Jérusalem vue par un Anglais, Lawrence d`Arabie, en 1917

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"Jérusalem, nous conjuguons ton nom", Christian Bernard, octobre 2001
Pour accéder à la présentation du travail interdisciplinaire dont cette séquence est
extraite, cliquer ici.
SEQUENCE D'ANGLAIS POUR LES ELEVES DE SECONDE
LA VILLE DE JERUSALEM ET LES RELIGIONS MONOTHEISTES VUES
PAR UN ANGLAIS EN 1917 : LAWRENCE D'ARABIE
1 - LE DOCUMENT : JERUSALEM VU PAR LAWRENCE OF ARABIA D'APRES SON ŒUVRE "LES
SEPT PILIERS DE LA SAGESSE"
"Apart from the country-folk, the six great towns - Jerusalem, Beyrout, Damascus, Homs, Hama, ans
Aleppo- were entities, each with its character, direction, and opinion. The southermost, Jerusalem,
was a squalid town, which every Semitic religion had made holy. Christians and Mohammedans
came there on pilgrinage to the shrines of its past, and some Jews looked to it for the political future
of their race. These united forces to the past and the future were so strong that the city almost failed
to have a present. Its people, with rare exceptions, were characterless as hotel servants, living on the
crowd of visitors passing through. Ideals of Arab nationality were far from them, though familiarity with
the differences of Christians at their moment of most poignant sentience had led the classes of
Jerusalem to despise us all."
In Seven Pillars of Wisdom, chapter LIX, page 341, Penguin Modern Classis, 700 p, 1969.
"A côté des populations paysannes, les six grandes villes, Jérusalem, Beyrouth, Damas, Homs,
Hama et Alep formaient autant d'entités ayant chacune son caractère, son évolution et ses opinions.
La plus méridionale, Jérusalem, était une ville horriblement sale, considérée comme sainte par toutes
les religions sémites. Les chrétiens et les mahométans venaient en pèlerinage aux reliques de son
passé; quelques Juifs voyaient en elle l'avenir politique de leur race. Ces puissances unies du passé
et du futur étaient si fortes que la ville n'avait presque pas de présent. Ses habitants, à quelques
rares exceptions près, étaient aussi dépourvus de caractère que des valets d'hôtel, et vivaient de
l'afflux des visiteurs. L'idéal d'un nationalisme arabe leur était bien étranger : pourtant le spectacle
familier des dissentiments entre chrétiens au moment de l'émotion la plus intense avait conduit les
diverses classes de Jérusalem à nous mépriser tous."
Traduction en français de cet extrait, par Charles Mauron, édition Petite Bibliothèque Payot, 1998,
765 p. L'extrait se trouve à la page 387.
His biography in this book, Penguin Modern Classics, p.1.
"Thomas Edward Lawrence was born in Wales in 1888 and educated at Oxford High School and at
Jesus and Magdalen Colleges, Oxford. He was later made a research fellow of All Souls College,
Oxford. From 1910 to 1914, he was an assistant in the British Museum's excavation of Carchemish
on the Euphrates. He xas commisioned on the out break of the First World War and in 1917 was
officially attached to the staff of the Hejaz Expeditionary Force, under General Wingate. In 1918 he
was transfered to General Allenby's staff. He attended the Peace Conference in 1919 as one of the
British delegation, and in 1921 and 1922 was Adviser on Arab Affairs in the Middle Eastern Division
of the Colonial Office. In 1927, embarrassed with "Lawrence of Arabia" legend, he changed his name
by Deed Poll to Shaw. He joined the RAF and served as an aircraftman, maintaining in Dorset a
cottage which is now National Trust property. He was killed in a motor-cycle accident in 1935. In
addition to this book, of which Lawrence lost almost the whole manuscript at Reading station in 1919,
he wrote "Revolt in the Desert (1927), "The Odyssey of Homer ( 1935), a translation in prose,
"Crusader Castles" (1936), and "The Mint", which was published twenty years after his death."
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2 - QUEL EST LE REGARD DE LAWRENCE ?
2.1) Sur la ville
En quelques lignes dans cette œuvre imposante que sont les Sept Piliers de la Sagesse, il cherche à
nous décrire Jérusalem, ville de la Syrie ottomane1, dans ce qu'elle a de spécifique, sa sainteté : "elle
est considérée comme sainte par toutes les religions sémites" - entendons par-là le judaïsme, le
christianisme et l'islam.
Lawrence a reçu dans son enfance une bonne éducation religieuse dans une famille anglaise
évangéliste. Dans cette fin XIXème siècle, la plupart des familles anglaises vivaient dans cette ambiance
victorienne, puritaine, voire fondamentaliste. La foi de sa jeunesse s'estompera progressivement avec
l'âge adulte, mais sa culture le marquera toujours2. Il connaît parfaitement l'univers biblique, il sait
pertinemment que Jérusalem, ville des prophètes, ville de la mort et résurrection du Christ, est aussi la
cité eschatologique - de la fin des temps - où le Christ reviendra pour le Jugement dernier, afin
d'inaugurer le Royaume de Dieu. Ainsi, cette culture chrétienne lui permet de percevoir dans Jérusalem,
une ville où les forces du passé et du futur pèsent tellement, qu'elle n'a plus d'existence présente. Le
passé, ce sont les lieux saints,- Saint-Sépulcre et la mosquée al-Aqsa-, baptisés ici un peu
péjorativement "reliques du passé". Le futur3 est renvoyé à la fin des temps, Jérusalem est dans la
langueur d'une attente eschatologique.
Face à cet être de Jérusalem, ce qui compte pour Lawrence, c'est la révolte arabe contre l'empire turc
ottoman ennemi, c'est ce présent de la politique et de la guerre. Jérusalem ne peut que le décevoir, elle
est riche d'un passé et d'un futur, mais il lui manque cruellement à ses yeux ce présent seul digne
d'intérêt.
2.2) Sur les religions présentes à Jérusalem
La population est en partie composée d'Arabes, de religion chrétienne ou musulmane. Ces derniers sont
ici appelés Mahométans, comme c'était fréquent chez les Européens de cette époque. L'expression est
ambiguë et somme toute à bannir, car elle laisse entendre un culte rendu au Prophète, ce qui est
contraire à l'Islam, Mahomet n'est qu'un homme; mieux vaut employer l'expression musulman - de
"muslim", celui qui professe l'islam.
