’un
bon œil par la hrarchie même si elle
n’était pas pparée ni en condition
pour assumer ce processus social.
Cependant, pendant la lutte révolu
tionnaire, linfluence de lÉglise
catholique a été décisive dans la for
mation de la conscience de nombreux
jeunes, hommes et femmes qui se sont
dress contre la tyrannie de Fulgencio
Batista.
Des évêques, celui de Santiago de
Cuba - Mgr Enrique Pérez Serantes -,
celui de Matanzas - Mgr Evelio Diaz -
ont appuyé publiquement les pre
mres réformes socio-économiques
mises en place par la Révolution,
parmi lesquelles on peut mentionner :
lamélioration du niveau de vie de la
majorité de la population, luniformité
des prix et la duction du coût des
loyers, la baisse des tarifs de lélectri
ci, du phone et des médicaments,
des hausses de salaires dans diverses
branches, la baisse des ints des
hypothèques, la création de nouvelles
sources d’emplois, la promotion de
lindustrie, lalphabétisation de plus
FIDEL CASTRO,
COMMENTATEUR DE JEAN-PAULII
La Havane, 21 janvier 1999 (Notimex).
Fidel Castro a dila phrase de Jean-Paul II globalisons la solidari
té” et la comparée à “prolétaires de tous les pays, unissez-vous” de Karl
Marx. Le président cubain a ajouté quil pourrait mettre une statue du
pape à té dé celle de Marx.
La Havane, 7 février 1999 (El Universal).
Le psident de Cuba, Fidel Castro, a fait léloge de lappel lan par
Jean-Paul II à lÊglise dAmérique pour quelle opte de façon préféren
tielle pour les pauvres, dans un document remis lors de sa visite récente à
Mexico. Le texte Église en Amérique, qui rassemble les conclusions du
Synode des évêques, “fournit des éléments qui aident à former la
conscience”, a décla le psident âgé de 72 ans, lors de la conclusion
dun congrès de quelque 5 000 éducateurs de 25 pays.
Dossier 2302 page 2 (6)
du quart de la population adulte et la
forme agraire.
Il existait une autre tendance contraire
et craintive, dans laquelle on trouve
lévêque de Çamagüey - Carlos Riu
Angs -, et lévêque de Cienfuegos -
Eduardo Martinez Dalmau - qui aban
donna lîle quelques semaines après le
triomphe de la Révolution. Dans ce
groupe, on trouve une grande partie de
la population catholique, beaucoup de
ptres en majorité espagnols et des
membres de congrégations féminines.
& -il
X
Visage cubain
2. La proclamation de la Constitu
tion de la République (1976)
La Constitution garantit la liberté de
culte. Cette législation donne à l’Église
une certaine garantie pour pouvoir exis
ter et exprimer librement sa foi. Bien
que la propagande et les pressions se
maintiennent, l’Église se manifeste face
à des événements déterminés, une atti
tude qui la maintenue proche du
peuple et a rendu possible à lintérieur
de l’Église une réflexion sur la pastora
le dévelope pendant cette période.
3. La chute du bloc socialiste (1989)
Elle a eu un effet immédiat sur le sys
me socio-économique de Cuba, en
créant une profonde crise économique
qui sest percutée dans lexpression
et la pratique de la foi des chtiens.
Cette situation fait que les agents de la
pastorale adoptent des modèles pasto
raux qui répondent à la demande reli
gieuse des Cubains. Cependant, devant
lafflux de fidèles, ils restent dans le
rituel et donnent les sacrements sans
évanliser suffisamment.
B. Les événements
de type religieux
1. Le concile Vatican II (1962-1965)
H s’agit d’une date symboüque, car le
Concile Vatican II est arrivé tard à
Cuba. Cependant, le plus significatif
de cette étape est leleconciliateur
joué par le nonce apostolique Cesare
Zachi et les changements alis par
Mgr Carlos Manuel de Céspedes
Garcias Menocal, au grand séminaire
de La Havane.
2. Conférence de Medellin (1968)
La préparation, puis la alisation de
Medellin a donné à rÉglise cubaine
loccasion dapprofondir son travail
pastoral et de découvrir les défis qu’el
le devait affronter, notamment la
cessité d’entrer en dialogue avec le
monde, surtout avec l’Amérique lati
ne. LÉglise redécouvre les acquis de
la Révolution et commence à dialo
guer occasionnellement avec les auto
ris gouvernementales. Cette attitude
des évêques irrite les catholiques les
plus ticents à la Révolution dans le
pays et à lexrieur, qui pféreraient
une Église rigide et à lécart de toute
activité politique”.
