Perspectives économiques Nunavut

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Perspectives économiques Nunavut Mai 2001
Regard sur l’économie
du Nunavut
RENDEMENT ET TENDANCES ÉCONOMIQUES
Perspectives économiques Nunavut : Regard sur l’économie du Nunavut
par Stephen Vail et Graeme Clinton
Le Conference Board
du Canada
L
e Conference Board du Canada est
l’organisme de recherche appliquée
sans but lucratif et indépendant le
plus avancé du pays. Il se donne pour
mission de développer le leadership dans le but
de contribuer à l’avancement du Canada en
aidant, par ses observations, à mieux comprendre
les tendances économiques, les grands dossiers
d’intérêt public et la performance des organisations.
Il crée aussi des liens et assure la diffusion de la
connaissance au moyen d’activités d’apprentissage,
de réseaux, de publications de recherche et de
services d’information taillés sur mesure. Un
large éventail d’organisations des secteurs public
et privé canadiens figurent parmi ses membres.
Créé en 1954, Le Conference Board du Canada
est affilié au Conference Board, Inc. qui dessert
quelque 3 000 sociétés réparties dans 67 pays.
©2002 Le Conference Board du Canada*
Imprimé au Canada • Tous droits réservés
ISBN 0-88763-531-8
*Constitué sous la raison sociale d’AERIC Inc.
Préambule
Cette étude a été rendue possible grâce à une subvention
du gouvernement du Nunavut, de la Nunavut Tunngavik
Inc. et du ministère des Affaires indiennes et du Nord
canadien. Conformément à ses politiques en matière
de recherche subventionnée, Le Conference Board
du Canada assume l’entière responsabilité de la
conception et de la méthode, ainsi que du contenu
du présent document.
L’étude a été réalisée par Graeme Clinton, Stephen Vail
et Peter Lok, chargés de recherche, sous la direction
de Luc Bussière, directeur des Services économiques.
TABLE DES MATIÈRES
Résumé......................................................................i
4.1.7 Services de santé et services sociaux ..........17
1 — Introduction ......................................................1
4.2 Le capital humain ............................................18
1.1 Historique ........................................................1
4.2.1 Données démographiques ..........................18
1.2 Objet de cette étude ..........................................3
4.2.2 Éducation et développement des
compétences ....................................................19
1.3 Plan d’ensemble du rapport ................................3
2 — Approche générale ............................................5
2.1 Méthode ..........................................................6
3 — Processus de développement économique ..........7
3.1 Pourquoi parler de « développement »? ................7
3.2 Quatre éléments essentiels au développement ......7
3.3 Processus et conditions préalables au
développement économique......................................8
3.3.1 Accroissement des réserves de
capital physique..................................................8
4.2.3 Revenu ....................................................20
4.2.4 État de santé ............................................21
4.3 Le capital naturel ............................................23
4.3.1 Science de la faune et des pêcheries............24
4.3.2 Sciences de la terre dans le secteur public ..24
4.4 Le capital social et organisationnel ....................25
4.4.1 L’Accord sur les revendications
territoriales du Nunavut (ARTN)..........................25
4.4.2 L’établissement du territoire du Nunavut......27
3.3.2 Approche axée sur les changements
structurels..........................................................8
4.4.3 L’établissement du gouvernement
du Nunavut ......................................................27
3.4 Développement durable ....................................10
4.4.4 Le rôle du Qaujimajatuqangit inuit..............28
3.5 Rôle de l’activité économique de subsistance ......10
4.4.5 Les secteurs clés du capital
organisationnel et social du Nunavut ..................28
3.5.1 Le pourquoi de la croissance économique ....10
3.5.2 Rôle de l'économie de subsistance
dans le développement ......................................11
4 — Regard sur le Nunavut : où en sommes-nous? ..13
4.1 Capital physique/infrastructure ........................14
4.1.1 Le logement..............................................14
5 — Aperçu de l’économie mixte du Nunavut ..........33
5.1 L’économie de subsistance et son rôle
dans l’économie mixte............................................33
5.1.1 Estimation de la taille de l’économie
de subsistance ..................................................35
4.1.2 Locaux commerciaux..................................15
5.2 Aperçu de l’économie basée sur
les salaires du Nunavut ..........................................36
4.1.3 Services de gestion et de traitement de
l’eau potable, des eaux usées et des déchets ........15
5.2.1 Taux d’emploi ..........................................39
4.1.4 Transports : réseau routier, terrains
d’aviation, ports et navigation maritime ..............15
4.1.5 Télécommunications et connectivité ............16
4.1.6 Services de garde et d’enseignement............17
5.3 Analyse du rendement sectoriel du Nunavut
en 1999 (basé sur les salaires) ................................39
5.3.1 Chasse, pêche et piégeage ..........................40
5.3.2 Industrie minière ......................................42
5.3.3 Industrie manufacturière............................43
6.3.7 Perspectives relatives aux pêches ................56
5.3.4 Industrie de la construction ......................45
6.3.8 Risques inhérents aux prévisions ................57
5.3.5 Industries du commerce au détail et
de gros et des services aux entreprises ................45
6.4 Perspectives de croissance économique de
l’économie numéraire ............................................57
5.3.6 Industrie de l’assurance et des finances ......45
7 — L’avenir : à nous d’en décider ..........................59
5.3.7 Industrie des services gouvernementaux
et connexes ......................................................46
7.1 Résumé des observations ..................................59
5.3.8 Industries du tourisme ..............................47
6 — Où va le Nunavut?............................................49
6.1 Le contexte planétaire ......................................49
6.2 Perspectives canadiennes ..................................50
6.3 Perspectives du Nunavut ..................................51
6.3.1 Méthode ..................................................51
6.3.2 Population................................................52
6.3.3 Projets d’exploitation minière ....................52
7.2 Questions essentielles à l’esquisse de l’avenir
économique du Nunavut ........................................60
7.2.1 Quelles sont les valeurs primordiales
des Nunavummiut? ............................................60
7.2.2 L’importance de mieux connaître
le Nunavut........................................................61
7.2.3 L’importance de l’éducation et du
développement des compétences ........................63
7.2.4 L’impact de l’ARTN sur le développement
économique ......................................................64
6.3.4 Le développement de l’industrie
du tourisme ......................................................54
7.2.5 Le rôle du gouvernement fédéral ................65
6.3.5 Le gouvernement ......................................54
7.2.7 La définition d’objectifs réalistes ................66
6.3.6 L’expansion de l’économie traditionnelle ......56
7.3 Conclusion ......................................................66
7.2.6 La nécessité de collaborer ..........................65
Résumé
Le 1er avril 1999, la création officielle du Nunavut venait
transformer à jamais le visage du Canada. Le Nunavut, dont
le nom signifie « notre terre » en inuktitut, est le fruit de
plus de trente années de planification et de négociations
de la part des Inuit de l’Est et de la région centrale de
l’Arctique canadien. L’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut (ARTN), conclu en 1993, comportait un
accord politique régissant la création dudit territoire et la
reconnaissance du droit des Inuit à l’autodétermination.
C’est dans ce contexte que les Inuit, soit 85 p. 100 de
la population du territoire, ont opté pour un modèle
de gouvernement populaire autonome, représentant tous
les citoyens du Nunavut, qu’ils soient ou non inuits.
de transport et de communication, les stocks de logements, les hôpitaux, etc.;
Le capital humain : comprend l’activité de la maind’œuvre, mais également, au sens plus large, les actifs
d’une société sur le plan de l’alphabétisation et de l’éducation, des compétences et des connaissances ainsi que
l’état de santé et le bien-être général de la population;
Le capital naturel : soit les matières premières à la base
de l’activité économique qui comprennent la terre, les
ressources fauniques, minérales ou énergétiques, les
fibres ainsi que le savoir dérivé de ce capital;
Le capital social et organisationnel : comprend le milieu
d’interaction des actifs naturels, humains et physiques
contribuant à la création des richesses. Ce capital réunit
les principaux secteurs et participants à la création des
richesses (le gouvernement, l’entreprise privée et les
organisations ou sociétés indépendantes), le cadre
d’élaboration des politiques, la sécurité publique ainsi
que la confiance entre les divers intervenants.
Le gouvernement du Nunavut, la Nunavut Tunngavik Inc.
ainsi que le ministère des Affaires indiennes et du Nord
canadien se sont engagés à appuyer conjointement le
développement durable du Nunavut et, d’un commun
accord, ont reconnu la nécessité d’étudier les perspectives
économiques du nouveau territoire pour mener à bien leur
tâche. Les services du Conference Board du Canada ont donc
été retenus pour qu’il examine l’état de l’économie mixte
actuelle du Nunavut (tant l’économie de subsistance1 que
l’économie basée sur les salaires), et évalue les perspectives
économiques à long terme. Cette étude doit s’accompagner
de prévisions économiques sur une période de vingt ans et
d’une énumération des questions structurelles sous-jacentes
au rendement économique à long terme.
Pour atteindre leurs objectifs de développement et
répondre aux besoins grandissants en biens et services
d’une population qui ne cesse de croître et qui consomme
de plus en plus, les sociétés doivent veiller à leur croissance économique, laquelle passe forcément par les
quatre facteurs mentionnés précédemment. Les systèmes
économiques traditionnels, dits de subsistance, ne peuvent
répondre seuls à l’augmentation de la demande de biens et
de services, produits de l’économie industrielle. L’activité
économique de subsistance peut néanmoins contribuer de
manière importante à l’économie générale et jouer un rôle
fondamental dans la vie sociale et culturelle d’une société.
L’économie de subsistance peut, par exemple, offrir un
moyen essentiel à la population en général, mais aux
Pour cette étude, nous avons adopté une approche globale
en commençant par un aperçu théorique des conditions
nécessaires à la croissance économique dans le contexte
d’une économie de subsistance. La création de richesses,
ou croissance économique, repose sur quatre facteurs clés :
Le capital physique : désigne l’infrastructure nécessaire au
maintien de la production économique, soit les systèmes
i
Le Conference Board du Canada
jeunes en particulier, d’accéder à des rôles productifs dans
la société et donc de prendre confiance en leurs moyens.
Le développement du capital humain qui en découle peut
renforcer les activités économiques futures.
navigation, de sécurité, de chasse et de pêche auprès
de sa famille et des aînés. Il sera essentiel de veiller
au maintien de cet aspect important de la vie sociale
et économique.
LES QUATRE FACTEURS DE CRÉATION DE RICHESSES
AU NUNAVUT
Le capital naturel
Les ressources naturelles sont à la base de l’économie
mixte du Nunavut et du mode de vie de la plupart des
Nunavummiut. Il est donc important que le Nunavut ait
une connaissance approfondie de son capital naturel et
que cette connaissance s’étende au Qaujimajatuqangit
inuit3 et s’en inspire. Toutefois, d’importantes lacunes
dans le domaine des sciences de la terre, de la faune et
des pêcheries rendent impossible une évaluation exacte
des richesses fauniques et des ressources non renouvelables du Nunavut. Bien que l’on procède actuellement
à la collecte de données relatives aux actifs naturels du
Nunavut, l’effort devra être plus soutenu et plus poussé.
Le Conference Board du Canada est conscient du fait
qu’une stratégie de développement économique pour le
Nunavut devra tenir compte des quatre facteurs déterminants de la création de richesses. Les observations suivantes
sont tirées de l’évaluation de chacun de ces facteurs.
Le capital physique
Dans son état actuel, l’infrastructure du Nunavut fait
considérablement entrave au développement social et
économique du territoire. Il est donc important d’examiner
comment le Nunavut devra renforcer son infrastructure
pour qu’elle réponde aux besoins grandissants d’une
importante population de jeunes et d’un nombre croissant
de personnes âgées. Les secteurs qui nécessitent une
attention particulière sont : le secteur du logement et
des locaux commerciaux, les systèmes de traitement et
de gestion des déchets et des eaux usées, les réseaux
de transport et de télécommunication à prix abordable
et les garderies.
Le capital social et organisationnel
L’Accord de 1993 sur les revendications territoriales du
Nunavut (ARTN) joue un rôle primordial dans l’organisation et la répartition des actifs du territoire. Il comporte
de nombreuses dispositions visant le développement
économique telles l’embauche proportionnelle d’Inuit dans
les administrations publiques territoriale, municipale et
fédérale (lorsque l’employeur est le Conseil du Trésor), des
politiques publiques de passation de marchés favorisant
l’entreprise inuite, l’obligation de conclure des Ententes
sur les répercussions et les avantages pour les Inuit (ERAI)
pour tous les projets de mise en valeur importants et l’octroi
d’un plus grand pouvoir sur les ressources naturelles et
leur exploitation. Le Qaujimajatuqangit inuit (QI) joue
un rôle de premier plan en guidant la création et la répartition des richesses au Nunavut, surtout dans le cadre
de l’économie de subsistance, mais aussi dans celui de
l’économie basée sur les salaires.
Le capital humain
La population du Nunavut grossit rapidement. De 1991
à 1996, le taux de croissance démographique a été trois
fois plus élevé au Nunavut qu’au Canada. La population du
Nunavut est également la plus jeune à l’échelle nationale.
Environ 60 p. 100 des habitants sont âgés de moins de
25 ans. Le niveau de scolarisation au Nunavut s’est nettement amélioré, mais il n’en demeure pas moins faible
par rapport aux taux de scolarisation observés ailleurs au
pays. Plus de la moitié de la population n’a pas terminé
ses études secondaires. Un ménage moyen du Nunavut
gagne un revenu inférieur à un ménage comparable des
autres régions du Nord ou du reste du Canada.
L’activité économique du Nunavut repose en grande partie
sur quatre secteurs ou intervenants qui sont le secteur
public, les organismes inuits constitués en personnes
morales, le secteur privé et les institutions gouvernementales. Le gouvernement fédéral et celui du Nunavut proposent tous deux d’établir un certain nombre d’initiatives
de développement économique pour aider les personnes,
les entreprises et les petites organisations, de même que
les collectivités. La Nunavut Tunngavik Inc. (NTI), chargée
de surveiller le respect des obligations inuites aux termes
de l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut,
gère aussi de nombreux programmes de développement
économique à l’intention des Inuit et fournit un appui à
plusieurs organismes inuits qui participent à des projets de
développement économique. Au Nunavut, le secteur privé
On constate également un écart considérable entre l’état
de santé des Nunavummiut2 et celui du reste de la population canadienne. L’espérance de vie du Nunavummiut de
sexe masculin est inférieure d’environ sept ans à celle du
Canadien moyen et, chez les femmes, la différence atteint
presque dix ans. En outre, le taux de décès prématurés
(mesuré en années potentielles de vie perdue) est de deux
fois supérieur au taux national moyen. Enfin, il est
impératif que les Inuit continuent de maîtriser les
habiletés nécessaires à leur participation à l’économie de
subsistance. L’Inuk acquiert ces habiletés en matière de
Le Conference Board du Canada
ii
contribution au tissu social inuit. Or, cette contribution
est difficilement calculable. Néanmoins, son apport à
l’avancement du capital humain inuit est fondamental
(p. ex., l’enfant apprend à chasser ou à coudre auprès
de ses parents ou grands-parents).
n’est pas très développé et dépend fortement du secteur
public. Les institutions gouvernementales, chargées de la
gestion de tous les aspects touchant le développement des
ressources fauniques et des terres du Nunavut, jouent par
le fait même un rôle déterminant dans l’expansion de l’activité économique.
Aperçu de l’économie basée sur les salaires au Nunavut
APERÇU DE L’ÉCONOMIE MIXTE DU NUNAVUT
Mentionnons d’abord que Statistique Canada ne dispose de
données sur l’économie basée sur les salaires au Nunavut
que depuis 1999. Cette année-là, le PIB réel du Nunavut
basé sur les dépenses a été de 682 millions de dollars.
Bien qu’il faille procéder avec prudence à l’analyse de l’économie du territoire à partir d’un seul point de données,
les chiffres mettent en évidence le lien de dépendance
étroit entre l’activité économique du Nunavut et le secteur
public. En termes réels, les dépenses publiques globales
en biens, en services et en investissements ont dépassé
55 p. 100 de la demande intérieure globale par rapport à
22 p. 100 environ à l’échelle canadienne. La même année,
le secteur public a employé 4 006 personnes, en moyenne,
ce qui représente près de la moitié des emplois du territoire.
Le système économique mixte particulier du Nunavut
combine l’économie de subsistance et l’économie basée sur
les salaires. Ces deux économies ne sont pas incompatibles
et, pour la plupart des Nunavummmiut, la question n’est
pas de choisir entre l’une ou l’autre, mais plutôt de trouver un juste équilibre entre les deux. Comme dans les
autres régions du Nord, le revenu d’un ménage provient
souvent de diverses sources comme les activités de subsistance, la production de biens (p. ex. la vente de peaux
de phoque), un emploi salarié et des paiements de
transfert gouvernementaux.
L’économie de subsistance s’étend au-delà de la simple
activité économique au sens strict. Elle fait partie intégrante des usages culturels et sociaux propres au mode
de vie inuit. Elle suppose le partage des ressources en
fonction de rôles et de responsabilités établis selon le
sexe, l’âge, l’expérience et l’affiliation hiérarchique.
La comparaison de la demande intérieure réelle avec la
production révèle également un autre aspect particulier
à l’économie du Nunavut. En 1999, la demande intérieure
réelle s’élevait à 967 millions de dollars alors que le PIB
réel était de 682 millions. Ces chiffres indiquent que la
population consomme une quantité beaucoup plus grande
de biens et de services qu’elle n’en produit, ce qui occasionne un déficit commercial de 195 millions de dollars
ou de 6 851 dollars par habitant. Si le territoire peut
se permettre ce déficit sans qu’il ait de ramifications
économiques, c’est grâce aux flux monétaires importants
en provenance du gouvernement fédéral, sous la forme
de transferts de fonds et de salaires directs. En outre,
l’expansion de l’administration publique a favorisé l’essor
du secteur local d’approvisionnement en services, la
création d’emplois et la circulation monétaire qui faisait
largement défaut. Cependant, à plus long terme, on a lieu
de s’inquiéter de l’importance relative de ces transferts
de fonds compte tenu de la croissance démographique.
Inévitablement, après l’essor initial, le secteur public va
se stabiliser et, comme l’économie repose dans une très
grande mesure sur ce secteur, la croissance économique
générale s’en trouvera également freinée. D’autre part,
la population continuera d’augmenter de sorte que la
croissance économique par habitant sera moindre.
Estimation de la taille de l’économie de subsistance
La méthode adoptée par Statistique Canada afin d’estimer
la valeur de la production ou du produit intérieur brut
(PIB) se limite généralement à la valeur des biens et des
services produits et échangés contre des valeurs en espèce,
dans l’économie basée sur les salaires. Par conséquent,
l’estimation de la taille de l’économie de subsistance selon
ces critères et en termes comparables est extrêmement
difficile. Bien que les chiffres doivent être utilisés avec
circonspection, nos principaux informateurs s’entendent
pour situer la valeur de l’économie de subsistance du
Nunavut aux environs de 40 à 60 millions de dollars. Cette
fourchette comprend 30 millions de dollars attribués à
l’activité économique que représente le traitement et la
transformation des aliments (valeur du coût de remplacement). Il est difficile d’aller plus loin dans nos estimations
et d’apposer une valeur à certaines activités spécifiques
comme l’artisanat, car elles sont rarement comptabilisées
officiellement. (Ces chiffres ne tiennent pas compte de
la valeur non consignée des services informels de garde
d’enfants, du travail bénévole ou des biens partagés.)
En 1999, le Nunavummit Kiglisiniartiit (bureau de la
statistique du Nunavut) estimait le taux de chômage au
Nunavut, basé sur une population active de 10 904 habitants, à environ 20,7 p. 100. Cette estimation est établie
Il importe par ailleurs, dans l’évaluation de l’économie de
subsistance du Nunavut, de prendre en considération sa
iii
Le Conference Board du Canada
Le Conference Board du Canada a fait des prévisions
économiques sur vingt ans pour le Nunavut. Le taux
d’accroissement annuel composé du PIB réel devrait
s’établir en moyenne à 2,42 p. 100 entre 1999 et 2020.
Le Nunavut connaîtra sa croissance la plus rapide durant
les dix premières années de son existence grâce aux activités entourant sa création. Les secteurs de l’exploitation
minière, du tourisme et de la pêche présentent le meilleur
potentiel. Nos projections sont fondées sur diverses suppositions, notamment la croissance démographique et l’expansion de la main-d’œuvre, l’augmentation des transferts
fédéraux et une évaluation par secteur de la plausibilité
d’une activité économique fondée sur les salaires. Nos
prévisions dépendent aussi du développement des quatre
formes de capital du Nunavut (mais surtout du capital
humain par, entre autres, l’éducation des jeunes et
l’amélioration de l’état de santé général) et de l’infrastructure du Nunavut.
selon la définition nationale donnée au terme « chômeur »
qui n’inclut que les personnes ayant activement cherché
un emploi dans le mois précédant le sondage. En réalité,
cette définition ne convient pas parfaitement au Nunavut,
car souvent les membres des collectivités dont l’économie
basée sur les salaires n’est pas très développée ne
recherchent pas d’emplois de manière active. Ils savent
en effet que, lorsqu’un emploi devient disponible, c’est
affiché au magasin général ou annoncé sur les ondes de
la radio communautaire ou les deux. Lorsque la définition
employée inclut les personnes pour qui « aucune occasion
d’emploi » ne s’est présentée et qu’elle englobe les
chômeurs ayant mentionné ne pas avoir activement
recherché d’emploi au cours du mois précédent parce qu’ils
croyaient qu’il n’y avait effectivement aucune ouverture,
le taux de chômage grimpe alors à 27,2 p. 100 pour une
population active de 11 886 habitants.
