Conclusion
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byzantines, les ducs. Leurs administrations, mais aussi la carte administrative de l’Égypte sont
refondues au rythme d’un système qui s’inspire de l’ordre local comme des initiatives des
nouveaux maîtres du pays.
L’administration de la Moyenne-Égypte prend effectivement une forme nouvelle, à
partir du règne de Mu‘āwiya (661-680). Au VIIe siècle, les documents grecs et coptes rendent
toute l’ampleur de l’activité administrative d’Antinoé et de sa zone d’influence. Dès le début
du VIIIe siècle, son nom arabe apparaît dans les documents, et on peut suivre l’histoire
d’Anṣinā qui se place ensuite, dès les premières décennies du VIIIe siècle, dans l’ombre de sa
voisine Ašmūn. Dans ce processus, le découpage provincial et en son cœur la Thébaïde, est
adapté à la philosophie de l’Empire, pour ne garder qu’une division entre Haute et Basse-
Égypte. Le duc présente un profil progressivement islamisé à différents niveaux de
représentation de sa fonction, comme dans les documents que sa chancellerie émet. La
chronologie de cette évolution était déjà connue dans son ensemble au niveau des plus grands
centres de l’Empire
, mais nous avons pu donner, dans le troisième chapitre, le détail de
l’application des mesures impériales au sein de la province.
Au tournant de l’époque marwānide, la région intègre ensuite directement des acteurs
nouveaux. Des fonctionnaires de nom arabe interviennent directement au niveau local, ils
portent tout d’abord le titre d’epikeimenos dans les documents arabes et acquièrent ensuite
directement un ancrage territorial au sein de la région. Ils remplacent alors les élites locales
dans la gestion des affaires administratives de la région. La création de ce corps de
l’administration local au niveau de la kūra constitue l’aboutissement des mesures mises en
place dès le début de l’époque umayyade, et témoigne d’une volonté impériale de
structuration de l’administration des provinces dans leurs différents niveaux hiérarchiques.
L’investissement du gouvernement provincial par l’envoi des epikeimenos arabes à partir de
705, l’implantation d’un corps de l’administration arabe en tant que tel au niveau de la kūra
d’Ašmūn à partir de 714 et la disparition progressive du duc de Thébaïde de la hiérarchie
provinciale dans les années 720, représentent trois volets intimement liés et consécutifs de ce
processus, si ce n’est directement contemporains. On trouve des epikeimenos arabes alors que
le duc est toujours en poste, puis epikeimenos et pagarques arabes finissent par se confondre
en une seule fonction.
Cet examen nous permet réellement de placer un tournant dans l’administration de la
Moyenne-Égypte autour des années 710 et du règne du calife al-Walīd (705-715). Les
Comme l’indique P. Brown, la période 632-809 est celle du « monde antique sous la domination de l’Islam » :
The World of Late Antiquity, Londres, 1971, p. 194-203.