3. La rencontre nationale eccsiale
cubaine (ENEC), 17-23 février 1986
LENEC a constitué pour lÉglise une
authentique Pentete, un temps privi
g pour s’évaluer, s’autocritiquer
pour dépasser le capitalisme et se pro
jeter dans lavenir. On rêve dune Égli
se pluraliste, pauvre, au service du
peuple, incarnée et ouverte au dia
logue.
Conclusion
Devant laccroissement des fidèles et
depuis la visite historique de Jean-Paul
H, lÉglise catholique se trouve dans
une conjoncture privilégiée à laquelle
elle doit pondre avec sagesse pour
illuminer la vie des fidèles et les enga
ger dans son histoire. D ne sagit pas
seulement de donner sens à la vie en
ces moments de résistance mais de
lordonner selon la volonté de Dieu.
LÉglise cubaine, aujourd’hui, a loc
casion de revenir à ses origines, de se
laisser transformer et diriger par
lEsprit du Ressuscité, de souvrir au
monde et de dépasser les dogma
tismes, les incompatibilités, les parti
cularismes, les fanatismes, létroitesse
desprit et les peurs et de répondre
avec audace, prophétisme et fidéli
aux signes des temps.
Cest une conjoncture privilégiée
parce que, face au manque dutopie, de
torance et de pluralisme, lÉglise
catholique peut démontrer au monde
que luni entre chrétiens et athées
peut être possible si un dialogue sincè
re et prudent est entamé, si on évite le
fanatisme et lintolérance. Ce que
seule une foi adulte et responsable
peut apporter.
Traduction DIAL. En cas de repro
duction, mentionner la source DIAL.
XXVIIème Réunion interaméricaine des évêques
à Cuba (14-17 février 1999)
La réunion interaméricaine des
évêques, qui a rassemblé 5 cardinaux
et 25 évêques de la gion, s’est ouver
te le 14 février avec une bration
eucharistique, présidée par le cardinal
Jaime Ortega y Alamino, archevêque
de La Havane. La rencontre eut pour
objectif de faire une évaluation pasto
rale de la premre année depuis la
visite du pape Jean-Paul II à Cuba et
de lapplication de YÉglise en
Amérique1 à la réalité continentale. La
séance de clôture de la rencontre épis-
1. Le pape a publié après le synode des
Amériques une exhortation apostolique post-
synodale, intitulée /Église en Amérique (NdT).
copale a eu lieu dans la paroisse de
Corpus Christi avec une autre célé
bration eucharistique présidée par
larcheque de La Havane. La veille,
les évêques participants avaient visité
19 paroisses de la capitale où ils célé
brèrent chacun une messe et entrèrent
en contact avec les membres de la
(7)Dossier 2302 page 3
communau ecclésiale.
Pour conclure la union interaméri
caine, le psident de la Conrence
des évêques catholiques cubains
(COCC), Mgr Adolfo Rodrfguez, a
décla que lÉglise vit dans une atmo
spre de grand optimisme parce
que, aps la visite du pape, il est
remarquable quune grande sensibilité
se soit éveillée parmi les
Cubains pour redécouvrir
le sentiment de foi qui exis
te toujours dans le
peuple.”
De son , le président
du Conseil épiscopal lati-
no-américain (CELAM),
Mgr Oscar Rodrfguez
Maradiaga, a noté que
nous avons pu écouter
ces pas positifs dans la vie
de VÉglise à Cuba et on
nous a exposé les besoins
actuels.” Larchevêque de
Boston, le cardinal
Bernard Law, a signa
pour sa part que, aps la
visite du pape à Cuba, il y
a des changements positifs
dans la vie de VEglise,
dans la société et aussi
dans les relations entre les autoris
du gouvernement cubain et VEglise
locale.”
Il a fait remarquer que les évêques
américains ont essayé de vivre une
communion plus forte, plus vive et au
service de la solidari humaine et a
affirmé qu’à Cuba il y a toujours des
occasions pour un dialogue plus
important et pour améliorer les choses.
J'ai une grande espérance dans
Vavenir du peuple et de VEglise à
Cuba”, a-t-il ajouté.