Le tableau s’assombrit encore davantage quand on pense
à l’écart qui existe au Nunavut entre le taux de chômage
chez les Inuit et chez les populations actives d’autres
origines. En 1999, selon le critère « aucune occasion
d’emploi », le taux de chômage chez les Inuit s’élevait
à 35,8 p. 100 par rapport à 3,3 p. 100 dans le reste de la
population active du Nunavut. Chez les Inuit de 15 à 24
ans, le taux de chômage annuel s’élevait à 48,1 p. 100. Ce
calcul fait exclusion de ceux qui étaient encore aux études
ou de ceux qui étaient occupés à plein temps aux activités
de subsistance et qui ne cherchaient pas d’emploi salarié.
La jeunesse du Nunavut a manifestement besoin d’emplois,
mais pour en obtenir, elle doit acquérir les compétences
qui assureront son succès professionnel. Cela ramène à
la question du capital humain et de la composition de
l’économie basée sur les salaires au Nunavut, où dominent
les emplois spécialisés au sein du secteur public. Les
jeunes doivent pouvoir bénéficier de la formation nécessaire à l’acquisition des compétences qui leur permettront
d’accéder à des postes de fonctionnaires, au niveau administratif ou professionnel.
En raison du manque de données à ce sujet, il est
beaucoup plus difficile d’établir des prévisions pour
l’économie de subsistance. L’accroissement de ce type
d’activité économique sera certainement influencé par
la richesse des ressources naturelles du Nunavut (c’està-dire l’importance des populations animales et l’abondance de la stéatite ou pierre à sculpter), la croissance
démographique ainsi que les compétences et valeurs
des jeunes et leur intérêt pour les activités reliées aux
ressources naturelles. La croissance de l’économie de
subsistance et de l’économie basée sur les salaires
du Nunavut est interdépendante. Par exemple, la
croissance du secteur touristique dépendra en partie
de la capacité du Nunavut de commercialiser son mode
de vie traditionnel.
QUESTIONS ESSENTIELLES À L’ESQUISSE DE L’AVENIR
ÉCONOMIQUE DU NUNAVUT
Le Conference Board du Canada a estimé nécessaire de
cerner les grandes questions qui auront un impact sur les
quatre formes de capital du Nunavut et le développement
de ses richesses. En premier lieu, les valeurs de la société
inuite continueront d’influencer fortement les choix en
matière de politiques et d’orientation économique au
Nunavut. Ces valeurs ont déjà grandement guidé le
développement du Nunavut jusqu’à présent. Parmi elles,
on retrouve :
• la préférence pour une approche collective du développement socio-économique : les Nunavummiut croient
fermement que les possibilités de développement
économique doivent être partagées par toutes
les collectivités, comme en témoigne la politique
du Nunavut en faveur de la décentralisation;
Dans notre analyse descriptive de l’économie basée sur
les salaires du Nunavut par secteur, nous nous sommes
servis en partie des données du PIB fournies par
Statistique Canada pour 1999. Notre analyse a porté
sur les secteurs de la chasse et de la pêche, de l’exploitation minière, de la fabrication (artisanat et traitement
et transformation des aliments), de la construction et
le secteur public. En 1999, c’est le secteur public et les
services connexes qui ont le plus contribué au PIB du
Nunavut. Bien souvent, la croissance de ces secteurs
a été limitée jusqu’à présent par les lacunes du capital
physique et humain (infrastructure insuffisante et absence
de main-d’œuvre spécialisée).
Le Conference Board du Canada
iv
Nunavut et les objectifs que ce territoire s’est fixés, on
comprend aisément l’importance d’en développer le capital
humain (c’est-à-dire une plus grande autonomie et une
fonction publique plus représentative de la population
inuite). Il sera indispensable pour la main-d’œuvre du
Nunavut d’acquérir les compétences nécessaires (p. ex.
gestion de l’information, adaptabilité et capacité de travailler avec d’autres) à une pleine participation au marché
du travail d’aujourd’hui.
• la promotion de l’autonomie : les Inuit souhaitent
exercer un plus grand contrôle politique et économique
sur le Nunavut et son environnement;
• le Qaujimajatuqangit inuit (QI) : on reconnaît et apprécie le savoir des Inuit et on l’intègre aux autres sources
de connaissance. Le processus décisionnel passe par la
consultation et l’établissement d’un consensus;
• le développement économique doit se faire principalement à l’échelle communautaire;
• l’activité économique de subsistance est un aspect
important du mode de vie inuit qui doit être soutenu :
rien ne permet de supposer qu’on accorde une valeur
moindre aux activités de subsistance qu’aux activités
rattachées à l’économie basée sur les salaires;
• le développement durable : le développement
économique doit respecter les pratiques du développement durable, voulant qu’on accorde une importance
égale au développement du capital humain et du
capital naturel.
En quatrième lieu, la mise en œuvre de l’Accord sur les
revendications territoriales du Nunavut aura également
une incidence sur l’activité économique du territoire.
Compte tenu du rôle principal que joue le gouvernement
dans l’économie, les articles 23 et 24 de l’ARTN visant
une plus forte présence inuite dans l’appareil gouvernemental, tant dans le processus décisionnel qu’au plan
opérationnel, peuvent contribuer largement au développement économique du Nunavut. Ajoutons que l’application
de l’Accord exige un engagement soutenu et continu,
surtout qu’il faut s’attendre à ce que certaines dispositions
prennent du temps.
Il faudra aussi vérifier dans quelle mesure la jeunesse
inuite accorde la même importance à ces valeurs et établir
quel équilibre les Nunavummiut désirent atteindre entre
l’économie de subsistance et l’économie basée sur les
salaires.
En cinquième lieu vient la nécessité de préciser le rôle de
chacun des principaux intervenants dans le développement
économique du Nunavut. Les stratégies fédérales d’aide
au développement économique doivent tenir compte du
caractère unique du Nunavut, de ses différences démographiques, de son capital physique restreint et de son
vaste potentiel encore inexploité. Les programmes de
développement économique dont le financement dépend
du nombre d’habitants ou dont le soutien va aux industries déjà établies ne conviennent pas au niveau de
développement actuel du Nunavut.
En deuxième lieu, il faudra enrichir notre connaissance du
Nunavut en encourageant une meilleure compréhension :
• de la situation sociale et de l’état de santé des
Nunavummiut;
• du capital naturel du Nunavut, y compris de ses
particularités géoscientifiques;
• de l’économie de subsistance et de son fonctionnement;
• de l’économie basée sur les salaires au Nunavut.
On ne peut examiner le rôle du gouvernement fédéral
au Nunavut sans se pencher sur les transferts de fonds
octroyés à ce territoire ou sans tenir compte des autres
participants au développement économique. Il est indispensable d’adopter une approche axée sur la coopération
entre tous les intervenants principaux, y compris le
secteur privé, et de viser des objectifs précis d’intervention et de dépassement des intérêts de chacun. Tout le
monde s’entend pour dire que l’effort de collaboration
entre les dépositaires d’enjeux pourrait être plus poussé.
Nombre des problèmes sont attribuables au manque
d’information sur le Nunavut, à la faible population
et aux difficultés que présente la collecte de données
économiques sur les activités associées aux ressources
naturelles. Certaines mesures ont déjà été prises pour
combler ces lacunes, mais il faudra s’efforcer de recueillir
aussi et de façon continue des données spécifiques au
Nunavut et s’assurer que ces données sont accessibles à
tous (p. ex. par une diffusion sur Internet). Pour encourager les investissements tant publics que privés, il faudra
arriver à une meilleure compréhension de l’état et du
potentiel des quatre formes de capital du Nunavut.
La recherche et l’obtention des fonds nécessaires au
financement des investissements qui permettront d’assurer
la prospérité de l’économie globale du Nunavut constituent l’un des grands défis auquel le gouvernement
du territoire doit faire face. Il peut être utile de réévaluer
les priorités en matière de dépenses, mais Le Conference
Board du Canada estime que cette seule mesure ne suffira
En troisième lieu, le développement du capital humain du
Nunavut, en particulier dans le domaine de l’éducation et
de l’acquisition de compétences, aura des répercussions
significatives sur la croissance économique du Nunavut.
Si l’on pense au jeune âge relatif de la population du
v
Le Conference Board du Canada
pas à assurer le financement adéquat des investissements.
Ainsi, il serait souhaitable d’accorder une attention particulière à l’obtention et à la création de revenus supplémentaires à court et à moyen terme (p. ex. complément de
fonds fédéraux, recherche de nouvelles sources de revenu,
etc.). D’une manière ou d’une autre, si l’on ne comble pas
les besoins du territoire en capital humain et physique, on
met en péril la réalisation de nos prévisions économiques
pour ne pas dire l’avenir du Nunavut.
cet objectif est intégré aux objectifs en matière d’éducation, de formation professionnelle et d’acquisition de compétences et dans la mesure où on arrivera à faire accepter
la fonction publique parmi les choix de carrière désirables
pour les Inuit, il sera possible de surmonter le problème.
La création du Nunavut a suscité un intérêt mondial et
nombreux sont ceux qui en suivent de près l’évolution.
Les attentes sont élevées, tant au Nunavut qu’ailleurs.
Mais il est clair que le Nunavut devra d’abord renforcer
ses bases et s’assurer d’avoir tous les niveaux de capital
nécessaires pour favoriser son développement économique.
Nos prévisions économiques, portant sur les vingt
prochaines années, demeurent favorables, à condition
qu’on renforce la base. De toute façon, en bout de ligne,
il en tiendra à la population du Nunavut de décider ce
qui représente pour elle une qualité de vie souhaitable
et durable, et de déterminer jusqu’où elle est prête à
aller dans le domaine du développement pour parvenir
à ses fins.
Les attentes qui accompagnent la création d’un nouvel
État sont toujours très élevées et le Nunavut ne fait pas
exception à la règle. Il importe donc de fixer des objectifs
réalisables et de ré-examiner les objectifs existants. Dans
cet ordre d’idées, certains des objectifs les plus ambitieux
que s’est fixé le Nunavut pourraient prendre encore un
certain temps. Par exemple, il sera probablement difficile
d’arriver à réunir un effectif inuit représentatif dans la
fonction publique du Nunavut à court et à moyen terme.
Cependant, en raison du jeune âge de la population et si
1 L’économie de subsistance comprend toute l’activité économique rattachée aux
ressources naturelles qui n’est pas rémunérée en espèces. Figurent dans cette
catégorie les activités de chasse, de pêche et de piégeage dont les produits servent
aux ménages ou au troc. Aux fins de cette étude, la vente enregistrée de poisson ou
de peaux de phoque destinés à l’industrie de la transformation, même si ces produits
sont dérivés des ressources naturelles, est exclue de l’économie de subsistance dans
la mesure où elle s’accompagne de transactions numéraires et est donc comptabilisée par Statistique Canada en tant qu’activité économique. Si la chasse et la pêche
sont les principales composantes de l’économie de subsistance, celle-ci s’étend
aussi aux services de garde d’enfants, à la confection de vêtements et à l’artisanat,
en autant qu’ils ne sont pas vendus.
Le Conference Board du Canada
2 « Nunavummiut » signifie tout citoyen du Nunavut, d’origine inuite ou autre.
3 Le Qaujimajatuqangit inuit est une philosophie ou un mode de vie et de pensée qui
réunit un ensemble d’éléments rattachés à la transmission du savoir, des valeurs et
des enseignements traditionnels aux jeunes par les aînés. C’est aussi un système de
règles et de valeurs ainsi qu’un mécanisme de consultation préalable aux décisions
qui touchent la collectivité, en plus d’une compréhension des relations familiales
complexes et de la terminologie inuktitut s’y rapportant.
vi
1—Introduction
[traduction] La création du Nunavut n’est pas qu’une
chance d’arriver à l’autodétermination, mais aussi une
occasion de développer une économie correspondant aux
valeurs et ressources des Inuit et de communiquer ainsi au
monde entier le sens véritable du développement durable1.
1.1
basée sur les salaires que l’économie rattachée aux
ressources naturelles ou « économie de subsistance » (voir
la définition de l’économie de subsistance dans l’encadré).
Qu’est-ce que l’« économie de subsistance »?
HISTORIQUE
Le 1er avril 1999, la création officielle du Nunavut venait
transformer à jamais le visage du Canada. Le Nunavut,
« notre terre » en inuktitut, est le fruit de plus de trente
années de planification et de négociations de la part
des Inuit de l’Est et de la région centrale de l’Arctique
canadien (voir la carte du Nunavut à la page suivante).
L’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut
(ARTN) conclu en 1993 comportait un accord politique
régissant la création dudit territoire et la reconnaissance
du droit des Inuit à l’autodétermination. C’est dans ce
contexte que les Inuit, soit 85 p. 100 de la population
du territoire, ont opté pour un modèle de gouvernement
populaire autonome, représentant tous les citoyens du
Nunavut, qu’ils soient ou non Inuit.
Au départ, le gouvernement du Nunavut a consacré
plusieurs mois à son développement organisationnel et
à la détermination de ses priorités. Ce nouveau gouvernement ainsi que les principaux dépositaires des enjeux
tiennent à établir une stratégie économique durable et
favorable au progrès socio-économique de sa population.
Il leur importe donc de déterminer dans quelle direction
axer cette stratégie de développement économique.
Because
Le Conference Board du Canada sait que, pour un grand
they cannot
nombre de Nunavummiut , la stratégie économique
2
adoptée devra intégrer certains aspects fondamentaux.
Premièrement, il est essentiel qu’elle reflète pleinement
l’économie mixte du Nunavut, c’est-à-dire tant l’économie
1
Il n’est pas facile de trouver un terme acceptable pour définir
l’économie de troc ou de subsistance. Certains aiment mieux les
termes « économie non structurée » ou « système traditionnel »
alors que d’autres estiment que ces termes ont une connotation
négative. Aux fins de ce rapport, Le Conference Board du Canada
a adopté l’expression « économie de subsistance ». Celle-ci comprend toute activité économique rattachée aux ressources naturelles
qui n’est pas rémunérée en espèces. Ce type d’économie compte,
par exemple, les activités de chasse, de pêche et de piégeage dont
les produits sont destinés à l’usage personnel ou au troc. Dans ce
contexte, la vente enregistrée de poisson ou de peaux de phoque
destinés à l’industrie de la transformation, bien que provenant de
ressources naturelles, ne s’inscrit pas dans l’économie de subsistance lorsqu’elle s’accompagne d’une forme de revenu et fait partie
des activités économiques mentionnées dans les classifications
types de Statistique Canada. Bien que l’économie de subsistance
repose en grande partie sur les activités de chasse et de pêche,
peuvent également y figurer la garde d’enfants ainsi que la production d’artisanat et la confection de vêtements, pourvu que ces
produits et services ne soient pas vendus. Le besoin de déterminer
et de définir quelles activités relèvent de l’économie de subsistance
est fondé sur le fait qu’une importante part de l’activité économique
du Nunavut n’est pas rémunérée et, conséquemment, prise en
considération par les dispositifs réguliers de mesure économique.
Dans le cas du Nunavut, l’expression « économie mixte » désigne
la combinaison de l’économie se rattachant aux ressources naturelles
et de l’économie basée sur les salaires. À la lecture du rapport, il
faudra éviter de confondre « économie mixte » selon cette définition
et « économie mixte » au sens général de régimes de « propriété
privée » et de « propriété publique ».
Le Conference Board du Canada
et sociaux favorables à l’épanouissement de la jeunesse
ainsi qu’à la réalisation de ses rêves et de ses objectifs.
Sur les plans social et culturel, les activités d’exploitation
de produits de consommation (p. ex. omble de l’Arctique,
caribou, narval) tiennent toujours un rôle de premier plan
dans le mode de vie des Inuit. Les principaux intervenants
du Nunavut estiment donc qu’il est primordial d’accorder
une plus grande attention à l’économie de subsistance et
de mesurer avec plus de précision la taille de cette
économie et son apport à l’économie générale.
Nombre d’autres facteurs entrent en jeu dans le cadre de
l’élaboration d’une stratégie de développement économique
pour le Nunavut, notamment sa population de moins de
30 000 habitants et son faible effectif économique. Par
ailleurs, bon nombre de collectivités constituées n’ont pas
été établies à proximité de sources d’emplois rémunérés
(p. ex., mines ou usines de traitement du poisson) et
conséquemment éprouvent de la difficulté à jeter les
assises économiques créatrices d’emplois qui favoriseraient
la participation à la nouvelle économie de marché en plein
essor. En 1996, quand le Nunavut faisait encore partie des
Territoires du Nord-Ouest (T.N.-O.), sa population représentait 39 p. 100 de l’ensemble de la population des
T.N.-O., mais ne contribuait qu’à 16 p. 100 de leur revenu
global. Ajoutons aussi que l’économie du Nunavut est plus
Deuxièmement, la stratégie de développement économique
du Nunavut devra s’inscrire dans le cadre du développement durable. Les ressources naturelles doivent être utilisées avec sagesse et les avantages économiques qu’elles
offrent, partagés de manière équitable. La participation
tant à l’économie basée sur les salaires qu’à l’économie
de subsistance doit reposer sur une saine gestion de
l’environnement si l’on vise le développement durable.
Troisièmement, il est vital d’intégrer
pleinement à cette stratégie le vaste
savoir inuit, le Qaujimajatuqangit inuit
(QI), et de reconnaître ce qu’il peut
apporter à l’élaboration d’une politique de
développement socio-économique durable
pour le Nunavut. (Voir la section 4.4.4 pour
plus de renseignements au sujet du QI.)
Quatrièmement, la stratégie de
développement économique devra présenter des avantages pour toutes les collectivités du Nunavut. Il a été établi que le
partage des richesses entre les 25 collectivités constituées du Nunavut serait un
élément central du plan de décentralisation des activités gouvernementales.
Nunavut
Axel
Heiberg
Island
Le Conference Board du Canada
Groenland
Grise
Fiord
Mer de Beaufort
Baie de Baffin
Bathurst
Island
Cornwallis
Island
Devon
Island
Resolute
Parry Channel
re
ukon
île du
Prince de
Galles
Holman
Lancaster Sound
Somerset
Island
Bylot
Island
Pond Inlet
Arctic
Nanisivik
Bay
Clyde River
A
le
rc
Ce
île de Victoria
Boothia
Peninsula
Cambridge
Bay
Coronation
Gulf
Détroit
de Dav
Hall
Prince
Beach Charles
Gjoa Haven
Amadjuak
Lake
Repulse Bay
Foxe
Peninsula
Wager
Bay
Southampton
Island
Thelon River
Rankin Inlet
ColombieBritannique
Chesterfield
Inlet
Marble Island
Détroit
d'Hudson
Coats
Island
Québec
Arviat
Alberta
Saskatchewan
Baie d'Hudson
Manitoba
Belcher
Islands
Échelle
100
200
300
400
500
600
700
800
Sanikiluaq
900 1000
Kilometres
Ontario
2
Frobisher
Bay
Kimmirut
Whale Cove
Kazan
River
Iqaluit
Cape Dorset
Coral
Harbour
Baker Lake
Yellowknife
Cumberland
Sound
Foxe Basin
Bathurst Inlet
Back River
Pangnirtung
Nettilling
Lake
Island
Melville
Peninsula
Qikiqtarjuaq
île de
Baffin
Igloolik
King Taloyoak
William
Island Kugaaruk
Queen Maud
Gulf
Umingmaktok
Coppermine
River
0
Sixièmement et dernièrement, il ne faut
pas négliger les besoins de la très jeune
population du Nunavut. Ce territoire,
dont 60 p. 100 des habitants sont âgés
de moins de 25 ans, compte la plus jeune
population au Canada. Il sera donc
impératif de créer des milieux économiques
île
d'Ellesmere
Océan arctique
Kugluktuk
Cinquièmement, si l’on veut que la
stratégie de développement économique
du Nunavut favorise une plus grande
autonomie, il faudra encourager une plus
grande participation des Nunavummiut à
l’activité économique et s’assurer que la
main-d’œuvre et l’expertise du sud du
Canada ne compromettent pas l’objectif
d’autonomie du Nunavut.
N
Lake
Hazen
Baie
d'Ungava
Labra
sensible aux variations de la demande mondiale en produits
et services que celle de ses voisins du Sud en raison de
sa très faible diversification et de sa forte dépendance
à l’égard des ressources naturelles. Enfin, seulement
9 p. 100 des revenus du gouvernement du Nunavut
proviennent de sources autres que les transferts fédéraux.