Pour Lawrence, ces habitants arabes de Jérusalem sont décevants car ils ne se soucient pas du
nationalisme arabe qui secoue la province du Hadjaz au sud. En effet, la prise de Jérusalem par les
troupes britanniques du général Allenby, considérée chez les chrétiens d'occident comme une revanche
prise sur l'échec des croisades du Moyen Âge, ne suscite pas l'enthousiasme des foules sur place.
Décidément, pour Lawrence, ces Arabes de Jérusalem passent à côté de tout ! La ville symbole est hors
actualité, hors du temps, occupée seulement à recevoir les nombreux touristes-pèlerins qui
s'empressent sur les lieux saints.
Le regard de Lawrence ne dévalorise pas l'aspect sacré de la ville, même s'il emploie le terme de
reliques dans un sens passéiste, il ne dénigre pas les religions non plus, mais son regard cherche
seulement à mesurer les choses et les hommes à la seule aulne du critère du nationalisme du peuple
arabe. Or, tout nationalisme passe par une conscience de soi, caractéristique que ne semblent pas avoir
les habitants arabes de Jérusalem, quelque soit leur religion : "ils étaient aussi dépourvus de caractère
que des valets d'hôtel". Un temps trop long d'exploitation ottomane a peut-être durablement asservi cette
ville. Cela est confirmé par les témoignages des écrivains voyageurs du XIXème siècle, tous affirment
que Jérusalem n'a pas d'avenir. Ces hommes se sont-ils trompés ou bien finalement ont-ils encore
raison ? Jérusalem ne serait-elle qu'une ville tellement chargée de symboles fondateurs qu'elle ne peut
raisonnablement avoir d'avenir dans le monde des hommes ?
Au-delà de ce regard global sur la population arabe, Lawrence émet deux remarques, fort brèves mais
précises sur les chrétiens et les Juifs. Les chrétiens sont seulement soucieux de leurs droits à l'intérieur
de l'édifice du Saint Sépulcre, se partageant l'espace sacré entre leurs confessions religieuses lors de
conflits incessants. Ils se divisent plutôt que de se réjouir de la libération de la ville.
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Les Juifs sont perçus comme un peuple, voire ici une race, et non comme une religion. Le sionisme est
à peine évoqué :"ils voyaient dans Jérusalem leur avenir politique".
Ce court passage des Sept Piliers de la Sagesse" est en fait très dense, ce regard, comme toujours,
nous renseigne autant sur la chose regardée - Jérusalem et les religions présentes- que sur l'homme luimême qui regarde.
3 - SON OUVRAGE : LES SEPT PILIERS DE LA SAGESSE
3.1) L'intention de l'ouvrage contenue dans le titre
Lawrence rêvait d'être écrivain, son aventure arabe lui donne l'occasion d'écrire une œuvre épique dans
"ce merveilleux orient". C'est, pétri de l'idéal chevaleresque des croisés, de références bibliques et
coraniques, qu'il se lance dans cette aventure littéraire. Le titre de l'ouvrage n'est pas banal, il est tout un
programme, il ne peut se comprendre qu'avec un minimum de connaissances religieuses.
Les sept piliers font d'abord référence à un proverbe de Salomon (IX, 1) : "La sagesse a bâti ma maison,
elle a taillé ses sept colonnes". La sagesse est la volonté divine, c'est la Sainte Sophie des Grecs, la
maison, est l'univers créé en 7 jours - les 6 jours de la création du livre de la Genèse et le 7ème, jour du
repos divin, du sabbat (jour du repos des Juifs, l'équivalent du dimanche des chrétiens).
Les sept piliers4 font peut-être écho aux cinq piliers de l'islam, le Coran fait souvent référence au chiffre
sept. Allah est le Sage (Sourate II, 32), celui qui "a créé en six jours les cieux, la terre et ce qui se trouve
entre les deux, Il s'est ensuite assis en majesté sur le Trône" XXV, 595
Ces références aux livres sacrés ne sont pas neutres. L'œuvre de Lawrence, celle de l'écrivain, celle de
l'officier anglais, est un nouvel acte créateur. Cette attitude est typiquement juive et chrétienne : l'homme
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biblique est co-créateur avec Dieu. Il s'agit ici de bâtir un nouvel Orient où la nation arabe aurait toute
sa place au lieu des Turcs. Par contre, l'homme n'est pas Dieu, il n'est qu'un homme avec ses limites. La
création de Lawrence ne s'achève pas, il n'y aura pas d'Etat arabe en Syrie, il n'y a pas de 7ème pilier,
ce 7ème jour bienheureux du repos mérité.
3.2) Situation du passage dans l'ouvrage
"Les sept piliers de la sagesse". L'armée anglaise suscite la révolte des Arabes contre l'ennemi
commun, les Turcs Ottomans. Laurence prend très à cœur cette révolte et tente de créer un
nationalisme arabe. L'œuvre est une route qui va de la Mecque à Damas, non dans le sens religieux
d'un quelconque pèlerinage, ce serait plutôt l'inverse, mais dans le sens politique de la conquête de la
liberté, d'une création de vie pour un peuple longtemps opprimé. "Ces pages dit-il, ne racontent pas le
mouvement arabe, mais la place que j'y tiens". Sa première action se situe dans le désert d'Arabie, le
Hedjaz, il remonte vers le nord en 1917, et pénètre en Syrie ottomane. Il passe selon sa propre
expression du monde nomade au monde paysan, se fait paysan au sens allégorique : "Si nous ne
devenions pas paysans nous-mêmes, notre mouvement de libération n'irait pas plus loin. Il était bon,
pour la Révolte Arabe, d'avoir à changer si tôt de caractère au cours de sa croissance. Nous avions
travaillé désespérément à labourer un sol en friche, tentant de faire croître une nationalité sur une terre
où régnait la certitude religieuse, l'arbre de certitude au feuillage empoisonné qui interdisait tout
espoir…(…). Si nous voulions prolonger la vie du Mouvement, nous devions mordre sur les terres
ornées; sur les villages, où les toits et les champs contraignent et abaissent le regard des hommes. Il
fallait commencer notre campagne par une étude de la carte et des réflexions sur la nature de notre
champ de bataille, la Syrie."