Le cardinal Law a également rappelé
lopposition des évêques nord-améri
cains au blocus économique impo à
Cuba par son pays. Nous sommes
convaincus que Vembargo est immoral
et que nous devons changer cette
situation, comme nous Vavons dit
aujourd’hui, dans cette réunion, et il
en sortira un appui plus fort pour
changer cette politique entre des pays
qui sont voisins, non ennemis ; nous
devons nous unir dans la solidarité
Manifestation pour la venue de Jean-Paul II
pour construire un avenir meilleur
pour tous sur le continent
Mgr Oscar Rodríguez, de son cô, a
mis laccent sur les besoins de lÉglise
à Cuba comme le manque de locaux
pourbrer les messes, pratiquer la
catéchèse et favoriser des œuvres
dassistance humanitaire”, et il a sou
lig que les Conrences des évêques
des États-Unis, du Canada et dautres
pays dAmérique latine sont ptes à
aider économiquement pour T édifica
tion de nouvelles églises, chaque fois
que le gouvernement de lîle donnera
son autorisation.
Le cardinal Lucas Moreira Neves, p
fet de la Congrégation pour les
évêques et président de la Commission
pontificale pour lArique latine, a
fait savoir qu’on cherchera à envoyer
des missionnaires et des prêtres latino-
américains dans lîle pour aider à
poursuivre lœuvre dévanlisation.
Cuba a besoin de missionnaires et de
prêtres venus dautres pays pour
appuyer VÉglise cubaine,
dont la mission prioritaire
est de prêcher T Évangi
le, a affirmé le cardinal
Moreira Neves pendant sa
participation à la dernière
journée.
Église-État
|1 Au sujet des relations avec
° tat à Cuba, Mgr
Rodríguez Maradiaga a
expliqué que même si les
relations entre le gouver
nement et lEglise de
Cuba ont considérable
ment avan à la suite de
la visite du pape Jean-
Paul II il y a un an, il est
nécessaire de continuer le
dialogue pour gulariser
totalement la fonction
ecclésiale dans ce pays
Larcheque a indiq que si le gou
vernement a bien donné son autorisa
tion pour que des prêtres et religieuses
dautres pays puissent travailler à
Cuba pour lévanlisation, parmi les
thèmes en suspens dans le programme
Église-État, il y a la restauration, la
restructuration et la construction
déglises catholiques. Beaucoup
déglises devinrent des administra
tions publiques, des magasins ou
autres choses.
Traduction DIAL.
En cas de reproduction, mentionner
la source DIAL.
Déclaration damour à la volution totale de Cuba
Moi, évêque de gauche, poète docca
sion, venu dailleurs, mais gref sur la
Grande Patrie, greffon jailli de cul
tures et d’aspirations métissées, mis
sionnaire dont la vocation m’incline à
évangéliser les Macédoniens”, cla-
tien de celui qui fut archeque de
Santiago de Cuba, je fais cette clara
tion en ce vingt et quelques de février
1999, avec lespoir que ce millénaire,
éblouissant et cruel” sachève à
moindre mal, tandis que la postmoder
nité vogue à la dérive et que lon veut
proclamer lutopie “épuie”.
Je viens du Brésil, qui est aussi latino-
américain, du fleuve Araguaia, fron
tière baignée de lune et doiseaux mais
aussi des luttes de la grande
Amazonie. Je viens du Sanctuaire des
martyrs de la Caminhada, se
conserve vivante la “dangereuse
mémoire” de tout le sang ver pour la
grande cause de la libération et où,
sans doute aucun, sont présents dans
Dossier 2302 page 4 (8)
une fraternité œcuménique les jeunes
cubains Frank Pais et Antonio
Echeberria.
Jai dit claration damour”, non
pas de haine, ni de mépris, ni dindif
rence, parce qu’il s’agit d’une révo
lution qui nous appartient pour aimer,
échanger, transformer, il sagit de
cette Grande Patrie quest notre
Amérique.
Che Guevana
C’est une déclaration à cœur ouvert et
à voix haute pour qu’en soient infor
mées les vagues qui vont et viennent à
travers la mer des Caraïbes, le silence
attentif des Andes et les vitrages gla
s de Wall Street. Mais sous forme de
parabole pour qu’on naille pas y
mettre plus qu’elle ne dit et pour qu’el
le touche dans leur cœur et dans leur
espérance ceux qui fraternellement
voudront la comprendre..
Acculée et accue, la révolution doit
se poursuivre, mais sous une forme
totale. Elle doit savoir quun échec
peut être momentané, un moment du
grand échec pascal qui se termine dans
le triomphe de la Vie.