Cela signifie que les dépenses gouvernementales en
matière de programmes sont étroitement liées à l’évolution
de ces transferts qui, par ailleurs, sont appelés à varier
selon la croissance démographique et l’augmentation des
dépenses provinciales.
économique correspondant à la situation du Nunavut sera
fortement influencé par les valeurs de la population et par
le sens qu’elle accorde aux termes « qualité de vie élevée ».
Quelles sont les composantes d’une qualité de vie élevée
pour les Nunavummiut? Quel équilibre les Nunavummiut
désirent-ils atteindre entre l’économie de subsistance et
l’économie basée sur les salaires? Quels choix et quels
compromis les résidants du Nunavut sont-ils disposés à
accepter? En définitive, ce sont les réponses à ces questions
qui aiguilleront le développement de l’économie mixte au
Nunavut.
Le Nunavut doit également faire face à d’énormes contraintes sur le plan de son infrastructure. Contrairement
aux autres régions du Canada, il ne dispose d’aucune infrastructure routière le reliant aux marchés extérieurs. De
plus, la saison de navigation maritime est de courte durée.
L’infrastructure de base, entre autres le stock de logements
ainsi que les services de gestion des déchets et des eaux
usées, nécessaire à la satisfaction des besoins d’une population en croissance rapide est très peu développée. La
pénurie de logements entraîne de sérieuses répercussions
sociales et économiques et cette question figure parmi les
priorités des dirigeants de tous les secteurs.
1.2
Enfin, sur le plan des ressources humaines, le Nunavut ne
compte qu’un nombre restreint de travailleurs spécialisés
pouvant contribuer à l’économie basée sur les salaires.
Le faible niveau de scolarisation ou d’éducation formelle
(p. ex. diplôme du cycle secondaire) d’un grand nombre
de Nunavummiut soulève beaucoup d’inquiétude quant
aux perspectives d’avenir. Bien qu’actuellement, le niveau
d’éducation formelle soit à la hausse et que la situation en
ce sens soit en voie d’amélioration, il n’en demeure pas
moins que le niveau de scolarisation est faible par rapport
à celui des autres provinces et territoires. Parallèlement,
les Nunavummiut sont soucieux de sauvegarder les connaissances et les habiletés essentielles aux activités rattachées
aux ressources naturelles.
Ce projet a été rendu possible grâce à la participation
financière :
• du ministère du Développement durable du Nunavut
(DDN),
• de la Nunavut Tunngavik Inc. (NTI),
• du ministère des Affaires indiennes et du Nord
canadien (MAINC).
OBJET DE CETTE ÉTUDE
Les services du Conference Board du Canada ont été retenus
en vue d’examiner l’état actuel de l’économie mixte du
Nunavut, composée de l’économie de subsistance et de
l’économie basée sur les salaires, et d’en évaluer les perspectives économiques à long terme, ce qui suppose, entre
autres, qu’il faut déterminer les possibilités s’offrant aux
nouvelles industries. La recherche doit être axée sur les éléments structurels sous-jacents au rendement économique à
long terme et permettre d’identifier les lacunes des données
devant servir à mesurer le rendement socio-économique.
Le projet a été mené sous la direction d’un comité de travail
comptant des représentants des trois organismes parrains.
Ce rapport se veut un outil essentiel au développement
d’une nouvelle stratégie économique qui reflétera le caractère distinctif de l’économie du Nunavut et correspondra
à ses exigences particulières. Cette stratégie devra aussi
être conforme aux principes du développement durable
de sorte que la population et l’environnement devront
constituer le pivot de la réflexion.
Il s’agit donc, pour le Nunavut, d’élaborer un plan de
développement économique durable qui prendra appui sur
l’économie de subsistance existante tout en la soutenant
et qui sera également favorable à une plus grande participation des intéressés à l’économie basée sur les salaires
dans leurs collectivités ou les environs. Cet objectif sera
réalisable à mesure que la population active augmentera
et qu’un nombre accru de Nunavummiut se joindront aux
activités relevant de l’économie mixte.
Ce rapport pourra être utilisé par les nombreux dépositaires d’enjeux dont le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux, territoriaux et municipaux, les
organisations inuites, le secteur privé et le grand public.
1.3
La « durabilité » de toute stratégie économique
reposera essentiellement sur l’apport des participants.
Conséquemment, le développement d’une stratégie
PLAN D’ENSEMBLE DU RAPPORT
Ce rapport compte sept chapitres, y compris la présente
introduction. Le deuxième chapitre fait état de l’approche
3
Le Conference Board du Canada
générale adoptée aux fins de l’étude, aspect de toute
première importance si l’on considère la vaste gamme
d’approches et de biais que peut comporter l’examen
du développement économique.
Le chapitre 5 traite de l’économie « mixte » ou « globale »
du Nunavut, c’est-à-dire de l’activité économique de subsistance (non rémunérée) et de l’activité économique basée
sur les salaires, à partir des données disponibles les
plus récentes. Ce chapitre décrit également l’économie
numéraire du Nunavut par secteur selon le système de
classification type des industries.
Le chapitre 3 donne un aperçu des théories et des concepts du développement économique, souligne quatre
facteurs essentiels à la création de richesses et au maintien de l’économie en ce XXIe siècle et fait état des questions soulevées par les économies en développement. Ce
chapitre a pour objet de familiariser le lecteur avec les
concepts de base du développement économique et de
lui faciliter la lecture et l’entendement des chapitres
subséquents.
Le chapitre 6 fait l’exposé des perspectives économiques
du Nunavut pour les vingt prochaines années en commençant par la présentation des perspectives économiques
nationales et des tendances économiques mondiales. La
discussion de l’avenir économique du Nunavut se limite
en grande partie à la croissance de l’économie basée sur
les salaires en raison du manque de données portant sur
l’économie de subsistance.
Le chapitre 4 présente un aperçu du Nunavut à la lumière
des quatre facteurs de création de richesses : le capital
physique ou l’infrastructure, le capital naturel, le capital
humain ainsi que le capital social et organisationnel. Le
cas échéant, ce chapitre propose des examens comparatifs
du Nunavut et du Canada, du Yukon, des T.N.-O. et du
Groenland en fonction des principaux indicateurs sociaux.
Le chapitre 7 situe toutes les observations et informations
dans le contexte et souligne les questions méritant une
attention particulière. On y traite également des valeurs
qui ont contribué au développement socio-économique
du Nunavut et qui continueront de l’influencer.
1 Heather Myers, « Options for Appropriate Development in Nunavut Communities »,
Études/Inuit/Studies 2000, 24(1), p. 25-40.
Le Conference Board du Canada
2 « Nunavummiut » signifie tout citoyen du Nunavut, d’origine inuite ou autre.
4
2 — Approche générale
On a parfois tendance à restreindre la détermination des
perspectives économiques à un résultat net comme la
prévision de l’accroissement du produit intérieur brut
(PIB), la fluctuation du taux de chômage ou de participation à l’économie, et la taille du capital naturel potentiel
(p. ex. gisements minéraux). Dans le cas du Nunavut, ce
type d’approche fait exclusion de toute activité économique
parallèle à l’économie basée sur les salaires et ne permet
pas de capter d’autres facteurs de croissance économique
tels le capital physique (l’infrastructure) et le capital
humain (les compétences et l’état de santé d’une population), ni de comprendre l’influence de ces facteurs sur le
développement socio-économique futur.
Le Conference Board du Canada reconnaît également l’importance des valeurs dans le cadre de l’élaboration des
politiques. Notre définition de ce qui constitue une « qualité
de vie élevée et durable » ainsi que le choix des politiques
visant l’atteinte de cet objectif sont inévitablement influencés par notre système de valeurs. Certaines sociétés,
par exemple, opteront pour une approche collective à la
réalisation de leurs objectifs alors que d’autres accorderont
davantage de poids à l’approche individuelle.
À la lumière de ces facteurs, nous avons adopté une
approche globale comportant quatre composantes, aux
fins de la détermination des prévisions économiques
du Nunavut. En premier lieu, nous dressons l’aperçu
théorique du développement économique en vue de
faciliter la lecture du document et de permettre au lecteur
de participer aux discussions subséquentes. Cet aperçu fait
état de la théorie, des principes et des facteurs essentiels
à la création de richesses et au maintien d’une économie
durable en ce XXIe siècle.
Depuis plusieurs années, Le Conference Board du Canada
fait l’évaluation du rendement et du potentiel socioéconomiques du Canada, conscient de l’interaction entre
les politiques sociales et économiques. Notre premier rapport, Performance and Potential 1996, déterminait que
notre société visait l’atteinte d’une « [traduction] qualité
de vie élevée et durable » et que la combinaison des politiques économiques et sociales devait permettre de réaliser
cet objectif1. La croissance économique d’une région
repose en effet sur l’état de la collectivité ainsi que sur la
santé et les compétences de ses membres. Parallèlement,
en l’absence d’assises économiques solides, il est impossible de soutenir les programmes de santé et les
programmes sociaux essentiels à la collectivité.
En second lieu, l’approche adoptée accorde une attention
particulière à l’économie « mixte » ou « globale » du
Nunavut. Nous avons donc examiné les indicateurs
économiques associés à l’économie basée sur les salaires
ainsi que la taille et la portée de l’économie de subsistance ou traditionnelle parallèle. Tel que le soulignent
Ross et Usher :
[traduction] Aux yeux des autorités centrales, des économistes et des planificateurs, l’économie parallèle, étant
composée de nombreuses petites unités autonomes,
demeure pratiquement invisible et ne fait donc pas
l’objet de quantification et de comptabilisation3.
La « santé » du capital naturel (un environnement sain) est
également un des éléments nécessaires à l’atteinte d’une
qualité de vie élevée et durable. Selon le rapport Rendement
et potentiel 2000 du Conference Board du Canada, tout
indique que le bon rendement au chapitre de l’environnement est un indicateur sûr du bon rendement dans
d’autres secteurs2. Les politiques économiques, sociales et
environnementales sont garantes du développement durable.
Compte tenu de son importance au Nunavut, l’économie
de subsistance a été intégrée à nos analyses chaque fois
que les données étaient disponibles.
5
Le Conference Board du Canada
suivantes ont été entreprises en vue d’établir nos prévisions
économiques :
• Une réunion ab initio tenue sur les lieux et comptant
les membres du groupe de travail;
• Une analyse documentaire des principaux rapports
et ouvrages sur le développement socio-économique
du Nunavut;
• Des entretiens téléphoniques et des entrevues menées
par le personnel du Conference Board du Canada auprès
des intervenants importants identifiés par les parrains
du projet;
• Un examen d’une gamme d’indicateurs socio-économiques
passant des mesures conventionnelles, telles le PIB et
le taux de chômage, aux indicateurs sociaux tels les
niveaux de scolarisation;
• Une étude des tendances et perspectives économiques
canadiennes et mondiales;
• Une prévision de l’avenir économique du Nunavut sur
les vingt années à venir effectuée au moyen de modèles
prévisionnels à long terme à l’échelle provinciale et
nationale. Nos perspectives sont dérivées du modèle
prévisionnel provincial, modèle économétrique
trimestriel à grande échelle, conçu et tenu à jour par
Le Conference Board du Canada;
• Une analyse sectorielle de l’économie numéraire du
Nunavut, fondée sur diverses sources, mais conforme
aux définitions du système de classification type des
industries (CTI) des Comptes nationaux;
• L’analyse de plusieurs bases de données pertinentes,
y compris l’Enquête sur la population active du Nunavut
de 1999, fournie par le Bureau de la statistique du
Nunavut, le Nunavummit Kiglisiniartiit.
En troisième lieu, notre étude des perspectives
économiques examine les quatre facteurs de développement économique soit le capital physique, le capital
humain, le capital naturel et le capital social et organisationnel. Nous y traitons de l’infrastructure physique et
des indicateurs sociaux et de santé. Malheureusement,
dans certains domaines, nous disposons de très peu de
données sur le Nunavut. Comme il s’agit d’un nouveau
territoire peu peuplé, il est souvent difficile d’obtenir
les données relatives à certains indicateurs sociaux. Dans
certains cas, les données disponibles datent d’avant la
création du Nunavut et se mêlent donc aux informations
portant sur les T.N.-O.
Dans la mesure du possible, ces indicateurs ont fait l’objet
de comparaisons avec le Canada ainsi qu’avec trois autres
régions, soit le Yukon, les T.N.-O. et le Groenland. Ces
régions ont été sélectionnées en raison de la similarité de
leurs caractéristiques géographiques et démographiques
ainsi que de leur ressemblance en termes de population.
Une discussion du rôle des valeurs dans le cadre de l’élaboration des politiques de développement économique
convenant au Nunavut constitue la quatrième particularité
de l’approche adoptée aux fins de ce rapport. L’historique
du Nunavut, bien que court, révèle que les valeurs ont
toujours tenu une grande importance dans l’élaboration
des politiques de développement économique du territoire,
comme en fait foi la décentralisation de l’activité
gouvernementale en vue de la répartition équitable
des richesses et des débouchés.
2.1
MÉTHODE
Conformément aux spécifications du client, Perspectives
économiques Nunavut n’est pas une étude normative,
c’est-à-dire qu’elle ne comporte aucune recommandation
en matière de politiques. Néanmoins, ce rapport a pour
objet de servir d’outil central à l’élaboration future d’une
stratégie économique qui englobera tous les facteurs sousjacents du développement socio-économique du Nunavut.
Les organismes parrains ont voulu qu’en raison de contraintes de temps et en vue de l’analyse de toutes les données déjà recueillies au sujet de l’économie du Nunavut,
ce projet de recherche fasse surtout usage de sources d’informations secondaires. Conformément à cette exigence
et en vertu de l’approche décrite ci-dessus, les activités
1 Le rapport Performance and Potential, publié une fois l’an par Le Conference Board
du Canada, présente une évaluation générale du rendement social et économique du
Canada. Figurent également dans ce rapport des comparaisons entre le Canada et six
autres pays industrialisés. http:/www.conferenceboard.ca/pubs/.
Le Conference Board du Canada
2 Le Conference Board du Canada, Performance and Potential 2000, Ottawa,
Le Conference Board du Canada, 2000, p. 73.
3 David P. Ross et Peter J. Usher, From the Roots Up: Economic Development as if
Community Mattered, Croton-on-Hudson, New York, The Bootstrap Press, 1986.
6
3 — Processus de développement économique
d’une région sont donc issues de l’analyse des perspectives
de réalisation des objectifs fixés.
Faits saillants
• La science économique ne s’intéresse pas strictement à
l’aspect financier, mais tient aussi compte de la façon dont les
gens font usage de leur temps et de leurs ressources en vue
de réaliser leurs objectifs personnels et sociaux.
Le développement économique d’une région suppose un
progrès vers la réalisation de trois objectifs économiques
fondamentaux1 :
1. Le maintien de la vie : Les gens ont-ils suffisamment
à manger, sont-ils logés de manière adéquate, sont-ils
à l’abri de la violence, sont-ils en bonne santé?
2. L’estime de soi2 : Les gens ont-ils une image positive
d’eux-mêmes et de ceux qui les entourent?
3. La liberté de choix3 : Les choix à la portée des groupes
et individus d’une région ont-ils été élargis ou
restreints?
• Le capital physique, le capital humain, le capital naturel et le
capital social et organisationnel sont les quatre composantes
du phénomène de création de richesses.
• La croissance économique est nécessaire à la réalisation des
objectifs de développement de toute société, à la satisfaction
des besoins essentiels au maintien de la vie, à l’acquisition
de l’estime personnelle et à la liberté de choix.
• L’économie traditionnelle de subsistance ne peut à elle seule
satisfaire à la demande croissante de biens et de services
produits dans le cadre d’une économie industrielle.
3.2
La réalisation des trois objectifs mentionnés plus tôt exige
un certain bien-être matériel, physique, culturel, mental
et spirituel. Le développement économique tend à passer
surtout par la création de richesses matérielles qu’on
estime être à la base du bien-être général. La création
de richesses repose sur quatre facteurs clés :
1. Le capital physique : désigne l’infrastructure nécessaire
au maintien de la production économique soit l’infrastructure ou les systèmes de transports, les structures
ainsi que l’équipement nécessaires au fonctionnement
des entreprises et de l’industrie, les systèmes de communication, etc. Les stocks de logements, les installations de
loisir, les centres hospitaliers et autres éléments affectant le capital humain ainsi que les investissements contribuant à réduire l’épuisement du capital naturel comme
les systèmes anti-pollution sont également pertinents;
2. Le capital humain : comprend l’activité de la maind’œuvre, mais également, au sens plus large, les actifs
d’une société sur le plan de l’alphabétisation et de
Le présent chapitre propose un aperçu des éléments et des
conditions nécessaires au développement économique en
général. Ce chapitre se veut un guide de l’analyse et des
perspectives économiques du Nunavut dont nous
traiterons dans les chapitres qui suivent.
3.1
QUATRE ÉLÉMENTS ESSENTIELS AU
DÉVELOPPEMENT
POURQUOI PARLER DE « DÉVELOPPEMENT »?
Tel que le veut l’approche adoptée dans ce rapport, l’évaluation économique d’une région suppose davantage que
la simple mesure des taux de production et de consommation de biens et de services. L’évaluation économique
englobe toute la gamme des activités entreprises en vue
du bien-être. La science économique ne s’intéresse pas
strictement à l’aspect financier, mais tient aussi compte de
la façon dont les gens font usage de leur temps et de leurs
ressources en vue de réaliser leurs objectifs personnels et
sociaux. Les perspectives de développement économique
7
Le Conference Board du Canada
ici deux approches se prêtant particulièrement au développement d’économies comme celle du Nunavut : la croissance
par l’augmentation des investissements dans le capital
physique et le passage d’une économie de subsistance à une
économie industrielle par la modification des structures4.
l’éducation ainsi que des connaissances et des compétences. Entrent aussi en ligne de compte l’état de santé
et le bien-être général de même que certaines caractéristiques telles la motivation, la discipline et les
valeurs individuelles;
3. Le capital naturel : soit les matières premières à la base
de l’activité économique qui comprennent la terre, les
ressources fauniques, minérales ou énergétiques, les
fibres, etc. Le capital naturel comprend également les
services rendus par l’environnement comme la gestion
des déchets (p. ex. l’entreposage des émissions de gaz
à effet de serre ou le traitement biologique des eaux
usées). Figure aussi dans ce capital le « savoir naturel »
ou le savoir préservé à l’intérieur des systèmes
biologiques, tel les configurations chimiques des
protéines des plantes dont on s’inspire pour créer
des produits pharmaceutiques ainsi que les rapports
écologiques qui ont évolué pour assurer la survie
dans les régions aux climats rigoureux;
4. Le capital social et organisationnel : comprend le milieu
d’interaction des actifs naturels, humains et physiques
contribuant à la création des richesses. Par exemple,
de longues périodes de conflit ou de guerre peuvent
entraîner la chute dramatique du rendement des capitaux humain, naturel et physique existants. De même,
l’absence d’entrepreneuriat organisé au sein d’une
structure commerciale appropriée fera entrave à la réalisation d’un potentiel qui serait, autrement, prévisible.
Le milieu et les structures en place sont-ils favorables
à l’innovation et permettent-ils de retirer une valeur
économique supplémentaire du savoir? Cette forme
de capital compte les principaux dépositaires d’enjeux
en ce qui concerne la création de richesses (p. ex. le
gouvernement, le secteur privé, les organismes non
gouvernementaux, etc. ), le cadre d’élaboration des
politiques, la sécurité publique et le rapport de confiance entre les intervenants.
3.3.1
Selon l’approche traditionnelle du développement
économique, la croissance économique peut résulter des
efforts d’un pays ou d’une région pour augmenter sa
réserve ou son stock de capital physique ou les actifs
physiques nécessaires à la production d’autres produits
et services5. Cependant, bien que les économies et les
investissements dans le capital productif constituent une
condition préalable à la croissance économique, ils ne suffisent pas en tant que tel à la réalisation de cet objectif.
D’autres éléments doivent être en place afin de permettre
à ce nouveau capital de mener à des niveaux de production économique plus élevés. Figurent habituellement
parmi les conditions préalables au développement :
• les attributs structurels appropriés, tels les marchés
monétaires et commerciaux bien intégrés, les systèmes
de transport hautement développés ainsi qu’une maind’œuvre compétente et bien formée;
• les facteurs extra-économiques favorables : c’est-à-dire
une bureaucratie et des politiques gouvernementales
efficaces;
• les attitudes sociales menant au développement :
c’est-à-dire la discipline, la gratification différée
(p. ex. l’éducation) et le désir de réussir.
Les quatre facteurs de création de richesses doivent opérer
de manière équilibrée si l’on veut assurer la productivité
des investissements dans l’infrastructure physique. Par
exemple, la construction d’un nouvel hôtel pour touristes
constitue un investissement dans le stock de capital
physique d’une région. Toutefois, s’il est situé sous le vent
d’un site d’enfouissement malodorant (faible capital
naturel), s’il n’existe aucun moyen de faire venir les
touristes dans la région (infrastructure de transport
inadéquate), si personne ne possède la motivation ou les
compétences nécessaires à la gestion de l’établissement
(capital humain inadéquat) ou si la région ne compte
aucune entreprise capable d’attirer les visiteurs à l’hôtel
(lacune en matière de capital organisationnel), l’investissement s’avérera vraisemblablement improductif.