Lawrence se livre donc ici à une véritable analyse géopolitique de cette Syrie ottomane, il décrit la
mosaïque des peuples et des religions, et, dans ce cadre il en vient aux villes dont Jérusalem. On
comprend ainsi dans quel esprit il aborde cette ville : quel intérêt présente-t-elle pour le Mouvement qui
l'intéresse : le nationalisme arabe. La réponse à cette préoccupation est nette: "l'idéal d'un nationalisme
arabe leur était bien étranger".
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4 - FICHES : L'ESSENTIEL SUR :
4.1) Le tourisme religieux à Jérusalem avant 1914
"Ses habitants vivaient de l'afflux des visiteurs" lit-on dans l'extrait de texte de Lawrence.
Les pèlerinages aux lieux saints, chrétiens surtout, n'ont pratiquement jamais cessé dans la deuxième
moitié du XIX e siècle, les conditions de voyage s'améliorent progressivement, ce qui permet à un
nombre toujours plus grand de pèlerins, catholiques, orthodoxes et protestants de venir s'y recueillir. La
navigation en Méditerranée se développe avec l'ouverture du canal de Suez en 1869, en fin de siècle, le
chemin de fer en provenance de Jaffa arrive à Jérusalem.
Le premier T.O. - Tour-Opérateur - pour prendre une expression moderne, à organiser des voyages pèlerinages en "terre sainte", fut le pasteur anglais Thomas Cook. Il créa les "Eastern Tours" pour les
classes moyennes anglaises. Parfois, c'est le séjour d'un hôte de marque et de sa suite, qu'il faut
organiser (Rodolphe d'Autriche par exemple). Arrivent également, par milliers, des pèlerins orthodoxes
russes, dépenaillés mais mus par une foi à déplacer des montagnes.
Tous ces touristes pèlerins doivent être logés, nourris dans une Jérusalem qui ne brille pas par son
hygiène et sa propreté :"une ville horriblement sale" dit Lawrence. Une bonne partie des habitants vit
donc de cette activité que l'on qualifie aujourd'hui de tertiaire.
4.2) La situation de Jérusalem en 1917
UNE VILLE ARABE OCCUPEE PAR L'EMPIRE TURC OTTOMAN DEPUIS QUATRE SIECLES
Lorsque la guerre 14 éclate, Jérusalem appartient à l'empire turc ottoman surnommé la "Sublime Porte"
en évocation du palais du Sultan qui règne à Istanbul. Les Turcs n'ont jamais ménagé leurs efforts pour
promouvoir la ville sainte. La population de Jérusalem, pour l'essentiel d'origine arabe, est dans
l'ensemble assez fidèle à l'empire, sa loyauté certes se dégradera pendant la guerre.
L'empire turc, vaste mais faible, est surnommé au XIX e siècle," l'Homme malade de l'Europe". Les
grandes puissances européennes exercent leur influence, lui imposent un début de modernisation. Les
Européens, protestants, catholiques et orthodoxes, rivalisent entre eux pour la possession des Lieux
saints. Cette mise sous tutelle déguisée permet à des Juifs d'occident de migrer et de s'installer dans la
ville de leurs ancêtres ( ancêtres tout théoriques!). En 1912, la population juive est d'ailleurs majoritaire
dans la ville, au Conseil Municipal, sur 10 membres, figurent 4 personnalités juives.
Juifs
45 000
musulmans
12 000
chrétiens
13 000
Total
70 000
A la veille de la guerre, et ce depuis une génération, la population de la ville est en forte augmentation;
cela est surtout dû à l'arrivée de Juifs. Devrait-on de ce fait, encore dire, "une ville arabe" ?
LES HABITANTS DE JERUSALEM SOUFFRENT BEAUCOUP D'UNE GUERRE QUI NE LES CONCERNE PAS
Jérusalem est dominée par quelques grandes familles musulmanes qui possèdent de vastes domaines
aux alentours. La fracture sociale est frappante avec l'immensité des couches sociales défavorisées. La
population dans son ensemble comprend mal l'intérêt de cette guerre qui réquisitionne leurs biens et
eux-mêmes. En effet, sujets de l'Empire ottoman, ces habitants sont ainsi les alliés des Empires
centraux (Allemagne et Autriche), et ennemis des Anglais, Français, Russes et ensuite Américains.
Les Anglais dans cette région du Proche-Orient, défendent leurs possessions en Egypte et notamment
le canal de Suez, inauguré en 1870, véritable cordon ombilical avec les Indes. Alors que les Français
tentent en vain d'attaquer l'Empire turc au cœur - Détroit des Dardanelles -, les Anglais eux, au sud,
soulèvent les populations arabes contre l'occupant turc, et leur promettent un royaume.
Outre les privations dues à la guerre, Jérusalem et sa région connaissent en 1915-16 des invasions
dévastatrices de sauterelles. Le nombre des morts est impressionnant. La population juive assimilée à
des Occidentaux, souffre encore plus de l'état de guerre. Beaucoup sont emprisonnés, d'autres comme
Ben Gourion réussissent à fuir aux USA. Les Juifs les plus touchés sont les hassidim7 et les peroushim8
qui vivaient de la halouka9 en provenance de Russie maintenant ennemie.
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ACTIONS DES AMERICAINS ET DES ANGLAIS A JERUSALEM.
Avant son entrée en guerre fin 1917, l'Amérique neutre conserve une présence consulaire à Jérusalem,
ce qui n'était plus le cas pour les Français et Anglais devenus des ennemis. Le Consul américain, O.A.
Glazebrook, ému par cette misère, par la situation sanitaire déplorable, attire l'attention de son
gouvernement qui envoie une aide au printemps 1915. Cette aide ponctuelle fut insuffisante, la famine
et la maladie reprirent leurs ravages.
Ce sont les Anglais, présents dans la région, qui vont le plus se préoccuper de Jérusalem. Le texte
de1917 de Lawrence confirme cette situation déplorable :"une ville horriblement sale", dit-il ! Dans les
années 20, une des premières actions du mandat britannique consistera à moderniser un peu la ville
grâce à un système d'adduction d'eau et d'électrification.