Les adjectifs, parfois, sont substantive
ment qualificatifs, c’est pourquoi jai
dit volution totale. Les révolu
tions, cest bien connu, peuvent être
partielles, partiales, voire momenta
nées. En langage chtien nous disons
- et nous croyons - que le Royaume de
Dieu, qui est la Révolution selon Dieu
lui même, est là, mais pas enco
re accompli”. Cest totale qu’elle doit
être, en outre, parce que la bonne révo
lution dont nous rêvons et que lon
veut pour notre Cuba aimée et pour
notre Amérique et pour le monde,
c’est la volution des âmes, la volu
tion dans les relations, la révolution
dans les structures. Mais ce qui s’ap
pelle une volution, parce que des
formes dans le style de celles des
démocraties formelles, nous en
sommes plus que lassés. Ce que nous
voulons cest la dignité pleine et
entière de lhomme (et de la femme)”
selon la parole de lapôtre Marti ;
cette expérience ingrale qu’il sou
haitait pour sa patrie et sans que son
triomphe ne mette en danger la liber
té, selon son avertissement et que, lui
- vivant dans le marbre de lhistoire et
dans une gloire ritée - souhaite
maintenant pour cette patrie quest
lhumanité et pour toute cette
Amérique dont nous sommes les fils
et les filles.
Tout le discours sur la soc que peut
clamer et vivre cette terre humaine de
la famille de Dieu se duit à conju
guer dialectiquement ces deux aspira
tions majeures de nos vies et de nos
peuples : la Liberté et la Justice, - rien
ou presque ! - Conjuguer conjointe
ment, comme le chantait le poète péru
vien, la justice et les roses”; ajoutons-
y le vent, le Vent...
Selon la foi de ceux qui, hommes et
femmes, suivent la voie de Jésus, toute
réalisation personnelle et toute
construction de lhistoire consiste à
savoir conjuguer, dans la dialectique
de lÉvangile, le monde, le Royaume,
lÉglise. (Cette Eglise qui est mysre
et mission mais aussi une histoire de
saintes, d’infidélités, de pouvoirs et
daveuglements.) Le Royaume - on le
sait - et combien mieux encore, ne
devrait-on pas le savoir ! - c’est le rêve
de Dieu, la passion de sus (selon lÉ-
vangile), le destin de lhumanité’
(selon le théologien dAfrique du Sud)
et labsolu appartient au seul
Royaume, tout le reste est relatif
(selon le pape Paul VI). Et le cours de
la vie, de chaque vie, et le cours de
lhistoire, avec tous ses méandres, sont
la matière première du Royaume, tra
versée par laction amoureuse de
lEsprit de Dieu.
Le capitalisme est un péc capital. Le
socialisme peut être une vertu cardina
le : nous sommes égaux, nous sommes
fres et sœurs, la terre est à tous, et
comme le répétait sus de Nazareth,
on ne peut pas servir deux maîtres ;
lautre maître, pcisément^ cest le
capital. Lorsque le capital est néolibé
ral, avec son cortège de profit par
nimporte quel moyen, de marc
total, d’exclusion de limmense majo
rité, alors le ché capital devient fran
chement mortel.
Socialiser, distribuer comme au sein
d’une famille, au sein de lhumaine
famille de Dieu, unique, endurante et
belle. Il ny aura pas de paix sur la
terre, il n’y aura pas democratie
digne de retrouver ce nom profané s’il
ny a pas une socialisation de la terre
des campagnes et du sol des villes, de
la san et de léducation, de la com
munication et de la science. Tu ne
peux posséder que si lautre, aussi,
peut posséder ; mais tu ne peux pas
thésauriser et laisser ton fre nu. La
proprié privée est intrinquement
inique lorsqu’elle est privative et
exclusive. Vous souvenez-vous du
geste fameux de la multiplication des
pains et des poissons ? Ce ne fut pas
un jeu magique mais un acte de parta
ge. Il y a du pain pour le monde, pour
lhumanité entière et dans la mer d’in
nombrables poissons. À lévidence
partager ira à lencontre du program
me du FMI et de la Banque mondiale,
et des transnationales et des multimil
lionnaires, et - qui sait - souvent, peut-
être - à lencontre de notre propre cœur
à légoïsme postmodeme.
Cuba traverse dans langoisse une
riode spéciale”. Le monde entier
traverse une période très spéciale.
Toutes les banques, tous les gouverne
ments, à grands coups d’ordinateurs,
(9)Dossier 2302 page 5
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