Ces facteurs sont évidemment sensibles aux conditions
extérieures et aux niveaux de capital des économies
auxquelles appartiennent les partenaires commerciaux.
Ainsi, les barrières au commerce, les guerres ou l’augmentation soudaine des cours mondiaux du pétrole
peuvent affecter le développement des capitaux de
toutes les économies.
3.3
PROCESSUS ET CONDITIONS PRÉALABLES AU
DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE
3.3.2
Attendu que les capitaux humain, physique, naturel, social
et organisationnel constituent les principaux facteurs de
création de richesses, quels sont donc les processus qui
mènent au développement économique? Nous présenterons
Le Conference Board du Canada
Accroissement des réserves de capital physique
Approche axée sur les changements structurels
La seconde approche du développement est axée sur les
changements structurels qui se produisent habituellement
quand une région se développe économiquement.
8
L’observation du développement de par le monde révèle
qu’à mesure que le niveau de production économique d’une
région augmente, la contribution du secteur de subsistance
traditionnel décroît par rapport à la production industrielle
urbaine. En vertu de cette approche, le moteur de croissance
économique passe de la production de subsistance traditionnelle à la production industrielle urbaine et à l’économie
basée sur le savoir et sur l’expérience (voir la pièce 1). Ce
changement est essentiel à l’accroissement des richesses par
habitant, puisque le potentiel de croissance ou d’expansion
du secteur économique traditionnel de subsistance est faible
par rapport à celui de la production industrielle.
de mieux saisir les changements qui s’opèrent sur le plan
de la répartition de la population ainsi que les virages qui
s’effectuent sur le plan des activités économiques. À mesure
que l’on investit dans le capital physique de l’économie de
subsistance, le niveau de productivité individuelle augmente.
Par exemple, la mécanisation du Canada rural a grandement
contribué à augmenter la capacité de production agraire
individuelle des fermiers. En revanche, elle est également
la cause d’un excédent de main-d’œuvre, car les économies
de subsistance sont malgré tout astreintes à des limites
naturelles à la production. Nombreux sont donc ceux qui
ont quitté les régions rurales pour profiter des possibilités
offertes par l’économie urbaine industrielle.
Soulignons cependant que, bien que l’importance relative
de la production industrielle ou de la production de
l’« économie nouvelle » augmente au cours de la période
de transition, le niveau de productivité de l’économie de
subsistance, exprimé en termes absolus, peut demeurer
constant ou même augmenter. De même, bien que l’apport
de l’« économie nouvelle » ajoute aux richesses nationales,
rien n’indique qu’en termes absolus, la production industrielle décroît. Plutôt, l’augmentation des richesses
attribuable à l’« économie nouvelle » entraîne une
demande accrue en production de biens de consommation.
Le passage de l’économie de subsistance stricte à une
économie mixte dépend de certains facteurs dont :
• l’abondance des ressources naturelles;
• les politiques gouvernementales et les objectifs sociaux;
• la disponibilité de technologies et de capital externes;
• l’état du commerce extérieur.
Ce processus repose implicitement sur l’idée qu’une juste
combinaison des politiques internes et de l’aide au
développement externe permet aux régions de vivre la
transition structurelle à un rythme favorisant l’atteinte
d’un niveau de richesse économique plus élevé tout en
réalisant leurs objectifs sociaux ou politiques.
Cette convergence sur les changements structurels, qui
résultent souvent du processus de développement, permet
PIÈCE 1
Étapes de croissance des économies en développement
Source : Statistique Canada.
9
Le Conference Board du Canada
3.4
définit le cadre d’évaluation du rôle de l’économie de subsistance dans le développement économique. Il reste les
deux questions suivantes auxquelles il faut prêter une
attention particulière :
1. Pourquoi la croissance économique est-elle nécessaire?
2. Quel est le rôle de l’économie de subsistance dans le
développement?
DÉVELOPPEMENT DURABLE
Les processus de développement décrits ci-dessus
sont fondés sur l’hypothèse voulant que la croissance
économique est nécessaire à la réalisation des objectifs
de développement d’une société (la satisfaction des
besoins essentiels à la survie, l’acquisition de l’estime
de soi et l’obtention de la liberté de choix). On se
demande cependant si cette croissance peut être
maintenue à long terme.
3.5.1
Les sociétés aborigènes du monde entier ont fait la preuve
que l’économie de subsistance pouvait être soutenue
pendant de nombreuses générations. Pourquoi donc la
présente exigence de croissance économique aux fins de
la réalisation des objectifs de développement?
Il est possible d’évaluer la durabilité de la croissance
économique en examinant les répercussions du
phénomène de croissance sur les quatre facteurs de
création de richesses. Dans le cas des réserves de capital
physique mentionnées plus tôt, les conditions de la
croissance économique dépendent de l’expansion des
stocks. Celle-ci se produit lorsque le niveau de consommation est inférieur à la production totale, entraînant la
réalisation d’économies qui, théoriquement, sont investies
dans le capital.
Autrefois, la durabilité était fondée sur certains mécanismes naturels et culturels qui contrôlaient avec succès
le niveau de production associé aux ressources naturelles.
La croissance démographique était naturellement limitée
par la capacité de charge de l’environnement et les
niveaux de consommation individuels, contrôlés par
les pressions sociales et culturelles.
Pour évaluer la durabilité de la croissance, il faut examiner
les économies et les investissements au chapitre des
quatre facteurs de création de richesse. C’est précisément
ce que propose la « comptabilisation du coût complet ».
Lorsque l’accroissement du capital physique se fait aux
dépens de l’environnement à court et à long termes,
l’érosion du capital naturel peut annuler la valeur réelle
de l’économie réalisée. De même, l’augmentation de la
main-d’œuvre (capital humain) au détriment du bien-être
familial (capital social) ne se traduit pas nécessairement
par la réalisation d’économies nettes contribuant à l’accroissement du potentiel de productivité.
Ces mécanismes de contrôle sont maintenant pratiquement
inexistants depuis l’avènement des nouvelles technologies
de transport et de communication. La possibilité de transporter de la nourriture dans les régions défavorisées a
contribué à l’accroissement des populations en aplanissant
les fluctuations naturelles et en réduisant les périodes
de famine, alors que les communications de masse encouragent une culture de consommation8.
Dans le cas des économies de subsistance modernes, les
investissements de capital en vue de l’acquisition de biens
et de services tels le logement, l’attirail de chasse et
l’équipement ménager ainsi que les réseaux de communication ont eu deux résultats majeurs. D’abord, ils ont contribué à l’augmentation de la productivité individuelle et
accorde davantage de temps libre à l’individu. Ils ont aussi
créé un excédent de main-d’œuvre. Ensuite, ils ont fait
apparaître un besoin d’argent comptant, puisque dans
les économies industrielles, ces éléments de capital sont
acquis par transactions au comptant.
Dans la même veine, l’Organisation des Nations Unies
suggère que la durabilité de la croissance est réalisable
« [traduction] en termes “d’économies réelles”, lorsque
les niveaux de consommation des membres d’une société,
dûment comptabilisés, sont inférieurs aux niveaux de
production, dûment comptabilisés, des membres d’une
société »6. Dans ce contexte, les concepts « consommation »
et « production » englobent les biens et les services
naturels ou environnementaux ainsi que les facteurs
humains, sociaux et culturels. L’intégration de la valeur de
ces facteurs non monétaires aux divers niveaux décisionnels politiques et commerciaux constitue l’un des grands
défis du développement durable7.
3.5
Ainsi, dans les régions où l’économie de subsistance
demeure active, le besoin de comptant signifie la commercialisation des activités rattachées aux ressources
naturelles, la création d’emplois rémunérés en espèces
et l’octroi de subventions, et exige la participation de la
population à une combinaison d’activités économiques officielles et numéraires et d’activités économiques informelles
ne comportant pas de transactions au comptant.
RÔLE DE L’ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE DE SUBSISTANCE
Ce bref aperçu des processus de développement
économique et des facteurs de création de richesses
Le Conference Board du Canada
Le pourquoi de la croissance économique
10
Cependant, le besoin de comptant pour acheter les biens
et services offerts par l’économie industrielle n’est pas
le seul moteur des exigences associées à la croissance
économique. La capacité de l’individu de tenir un rôle productif dans la société constitue un élément fondamental
du développement de l’estime de soi et de la réalisation
du bien-être personnel. Manifestement, la disponibilité
de rôles productifs devra suivre de près la croissance
démographique.
est parfois heureux de renoncer à certains aspects
matériels de son bien-être en vue de profiter davantage
d’autres aspects tels la sauvegarde de sa culture ou la
liberté personnelle. Les systèmes économiques urbains
sont peut-être également disposés à défrayer les coûts
associés au maintien d’une diversité sociale et à reconnaître qu’il s’agit d’une autre forme d’avoir9. Les valeurs
tiennent effectivement un rôle important dans le choix
des politiques (traité en détail au chapitre 7).
Là où la demande de produits et de services est à la hausse
en raison de l’augmentation de la population ou de la consommation individuelle, la croissance économique est
essentielle à la réalisation des objectifs de développement.
C’est pour ces raisons, entre autres, que les collectivités
économiquement marginales continueront vraisemblablement d’exister. Par conséquent, les efforts de développement de l’économie de subsistance doivent viser
l’amélioration du bien-être des membres de collectivités
et la réduction de leur vulnérabilité envers les événements
en atténuant le besoin de bénéficier des transferts de
régions plus productives. Cette démarche pourrait contribuer à augmenter la viabilité de ces collectivités,
même si elles ne parviennent pas à atteindre l’autosuffisance complète.
3.5.2
Rôle de l’économie de subsistance dans le
développement
Les économies de subsistance reposent sur des processus
naturels qui limitent inévitablement les niveaux de production et, par conséquent, le potentiel de croissance
économique. Il n’y a qu’un certain nombre de caribous
dans la toundra et de poissons dans la mer. En soi,
l’économie de subsistance traditionnelle ne peut suffire
à la demande croissante de biens et de services dérivés
de l’économie industrielle.
Deuxièmement, les économies de subsistance ont un potentiel extraordinaire d’adaptation et d’évolution et c’est
pourquoi nous avons revalorisé les perspectives économiques
des activités rattachées aux ressources naturelles. En s’appuyant sur les quatre facteurs de création de richesses, il
sera sans doute possible d’établir de nouveaux secteurs d’activité qui se prêtent à l’économie de subsistance. L’abandon
de l’économie traditionnelle se produira sans doute, mais ce
virage n’impliquera pas nécessairement l’adoption d’un modèle économique industriel, en milieu urbain. Le potentiel
de la « nouvelle économie » soulève un grand intérêt, car
ce type d’économie permet la transformation du savoir
naturel traditionnel, le QI dans le cas du Nunavut, et des
activités de subsistance en produits et services ayant une
valeur marchande dans l’économie conventionnelle10. Le
tourisme d’expérience et le marketing à valeur ajoutée, qui
s’inspire des connaissances traditionnelles, de biens spécialisés n’en sont que deux exemples.
Comme nous l’avons souligné dans le cas du processus
d’augmentation des réserves de capital physique, la croissance économique est le produit des investissements dans
le capital physique et de la transition vers les secteurs
industriels et ceux de la « nouvelle économie ». Bien que
la production découlant des activités de subsistance se
poursuive (voir la pièce 1), le nombre de participants à
cette économie décroît au rythme de l’augmentation du
taux de productivité individuelle. Bien souvent l’excédent
de main-d’œuvre ainsi créé favorise le mouvement des
populations vers les centres urbains où les possibilités
qu’offrent les secteurs industriels et ceux de la « nouvelle
économie » sont plus abondantes. S’ensuit une réduction
de la demande de biens et de services locaux laquelle
entraîne le déplacement des fournisseurs et de leurs
familles, et les collectivités affectées se retrouvent dans
une situation de déclin irrémédiable. Il ne s’agit pas là
d’un risque strictement théorique, comme de nombreuses
collectivités agricoles du Canada le savent.
L’activité économique traditionnelle de subsistance peut
jouer un rôle primordial pour ce qui est du maintien et du
renforcement de trois des principaux facteurs de création
de richesses : le capital humain, le capital naturel et le
capital social. De fait, l’activité de subsistance peut contribuer à jeter les assises de la croissance économique
future. Par exemple, la confiance et le partage social
généralement caractéristiques de l’économie de subsistance
peuvent faire contrepoids à l’individualisme croissant
observé au sein des économies industrielles formalisées.
Bien que la valeur du capital social ne soit pas particulièrement bien intégrée aux modèles de développement
Ajoutons cependant que l’avenir des économies de subsistance n’est pas nécessairement aussi sombre. Premièrement,
les décisions d’une société ne sont pas toutes fondées sur
l’optimisation économique. Le sens d’appartenance à la
collectivité et l’attachement à la terre comptent parmi les
valeurs fondamentales de nombreuses sociétés. L’individu
11
Le Conference Board du Canada
économique, les efforts de comptabilisation du coût global
de l’activité économique entreprise en vue du développement durable sont garants de progrès certains dans ce
domaine. Cet axe de recherche permettra d’établir sans
doute les liens entre le capital social, les habitudes de
consommation et le capital naturel.
Les partisans de l’économie collective de subsistance et
les décisionnaires du gouvernement doivent maintenant
tenter de déterminer comment ces réserves de capital
humain, naturel et social peuvent se traduire en production économique et quels sont les investissements de
capital physique qui complémentent le plus efficacement
ce processus de transformation.
L’activité économique de subsistance pourra aussi
contribuer à l’enrichissement du capital naturel par
l’application du savoir traditionnel à la surveillance
de l’environnement (par exemple, les efforts consentis
actuellement en vue d’intégrer le savoir traditionnel à
l’évaluation des changements climatiques mondiaux) ou
à la gestion des ressources. Le savoir relatif aux systèmes
naturels pourra également mener à un nouvel usage des
ressources naturelles comme le suggère l’évolution actuelle
des médecines douces.
En résumé, l’avenir des économies de subsistance repose
en grande partie sur leur état de développement actuel
et sur les réserves disponibles dans chaque secteur de
création des richesses. Lorsque les besoins humains de
base sont satisfaits, l’activité de développement et d’investissement peut être axée sur la capitalisation des
sources de richesses existantes. Ce virage exige de solides
mécanismes de soutien organisationnel, des individus en
santé, appuyés par une bonne estime d’eux-mêmes, une
motivation sociale solide, une confiance et une conscience
sociales profondes, une infrastructure appropriée et des
ressources naturelles favorables au soutien du milieu.
À très court terme, l’économie de subsistance offre à la
population, et à la jeunesse en particulier, un moyen
de bâtir son estime personnelle par l’adoption de rôles
sociaux productifs. Cela peut fortement encourager le
développement du capital humain sur lequel reposeront
les activités économiques de demain.
1 Adaptation de Michael P. Todaro, Economic Development in the Third World,
4e édition, White Plains, NY, Longman, 1989.
7 Par exemple, les Principes de Bellagio en matière d’évaluation des progrès vers
le développement durable établissent une série de lignes directrices concrètes en
faveur du développement durable. Ces principes exigent l’adoption d’une perspective
globale, l’examen des conséquences tant positives que négatives de l’activité
humaine au fil du temps et l’examen de l’équité et de la disparité dans les populations actuelles et entre les générations actuelles et futures compte tenu de toute une
gamme de dimensions. L’ouvrage de Peter Hardi et de Terrence Zdan sur la mise en
pratique de ces principes aux fins de l’évaluation du développement durable, publié
en 1997 et intitulé Assessing Sustainable Development: Principles in Practice,
présente les Principes de Bellagio dans leur intégrité. Cet ouvrage est disponible
auprès de l’Institut international du développement durable, à l’adresse web
http://iisd.ca/measure/1.htm.
2 Parmi les facteurs qui influencent l’estime personnelle figurent l’inégalité
économique (pauvreté relative et capacité de se mesurer à ses voisins) ainsi que
l’inégalité sociale déterminée par l’aptitude de l’individu à jouer un rôle productif
dans la société. Le développement culturel est indéniablement l’un des facteurs
influant sur le développement de l’estime collective.
3 Par exemple, dans quelle mesure le développement a-t-il contribué à augmenter
ou à diminuer la dépendance à l’égard des facteurs externes et à réduire ou à
augmenter l’asservissement à d’autres personnes ou institutions? Le développement
économique ne doit pas uniquement contribuer à augmenter les biens et services
de consommation, mais également accroître les choix dont disposent les gens.
8 Nombreuses sont les sociétés traditionnelles dont la subsistance est assurée par les
ressources naturelles et chez qui les niveaux de consommation sont dictés par le
besoin de survie alors que, dans les sociétés de consommation modernes, l’utilité
d’un produit est définie en termes beaucoup plus larges qui se rapprocheraient
davantage du désir que du besoin. La consommation dictée par le besoin est limitée
alors que la consommation basée sur le désir est pratiquement sans limites.
4 La discussion figurant à ce chapitre est strictement théorique et ne se veut pas une
évaluation d’une région en particulier.
5 Cela peut être réalisé par l’économie d’une portion de la production globale et le
réinvestissement de celle-ci pour augmenter le capital physique. Afin de se permettre
un tel investissement, il est parfois nécessaire qu’une région réduise, entre autres,
les dépenses imputables aux produits de consommation et aux programmes sociaux.
L’accroissement du capital peut également être le fruit de transfert de capital d’autres
régions. Toutefois, la dépendance qui en découle a tendance à accroître la vulnérabilité à l’égard des forces externes et à réduire les options à la portée des décideurs
locaux en matière de développement.
9 La valeur des divers systèmes de connaissance et modes de vie change avec le
temps. Comme pour la diversité biologique et génétique, la diversité des modes
de vie pourrait s’avérer cruciale au développement de l’humain à l’avenir. La
sauvegarde des diverses stratégies économiques, y compris l’économie de
subsistance, comporte peut-être une valeur inhérente encore inconnue.
10 Voir, par exemple, Michael Robinson et Elmer Ghostkeeper, « Native and Local
Economics: a Consideration of Economic Evolution and the Next Economy »,
Arctic 40, (2), 1987, p. 138-144.
6 Le Conference Board du Canada, Performance and Potential 2000, op. cit., p. 11.
Le Conference Board du Canada
12
4 — Regard sur le Nunavut : où en sommes-nous?
Faits saillants
• Dans l’état actuel des choses, le capital physique ou l’infrastructure du Nunavut fait sérieusement entrave à son développement social et
économique. Il est primordial de veiller à offrir un plus grand nombre de logements et de locaux commerciaux, à amélioration les systèmes
de traitement et de gestion des déchets et des eaux usées, à rendre l’accès aux systèmes de transport et de télécommunications abordable
et à établir des services de garderie.
• Le taux de croissance démographique du Nunavut est supérieur, par plus de trois fois, à la moyenne canadienne. La population du Nunavut
est également la plus jeune au pays : 60 p. 100 des habitants sont âgés de moins de 25 ans et 41 p. 100 de moins de 16 ans.
• Sur le plan du capital humain, il reste encore beaucoup à faire au Nunavut. Le niveau de scolarisation s’est définitivement amélioré, mais,
par rapport au reste de la population canadienne, les Nunavummiut restent généralement moins instruits. Le revenu moyen des ménages au
Nunavut est plus faible que celui des ménages habitant les autres territoires du Nord et le reste du Canada. L’état de santé de la population
du Nunavut est également beaucoup moins bon que celui de l’ensemble de la population canadienne.
• Il est essentiel d’arriver à mieux comprendre l’état du capital naturel au Nunavut. Pour cela, il faut commencer par combler les lacunes
énormes des données géoscientifiques publiques sur le Nunavut et mettre en place des mécanismes d’observation et de mesure de
l’environnement et des ressources naturelles.
• L’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut (ARTN) joue un rôle de toute première importance dans la répartition du capital
affecté au développement économique du territoire. L’ARTN comporte de nombreuses dispositions visant le développement économique
dont l’embauchage représentatif d’Inuit dans l’administration publique, des politiques préférentielles de passation de marchés entre l’entreprise inuite et les gouvernements fédéral et territorial, l’obligation de conclure des Ententes sur les répercussions et les avantages pour les
Inuit dans le cas des projets de mise en valeur importants et l’octroi d’un plus grand pouvoir en ce qui concerne les ressources naturelles
et les droits d’exploitation.
• Tant le gouvernement fédéral que le gouvernement territorial et les organismes inuits constitués tiennent un important rôle dans l’appui des
possibilités de développement économique au Nunavut. Le Qaujimajatuqangit inuit, la philosophie et le savoir inuits, exercera sans doute
une influence considérable sur les décisions relatives à la création des richesses au Nunavut.
Le territoire du Nunavut est immense et représente en étendue 23 p. 100 des terres canadiennes et les deux tiers du
littoral du Canada. Le Nunavut compte 25 collectivités constituées, dont la population passe de 130 habitants à Grise
Fiord, île d’Ellesmere, à environ 5 000 à Iqaluit, sur l’île de
Baffin. Toutes les collectivités du Nunavut sauf Baker Lake
sont situées sur la côte. À l’exception d’une route entre
Arctic Bay et la mine de Nanisivik, au nord de Baffin, il
n’existe aucune infrastructure routière au Nunavut.