Pour l'heure, 1917 est l'année clef de l'action britannique à Jérusalem :
- le 2 novembre, Lord Balfour, ministre des Affaires Etrangères de sa Majesté, par une lettre officielle,
se dit favorable à la création en Palestine d'un Foyer national Juif - c'est ce que l'on appelle la
"déclaration Balfour". Pour les Juifs occidentaux enthousiastes, la capitale de ce futur foyer débarrassé
des Turcs, ne peut-être que Jérusalem !
- Au même moment, l'armée anglaise d'Egypte attaque les troupes turques encadrées par des officiers
allemands - installés à Jérusalem -. La bataille fut rude comme en témoigne le cimetière militaire
installé sur les flancs du Mont Scopius. L'entrée officielle des Britanniques dans Jérusalem, à laquelle
participa le Colonel Lawrence, eut lieu le 11 décembre 1917. Le général Allenby, héros de cette
victoire, pénètre humblement à pied dans la vieille ville, par respect pour les Lieux saints qui s'y
trouvent. Allenby est acclamé en libérateur par la population juive et par la majorité des notables
arabes las de la présence turque. La guerre se prolonge encore quelques mois dans les alentours.
Des Juifs s'engagent en nombre dans l'armée britannique, dont Ben Gourion, futur chef d'Etat d'Israël
en 1948, revenu des USA.
Le gouvernement militaire anglais s'installe dans Jérusalem, à la place de l'Etat Major allemand, les Juifs
également choisissent la ville comme capitale de leur futur Foyer National.
Dans cette fin de première guerre mondiale, l'idée majeure qui prévaut chez les Alliés occidentaux est
celle de l'internationalisation de la ville. Jérusalem ville internationale, seul moyen pense-t-on alors - et
encore en 1947 lors du vote de l'ONU -, d'installer la paix entre les tenants des différentes religions. Cet
idéal est toujours très beau sur le papier ! La réalité du terrain et des hommes a toujours rejeté cette
belle utopie !
Ainsi donc, l'entrée des Britanniques dans Jérusalem 1917, que nous rapporte ce texte de Lawrence, est
une date charnière dans l'histoire de cette ville sainte. Elle met fin à quatre siècles de domination turque.
Bien faire comprendre à ce propos, aux élèves que les Turcs et les Arabes constituent deux peuples
différents, même s'ils ont une même religion, l'islam. Prendre comme situation comparable, les peuples
français et allemands, tous les deux chrétiens, et pourtant souvent opposés dans l'histoire.
La ville de Jérusalem ne regrette pas cette époque d'avant 1917. L'action anglaise rend la ville aux
arabes mais sème les germes des problèmes futurs en permettant une arrivée massive de Juifs. Nous
avons là l'origine des difficultés contemporaines.
4.3) Le sionisme
Dans ce passage des Sept Piliers de la sagesse, Lawrence évoque très brièvement le sionisme":
quelques Juifs voyaient en elle (Jérusalem) l'avenir politique de leur race". L'expression "sionisme"
désigne une volonté politique des Juifs d'Europe de créer un Etat pour l'ensemble du peuple juif. C'est
donc d'une certaine manière, un mouvement nationaliste. Contrairement au judaïsme, approche
religieuse, le sionisme, considère les Juifs comme un peuple, même s'il lui manque encore beaucoup
d'attributs, comme la langue. Cette idée apparue au XIXème siècle, vise la Palestine et Jérusalem
comme territoires légitimes pour créer cet Etat. Contrairement à l'impression que l'on peut avoir en lisant
cette petite phrase de Lawrence, à l'allure anodine, il est en fait tout à fait partisan de ce mouvement.
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L'idée majeure de Lawrence est qu'il y a place en Palestine pour les deux peuples, Arabe et Juif, que
ceux-ci doivent s'entendre, grandir ensemble car la présence anglaise dans la région ne doit pas être
durable. Cette position est également partagée par un autre grand orientaliste, un français, Louis
Massignon, alors capitaine au levant.
Cette fiche va brièvement faire le point sur ce sujet du sionisme en Palestine, afin d'éclairer la
compréhension du témoignage de Lawrence.
LE SIONISME ET LA PALESTINE.
a) En Europe occidentale, le mouvement d'émancipation des Juifs - c'est-à-dire, leur reconnaissance
comme citoyens d'un Etat, leur intégration à ce pays- commencé avec la philosophie des Lumières fin
XVIIIe siècle, s'essouffle vers la fin du siècle, précisément lors du Congrès de Berlin en 1878 où cela est
manifeste avec le cas des Juifs Roumains toujours considérés comme des étrangers dans "leur" pays.
Ce coup d'arrêt au libéralisme européen, à mettre en lien avec une montée des nationalismes, va libérer
les forces antisémites, qui vont mener jusqu'aux horreurs connues du XXe siècle. Le nationalisme se
construit alors contre l'"autre", le juif incarne parfaitement l'étranger.
b) A partir des années 1880, l'antisémitisme devient un mouvement collectif en Europe. Le mot sémite
employé ici par Lawrence a été forgé dans les années 60 par les orientalistes, imbibé de culture
biblique et soucieux de philologie, de science des origines. Pour eux, l'apparition des langues dans
l'antiquité a été déterminante, ils définissent une ethnographie linguistique comme supérieure à une
ethnographie physiologique, et ainsi définissent des races. A la race des sémites (le terme désigne
souvent les Juifs) qui ont "inventé" les différentes formes du monothéisme – judaïsme, christianisme,
islam-, ils opposent la race aryenne. Le mot antisémitisme apparaît chez les protestants allemands qui
fondent la Ligue antisémite en 1879. Lawrence reprend ces conceptions et les fait fonctionner plutôt en
faveur des Arabes, qui le préoccupent plus que les Juifs:" reprenant les opinions de son temps, il
interprète le clivage Arabes/Européens comme une opposition entre sémites et Aryens. En bon
Britannique, il n'apprécie que les races pures et, pour lui, le véritable Arabe est celui de l'intérieur des
terres. Plus on se rapproche de la bédouinité originelle, plus on retrouve l'identité du Sémite".10
c) Alors que les vexations et pogroms - massacres- de Juifs se développent en Russie et dans toute
l'Europe centrale à partir des années 80,11 que la France se déchire à propos des Juifs12, l'idée se fait
jour que l'intégration rêvée dans les sociétés de ces pays est impossible. Alors, les solutions proposées
divergent: certains Juifs voient l'avenir dans une voie révolutionnaire qui changerait la société, d'autres
pensent qu'il faut partir, créer ailleurs un Etat pour vivre en paix. C'est l'idée sioniste. Dans ce contexte
difficile, un juif hongrois, Théodore Herzl publie en 1896 un ouvrage intitulé "L'Etat des Juifs" où il
reprend les thèses sionistes. Pour appuyer ce projet, il organise le Congrès sioniste mondial de Bâle en
août 1897 où il affirme une volonté de "créer un foyer, entendons un Etat, national juif en Palestine.
