par la pensée des biens à venir
.» Or comme le dit saint Paul que Cyprien cite quelques
lignes plus loin : « Nous sommes les cohéritiers du Christ à condition de souffrir avec Lui
pour être glorifiés avec Lui
.» La récompense n’attend pas, elle précède même parfois le
martyre.
Dans la très belle et très poétique lettre 37, Cyprien ouvre une autre dimension liée à
la purification et à la sanctification. La prière du juste est plus féconde et les souffrances du
martyr non seulement le purifient et le justifient, mais peuvent rejaillir sur les autres. Nous
touchons-là le problème que Cyprien aura à régler avec les confesseurs qui distribuaient leurs
mérites aux lapsi pour les réintégrer. Nous sommes là aux sources même du principe des
indulgences. « Il me reste, frères bienheureux, à vous prier de vous souvenir de moi, de
vouloir bien au milieu de vos pensées grandes et divines, nous porter dans votre cœur, et dans
votre esprit, et me faire une place dans vos prières et oraisons, lorsque votre voix, qu’a
purifiée une confession glorieuse, et dont les nobles accents se sont soutenus sans défaillance,
parvient aux oreilles de Dieu, et passant de ce monde qu’elle a vaincu au ciel qui lui est
ouvert, obtient de la divine bonté tout ce qu’elle sollicite. Que demandez-vous en effet, à la
bonté divine que vous ne méritiez d’obtenir, vous qui avez si bien gardé les commandements
du Seigneur, observé la discipline évangélique avec l’énergie d’une foi sincère et conservé
intact l’honneur de votre fidélité courageuse !
» Si les mérites de la croix du Christ ont
ouvert les grâces aux hommes, alors le chrétien qui donne sa vie pour le Christ communie à
ses souffrances et participe au salut du monde : « Lui il a vaincu une fois la mort pour nous,
triomphant toujours en nous
».
Mais il ne faut pas se faire d’illusion : celui qui combat n’est pas seul. S’il peut
vaincre, c’est parce qu’il est « couvert des armes de la foi
». Toute la Trinité combat avec le
soldat du Christ. Dans les psaumes, l’Esprit Saint nous parle et nous exhorte, tandis que « le
Christ prend plaisir à combattre et à vaincre dans la personne de tels serviteurs, lui qui protège
ceux qui lui sont fidèles
». Et c’est ainsi que Cyprien décrit le martyre : « La foule de ceux
qui étaient là a vu avec admiration la lutte spirituelle, le combat du Christ; elle a vu ses
serviteurs luttant sans se laisser abattre, confessant leur foi à voix haute, incorruptibles,
animés d’un courage surhumain, dépourvu des armes du siècle, mais couverts des armes de la
foi. Les torturés sont restés debout plus forts que ceux qui les torturaient ; et les ongles de fer
ont eu beau frapper et déchirer : les membres frappés et déchirés les ont vaincus. Une foi
inexpugnable a eu raison de coups longtemps répétés, alors que dans le corps disloqué des
serviteurs de Dieu, ce n’étaient plus des membres que la torture blessait, mais des blessures
qu’on rouvrait. Le sang coulait qui devait éteindre l’incendie de la persécution, assoupir sous
son ondée glorieuse les feux et les flammes. Ô la belle fête que donnait notre Seigneur,
combien élevée, combien magnifique, combien agréable aux yeux de Dieu par la fidélité au
serment et le dévouement de ses soldats! (…) Elle est vraiment précieuse cette mort qui
achète l’immortalité au prix du sang, qui reçoit la couronne en déployant le suprême courage.
Combien le Christ fut heureux alors, combien il prit plaisir à combattre et à vaincre dans la
personne de tels serviteurs, lui qui protège ceux qui lui sont fidèles et qui donne à ceux qui
croient dans la mesure même où ils peuvent recevoir ! Il a été présent au combat donné en son
nom, il a soutenu, fortifié, animé ses soldats et ses champions ; et lui il a vaincu une fois la
mort pour nous, triomphant toujours en nous. (…) Il n’est pas disposé à se contenter de
. Ibid.
. Rm 8,16-17.
. Ep. 37,4.
. Ep. 10,3.
. Ep. 10, 2,2.
. Ep. 10, 3.