Un grand nombre de collectivités ne sont établies de
manière permanente que depuis peu. Certaines populations
sont venues s’installer là où se trouvait une industrie,
comme dans le cas d’Iqaluit ou de Rankin Inlet, alors que
d’autres hameaux ont été établis pour des raisons administratives (services gouvernementaux, établissements et
services de santé et d’éducation) ou en signe d’affirmation
de la souveraineté canadienne. Il est bien connu que
l’établissement de collectivités inuites permanentes a eu
13
Le Conference Board du Canada
de sérieuses répercussions sur de nombreuses facettes du
mode de vie inuit et a contribué à changer, par exemple,
les habitudes de chasse en plus d’exacerber la dépendance
à l’égard de l’économie basée sur les salaires1.
4.1.1
Le gouvernement du Nunavut reconnaît que la mise en
disponibilité d’un plus grand nombre de logements constitue une priorité. Nombre des problèmes de santé et des
difficultés économiques et sociales que connaît le territoire
paraissent attribuables à cette pénurie. Certains rapports
isolés veulent qu’en raison du manque d’espace, certaines
familles doivent établir des quarts de sommeil. Ce manque
de sommeil aggrave le problème d’absentéisme chez les
employés et affecte le rendement scolaire des enfants. La
surpopulation et les imperfections de la construction des
logements existants causent des problèmes de santé telles
des affectations des voies respiratoires et la propagation
des maladies contagieuses. La crise du logement rend
également plus difficile le recrutement des employés.
Comment accepter un emploi si on n’a pas où se loger?
De même, l’employé est réticent à quitter un emploi si ce
changement signifie qu’il doit céder son logement. Dans le
cas des collectivités de petite taille, la réalisation du plan
de décentralisation des activités gouvernementales crée
inévitablement une plus grande demande de logements.
Tel que nous l’avons déjà souligné, Le Conference Board du
Canada estime que la stratégie économique du Nunavut doit
reposer sur les quatre facteurs de création de richesses : le
capital physique, le capital humain, le capital naturel et le
capital social et organisationnel. Dans le présent chapitre,
nous décrivons l’état de chacun de ces capitaux et leur pertinence pour le développement économique du Nunavut.
Nous soulignons aussi les aspects qui méritent une attention particulière. Ces informations seront utiles à l’examen
de la situation économique et des secteurs de développement potentiel du Nunavut traités aux chapitres 5 et 6.
4.1
CAPITAL PHYSIQUE/INFRASTRUCTURE
Comme nous l’avons vu au chapitre 3, le capital physique, ou
infrastructure, est essentiel au développement économique.
Les réseaux et les systèmes de transport, le logement, l’approvisionnement en électricité, les établissements d’enseignement ainsi que les services de santé publics (disponibilité de
l’eau potable et traitement des déchets et des eaux usées)
contribuent tous au développement économique.
Les problèmes de logement du Nunavut sont étroitement
liés au coût élevé du terrain aménagé ainsi qu’aux coûts
de construction, d’entretien et d’exploitation. La majorité
des matériaux de construction sont expédiés du Sud par
bateau, et ce à un coût pouvant atteindre 35 000 $. De là
l’importance du logement subventionné et des habitations
fournies par le gouvernement. Le Nunavut compte plus
de 3 579 logements subventionnés occupés par environ
13 666 personnes, soit plus de la moitié de la population
(98 p. 100 des locataires sont Inuit). Les coûts d’exploitation, comme celui des services publics, sont d’environ
91 millions de dollars par année et constituent le principal
obstacle au logement subventionné.
Les pages suivantes offrent un bref aperçu du capital
physique du Nunavut. Nous ne cherchons pas à en faire une
évaluation exhaustive, mais plutôt à faire ressortir l’importance d’une infrastructure solide pour le développement
économique et social. La grande question est de déterminer
si le capital physique du Nunavut suffit à soutenir la croissance économique du territoire ou si certains aspects lacunaires s’opposent à la croissance économique ou nuisent
aux trois autres facteurs de création de richesses.
L’examen de la documentation sur le sujet ainsi que la
consultation d’experts en la matière suggèrent fortement
que l’état de l’infrastructure au Nunavut laisse sérieusement à désirer et fait entrave tant au développement
économique qu’au développement social. Il s’agit donc
de déterminer comment et à quel point il faut améliorer
l’infrastructure du Nunavut afin qu’elle puisse soutenir
la croissance d’une population principalement composée
de jeunes et d’un nombre grandissant de personnes âgées.
Contrairement à bon nombre de collectivités du Sud, le
Nunavut ne peut guère espérer financer ces améliorations
en haussant l’assiette fiscale locale.
Le locataire typique d’un logement subventionné, s’il est
employé, doit payer un loyer équivalent à 20 p. 100 du
revenu mensuel brut du ménage. Cependant, la plupart des
locataires de ces logements sont sans emploi ou ne disposent
que d’un très faible revenu. Le loyer de ces locataires,
représentant plus de 60 p. 100 des locataires de ce type de
logement, est subventionné au coût d’environ 1 625 $ par
mois, par ménage, alors que le locataire ne paie que 32 $ par
mois. Les dépenses en subvention s’élèvent à 45 millions
de dollars par année et les locataires sont rarement informés
du fait que leur logement est subventionné2.
Le système de loyer proportionnel au salaire est en fait
un dissuasif à l’emploi puisque l’obtention d’un emploi
rémunéré peut entraîner une augmentation considérable
du loyer. Les gens préfèrent le logement subventionné à
Nous faisons état ci-dessous de certains des secteurs importants de l’infrastructure les plus fréquemment identifiés
comme présentant des lacunes.
Le Conference Board du Canada
Le logement
14
un emploi à 12 $ l’heure3. Ce système limite également la
possibilité de trouver une solution de rechange au logement subventionné.
commerciaux. L’entreprise à domicile, de plus en plus populaire dans le Sud, n’est pas à la portée de tous au Nunavut,
car le gouvernement du territoire interdit l’usage commercial
des logements subventionnés, et ce, pour plusieurs raisons,
dont l’usage accru des services publics. En outre, la surpopulation des logements ainsi que les difficultés d’accès aux
services Internet ne sont pas favorables au travail à domicile.
La liste d’attente pour un logement subventionné compte
1 100 ménages, soit 4 000 personnes ou 15 p. 100 de
la population. Selon les responsables du logement au
Nunavut, la demande ne fera qu’augmenter, car les
familles et les particuliers désirent de plus en plus habiter
leur propre logement plutôt que de partager une habitation avec leur famille élargie. Bien que le pourcentage
de ménages comptant six personnes ou plus soit passé
de 32 p. 100 en 1986 à 22 p. 100 en 1996, le nombre
d’occupants par habitation demeure plus élevé au Nunavut
(3,84 personnes par logement) que dans l’ensemble du
Canada (2,65)4. Cette tendance s’ajoutant à la proportion
croissante de jeunes âgés de 14 à 18 ans, il faut prévoir
que la demande de logements augmentera d’environ
260 logements par an au cours des cinq prochaines
années5. En plus de cette pénurie de logements ordinaires,
il existe une demande croissante de logements adaptés
aux besoins des personnes âgées ou handicapées.
Il est question d’établir un plus grand nombre de centres
multiservices, c’est-à-dire d’édifices occupés par diverses
entreprises. Ce type d’arrangement exige habituellement
des mécanismes de financement novateurs pour couvrir
les coûts de construction et d’entretien des locaux.
4.1.3
L’accès à des services locaux d’approvisionnement en eau
potable, de gestion des déchets et de traitement des eaux
usées est de toute première importance. La disponibilité
de tels services est généralement considérée comme étant
le principal facteur d’amélioration de la santé. Il est
donc essentiel de veiller à ce que tous les Nunavummiut
puissent en bénéficier.
Le gouvernement du Nunavut a consenti les fonds nécessaires (15 millions de dollars) à la construction de 100 unités
de logements subventionnés dans l’ensemble du territoire
en l’an 2000. Ce sont les premières unités de logement
bâties depuis 1993. En vue de satisfaire à la demande,
le gouvernement du Nunavut a prévu la construction de
3 200 à 3 500 unités de plus, pendant les cinq prochaines
années, au coût de 100 millions de dollars par année6.
Bien que la présente évaluation ne va pas jusqu’à l’étude
des systèmes de gestion des eaux et des déchets, une consultation des fonctionnaires du Nunavut et les rapports des
médias suggèrent fortement que la gestion des déchets et
des eaux usées soulève beaucoup d’inquiétude dans certaines collectivités. Il semblerait même que la gestion ou
l’élimination des déchets soit le plus grave problème d’infrastructure du Nunavut. Dans la plupart des cas, l’enfouissement des déchets n’est tout simplement pas possible et l’on
procède donc à l’incinération des ordures à ciel ouvert.
En vertu d’une entente de financement global, la Société
canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) verse
approximativement 58 millions de dollars par année au
Nunavut aux fins de l’augmentation des logements sociaux.
Toutefois, la subvention sera réduite graduellement à partir
de 2005 et éliminée complètement d’ici 2037. Le rôle que
tiendra par la suite le gouvernement fédéral est incertain.
À Iqaluit, le problème est encore plus aigu, car l’infrastructure de cette municipalité doit satisfaire à une
croissance démographique rapide. Les fonctionnaires
municipaux estiment qu’une injection de 18 millions de
dollars sera nécessaire afin de répondre aux besoins fondamentau d’infrastructure. La construction d’une nouvelle
usine de traitement biologique et mécanique des eaux
usées apportera un précieux appui. Reste à savoir si l’infrastructure de base suffira à satisfaire les besoins d’une population croissante et à soutenir les nouvelles formes de
développement économique comme l’entreprise touristique.
Le logement demeure définitivement l’une des grandes
priorités du gouvernement du Nunavut. C’est le deuxième
article en importance du budget d’investissement de 20012002. Toutefois, il semble qu’à lui seul, le gouvernement
n’est pas en mesure de mettre fin à la crise du logement
de manière durable. De toute évidence, ce problème va
nécessiter des solutions novatrices.
4.1.2
Services de gestion et de traitement de l’eau
potable, des eaux usées et des déchets
4.1.4 Transports : réseau routier, terrains d’aviation, ports
et navigation maritime
Locaux commerciaux
Certaines sources d’information sérieuses signalent le
manque de locaux à vocation commerciale dans nombre
de collectivités. Le Nunavut compte très peu d’édifices
Au Nunavut, les systèmes de transport aérien, routier
et maritime sont très peu développés. La situation du
15
Le Conference Board du Canada
décentralisation de l’administration publique et du besoin
d’établir de meilleurs liens entre les nombreuses collectivités réparties sur un aussi vaste territoire. L’amélioration
des systèmes de communication est également essentielle
au développement socio-économique en ce qu’elle favorise
l’accès à l’information et aux services (p. ex. télésanté),
augmente les possibilités d’enseignement à distance et
rehausse les perspectives de marketing et de commerce
électronique (p. ex. achat d’artisanat, réservations et
planification de vacances et voyages via Internet).
Nunavut sur ce plan est tout à fait différente de celle
des T.N.-O. et du Yukon. Le réseau routier du Yukon,
par exemple, s’étend sur 4 681 kilomètres alors que le
Nunavut ne compte qu’une seule route intercommunautaire d’environ 20 kilomètres. Ajoutons que, contrairement
aux T.N.-O., il n’existe aucune route d’hiver au Nunavut à
l’exception d’une route reliant les T.N.-O. à la mine Lupin,
à la limite frontalière ouest du Nunavut. Le gouvernement
du Nunavut se dit intéressé à établir un réseau routier
toutes saisons, notamment entre la région de Kivalliq et
le Manitoba7. Il n’en demeure pas moins que la situation
géographique (nombreuses populations insulaires) et
le dispersement de petites collectivités éloignées font
obstacle au développement des voies de transport.
Par contre, le développement des systèmes de télécommunication au Nunavut a été plutôt limité jusqu’à présent.
Dans le Nord, les télécommunications reposent forcément
sur les techniques satellites, extrêmement coûteuses.
Contrairement au Yukon et aux T.N.-O., le Nunavut ne se
prête pas aux réseaux de transmission terrestre comme les
câbles de fibres optiques et les micro-ondes. La technologie des satellites requiert un ou des satellites, l’installation de stations terrestres et la disponibilité de la largeur
de bande voulue (ou de temps-secteur spatial). Dans le
Nord, le coût élevé du temps-secteur spatial et le nombre
insuffisant de fournisseurs de services Internet compliquent aussi grandement l’accès aux télécommunications.
Bien que les collectivités du Nunavut soient sur la côte et
compte tenu de l’importance du transport maritime pour
l’approvisionnement en été, les installations portuaires
sont, pour ainsi dire, inexistantes au Nunavut. Les collectivités ont manifestement su se passer de ces structures,
mais il faudra éventuellement envisager le développement
de l’infrastructure maritime dans la mesure où cette
lacune restreint ou élimine, entre autres, les possibilités
de développement économique des industries du tourisme
et de la pêche.
La qualité des services téléphoniques disponibles au
Nunavut est aussi loin de correspondre à celle dont bénéficient les collectivités du Sud. Les tarifs sont élevés et l’accès aux lignes individuelles plus difficile. En raison des
faibles taux de population, les abonnés ne sont pas en
mesure d’assumer totalement le coût d’amélioration des
services. Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) a approuvé la mise en œuvre
d’un plan de réduction des tarifs interurbains et d’amélioration des services téléphoniques entrant en vigueur le
1er janvier 200110. Ce plan a pour objet de stimuler la
concurrence dans le secteur des services interurbains et
de faciliter l’accès aux fournisseurs de services Internet.
En l’absence d’infrastructures routière et maritime
adéquates, la population dépend fortement du système de
transport aérien bien que les coûts en soient extrêmement
élevés. Par exemple, un aller-retour Iqaluit-Ottawa coûte
plus de 2 000 $, ce qui présente une sérieuse entrave au
développement de l’industrie du tourisme au Nunavut. La
qualité des terrains d’aviation et des services de transport
aérien liant les collectivités du Nunavut n’est pas non plus
toujours égale d’un endroit à l’autre.
Le gouvernement du Nunavut est bien conscient des problèmes que présente l’absence d’infrastructures de transport adéquates et a confié l’élaboration d’une stratégie du
transport à son ministère du Gouvernement communautaire et des Transports. Entre autres, cette stratégie propose un réseau de transport qui reposera sur l’engagement
d’améliorer les liens entre les diverses collectivités du
Nunavut (afin de favoriser notamment la décentralisation
de l’administration publique)8.
4.1.5
Certaines décisions s’imposent en ce qui a trait au niveau
de services réseaux et Internet désirés compte tenu du
coût très élevé qu’entraînerait un usage accru de tempssecteur satellite. Manifestement, l’idée de faire du
Nunavut un modèle sur le plan des télécommunications et
de l’informatique, pour en compenser l’éloignement géographique, n’est pas réaliste à moins qu’on puisse trouver
une solution aux coûts élevés du temps-secteur satellite.
Il n’en demeure pas moins que l’on doit veiller à ce que les
Nunavummiut, y compris les entreprises et le gouvernement, bénéficient d’un accès approprié et raisonnable aux
services Internet. Il est également nécessaire de s’assurer
que les technologies de l’information peuvent soutenir
l’effort de décentralisation de l’administration publique.
Télécommunications et connectivité
Dans le cadre du plan de mise en œuvre du nouveau territoire, la Commission d’établissement du Nunavut a déterminé qu’il était impératif de disposer de systèmes de
communication et d’information de pointe9. Cela est d’une
importance particulière compte tenu des objectifs de
Le Conference Board du Canada
16
Les représentants du gouvernement du Nunavut travaillent
de concert avec le Groupe de travail national sur les services à large bande récemment créé pour élaborer une
stratégie et suggérer au gouvernement fédéral la meilleure
façon d’assurer aux résidants et entreprises de partout au
Canada un accès aux services Internet haute vitesse d’ici
l’année 2004. Le Groupe de travail a également pour mandat d’examiner les diverses stratégies qui permettraient de
combler les écarts entre les niveaux de service offerts aux
régions urbaines et aux régions rurales ou éloignées.
4.1.6
état le Conseil des ministres de l’Éducation du Canada,
la taille des écoles et des populations qu’elles desservent
affecte le coût des services d’enseignement et donc
la manière de prodiguer l’enseignement général et
spécialisé12. Malgré les restrictions budgétaires fédérales
des années 1990, les dépenses au chapitre de l’éducation
pour les T.N.-O. et le Nunavut des dix dernières années,
ont atteint le double de la moyenne nationale13.
De nombreuses sources font état de la qualité médiocre
de l’enseignement au Nunavut. Bien que la majorité des
enseignants soient extrêmement dévoués, ils sont souvent
moins instruits que leurs collègues du Sud14. Notons
également que très peu d’enseignants peuvent offrir leurs
cours en inuktitut et qu’en 1996-1997, les Inuit ne comptaient que pour 35 p. 100 du personnel enseignant du
Nunavut15. Le ministère de l’Éducation précise par ailleurs
que la qualité des services d’enseignement va en s’améliorant et qu’un nombre croissant d’Inuit choisissent de faire
carrière dans l’éducation. Il faudra néanmoins qu’un plus
grand nombre de Nunavummiut s’intéressent à l’enseignement si l’on veut satisfaire à la demande de services
d’enseignement en inuktitut (avec connaissance de la
culture et des valeurs inuites à l’appui), et compte tenu
du fait qu’on s’attend à perdre les enseignants d’ailleurs
au Canada, en raison d’une pénurie dans ce domaine au
cours des années à venir16.
Services de garde et d’enseignement
Au cours des dernières années, de nombreuses recherches
ont été menées en vue de cerner les facteurs déterminants
sur le plan de la santé et du développement de l’enfant et
d’en mesurer les effets. Ces études révèlent que les six
premières années de vie sont les plus importantes au
développement physiologique (p. ex. développement du
cerveau) et social de l’être humain. Un revenu familial
adéquat, l’accès à des programmes de développement de
l’enfant (p. ex. services de garde structurés, centres de
ressources familiales, etc.), des pratiques parentales positives et le soutien de la collectivité sont autant de facteurs importants du développement de la petite enfance.
À la lumière de ces connaissances, les chercheurs et les
décideurs préconisent des programmes et services axés
sur le développement optimal du jeune, y compris l’offre
de services de garderie de meilleure qualité. Au Nunavut,
l’absence de services de garde de qualité est un problème
fréquemment mentionné11 qui peut, de surcroît, entraver
le développement économique de deux manières.
Premièrement, il contribuerait à dissuader les participants
éventuels à l’économie numéraire, particulièrement les
femmes ou ceux qui seraient autrement disposés à déménager si un emploi l’exigeait. Deuxièmement et à plus
long terme, l’absence de services de garderie et de
développement de la petite enfance pourrait nuire
au progrès scolaire des jeunes Nunavummiut.
Bien qu’il n’y ait aucune université au Nunavut, le collège
Nunavut Arctic College offre une vaste gamme de programmes de formation et d’enseignement post-secondaires,
y compris des programmes d’éducation permanente, dans
un certain nombre de collectivités. En 1998, plus de
2 500 résidants du Nunavut, soit 10 p. 100 de plus
que l’année précédente, ont bénéficié de ces cours.
4.1.7
Services de santé et services sociaux
Le Centre hospitalier régional de Baffin, établi il y a plus
de 40 ans, est le seul hôpital au Nunavut et ne compte
que 34 lits. Dans les autres collectivités, les résidants ont
accès aux services infirmiers des centres de santé communautaires. Les populations des régions de Kivalliq et de
Kitikmeot n’ont accès à aucun centre hospitalier et
doivent donc se déplacer au loin pour recevoir un traitement hospitalier. Les trois grandes régions du Nunavut
sont jumelées à un centre hospitalier du Sud, par exemple,
Edmonton dans le cas de la région de Kitikmeot.
La disponibilité des établissements d’enseignement compte
aussi dans le capital physique. Depuis déjà plusieurs années,
la population s’inquiète de l’absence d’établissements en
mesure d’offrir un enseignement secondaire dans certaines
collectivités du Nunavut. Mentionnons qu’en 1990-1991,
la région du Nunavut ne comptait que quatre collectivités
offrant le programme d’enseignement secondaire, c’est-àdire jusqu’à la douzième année. Dans une grande mesure,
ce problème est maintenant rectifié. D’ici l’année scolaire
2000-2001, les élèves de 22 collectivités sur 26 pourront
avoir accès à un programme d’enseignement secondaire
dans la région où ils habitent. Cependant, tel qu’en faisait
Les ressources humaines sont l’un des principaux éléments
du régime de santé. Au Nunavut, très peu de collectivités
bénéficient des services d’un médecin résident. Il est
extrêmement difficile d’assurer le suivi médical de la
17
Le Conference Board du Canada
population en raison des fréquents changements et remplacements des professionnels de la santé. L’Enquête
nationale sur la santé de la population de 1994-1995
révèle que 75 p. 100 de la population masculine du
Nunavut n’avaient pas consulté de médecin au cours des
douze mois précédents, par rapport à 50 p. 100 aux T.N.-O.
et à 28 p. 100 dans l’ensemble du Canada. Le Nunavut
connaît une pénurie de personnel infirmier et la situation
n’a guère de chance de s’améliorer quand on pense au
manque grandissant de personnel infirmier au Canada en
général. De plus, le Nunavut ne compte pas d’Inuit parmi
son personnel infirmier, ce qui complique la prestation de
services de santé culturellement et linguistiquement adaptés.
programmes sont alloués à la santé. Les gouvernements ont
consenti des efforts énormes pour mieux maîtriser l’augmentation du coût des services de santé18. Le gouvernement du
Nunavut connaîtra probablement les mêmes difficultés.