Cette prétention n'est pas du goût de tout le monde y compris de certains Juifs. Herzl a lancé l'idée, créé
des institutions permanentes en annexe du Congrès afin de pouvoir acheter des terres aux Palestiniens
et d'y établir des Juifs. A sa mort en 1904, le sionisme est un mouvement international organisé, qui
recherche l'appui des grandes puissances, mais qui déjà se lance dans des opérations de colonisation Tel Aviv est fondée en 1908.
LES JUIFS EN PALESTINE AVANT LA GUERRE 14
Les premières implantations juives sont l'œuvre de "l'Alliance Israélite Universelle", organisme d'origine
française créé en 1860 sous le second Empire. Les Juifs d'Europe de l'ouest, émancipés depuis
quelques dizaines d'années, se penchent sur le sort de leurs frères d'Orient en pays musulman. Cette
organisation copie un modèle missionnaire protestant, l'Alliance Evangélique Universelle. Les grandes
familles juives d'Europe comme les Rothschild, les Hirsch soutiennent cette initiative. Grâce à
d'importants moyens financiers, l'alliance Israélite Universelle peut financer en Palestine, à Jérusalem,
des écoles (où l'on parle français). Les Juifs dans l'ensemble sont protégés par les Turcs Ottomans, les
problèmes arrivent lorsqu'ils sont impuissants face aux Grecs; ce sont ces derniers, comme jadis à
Odessa, qui reprennent les accusations de crime rituel juif. Cette Alliance en fait " francise" les Juifs de
Jérusalem et de Palestine. L'Alliance souhaite développer une colonisation rurale. Les Juifs sur place
eux préfèrent vivre en ville, notamment à Jérusalem, ils laissent donc aux nouveaux arrivants pauvres
issus d'Europe centrale, le soin de s'installer dans ces colonies rurales modernes pour l'époque13. Les
Juifs qui fuient les pogroms de Russie sont pris en charge par l'Alliance et transférés en Palestine.
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Les Anglais sont eux aussi favorables à une immigration juive en Palestine arabe. "Les élites politiques,
fortement nourries de la lecture de la Bible, estiment que l'accomplissement des prophéties ne se fera
qu'après le retour des Juifs sur la terre d'Israël et leur conversion au christianisme"14. Les Anglais visent
aussi leur influence dans une région également convoitée par les Français. Le sionisme à la veille de la
guerre 14 certes développe son action, mais l'impact est encore assez marginal. Par contre les
tendances lourdes de l'avenir sont déjà en place. Le projet est politique : créer un Etat juif Cela
nécessite le soutien des puissances, d'où le lobbying juif auprès d'elles. Les Arabes de la région
réagissent encore peu, les sionistes préfèrent négocier avec les Arabes de l'extérieur de la Palestine,
qu'avec eux.
LES CHANGEMENTS DUS A LA GUERRE
a) Le sort des Juifs devient un enjeu de propagande entre les belligérants qui se livrent pour la première
fois à une guerre totale. La France et l'Angleterre font valoir le droit des peuples, mais leur allié russe ne
l'entend pas ainsi. L'empire russe persécute ses Juifs les accusant de trahison en faveur de l'Allemagne.
Les Empires centraux - Allemagne et Autriche-Hongrie-, cherchent l'appui des Juifs, en émancipant ceux
de Pologne occupée par eux, et en protégeant ceux de Palestine en territoire turc, leur allié.
Aux Etats-Unis, les Juifs issus pour la plupart de Russie et d'Allemagne, ont tendance à être plutôt
favorables aux Empires centraux. Or, l'enjeu est de taille quand on sait que ce sont ces mêmes Juifs qui
tiennent les grandes banques américaines. On devine donc les raisons de ces attentions portée aux
Juifs américains par les uns et les autres. La guerre de propagande européenne sur ce sujet vise donc
les Juifs américains, l'argent américain sera déterminant dans le conflit.
b) La déclaration Balfour de 1917. L'organisation sioniste mondiale tente de demeurer neutre dans le
conflit, elle transfert son siège de Berlin, qui seule la soutenait vraiment avant, à Copenhague. C'est le
président sioniste anglais, le chimiste Weizmann qui relance l'idée sioniste. C'est l'action influente de ce
juif anglais qui arrive à convaincre le gouvernement de sa Majesté en la personne de Lord Balfour,
ministre des Affaires étrangères. Cet homme politique, à la culture biblique impressionnante, est alors un
personnage important, sa lettre du 2 novembre 1917, adressée à Lord Rothschild, est un document
officiel que l'on a pris l'habitude de nommer "déclaration Balfour". C'est la première reconnaissance
officielle par une grande puissance, du peuple juif en tant que tel et du "principe de reconnaître la
Palestine comme Foyer national du peuple juif, du droit du peuple juif à construire sa vie nationale en
Palestine…"15.
LA SITUATION A L'EPOQUE DU TEXTE DE LAWRENCE
L'entrée du général anglais Allenby à Jérusalem le 11 décembre 1917 a été l'objet de difficiles
négociations préalables avec les Français. Allenby pénètre à pied, humblement dans la vieille ville de
Jérusalem, en contraste volontaire avec l'entrée fracassante à cheval de l'empereur allemand Guillaume
II quelques années auparavant. Un peu à l'arrière d'Allenby, suivent les Français, Picot et Massignon.
Allenby fait lire la loi martiale, la cérémonie ne dépasse pas la demi-heure. Jérusalem est donc régie par
la loi militaire anglaise, la ville sainte et la Palestine, encore zone de combat, sont ainsi sous la
protection des Conventions de la Haye ! Celles-ci interdisent tout changement de statu quo tant que la
guerre n'est pas terminée et qu'une paix n'est pas signée.
Cette volonté anglaise de maintenir le statu quo afin de bloquer toute prétention française, se retourne
en fait contre la déclaration Balfour qui ne peut pas trouver d'application dans l'immédiat. Pourtant,
Weizmann, certes mécontent de l'administration militaire anglaise, ne se décourage pas, reste très actif
sur le terrain. En effet, quelques temps après la prise de Jérusalem, il propose aux musulmans, par le
biais de l'administration anglaise, l'achat du mur des lamentations; or celui-ci fait partie intégrante des
biens inaliénables du haram al-sharif musulman. Désormais, les musulmans de Jérusalem s'inquiètent
du projet sioniste, sont mécontents des Anglais. Picot, dans une brève description de son entrée dans
Jérusalem signale l'absence des Arabes et en général d'enthousiasme des populations. On le voit, la
situation des Juifs à Jérusalem est complexe à la date décrite par Lawrence.
4.4) Le nationalisme arabe
Ce mouvement est l'autre grand changement qui affecte le Proche-Orient aux alentours de la guerre 14.
Lawrence, militaire anglais s'engage à fond dans la défense de cette cause, il est déçu dans le texte qui
nous intéresse, par le manque d'intérêt porté à ce mouvement national par les Arabes de Jérusalem.
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LES ARABES AVANT LA PREMIERE GUERRE MONDIALE
On ne peut pas véritablement parler de nationalisme arabe à cette époque par absence de projet
séparatiste, mais par contre divers mouvements, parfois opposés, traversent le monde arabe.
a) L'arabisme est la conscience d'être arabe, différent des autres groupes ethniques de l'Empire turc
ottoman; ce point de vue est encore marginal, l'arabe se défini alors surtout par une ascendance
généalogique avec des ancêtres de la péninsule arabique. Cette idée d'arabisme naît au Liban, en
milieu chrétien persécuté par les Turcs, avec une volonté de dépasser les différences religieuses et de
mettre en avant la langue et la culture. Cet amour de la patrie arabe est essentiellement une attitude
constatée seulement en Syrie qui souhaite une monarchie encadrée par un empire turc suzerain.
Un autre mouvement, le salafisme apparaît fin XIXème siècle. A partir d'un constat de retard par rapport
à l'occident, constat évident depuis l'irruption de Bonaparte en Egypte début XIXème siècle, cette
pensée prône le retour aux sources de l'islam: il s'agit donc d'un mouvement réformiste: imiter les pieux
ancêtres d'où le nom de salafisme. Cette attitude rejette les nationalismes arabes comme facteur de
division et d'affaiblissement des l'Oumma - l'ensemble des croyants-. Il s'agit de favoriser toutes les
valeurs issues de l'islam et de rejeter celles de l'occident chrétien.
Le lien entre ces deux courants est réalisé vers 1900 par un Egyptien, Rida : le retour aux origines de
l'islam est en fait le retour à la primauté des Arabes dans la religion musulmane. La responsabilité des
retards est attribuée aux non-arabes, entendons les Turcs. Ainsi naît et se développe l'idée d'un califat
arabe contre celui d'Istanbul- depuis le XVI e siècle-, califat qui serait purement spirituel et centré sur la
Mecque.
b) Les hésitations des réformateurs turcs face à ces velléités de revendications arabes. Une
révolution interne à l'empire ottoman amène au pouvoir en 1909, des réformateurs que l'on appelle les
"Jeunes Turcs". Le vieux sultan Abdul Hamid II est déposé. L'idée qu'il n'existe plus de discrimination
mais que des citoyens ottomans dans l'empire séduit dans un premier temps les Arabes, mais très vite,
les attitudes centralisatrices des Jeunes Turcs, imposant la langue turque dans l'administration, déplait
fortement à la bourgeoisie arabe qui se voit de ce fait rejetée des postes à responsabilité.
Ces espoirs étant déçus, les élites arabes se tournent vers l'idée d'autonomie avec le soutien des
puissances étrangères alliées, France et Grande-Bretagne. Chacun semble y trouver son compte : les
Arabes ne peuvent rien sans aide extérieure, les occidentaux doivent protéger cette zone stratégique de
l'arrivée des Allemands - canal de Suez, route des Indes. Ces tendances vont se développer avec la
guerre, grand accélérateur de l'histoire.
c) Ces projets arabes entraînent une répression ottomane sévère - c'est en gros également l'époque du
génocide arménien commis par l'armée turque-. En réaction, Français et Anglais s'engagent
concrètement à soutenir une révolte arabe contre les Turcs. Les deux alliés signent en janvier 1916 les
accords Dykes-Picot où ils s'engagent à "reconnaître une confédération d'Etats arabes", se préservent
chacun une zone d'influence au nord pour la France - Syrie-Liban -, au sud pour l'Angleterre, la
Palestine devant être internationalisée.
LA REVOLTE ARABE ET SES SUCCES MILITAIRES
a) La révolte arabe est déclenchée dans le Hedjaz par le Chérif Hussein, en juin 1916. Ses quatre
fils, dont Faysal, sont chargés des combats. La révolte n'est pas officiellement menée au nom de
l'arabisme mais au nom de l'islam, c'est un Jihad mené contre les Turcs Ottomans jugés impies, les
Jeunes Turcs sont accusés de trahison, de non respect des valeurs de l'islam. La Mecque est prise, la
France et l'Angleterre sont rassurées, il n'y a pas à craindre de soulèvements parmi nos troupes
musulmanes pour qui on s'empresse d'organiser un pèlerinage aux lieux saints. Les Arabes mènent une
guérilla avec l'aide occidentale, enregistrent des succès militaires, prise d'Akaba, et finalement de
Damas, en Syrie, au nord (en septembre 1918). Cette action est un empiètement sur les territoires
dévolus aux français par l'accord Sykes-Picot - accords considérés comme caducs par l'Angleterre.
b) Action de Lawrence d'Arabie dans cette épopée arabe. Thomas Edward Lawrence s'intéresse très
tôt au Proche-Orient, son sujet de thèse est "l'influence des croisades sur l'architecture militaire
européenne jusqu'à la fin du XIIème siècle". Jeune, en 1909, il parcourt à pied la campagne syrienne,
risquant plusieurs fois sa vie. Il eut la chance de rencontrer un personnage important, Hogarth,
archéologue et célèbre pour ses récits de voyages orientaux. C'est ainsi qu'il part dans ces contrées
comme archéologue, d'abord sur le site de la ville hittite de Carchemish sur l'Euphrate, puis comme
cartographe au Sinaï et en Palestine.