Les services de télésanté pourraient apporter une solution
aux lacunes sur le plan des ressources humaines dans le
domaine de la santé et aux problèmes d’accès aux experts
médicaux en assurant la transmission des images et des
informations médicales entre les régions jumelées. Certains
services de télésanté sont maintenant offerts et Santé
Canada vient de verser des fonds au gouvernement du
Nunavut en vue d’étendre ces services à toutes les collectivités du territoire. La technologie de ce système est
adaptable à d’autres domaines et pourrait donc servir,
entre autres, à l’enseignement par vidéoconférence.
En vue d’atteindre les ambitieux objectifs socioéconomiques que s’est fixés le Nunavut, sa population
devra acquérir « santé, sagesse et richesses ». L’étude de
certains des principaux indicateurs sociaux révèle qu’il
reste beaucoup à faire et ce, dans plusieurs domaines.
4.2
Comme nous l’avons mentionné au chapitre 3, le capital
humain est un élément essentiel au développement
économique. De plus en plus, le monde entier s’intéresse
au capital humain et à l’élaboration de stratégies pour le
rehausser, par exemple, en encourageant le développement
de la petite enfance et l’apprentissage continu.
4.2.1
Données démographiques
D’après Statistique Canada, la population du Nunavut
au moment de sa création en 1999 s’élevait à environ
27 000 habitants. Contrairement au Yukon et aux T.N.-O.,
la population du Nunavut n’a pas convergé vers un seul
centre (voir le tableau 1). La capitale du Nunavut, Iqaluit,
qui compte 5 000 habitants, est la collectivité la plus peuplée. Rankin Inlet, la deuxième collectivité en importance,
compte approximativement 2 200 habitants. Huit autres
collectivités, y compris celle de Cambridge Bay, ont plus
de 1 000 habitants. Environ la moitié de la population du
Nunavut habite la région de Baffin alors que 30 p. 100
à peu près habite la région de Keewatin ou de Kivalliq
et 20 p. 100, la région de Kitikmeot.
Au cours des 25 dernières années, le domaine des sciences
de la santé a connu un virage axé davantage sur la promotion des bonnes habitudes de santé et la prévention de la
maladie que strictement sur le traitement de la maladie.
Les recommandations formulées par l’Organisation mondiale de la santé et la Banque mondiale veulent que tous
les pays, et particulièrement les pays ne disposant que de
budgets restreints, investissent plutôt dans les services de
prévention de la maladie et de promotion de la santé qui
profitent à un plus grand nombre de personnes que dans
le financement de traitements spécialisés onéreux dont
peu bénéficient. Nombre de professionnels de la santé du
Nunavut prônent également cette approche et estiment
qu’elle mérite une attention prioritaire. L’affectation de
ressources aux services de santé mentale, notamment à
l’assistance psychosociologique ou à l’aide psychopédagogique, doit aussi figurer sur la liste des priorités17.
Bien qu’au Nunavut, les Inuit représentent environ
85 p. 100 de la population, dans les centres autres que
Cambridge Bay, Iqaluit et Rankin Inlet, le pourcentage d’Inuit
TABLEAU 1
Comparaisons démographiques
(nombre d’habitants)
La disponibilité de services de santé entraîne de sérieuses
implications pour les Nunavummiut et leur gouvernement.
Les services de santé représentent une part considérable
des budgets provinciaux et territoriaux en raison de l’importance que leur accordent les Canadiens. À ce titre, ces
services sont parfois offerts au détriment d’autres secteurs
prioritaires comme ceux de l’éducation et du développement
économique. Entre les années 1998 et 2000, 62 p. 100 des
budgets provinciaux pour l’établissement de nouveaux
Le Conference Board du Canada
LE CAPITAL HUMAIN
Nunavut
T.N.-O.
Yukon
Groenland
Total
Capitale
Pourcentage du
total dans la capitale
27 000
40 000
31 000
56 000
5 000
17 000
23 000
13 000
18,5
42,5
74,2
23,2
Source : Statistique Canada
18
est plus près de 95 p. 100. Le pourcentage d’autochtones
au Nunavut est plus élevé qu’au Yukon (21 p. 100), qu’aux
T.N.-O. (48 p. 100) et qu’au Groenland (80 p. 100). Selon
le recensement de 1996, l’inuktitut est la langue la plus
parlée au Nunavut. C’est-à-dire que 60 p. 100 de la population s’exprime dans cette langue à la maison, en comparaison de 35 p. 100 pour l’anglais.
TABLEAU 2
Nunavut : la fontaine de jouvence
(pourcentage de la population)
Nunavut
Âgés de moins de 15 ans
Âgés de moins de 25 ans
Âgés de plus de 65 ans
D’importantes particularités distinguent la population
du Nunavut de celle des autres régions du Canada et
influent sur le développement économique du territoire.
Mentionnons d’abord la croissance démographique rapide
observée au cours des dernières décennies. De 1986 à 1996,
la population du Nunavut a en effet augmenté de 32 p. 100.
Cette croissance est en grande partie imputable à un taux
de natalité élevé et à une plus longue espérance de vie,
attribuable dans une certaine mesure à l’amélioration des
services de santé19. De 1991 à 1996, le taux de croissance
démographique du Nunavut a été de 16,4 p. 100, soit
plus de trois fois supérieur à la moyenne nationale de
5,7 p. 100. Selon le Nunavummit Kiglisiniartiit, bureau
de la statistique du Nunavut, d’ici l’an 2006, la population
du Nunavut dépassera 32 000 habitants et d’ici l’an 2020,
43 000. D’ici 2010, on prévoit que le Nunavut comptera un
plus grand nombre d’habitants que le Yukon. Cependant,
il ne faut pas oublier que le rythme de croissance démographique a commencé à ralentir, suivi par le taux de
fécondité (du fait que les femmes inuites ont maintenant
un moins grand nombre d’enfants).
Canada
41
60
3
20
38
12
Source : Nunavummit Kiglisiniartit (bureau de la statistique du Nunavut).
et leurs besoins vont vraisemblablement déterminer les
politiques publiques du Nunavut pendant encore plusieurs
années (p. ex. augmentation de la demande de services
d’enseignement et de services connexes, et de débouchés
professionnels pour les jeunes20). Pour le reste de la population, autre qu’inuite, la distribution par tranche d’âge
est la même qu’ailleurs au Canada, la majorité étant âgée
de 25 à 60 ans.
4.2.2
Éducation et développement des compétences
Le niveau d’éducation d’une population contribue grandement au capital humain et reflète le « potentiel » de cette
population. L’éducation et la formation figurent parmi les
priorités du gouvernement du Nunavut.
Or, tel que l’illustre le tableau 3, en 1996, plus de la
moitié de la population adulte du Nunavut ne détenait
pas de diplôme d’études secondaires.
Cette croissance démographique rapide des dernières
années a fait que la population du Nunavut est la plus
jeune au Canada (voir le tableau 2). Environ 60 p. 100 des
habitants sont âgés de moins de 25 ans et 41 p. 100, de
moins de 16 ans. De ce nombre, 92 p. 100 sont Inuit. Donc,
contrairement au reste du Canada (voir le graphique 1), les
jeunes représentent une importante tranche de la population
Toutefois, la situation en termes de scolarisation s’améliore.
Comme l’indique le tableau 4, le taux d’inscription aux études
secondaires augmente de manière constante depuis 1985. Le
taux d’obtention de diplôme est également à la hausse. En
1987, 25 étudiants du cycle secondaire (12e année) ont
obtenu leur diplôme au Nunavut contre 65 en 1997 et
TABLEAU 3
Niveaux de scolarisation : adultes du Nunavut (1996)
(pourcentage)
Nunavut
T.N.-O.
Yukon
Canada
Aucun
diplôme
secondaire
Diplôme
secondaire
Certificat ou
diplôme de
formation pratique
Autre certificat
ou diplôme non
universitaire
Études
universitaires
partielles
Diplôme
universitaire
53,1
36,4
27,6
34,8
4,1
8,5
8,4
14,3
4,5
3,6
4,0
3,7
27,1
29,5
33,5
24,2
4,4
9,3
12,0
9,7
6,8
12,6
14,5
13,3
Source : Statistique Canada, Recensement de 1996.
19
Le Conference Board du Canada
GRAPHIQUE 1
Pyramide des âges : Nunavut et Canada, 1999
(Nunavut : nombre d’habitants; Canada : milliers d’habitants)
Femmes
90+
85–89
80–84
75–79
70–74
65–69
60–64
55–59
50–54
45–49
40–44
35–39
30–34
25–29
20–24
15–19
10–14
5–9
0–4
Hommes
2 000 1 500 1 000 500
Femmes
90+
85–89
80–84
75–79
70–74
65–69
60–64
55–59
50–54
45–49
40–44
35–39
30–34
25–29
20–24
15–19
10–14
5–9
0–4
0
500 1 000 1 500 2 000
Nunavut
Hommes
1 500
1 000
500
0
Canada
500
1 000
1 500
Source : Statistique Canada.
participer au gouvernement et à l’économie du territoire à
l’avenir. La Commission royale sur les peuples autochtones
trouve alarmant de constater le faible niveau d’éducation
des Inuit étant donné que la plupart des emplois dans
l’administration publique exigeront une formation postsecondaire dans des domaines comme la comptabilité, la
gestion financière, le développement organisationnel, la
planification et le développement des affaires23. Le tableau 5
laisse entendre que la population masculine du Nunavut
pourrait mettre du temps à acquérir ces compétences
puisque seuls 34 p. 100 des hommes comptent poursuivre
des études post-secondaires par rapport à 54 p. 100 aux
T.N.-O. et à 51 p. 100 des femmes au Nunavut.
135 en 200021. Le taux de scolarisation post-secondaire
est également plus élevé. De 1986 à 1996, le pourcentage
d’adultes ayant fréquenté un établissement d’enseignement post-secondaire a plus que doublé22.
Pour assurer le développement socio-économique du
Nunavut, il faudra poursuivre les efforts de scolarisation
de la population. Notons que le taux d’emploi des détenteurs d’un diplôme d’études secondaires (12e année) ou
plus est de 75 p. 100 par rapport à 30 p. 100 seulement
chez ceux qui n’ont qu’une 8e année ou moins. Il est
impératif de veiller à ce qu’un nombre suffisant d’Inuit
soient en mesure d’assumer des postes de direction et de
Il est aussi important que les Inuit continuent de
maîtriser les habiletés nécessaires à leur participation à
l’économie de subsistance. L’Inuk acquiert ces habiletés
en matière de navigation, de sécurité et de ressourcement
naturel auprès de sa famille et des aînés. Les méthodes et
processus d’évaluation de la maîtrise de ces compétences
chez les jeunes Inuit ne peuvent manifestement pas être
les mêmes que pour le rendement scolaire.
TABLEAU 4
Participation au deuxième cycle du secondaire
Étudiants âgés de 15 à 19 ans
(pourcentage)
Nunavut
T.N.-O.
1985
1990
1995
1997
47
56
54
60
73
82
76
90
4.2.3
Source : Dossiers scolaires, ministère de l’Éducation, de la Culture et de l’Emploi,
Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest.
Le Conference Board du Canada
Revenu
Le revenu est un déterminant important de la santé. Dans
le cas du Nunavut, deux questions se posent au sujet du
20
monoparentales dont le chef de famille est une femme
représentent le groupe familial le plus pauvre du
Nunavut;
• La population du Nunavut dépend fortement de l’aide
au revenu. Environ 55 p. 100 des Nunavummiut ont
besoin de cette forme de revenu au moins une fois l’an.
revenu. Premièrement, les citoyens du Nunavut gagnent-ils
ou reçoivent-ils un revenu suffisant et, deuxièmement,
comment le revenu est-il distribué? Tél qu’en fera état
le prochain chapitre, les besoins des Nunavummiut sont
comblés en grande partie par les activités de subsistance.
Le calcul du revenu imposable ne fait donc pas le bilan
exact de la situation du Nunavut.
Il s’est toujours avéré difficile d’obtenir des informations
sur le revenu et de fixer un « seuil de pauvreté » dans le
cas du Nunavut. Ce problème tient sans doute au fait que
nombre de Nunavummiut partagent leurs biens avec la
collectivité et vivent encore du produit des activités de
subsistance. Il n’en demeure pas moins que cela vient
compliquer l’étude de la répartition des revenus, aux
fins de la planification du développement.
Néanmoins, les données compilées par Statistique Canada
suggèrent qu’un grand nombre de Nunavummiut ont de
faibles revenus :
• Le revenu moyen par habitant, au Nunavut, est
inférieur à celui des T.N.-O. et de l’ensemble du Canada.
Cela se traduit par un pouvoir d’achat encore plus faible
compte tenu du coût plus élevé de la vie au Nunavut
qu’aux T.N.-O. En 1999, le revenu personnel par habitant
au Nunavut était de 18 630 $ par rapport à 25 485 $
dans le reste du Canada (traité plus en détail au
chapitre 5);
• Proportionnellement, le nombre de familles dont le
revenu est de 50 000 $ ou plus est moindre au Nunavut
que dans les T.N.-O. (voir le graphique 2);
• Le revenu est distribué à peu près également dans
toutes les régions du Nunavut, à l’exception de la
région de Baffin, Iqaluit en particulier, où le revenu
moyen est légèrement plus élevé;
• Depuis 1981, le pourcentage de familles monoparentales est à la hausse au Nunavut et aux T.N.-O.
En 1981, 13 p. 100 des familles ne comptaient qu’un
parent. En 1996, le pourcentage de familles monoparentales avait grimpé à plus de 16 p. 100 alors que la
moyenne canadienne était de 14 p. 100. Les familles
4.2.4
État de santé
[traduction] Actuellement, les Inuit affichent les taux
de suicide et de natalité les plus élevés et l’espérance
de vie la plus faible de toutes les populations
autochtones du Canada et l’état de santé des
autochtones est de beaucoup inférieur à la norme
nationale24.
L’Enquête nationale sur la santé de la population de
1994-1995 demandait aux répondants de faire l’évaluation
de leur état de santé. Il est plutôt intéressant d’observer
que le pourcentage d’Inuit disant être en « excellente
santé » est semblable au pourcentage équivalent à
l’échelle nationale.
GRAPHIQUE 2
Comparaison du revenu des familles recensées, en 1996
(pourcentage des familles)
TABLEAU 5
Perspectives d’avenir après les études secondaires, en 1996
(pourcentage)
Nunavut
Nunavut
T.N.-O.
Hommes Femmes Hommes Femmes
T.N.-O.
70
60
Trouver un emploi
Être au chômage
Travailler à son compte
Études collégiales
Études universitaires
Adopter le mode de
vie traditionnel
Autre
44
7
5
11
23
35
6
3
23
28
27
4
3
21
33
18
5
2
24
46
4
5
0
3
2
8
0
4
50
40
30
20
10
0
<10
Source : Ministère de l’Éducation, de la Culture et de l’Emploi, Health Behaviours,
Attitudes and Knowledge of Young People in the Northwest Territories, rapport
technique, Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, 1996.
10–30
30–50
Revenu en milliers de dollars
>50
Source : Statistique Canada.
21
Le Conference Board du Canada
TABLEAU 6
Indicateurs de santé et indicateurs sociaux
Nunavut
T.N.-O.
Yukon
Canada
27 000
40 000
31 000
30 750 000
85
48
21
3
Espérance de vie des hommes à la naissance, 1996 (en années)*
68,3
74,4
72,3
75,4
Espérance de vie des femmes à la naissance, 1996 (en années)*
71,3
79,1
79,2
81,2
Années potentielles de vie perdue par tranche de 100 000 personnes, 1996
(taux combiné du Nunavut et des T.N.-O.)
7 695
7 695
4 742
3 804
Taux de mortalité infantile (par tranche de 1 000 naissances vivantes)*
17,9
6,7
8,7
5,8
Taux de fécondité (naissances par tranche de 1 000 femmes âgées de 15 à 49 ans)
131,3
82,3
44
48,4
Taux d’insuffisance pondérale à la naissance (pourcentage de naissances vivantes
de poids inférieur à 2 500 g)*
7,4
4,4
4,8
5,8
Décès accidentels par tranche de 100 000 (décès résultant de collisions automobiles,
de chutes, de noyades, de brûlures et d’empoisonnements)
75,7
72,8
68,6
27,7
Taux de suicide par tranche de 100 000 habitants*
68,6
12,7
23,5
12,9
Crimes violents par tranche de 100 000 habitants, 1996 (taux combiné du
Nunavut et des T.N.-O.)
5 032
5 032
3 175
973
Cancer du poumon (taux de mortalité par tranche de 100 000 habitants)*
131,8
66,3
73,1
49,2
Cardiopathie ischémique (taux de mortalité par tranche de 100 000 habitants)*
40,2
85
119,2
136,6
Auto-évaluation de leur état de santé par les hommes, 1994-1995 (pourcentage
disant être en « excellente santé »)
23
28
24
27
Auto-évaluation de leur état de santé par les femmes, 1994-1995
(pourcentage disant être en « excellente santé »)
24
19
27**
24
Tabagisme, 1994-1995 (pourcentage de la population)
59
38
33**
24
Tabagisme chez les 12 à 19 ans (pourcentage de la population)
46
27
25**a
14
Indice de l’activité physique, 1994-1995 (pourcentage des femmes se disant « inactives »)
81
56
28
62
Pourcentage d’hommes n’ayant pas consulté un omnipraticien au cours des
12 derniers mois, 1994-1995
75
50
18
28
Population totale
Population autochtone (pourcentage de la population totale)
* Ces chiffres représentent la moyenne des données recueillies sur trois ans (1995, 1996 et 1997) et calculées en fonction des estimations de la population en 1996. Les taux sont aussi
standardisés pour l’âge d’après la structure des groupes d’âge de la population canadienne en 1991.
** Ces chiffres sont tirés de l’Enquête sur la promotion de la santé : Yukon de 1993.
a âgés de 15 à 19 ans
Sources : Institut canadien d’information sur la santé, Statistique Canada (Base canadienne de données sur l’état civil), ministère de la Santé et des Services sociaux des Territoires du
Nord-Ouest, Bureau de la statistique du Yukon, Enquête nationale sur la santé de la population de 1994-1995.
Toutefois, la réalité statistique signale des différences
entre l’état de santé des Nunavummiut et des autres
Canadiens. Le tableau 6 compare les indicateurs de
santé au Nunavut, dans les autres territoires et par
rapport au Canada en général. L’espérance de vie des
Nunavummiut de sexe masculin est écourtée de sept
ans par rapport à la moyenne nationale et celle des
Nunavummiut de sexe féminin, de près de dix. Ces
chiffres s’expliquent, entre autres, par le taux élevé
de décès prématurés (mesurés en années potentielles
de vie perdue), qui est deux fois plus élevé que la
Le Conference Board du Canada
moyenne nationale. Lui-même est attribuable aux taux
plus élevés de blessures évitables et de mortalité infantiles
que les taux canadiens correspondants. Le taux de tabagisme est très élevé, chez les jeunes en particulier, de
sorte que le taux de mortalité attribuable au cancer du
poumon au Nunavut est supérieur au double de la
moyenne canadienne. Un rapport comparatif préparé
par le Groenland montre que l’espérance de vie des Inuit
de toute la région circumpolaire est semblable à celle
des populations des pays en développement tels le Brésil,
la Chine et la Thaïlande25.
22
Par ailleurs, à la lumière de certains indicateurs, la population du Nunavut se porte relativement bien, en particulier
sur le plan des maladies d’origine alimentaire. Le taux de
mortalité attribuable à la cardiopathie ischémique, par
exemple, est beaucoup plus faible chez les Nunavummiut
que dans le reste de la population canadienne. La consommation relativement importante de nourriture traditionnelle
par les Inuit explique peut-être les faibles taux de maladie
cardiaque et de diabète par rapport au reste du Canada.
Le niveau de consommation d’alcool et de drogues est
également élevé. L’abus de drogues et l’inhalation de
solvants et d’aérosols sont sensiblement plus élevés chez
les Inuit que chez le reste des Nunavummiut ou que dans
l’ensemble de la population canadienne (voir le tableau 7).
L’état de santé plus précaire des Nunavummiut entraîne
deux conséquences majeures : premièrement, il réduit
le capital humain, facteur de création de richesses,
puisqu’une moins grande portion de la population peut
travailler ou participer pleinement à l’activité économique.
Le développement et le maintien d’un système économique
pouvant soutenir un niveau approprié de services publics
exigent une main-d’œuvre instruite et en bonne santé;
deuxièmement, le faible état de santé d’une population
accroît la demande de services sociaux et de services de
santé subventionnés et les dépenses gouvernementales.
L’augmentation du capital humain prend du temps. C’est
pourquoi on se doit d’accorder dès maintenant une attention particulière à ce facteur de création de richesses.
Par ailleurs, l’Enquête nationale sur la santé de la population de 1994-1995 fait état d’un taux d’inactivité très
élevé et alarmant au Nunavut et chez les femmes en
particulier : 81 p. 100 des femmes se sont dites inactives,
par rapport à 62 p. 100 dans le reste du pays.
Au Nunavut et aux T.N.-O., le taux de maladies contagieuses est de beaucoup supérieur au taux national
(le taux de rougeole est égal à 36 fois la moyenne canadienne)26. Le taux de maladies transmises sexuellement
est, selon les données, 15 fois plus élevé au Nunavut et
aux T.N.-O. que le taux national moyen27.
4.3
LE CAPITAL NATUREL
Le capital naturel est le troisième facteur de création de
richesses. Il comprend entre autres les ressources fauniques, minérales, énergétiques et géologiques, c’est-à-dire
les matières brutes essentielles à l’activité économique.
Le Nunavut jouit d’un vaste capital naturel qui constitue,
depuis des siècles, un élément fondamental du mode de
Les données anecdotiques et autres révèlent que les
Nunavummiut ont effectivement connu des difficultés
au cours de cette période de grand ajustement social et
économique. Les travailleurs communautaires ont souvent
souligné le besoin de services de santé mentale. Le
programme Nunavut Brighter Futures vise à combler
les besoins des collectivités en matière de santé physique,
sociale et mentale. Selon le rapport de 1999-2000,
52 p. 100 des initiatives subventionnées portaient
sur la santé mentale28.
TABLEAU 7
Comportement face à l’alcool et aux drogues au Nunavut,
en 1996
(pourcentage)
Nombreux sont ceux pour qui le suicide est de loin le plus
grave problème social du Nunavut. Le taux de suicide y
est environ cinq fois plus élevé que dans l’ensemble du
Canada. Depuis vingt ans, le nombre de suicides au
Nunavut ne cesse d’augmenter, particulièrement chez les
jeunes hommes et dans la région de Baffin29. Par exemple,
entre les mois d’avril 1999 et juillet 2000, 34 suicides ont
été officiellement déclarés, soit, en moyenne, plus de deux
suicides par mois. Sur ces 34 suicides, 21 se sont produits
dans la région de Baffin, dont près de 60 p. 100 dans la
ville d’Iqaluit.
Inuit
Non-inuit
Canada
25,1
21,3
8,8
Boit au moins une fois par semaine 12
34,7
34,9
A consommé de la marijuana ou
du haschisch au cours des
12 derniers mois
32,5
12,2
7,4
A consommé du LSD, de la
cocaïne ou de l’héroïne au
cours des 12 derniers mois
6,5
2,1
1,5
A déjà inhalé des solvants
ou des aérosols
25,6
2,6
0,8
Consomme 5 verres ou
plus chaque fois
La violence familiale, selon les experts, constitue également
un des grands problèmes sociaux du Nunavut. Il est malheureusement difficile de recueillir et d’interpréter l’information quantitative à ce sujet. Selon les données de Statistique
Canada pour l’année 1996, l’incidence de voies de fait aux
T.N.-O. (y compris le Nunavut) était plus élevée que le taux
national dans une proportion de cinq fois et demie.
Source : 1996 NWT Alcohol and Drug Survey (www.stats.gov.nt.ca/Statinfo/Health/
alcdrug/Alcohol_Drug.html).
23
Le Conference Board du Canada
1999 grâce aux fonds fournis par le ministère canadien
des Pêches et des Océans et le Conseil de gestion des
ressources fauniques du Nunavut, ont contribué à l’augmentation des quotas de pêche au Nunavut (voir la section
5.3.1 pour plus de détails). Les recherches en cours
suggèrent que l’aire principale de frai du turbot dans la
région canadienne arctique et atlantique se situe dans
le détroit de Davis, plus précisément dans les eaux à la
limite de la frontière du Groenland.
vie des Inuit et permet de soutenir tant l’exploitation
traditionnelle que le développement industriel.
La connaissance du capital naturel du Nunavut est essentielle à l’élaboration d’une stratégie économique. Comme le
remarque la Commission royale sur les peuples autochtones,
une participation productive à l’économie mixte repose sur
une connaissance approfondie de vastes territoires et de la
flore et de la faune qui les composent30. En général, le
Nunavut n’a pas encore une connaissance solide de l’étendue de son capital naturel (gisements minéraux, stocks de
poisson) (le chapitre 5 traite du potentiel naturel en plus
de détails). Il faudra combler cette lacune en établissant
les structures et les processus d’évaluation appropriés.
Une meilleure connaissance des stocks de poisson assure
deux avantages primordiaux. D’abord, l’identification de
nouveaux stocks ou de stocks plus importants permet
d’autoriser plus de prises comme dans le cas de la pêche
au turbot en 2001. Ensuite, la détermination plus juste
des stocks permet d’améliorer les mesures de conservation
des espèces marines ainsi que le développement d’une
industrie de la pêche durable.
L’ARTN, dont il sera question au prochain chapitre, traite un
certain nombre de questions rattachées au capital naturel
telles les droits fonciers et la création d’organismes publics
chargés des questions environnementales, dont le Conseil de
gestion des ressources fauniques du Nunavut, la Commission
d’aménagement du Nunavut, la Commission du Nunavut
chargée de l’examen des répercussions, l’Office de gestion des
eaux du Nunavut ainsi que le Tribunal des droits de surface.
4.3.2
L’une des principales sources de connaissances sur le sol
et le sous-sol, les sciences de la terre soutiennent de
nombreuses activités et industries. Il s’agit d’un outil
essentiel à l’élaboration de toute stratégie de développement économique. Les connaissances géoscientifiques
sont à la base des travaux de planification et d’exploration
des industries minière et énergétique. La cartographie
topographique est un des piliers de la gestion des
ressources renouvelables et du développement de
certains services comme le tourisme.
En vertu de l’article 11 de l’ARTN, la Commission d’aménagement du Nunavut et le ministère des Affaires indiennes et
du Nord canadien ont institué un programme de surveillance
générale qui démarrera avec la région de Kitikmeot et
assurera la collecte et la coordination de données portant
sur l’état de l’environnement (p. ex. gaz à effets de serre
et réchauffement climatique mondial).
4.3.1
Science de la faune et des pêcheries
Malheureusement, le Nunavut manque gravement de
données géoscientifiques sur son territoire31.
• Moins d’un tiers du territoire du Nunavut a été reproduit
sur des cartes topographiques à l’échelle de 1:50 000.
La plupart des cartes existantes sont épuisées et moins
de 5 p. 100 seulement des cartes disponibles ont été
numérisées;
• Seule la moitié du territoire du Nunavut a été reproduite
sur des cartes géologiques à l’échelle de 1:250 000
nécessaires à l’exploration minière. La cartographie
géochimique et géophysique est également incomplète
et moins de 5 p. 100 du territoire a fait l’objet de
cartes géochimiques;
• Le nombre de cartes hydrographiques est tout à fait
insuffisant et ne permet donc pas d’appuyer le
développement des ressources, de la navigation et
du tourisme maritimes.
L’ARTN prévoyait également l’octroi unique de fonds en
vue de la réalisation d’une Étude quinquennale sur
l’exploitation des ressources fauniques au Nunavut
(collecte de données entre 1996 et 2001 et production
d’un rapport en 2003 au plus tard). L’objet de cette étude
est de recueillir davantage d’informations sur l’exploitation
des ressources fauniques en vue de faciliter la détermination
des niveaux de prises autorisées et d’assurer une saine
gestion des ressources fauniques. L’Accord prévoyait
également une étude sur les baleines boréales dont nous
traiterons en détail à la section 4.4.4. Il reste encore à
prendre les mesures qui permettront l’observation et le
contrôle continus des ressources fauniques du Nunavut.
Il sera aussi nécessaire d’en savoir davantage sur les stocks
de poisson, de turbot et de crevettes en particulier, dans
les eaux littorales du Nunavut. Les recherches menées à
ce jour, bien que peu nombreuses, se sont avérées utiles. Les
recherches scientifiques sur les stocks de turbot, réalisées en
Le Conference Board du Canada
Sciences de la terre dans le secteur public
Cette pauvreté de l’information cartographique est particulière au Nunavut. En comparaison, le Yukon dispose d’une
base de données géoscientifiques publique bien garnie.
24
leurs ambitions politiques et leur désir d’une réponse
à leurs revendications territoriales, mais il couvre
également la création de nouveaux liens permanents
entre les Inuit et l’État canadien. Au-delà de tout, le
Nunavut en est venu à être perçu comme le moyen de
tracer la voie vers l’avenir, le moyen d’intégrer ce que
l’ancien et le nouveau ont de meilleur à offrir.33
Les avantages que l’on aurait à combler cette lacune sont
évidents. Selon une perspective scientifique, cela permettrait d’accroître le savoir fondamental et la compréhension
des ressources naturelles du Nunavut et des mesures
de préservation de ces ressources. Du point de vue du
développement économique, le savoir ainsi acquis servirait
au développement de plusieurs secteurs de l’industrie, dont
l’exploitation minière, les pêcheries et le tourisme. Une
mesure plus exacte du potentiel minéral faciliterait les décisions du gouvernement ou d’autres organismes du Nunavut
en matière d’investissements ou de financement. À ce titre
donc, il s’agit d’un investissement public d’importance.
La création du nouveau territoire du Nunavut est le fruit
de plusieurs facteurs, mais le désir de conclure cet Accord
sur les revendications territoriales en a certainement été
la clé et demeure encore l’axe autour duquel doivent s’articuler les efforts de développement économique (voir les
dates des événements marquants dans l’encadré).
Le capital naturel est essentiel au développement durable
tant de l’économie de subsistance que de l’économie basée
sur les salaires ainsi qu’au maintien du mode de vie des
Nunavummiut. La population du Nunavut s’inquiète de
la présence de dépôts de déchets dangereux, de la contamination des ressources naturelles et du réchauffement
climatique32. Il faut une connaissance approfondie du
capital naturel du Nunavut qui alimente et intègre le
Qaujimajatuqangit inuit. Bien que l’on procède présentement
à la collecte de données sur de nombreux aspects du capital
naturel du Nunavut, les efforts à cet effet devront être
plus poussés et le travail soutenu de manière constante,
surtout si l’on veut que le Nunavut puisse jouer un rôle
significatif dans la surveillance du changement climatique.
4.4
L’Accord de 1993 sur les revendications territoriales du
Nunavut (ARTN) compte 42 articles régissant les droits de
propriété et d’exploitation des terres et des ressources du
Nunavut. Les dispositions de l’Accord visent :
• [à] déterminer de façon claire et certaine les droits de
propriété, d’utilisation et d’exploitation des terres et
des ressources, ainsi que le droit des Inuit de participer
à la prise de décisions concernant l’utilisation, l’exploitation, la gestion et la conservation des terres, des
eaux et des ressources, notamment au large des côtes;
• [à] reconnaître aux Inuit des droits d’exploitation des
ressources fauniques et le droit de participer à la prise
de décisions en cette matière;
• [à] verser aux Inuit des indemnités pécuniaires et à
leur fournir des moyens de tirer parti des possibilités
économiques;
• [à] favoriser l’autonomie et le bien-être culturel et
social des Inuit.34
LE CAPITAL SOCIAL ET ORGANISATIONNEL
Le capital social et organisationnel, dernier facteur de
création des richesses mentionné au chapitre 3, comprend
la structure et l’organisation de l’administration d’une
région donnée en regard des trois autres facteurs de
création de richesses, soit les capitaux physique, humain
et naturel. Dans les pages qui suivent, nous examinerons
l’organisation du Nunavut dans la perspective de la création de richesses. Nous commencerons par l’Accord sur
les revendications territoriales du Nunavut et terminerons
par un inventaire des principaux intervenants dans la
création de richesses au Nunavut.
4.4.1
L’Accord comporte des dispositions touchant les nombreux
aspects du développement socio-économique du territoire
et de sa population, dont :
• la négociation d’un accord politique visant l’établissement du Nunavut;
• des paiements de transfert de capital d’investissement
de 1,148 milliard de dollars, versés par tranches sur une
période de quatorze ans, à la Fiducie du Nunavut qui
en assumera la gestion au nom de la Nunavut
Tunngavik Inc. (NTI). Les tranches ne peuvent être
versées aux particuliers, mais doivent servir au bienêtre collectif des Inuit;
• la dévolution des titres fonciers pour un territoire d’une
superficie de 350 000 kilomètres carrés, dont près de
10 p. 100 (35 200 kilomètres carrés) s’accompagnent
de droits d’exploitation minière et de redevances
partagées pour le pétrole, le gaz et les minéraux;
• l’engagement d’accroître, jusqu’à un niveau représentatif,
le nombre d’Inuit employés dans la fonction publique
L’Accord sur les revendications territoriales du
Nunavut (ARTN)
Il est essentiel de reconnaître que la création du Nunavut
est perçue par ses dirigeants comme une condition nécessaire à la réalisation d’objectifs socio-économiques
ambitieux intégrant le mode de vie inuit au mode de vie
associé à une économie basée sur les salaires :
[traduction] Le Nunavut a été et est encore utilisé
par les dirigeants inuits pour désigner un ensemble
de choses – car ce mot n’exprime pas uniquement
25
Le Conference Board du Canada
•
•
•
•
•
•
•
du Nunavut (territoriale, municipale ou fédérale, en
Les articles 23 et 24 de l’ARTN portent sur deux des
aspects les plus susceptibles d’affecter le développement
quel cas le Conseil du Trésor est l’employeur). Le niveau
économique du Nunavut. En raison de la grande impord’embauche doit refléter le poids démographique des
tance que tiennent les emplois du secteur de la fonction
Inuit par rapport à la population totale de la région du
publique au Nunavut, d’arriver à une main-d’œuvre inuite
Nunavut (article 23);
représentative dans les trois ordres de gouvernement a
l’adoption, dans le cas des marchés publics fédéraux et
de très sérieuses implications. De plus, l’engagement des
territoriaux au Nunavut, de politiques préférentielles
gouvernements, conformément à l’article 24, d’aider les
favorisant l’entreprise inuite (article 24) et l’engageentreprises inuites à participer aux marchés publics
ment de donner la préférence à l’entreprise inuite
élargit les possibilités de développement économique du
lorsque les gouvernements se proposent de lancer un
Nunavut. L’obligation de conclure des Ententes sur les
appel d’offres à l’égard de l’établissement, de l’exploitaavantages et les répercussions pour les Inuit pour tout
tion ou de l’entretien de parcs nationaux et territoriaux
projet de mise en valeur important comme les projets
(article 8.4.8);
d’exploitation minière, gazière et pétrolière viendra
la conclusion d’ententes sur les répercussions et les
modifier la structure et la mise en œuvre de ces projets
avantages pour les Inuit pour tous les projets de mise
à l’avenir et entraînera l’abandon des pratiques passées
en valeur importants, (p. ex. projets d’exploitation des
de développement très différentes.
terres et des eaux du Nunavut et projets d’une valeur
supérieure à 35 millions de dollars), où l’on aura traité
Les paiements de transferts de capital d’investissement
des questions comme l’embauche des Inuit, l’accès aux
fédéraux sont au seul usage des organismes inuits et ne
terrains d’aviation et aux routes et les débouchés pour
les entreprises inuites;
le droit de représentation au sein des
Création du Nunavut : points saillants
divers organismes publics de gestion
des terres, des eaux, des ressources
1976
L’Inuit Tapirisat du Canada (ITC) propose la création du territoire du Nunavut
fauniques, de l’environnement et de
dans les T.N.-O. en tant que partie intégrale d’un accord final sur les revendications
mise en valeur des ressources qui
territoriales, conclu avec les Inuit.
travailleront en collaboration avec
1980
Les délégués à l’assemblée générale annuelle de l’ITC adoptent à l’unanimité une
le gouvernement du Nunavut;
motion
visant la création du Nunavut.
la création de trois nouveaux parcs
nationaux, aux frais de l’administraLes T.N.-O. votent en faveur de la division du territoire.
tion fédérale;
1990
La Fédération Tungavik de Nunavut, établie en vue de négocier un accord sur les
le droit de préférence aux Inuit dans
revendications territoriales au nom des Inuit, le gouvernement fédéral et le
le cadre de la création d’entreprises
gouvernement des T.N.-O. signent une entente de principe portant sur les
sportives ou axées sur la faune;
revendications territoriales du Nunavut.
le droit d’exploiter les ressources
1992
La Fédération Tungavik de Nunavut et les représentants du gouvernement concluent
fauniques marines et terrestres
l’Accord politique du Nunavut les engageant à l’établissement du territoire du
dans l’ensemble du Nunavut, à un
Nunavut au 1er avril 1999.
niveau correspondant aux besoins
Les Inuit du Nunavut votent en faveur de l’adoption de l’Accord sur les revendications
de consommation;
territoriales du Nunavut.
l’octroi préférentiel de permis de
pêche dans les zones de la baie
d’Hudson et du détroit de Davis
contiguës, mais extérieures aux
limites frontalières du Nunavut.35
Cette liste est loin d’être exhaustive, car
l’Accord contient de nombreuses autres
dispositions qui traitent également du
développement économique. En vertu de
l’Accord, par exemple, chaque Inuk a le
droit de prélever annuellement, sans
permis, jusqu’à 50 verges carrées de
pierre à sculpter sur les terres de l’État.
Le Conference Board du Canada
1993
L’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut est ratifié.
La Loi sur l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut et la Loi sur le
Nunavut sont adoptées par le Parlement du Canada.
1994
La Commission d’établissement du Nunavut est créée. Elle a pour mandat d’agir à
titre de conseiller dans l’établissement du nouveau territoire (p. ex. structure et
organisation du gouvernement).
1995
Après un scrutin public, Iqaluit devient officiellement la capitale du Nunavut.
1999
Le 1er avril, le Nunavut entre officiellement en existence.
Source : Jack Hicks et Graham White, « Nunavut: Inuit self-determination through a land claim and public
government? », Nunavut: Inuit Regain Control of Their Lands and Their Lives, Jen Dahl, Jack Hicks et Peter Jull,
Copenhague, Danemark, Groupe international de travail pour les affaires indigènes, 2000, p. 94-96.
26
peuvent servir aux opérations gouvernementales. Une part
de ces fonds a servi au développement économique, comme
dans le cas du récent établissement de l’Atuqtuarvik
Corporation, ainsi qu’à une aide financière aux chasseurs
inuits. Cependant, l’Accord ne stipule en rien que les
revenus générés par les dépenses au compte des immobilisations doivent servir aux services gouvernementaux. Cela
soulève donc la question du rôle du gouvernement et des
organismes inuits dans le financement et l’avancement du
développement socio-économique du Nunavut.
4.4.3 L’établissement du gouvernement du Nunavut
La Loi sur le Nunavut, adoptée en 1993, se veut le prolongement de l’Accord sur les revendications territoriales
du Nunavut et a servi de cadre législatif à la création du
Nunavut. C’est en vertu de la Loi qu’on a créé, en 1994,
la Commission d’établissement du Nunavut qui a formulé
des recommandations touchant l’instauration du nouveau
gouvernement du Nunavut. La Commission a produit
plusieurs rapports qui ont éventuellement mené à deux
rapports complets, les volumes 1 et 2 du document intitulé L’empreinte de nos pas dans la neige fraîche, publiés
respectivement en 1995 et en 1996. Ces rapports comportent des recommandations à l’égard de la gouvernance
et de l’administration du Nunavut et proposent un calendrier
électoral, un échéancier pour la création d’une nouvelle
assemblée législative et le processus d’établissement
de la capitale territoriale37.
L’ARTN se distingue d’autres ententes sur les revendications territoriales plus importantes comme la Convention
de la Baie James et du Nord québécois qui exigeait la
création d’une seule grande société de développement
économique. En outre, il comporte un accord politique
régissant le territoire.
4.4.2
L’établissement du territoire du Nunavut
Aux yeux des dirigeants du Nunavut, la structure et le
modèle de gouvernement représentaient une importante
démarche en vue du développement du territoire :
La création du gouvernement représentera une
première démarche importante et essentielle en ce
qu’elle permettra aux Inuit et aux autres résidants
du Nunavut de prendre en charge leur vie et leur
avenir, de créer leurs propres débouchés, de peser
leurs propres compromis et de faire eux-mêmes les
choix qui s’imposent38.
Le Nunavut diffère considérablement du Yukon et des
T.N.-O. en ce qu’il est le fruit d’un seul accord sur les
revendications territoriales, accord qui porte sur tout le
territoire. Par ailleurs, comme le Yukon et les T.N.-O., le
Nunavut est dirigé par un gouvernement populaire qui
représente tous ses résidants, Inuit et autres. En raison de
cette forme de gouvernement, c’est à la Nunavut Tunngavik
Inc. (NTI), autrefois la Fédération Tungavik de Nunavut,
qu’incombe la responsabilité d’administrer l’ARTN au nom
des Inuit (et non du gouvernement du Nunavut), et l’on
s’est fixé comme objectif que le gouvernement du Nunavut
soit représentatif de la vaste population inuite qu’il dessert.