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Au cours de ces premiers voyages, il se forge une idée des Arabes qu'il oppose en tout aux Turcs. Avec
la guerre, il s'engage dans l'armée britannique, il est d'abord envoyé en Egypte, puis en 1916 en Arabie
où il se lie d'amitié avec le prince Faysal, les deux jeunes gens sont à peu près du même âge, mais c'est
Lawrence, qui toujours manipulera le prince arabe. Devenu officier de renseignements, Lawrence, tente
par ses rapports d'experts d'influencer les décisions anglaises dans le sens de son souhait, créer un
grand Etat arabe, sous influence anglaise, contre la France. Lawrence est le conseiller anglais des
Arabes, et définit pour eux l'art de la guérilla (déjà pratiquée par les Boers contre les Anglais). Habillé
comme les bédouins16, Lawrence se lance dans le combat. Les actes majeurs de son épopée sont le
raid audacieux qu'il mène en plein territoire ennemi jusqu'au sud Liban et la folle charge victorieuse de
méharistes arabes contre les troupes ottomanes dans l'été 1917 qui le conduit à prendre Akaba, tête de
pont d'un ravitaillement possible par les Alliés. Malgré la maladie et les dangers de toutes sortes, il fait
preuve d'un grand courage, il sera promu colonel17. Les succès militaires arabes lui doivent beaucoup,
mais les échecs politiques également.
c) La révolte arabe contre les Ottomans aboutit à l'occupation militaire de la Syrie avec Faysal en
septembre 1918.
L'ECHEC POLITIQUE DU NATIONALISME ARABE A LA FIN DE LA PREMIERE GUERRE MONDIALE
a) Lawrence réussit à imposer le prince Faysal comme seul représentant des Arabes à la conférence de
la paix de Versailles. En janvier 1919, Faysal y expose les revendications arabes. La nation arabe doit
comprendre tout l'espace au sud d'une ligne d'Alexandrette à la frontière perse (iranienne). Le projet vise
à créer une confédération d'Etats arabes dirigés par son père, Hussein, où la Palestine serait sous
tutelle étrangère - anglaise bien sûr !
b) La France, grande puissance victorieuse, n'accepte pas ces projets arabo-anglais. L'Angleterre trop
occupée par d'autres problèmes politiques de l'après guerre, finit par laisser tomber son allié arabe, lui
conseillant de s'entendre avec les Français.
c) La France accepte que la Palestine passe sous contrôle anglais mais préserve en échange sa
présence au Liban. Les Arabes à partir de leur embryon d'Etat syrien, attaquent l'armée française au
Liban. Le général Gouraud, riposte, entre en Syrie, prend Damas et en chasse Faysal; c'est la fin du
rêve d'un Etat arabe à Damas.
Avec cette révolte arabe qui lui tenait tant à cœur, Lawrence entre dans la légende. Il a échoué sur
le plan politique, faute de ne pas avoir mesuré le poids des influences des autres grandes puissances,
notamment, l'importance du lobby juif ; en effet, le projet sioniste soutenu par les Américains est
incompatible avec le projet de son ami Faysal. Sa célébrité il la doit à un journaliste américain, Lowell
Thomas, au moment où son influence réelle disparaît. Ce contraste sera un poids énorme pour ses
dernières années de vie.
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TRAVAIL DE L'ELEVE
Les élèves répartis en groupes de travail de 4 ou 5, selon l'effectif de la classe, en partie au CDI, et en
partie dans leur salle de cours, auront à mener cette recherche sur un temps de 3 séances.
L'objectif est double :
1) apprendre à s'exprimer en anglais, ici, sous forme écrite, enrichir son vocabulaire notamment dans le
registre religieux,
2) participer à l'étude interdisciplinaire sur Jérusalem. Cette participation respecte toujours les deux
angles d'approche du sujet, à savoir, la ville elle-même en tant que lieux saints, et le regard sur les
groupes religieux présents.
De quoi dispose l'élève ?
- Du texte anglais de Lawrence. Ce texte n'est pas trop long pour des élèves de seconde, mais il est
assez riche en contenu. La plupart du temps, le passage est allusif, ce qui est une excellente occasion
de recherche de précisions et donc de sens.
- De différents outils de recherche - dictionnaires d'anglais, dictionnaires encyclopédiques, Internet,
livres d'histoire…
- De différents documents ici présents : une carte du Moyen Orient au début de la Première Guerre
mondiale, 3 fiches de connaissances : Jérusalem en 1914, le sionisme, le nationalisme arabe. Ces
fiches font le point sur ces trois questions, elles peuvent être utilisées directement par les élèves
comme source de documentation, ou être résumées en anglais par le professeur et ainsi distribuées,
selon le niveau et les possibilités de la classe.
Le professeur est présent pour aider, orienter, voire le cas échéant, corriger - tant le contenu de cette
recherche que l'expression anglaise.
Le Travail lui-même est distribué - fiche du questionnaire - et expliqué précisément dès le début. Les
réponses demandées en langue anglaise peuvent être assez concises, mais toujours exprimées avec
clarté, et grammaticalement correctes.
Trois temps distincts dans cette recherche :
- un petit travail d'approche sur l'auteur et les circonstances de son écrit sur Jérusalem.
- une compréhension du texte sur la globalité du lien entre Jérusalem et les religions.
- une approche religion par religion
Une brève conclusion doit dégager les grandes lignes du regard de Lawrence.
Selon le temps disponible, l'intérêt des élèves, les intentions du professeur un prolongement à ce travail
peut être facilement envisagé :
- traduire le texte en français et mener un travail critique sur la traduction proposée ici par Charles
Mauron chez Payot.
- lancer un débat consistant à s'interroger sur la pertinence du regard de Lawrence pour la situation de
Jérusalem aujourd'hui.
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QUESTIONNAIRE POUR GUIDER LE TRAVAIL.
1 - TRAVAIL D'APPROCHE
Qui est Lawrence d'Arabie ? D'où lui vient sa renommée ?
Pourquoi et comment Jérusalem est-elle concernée par la première guerre mondiale ?
Quand et à quelle occasion, Lawrence écrit-il ces quelques lignes sur Jérusalem ?
Repérage sur une carte.
L'élève a à sa disposition outre les richesses d'un CDI, y compris l'utilisation intelligente de l'Internet, les
fiches connaissances que nous proposons, et un dictionnaire anglais français.
2 - QUESTIONS SUR LE TEXTE
a) Jérusalem et les religions présentes, vue d'ensemble :
- Lignes 3-5 : "Every Semitic religion hade made Holy"
Quelles sont ces religions ? Quels sont leur lieu saint ?
- Que désigne concrètement l'expression "shrines of its past" ?
- Que représente chacune d'elle à Jérusalem vers 1917?
b) Les chrétiens à Jérusalem :
- Comment Lawrence les décrit-il (lignes 4-5; 9-10) ?
- Que signifient "differences of Christians"?
c) Les "Mohammedans" :
- Que signifie cette expression (comment la traduit-on en français), vous paraît-elle appropriée ?
- Précisez ce que sont les "ideals of Arab nationality" ?
- Pourquoi Lawrence semble t-il déçu par les Arabes de Jérusalem ?
d) Les Juifs à Jérusalem :
- Expliquez la ligne 5.
- Pourquoi les Juifs sont-ils décrits comme une race ?
- Quel est ce projet politique, où en est il en 1917 ?
CONCLUSION
Quelle est la vision de Lawrence d'Arabie ?
Sur Jérusalem : a-t-il raison de dire que c'est une "squalid town" ?
Sur les religions : Pourquoi selon lui, il y a en 1917, des forces du passé, des forces d'avenir mais pas
de présent ?
Que pensez-vous de son analyse en fonction de la situation actuelle de Jérusalem ?
Le tout dernier travail consistera à traduire le texte et à confronter sa propre traduction avec celle
proposée.
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POSITION DE JERUSALEM DANS L'EMPIRE OTTOMAN EN 1917
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1
Voir la fiche "Situation de Jérusalem en 1917". Ainsi que la carte "le Moyen Orient en 1914."
2
Pour connaître la vie de Lawrence, on pourra consulter :
André GUILLAUME, "Lawrence d'Arabie", fayard, 2000, 425 p, cartes.
Henry LAURENS, " Lawrence en Arabie", Gallimard Découverte, 176 p.1992, nombreuses illustrations.
3
Le pilier ou la colonne est aussi l'image biblique de la théophanie, c'est la nuée dans laquelle Dieu se
manifeste. Le pilier renvoie aussi à son passé, à son goût pour l'architecture
4
Consulter pour ces références le livre d'André GUILLAUME, op.cit p.279.
5
Il y a également une référence à l'un des ses auteurs favoris, F. Nietzsche, avec la notion de Volonté de
puissance.
6
Le Hassidisme est un mouvement de renouveau religieux populaire issu de l'Europe Centrale au XVIIIe siècle.
Le mot vient de hasid, pieux en hébreu. Le mouvement connu un grand succès au XIX e siècle. C'est alors une
sorte de mysticisme qui réagit contre une attitude jugée trop sèche et intellectuelle des rabbins classiques; cela
se traduit par un enthousiasme manifeste et des attitudes joyeuses lors de la prière. Ces attitudes ne plurent
pas à tout le monde, il y eut des exclusions. Dès 1777, certains Hassidim s'établissent en Palestine - "Erets
Israël"-. La plupart restèrent en Europe. Les rescapés de la Shoah s'installèrent en Israël après 1950 en
gardant le souvenir de leurs villes de départ
7
Les Peroushim sont les disciples de rabbin Eliyah. Ce juif mondialement connu vivait au XVIIIe siècle à Vilnius,
grand centre intellectuel juif d'Europe. Ascète, érudit, curieux de tout, il s'opposa aux Hassidim, les jugeant
dangereux. Il encouragea ses disciples à migrer en Palestine, ce qu'ils firent début XIXe siècle
8
La halouka ou Halouqqah signifie la répartition. C'est une aide financière accordée aux Juifs vivant en Terre
sainte par ceux de la diaspora, cela depuis la fin du XVIIIe siècle avec l'arrivée en Palestine d'immigrants
hassidiques. Il s'agit en fait de la reprise d'une coutume pratiquée déjà dans l'antiquité. Au XIX e siècle, les
communautés juives de Russie y contribuent pour une bonne part. de nos jours, des Juifs orthodoxes de la
diaspora continuent à envoyer des fonds pour aider les étudiants en religion à Jérusalem.
9
Henry LAURENS, "Lawrence d'Arabie", collection découverte Gallimard, 1992,176 p, nombreuses illustrations,
page 22. Excellent petit ouvrage sur Lawrence d'Arabie.
10
Le premier pogrom a lieu en Russie, à Odessa, 3e ville de l'empire russe, en 1821 ; il sera suivi de nombreux
autres. Lors de l'assassinat du tsar Alexandre II, une partie de la presse s'en prend aux Juifs.
11
C'est l'ouvrage de Drumont en 1886 " La France juive", c'est l'affaire Dreyfus- 1897-1899.
12
Voir la carte des colonies juives en Palestine en 1914 p. 701 dans l'ouvrage de Henry LAURENS " La question
de Palestine" t.1 1799-1922, l'invention de la Terre sainte", Fayard, 1999, 719 p.- ainsi que pour toutes cartes
sur cette époque concernant la Palestine.
13
Page 24 du manuel de Vincent CLOAREC, Henry LAURENS "Le Moyen-Orient au 20ème siècle", Armand
Colin, Collection U - Histoire contemporaine-, 2000, 255 p.
14
Voir l'ouvrage d'H. LAURENS sur La question de Palestine, op.cit. p.360.
15
Il n'a pas la tenue du bédouin ordinaire, mais le costume des aristocrates du désert, c'est une question de rang
pour être admis et non l'illusion de passer pour un arabe. "L'uniforme de l'armée britannique est abominable
quand il faut monter un chameau ou s'asseoir par terre. Les vêtements des Arabes que j'avais appris à porter
avant la guerre, sont dans le désert à la fois plus décents et plus propres" écrit-il dans les "Sept piliers de la
sagesse".
16
Lawrence est invité à participer à l'entrée solennelle d'Allenby à Jérusalem le 11 décembre 1917.
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