Conformément à l’Accord politique du Nunavut, la
Commission a recommandé la décentralisation du gouvernement du Nunavut dans la mesure la plus large possible, en
vue de répartir consciemment les postes et les activités
gouvernementales dans toutes les régions et collectivités
du Nunavut et de concéder le plus grand pouvoir possible
aux fonctionnaires du gouvernement du Nunavut œuvrant
aux niveaux territorial et communautaire39. En tant que
principal employeur du territoire, le gouvernement du
Nunavut, par la décentralisation de ses activités, veillera
à ce que les possibilités de développement économique
soient partagées le plus largement possible. La répartition
équitable des emplois gouvernementaux parmi les collectivités du Nunavut est une question délicate et d’extrême
importance pour la plupart des Nunavummiut (voir la discussion approfondie sur cette question au chapitre 7)40.
Il faut reconnaître que le développement du Nunavut
dépend étroitement d’un partenariat à trois qui unit : les
Inuit, représentés par la Nunavut Tunngavik Inc. (NTI), le
gouvernement du Nunavut et le gouvernement du Canada,
par l’entremise du ministère des Affaires indiennes et du
Nord canadien36. Le fonctionnement de ce partenariat
tripartite et le rôle de chacun de ses membres restent
toujours à éclaircir en raison du caractère évolutif de cette
forme de partenariat. Quoi qu’il en soit, ce partenariat est
unique en son genre, car nulle part ailleurs au Canada, un
gouvernement ne partage exactement les mêmes frontières
qu’une administration autochtone unique. En 1999, le
gouvernement du Nunavut et la NTI ont signé le Clyde
River Protocol et établi ainsi un cadre de coopération
entre les deux organisations alors qu’elles s’apprêtaient
à entrer en fonction. En vertu du protocole, la NTI et le
gouvernement populaire devaient collaborer à l’élaboration
de la Nunavummi Nangminiqaqtunik Ikajuuti (NNI) (politique
d’encouragement et d’appui aux entreprises du Nunavut) et
de la nouvelle Loi sur l’éducation du Nunavut.
La décentralisation favorise inévitablement l’accès aux
emplois gouvernementaux pour les membres d’un plus
grand nombre de collectivités et encourage les Inuit à
participer à la fonction publique du Nunavut. En outre,
certains suggèrent que le modèle d’un gouvernement
décentralisé correspond davantage à la culture politique
27
Le Conference Board du Canada
traditionnelle des Inuit41. Conséquemment, des services
de chaque ministère du Nunavut ont été établis dans dix
collectivités réparties dans les trois régions du Nunavut.
Ainsi, le développement économique a été axé sur la collectivité plutôt que sur l’individu ou le territoire. Tel que
l’avait recommandé la Commission royale sur les peuples
autochtones, cette approche convient au développement
économique des collectivités autochtones.
Il s’agit d’une philosophie de vie et de pensée englobant
une vaste gamme d’éléments dont les suivants :
• la tradition inuite de longue date en vertu de laquelle
les aînés transmettent savoir, valeurs et enseignements
aux générations plus jeunes;
• un système de lois, de valeurs et de consultations préalables aux décisions majeures touchant la collectivité;
• la compréhension des liens hiérarchiques d’un système
parentaliste définis en inuktitut;
• la connaissance des méthodes traditionnelles de guérison
et de conseils et une approche fondée sur l’amour et la
confiance à l’égard d’autres Inuit vivant des difficultés;
• le savoir en matière de ressources fauniques et de techniques de chasse ainsi que la compréhension de la vie
animale et de la complexité des questions de biologie
et de migrations43.
Ces dernières années, l’attention et les énergies ont surtout
convergé vers l’établissement du gouvernement du Nunavut
et de ses organismes publics et ce n’est qu’en 1998 que les
principaux cadres du gouvernement du Nunavut, les sousministres, ont été nommés. À partir de ce moment-là a
débuté le plus gros de l’organisation du nouveau gouvernement, y compris l’embauche d’environ 2 700 fonctionnaires
dont 1 800 étaient au service du gouvernement des T.N.-O.
La Commission avait fixé comme objectif qu’on embauche
au moins 50 p. 100 d’Inuit à l’administration centrale du
gouvernement du Nunavut pour 1999 afin d’arriver à une
participation inuite complètement représentative en l’an
2021. Le 1er avril 2000, les Inuit formaient 44 p. 100 des
effectifs du gouvernement du Nunavut.
Le QI affecte le capital social et organisationnel de deux
façons. D’abord, il guide le fonctionnement de l’économie de
subsistance tant sur le plan de la production que de la consommation (voir le chapitre 5). Ensuite, on cherche à intégrer le QI au système économique basé sur les salaires et au
processus décisionnel du gouvernement du Nunavut relatif à
son fonctionnement et à ses services. Le QI est un élément
important du Mandat de Bathurst et plusieurs ministères du
gouvernement du Nunavut ont mis sur pied des groupes de
travail du QI composés d’employés inuits. (L’encadré qui suit
donne un autre exemple de mise en pratique du QI.)
En 1999, le gouvernement du Nunavut rendait public le
Mandat de Bathurst, ses priorités et son plan quinquennal
ainsi que les lignes directrices régissant sa mise en œuvre.
Il y avait cerné quatre grands thèmes :
1. les collectivités saines;
2. la simplicité et l’unité;
3. l’autonomie;
4. l’éducation et l’apprentissage continu42.
4.4.5
Cette section présente un bref aperçu de l’organisation des
richesses du Nunavut par les principaux intervenants ou
secteurs, notamment le gouvernement, les organisations
inuites, le secteur privé et les institutions gouvernementales. Notre objectif ici n’est pas d’énumérer les divers
programmes de développement économique, mais plutôt
d’identifier les principaux secteurs sur lesquels repose
la création de richesses au Nunavut.
À l’intérieur de ces grands thèmes, le gouvernement s’est
donné comme priorité la formation et l’éducation de la
main-d’œuvre du Nunavut ainsi que la résolution des
problèmes de logement. Le gouvernement a donc réparti
comme suit ses dépenses budgétaires principales (comme
en fait foi son budget de 2001-2002) :
• Éducation (y compris le soutien du revenu) : 26 p. 100
• Santé et services sociaux : 18 p. 100
• Travaux publics : 14 p. 100
• Transport et gouvernements communautaires : 12 p. 100
• Société d’habitation du Nunavut : 8 p. 100
4.4.4
4.4.5.1 Le gouvernement
Comme nous le montrerons au chapitre 5, le gouvernement
joue un rôle primordial sur le plan économique, tant à
titre d’employeur direct que de principal client des entreprises locales. Par gouvernement, on entend le gouvernement du Nunavut et le gouvernement du Canada ainsi que
les gouvernements municipaux.
Le rôle du Qaujimajatuqangit inuit
Le Qaujimajatuqangit inuit (QI) a joué un rôle primordial
dans la création et la répartition des richesses au
Nunavut, en particulier dans l’économie de subsistance
mais aussi, de plus en plus, dans l’économie basée sur
les salaires. Littéralement, « Qaujimajatuqangit inuit »
signifie « ce que les Inuit connaissent de longue date ».
Le Conference Board du Canada
Les secteurs clés du capital organisationnel et
social du Nunavut
Le gouvernement du Nunavut est aussi un intervenant
majeur dans le domaine du développement économique
puisqu’il fournit de l’emploi, élabore les politiques et offre
28
les activités de la Société de développement du Nunavut
(Nunavut Development Corporation), établie en 1999. La
Société gère présentement neuf entreprises dans sept
collectivités du Nunavut œuvrant dans le domaine de
l’artisanat et des secteurs de la transformation du poisson
et de la viande. Il incombe également à cette Société
d’identifier toute nouvelle possibilité d’investissement
favorable à l’expansion et à la diversification économiques
des collectivités44.
Exemple de mise en pratique du QI
L’Étude des connaissances des Inuit sur les baleines boréales,
réalisée récemment, illustre bien l’utilisation et l’intégration du QI
aux approches occidentales. En vertu de l’article 5 de l’Accord
sur les revendications territoriales du Nunavut, le Conseil de gestion
des ressources fauniques du Nunavut a mené une étude sur les
migrations et les stocks de baleines boréales. Pour cela, il a recouru
aussi bien au savoir écologique traditionnel (connaissances des
aînés acquises par l’observation et le vécu) qu’à la science moderne.
Cette étude fournit des renseignements sur les routes de migration
et les stocks de baleines dans la région du Nunavut.
D’autres ministères du Nunavut gèrent aussi certaines
activités de développement économique. Par exemple,
le ministère de la Culture, des Langues, des Aînés et de
la Jeunesse offre des subventions dans les domaines
de la culture et des communications afin d’encourager
le développement économique des arts.
Source : Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, Rapport final de
l’Étude des connaissances des Inuit sur les baleines boréales, Iqaluit, mars 2000.
les programmes qui stimulent le développement économique.
Ainsi, conformément aux dispositions de l’article 24 de
l’ARTN sur les politiques préférentielles de passation des
marchés de l’État à l’égard des entreprises inuites (dont
51 p. 100 des parts au moins appartiennent à des Inuit),
le gouvernement du Nunavut et la NTI ont adopté la
politique Nunavummi Nangminiqaqtunik Ikajuuti (NNI).
Celle-ci touche l’adjudication des contrats du gouvernement du Nunavut ou de ses organismes affiliés et vise
à accroître la participation des Inuit aux activités
économiques du Nunavut. Les critères de soumissions
favorisent l’entreprise officiellement inuite, l’entreprise du
Nunavut ou l’entreprise locale. Tel que mentionné plus tôt,
le gouvernement a adopté une approche de développement
économique communautaire, c’est-à-dire que ses politiques
sont axées sur le soutien à l’échelon de la collectivité.
La participation du gouvernement fédéral au développement économique du Nunavut est guidée par le document
intitulé Rassembler nos forces : le plan d’action du Canada
pour les questions autochtones et préparé en réponse
au rapport de la Commission royale sur les peuples
autochtones. Le ministère des Affaires indiennes et du
Nord canadien veille à l’accomplissement des obligations
légales du gouvernement fédéral à l’égard du Nunavut et
fournit un appui financier aux projets de développement
économique inuits à divers paliers, y compris en accordant
un financement de base à trois organismes de développement économique communautaires. En 2000-2001, la
région du Nunavut a reçu à ce titre 3,6 millions de dollars.
De plus, les organismes inuits sont admissibles à des fonds
de développement économique centraux.
Le ministère du Développement durable du Nunavut
veille à promouvoir l’activité économique dans le respect
des principes du développement durable. À ce titre,
le Ministère est responsable de la gestion du milieu
écologique et de l’utilisation des ressources naturelles.
Il consent également environ 13,7 millions de dollars
sous forme de subventions et de programmes d’aide au
développement économique du Nunavut. Cette aide comprend le soutien financier des pêcheurs, des chasseurs et
des trappeurs, des producteurs d’artisanat, de la petite
entreprise et des agents de développement économique
communautaires. Les industries nouvelles comme celles
de la pêche commerciale et des fourrures ont également
droit à l’appui financier du Ministère. Le programme d’aide
au développement (Community Futures) du ministère du
Développement durable contribue aussi au soutien financier de centres de développement de l’entreprise qui,
à leur tour, aident la petite entreprise des collectivités
au moyen de prêts et de services-conseils techniques et
d’aide à la planification. Le Ministère finance également
De nombreux autres ministères fédéraux interviennent
directement dans le développement, dont le ministère du
Développement des ressources humaines du Canada,
Pêches et Océans Canada, Industrie Canada et le ministère
des Ressources naturelles du Canada45. En plus de veiller
à l’exécution des obligations prescrites par la loi, la plupart
de ces ministères offrent des subventions et des programmes
visant le développement économique. Récemment, le ministère du Développement des ressources humaines du
Canada et le gouvernement du Nunavut ont conclu une
entente de développement du marché du travail qui
prévoyait le transfert de plus de 2 millions de dollars
au Nunavut, sur une période de deux ans, afin de mettre
sur pied des programmes visant le recrutement des sansemploi, la formation en cours d’emploi et l’apprentissage
des compétences nécessaires au travail autonome. L’an
dernier, Industrie Canada a lancé le Centre Canada-Nunavut
de services aux entreprises, en collaboration avec le ministère
du Développement durable du Nunavut. Ce Centre, établi
dans trois collectivités et accessible par téléphone et par
29
Le Conference Board du Canada
présente dans le domaine de la pêche hauturière à la
crevette et au turbot, de la gestion aéroportuaire, du
nettoyage des stations du Réseau d’alerte avancé (DEW),
des services de gestion de l’environnement, des activités
d’exploitation minière, des services de transport par
hélicoptère, de la vente et des services d’entretien de
la machinerie lourde, de la livraison de produits pétroliers
et des activités de construction et de vente immobilières47. Les associations de développement économique
encouragent l’expansion de la petite entreprise inuite et
l’amélioration des compétences de travail des Inuit. En
1999, figuraient sur la liste des entreprises inuites tenue
par la NTI plus de 250 entreprises majoritairement inuites,
dont 43 p. 100 dans la région de Baffin, 28 p. 100 dans la
région de Kivalliq, 22 p. 100 dans la région de Kitikmeot
et 7 p. 100 à l’extérieur du Nunavut.
Internet, est la première source d’information pour tout
entrepreneur à la recherche de renseignements portant sur
les programmes et services offerts par le gouvernement.
Malgré l’existence de ces programmes d’aide au développement, le gouvernement du Nunavut redoute l’expiration
des ententes fédérales-territoriales de développement
économique et l’absence de tout organisme fédéral de
développement économique dans leur région, service dont
bénéficient d’autres régions au Canada.
4.4.5.2 Organisations inuites constituées en sociétés
La création de richesses repose en deuxième lieu sur les
organisations inuites constituées en sociétés comme la NTI
et les trois associations inuites régionales : l’Association
inuite de Qikiqtani, celle de Kitikmeot et celle de Kivalik.
Toutes exercent une influence considérable au Nunavut46.
Le recours à ce type d’organisations est un modèle de plus
en plus apprécié et populaire dans le domaine du développement au Nunavut. Le poids qu’ont ces organisations est un
phénomène particulier à l’économie du Nunavut.
La Nunasi Corporation est une autre société inuite à
laquelle tous les Inuit de plein droit en vertu de l’ARTN
appartiennent. Établie en 1976, elle s’implique dans des
activités commerciales présentant des avantages à la fois
sociaux et économiques pour ses actionnaires inuits. Cette
société est propriétaire de plusieurs des entreprises de
l’Arctique, dont la Kit Nuna, une entreprise de construction en plein essor découlant d’un partenariat entre la
Nunasi et la Kitikmeot Development Corporation.
Comme nous l’avons mentionné plus tôt, il incombe entre
autres à la Tunngavik (NTI) de veiller à l’accomplissement
des obligations prévues par l’Accord sur les revendications
territoriales du Nunavut. La Tunngavik a récemment fondé
l’Atuqtuarvik Corporation, société de prêt et d’investissement indépendante qui soutient les investissements inuits
grâce à des fonds de lancement de la Fiducie du Nunavut.
La valeur initiale du fonds s’élève à 20 millions de dollars,
auxquels viendront s’ajouter des versements de 10 millions
par année, sur les trois prochaines années.
La Nunavut Construction Corporation (NCC) constitue
également une force majeure sur le plan du développement
économique. Elle appartient à la Nunasi et aux trois organismes de représentation des Inuit de plein droit. Cette
entreprise se veut un véhicule permettant de répartir les
travaux à faire sur l’infrastructure du Nunavut entre toutes
les collectivités, au lieu de les limiter aux collectivités où
l’infrastructure doit être installée. La NCC a contribué à la
construction et à la gestion du grand nombre de logements
et de bureaux associés à l’établissement du Nunavut (voir
l’encadré de la page suivante, pour plus de détails).
Sous l’égide de la NTI, une société de développement
économique représentant les Inuit de plein droit ainsi
qu’une association de développement de la petite entreprise inuite ont été créées dans chacune des trois régions
du Nunavut : la Qikiqtaaluk Corporation et la Kakivak
Association, la Sakku Investments Corporation et Kivalliq
Partners in Development, et finalement la Kitikmeot
Corporation et la Kitikmeot Economic Development
Commission. Ces sociétés ou organisations inuites examinent les débouchés possibles pour les Inuit (par la
voie d’initiatives de création d’emplois, de formation ou
d’échanges de compétences) et l’établissement de coentreprises avec des partenaires intéressés. Jusqu’à présent,
la Tunngavik a octroyé plus de 10 millions de dollars
aux sociétés et aux associations de développement par
l’entremise de son Nunavut Investment Review Committee
(NIRC) dans l’idée de soutenir leurs investissements dans
des coentreprises du secteur immobilier ou de celui de la
construction. Par exemple, la Qikiqtaaluk Corporation est
Le Conference Board du Canada
4.4.5.3 Le secteur privé
Le secteur privé est le troisième intervenant d’importance
dans la création de richesses. Comme nous le montrerons
au chapitre 5, il n’est pas très développé au Nunavut.
Il existe notamment très peu d’associations comme des
chambres de commerce. Malgré certains signes prometteurs
comme l’établissement de lieux d’affaires au Nunavut, la
survie du secteur privé dépend encore lourdement des
marchés publics.
Tel que mentionné en début de chapitre, plusieurs obstacles
s’opposent à l’expansion du secteur privé au Nunavut, y
compris le manque de locaux commerciaux, le coût élevé
30
du transport, la nécessité de s’approvisionner chez les
fournisseurs du Sud, le manque de main-d’œuvre spécialisée et qualifiée, le faible esprit d’entreprise et l’impossibilité de faire concurrence au secteur public sur le plan
des salaires et des avantages sociaux. En effet, les travailleurs qualifiés du secteur privé hésitent rarement à se
saisir des offres d’emploi du gouvernement qui les paiera
mieux et leur accordera de meilleurs avantages sociaux.
et de la gestion de la faune dans le cas du Conseil de gestion des ressources fauniques. Les IG s’inspirent des
grandes leçons tirées de l’affaire du pipeline de la vallée
du McKenzie dans les années 1970. Ces commissions et
conseils sont solidement établis, compétents et dotés de
mécanismes d’examens formels permettant de réduire les
risques de malentendus susceptibles d’occasionner des
retards dans l’exécution des projets.
4.4.5.4 Les institutions gouvernementales
4.4.5.5 Coordination des secteurs
Le réseau d’institutions gouvernementales (IG) établies en
vertu de l’ARTN est le quatrième intervenant de taille dans
la création de richesses. Ces IG, dont les conseils d’administration comptent tant des Inuit que des non-Inuit, sont
chargées respectivement de l’examen des questions de
développement dans le cas de la Commission du Nunavut
chargée de l’examen des répercussions, des questions relatives à l’eau dans le cas de l’Office des eaux du Nunavut,
Toutes nos sources importantes d’information se sont dites
inquiètes du manque de coordination entre les quatre
secteurs et les principaux intervenants. Plusieurs organismes sont créés et lancent des programmes et, à moins
que l’on ne prête une attention immédiate à cette lacune,
le manque de coordination avec les autres entraînera des
chevauchements et des inefficacités. Cette question est
examinée plus en détail au chapitre 7.
Nunavut Construction Corporation
La Nunavut Construction Corporation (NCC) est responsable du financement, de la construction et de la gestion des logements et bureaux supplémentaires dont a besoin le gouvernement du Nunavut.
La NCC a été constituée en 1995. En vertu d’une entente de partenariat conclue entre le gouvernement du Canada, la Nunavut Tunngavik Inc. et la
Nunavut Construction Corporation, la NCC s’est vue confier le développement des projets d’infrastructure pour le nouveau gouvernement du Nunavut.
L’infrastructure compte 250 unités de logement et 10 édifices à bureaux, y compris les installations de l’Assemblée législative. La NCC a assuré la
totalité du financement des projets par l’entremise d’établissements financiers du secteur privé.
La NCC a entrepris la construction d’édifices à bureaux et d’unités de logement pour le personnel dans chacune des onze collectivités désignées dans
le modèle de décentralisation du gouvernement du Nunavut : Cape Dorset, Pangnirtung, Pond Inlet, Iqaluit, Igloolik, Arviat, Rankin Inlet, Baker Lake,
Kugluktuk, Cambridge Bay et Gjoa Haven.
La NCC est un excellent exemple de la mise en application de l’article 24 de l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut. Plus de 70 p.
100 de ses employés, dont 22 apprentis, sont Inuit. Depuis le mois de juillet 1997, ses apprentis ont accumulé plus de 80 000 heures de formation
en cours d’emploi.
Plus de 65 entreprises des collectivités et des régions du Nunavut ont tiré profit de travaux donnés en sous-traitance par la NCC ainsi que de ses
achats de biens et de services, y compris des services de triage et de couvrage, des services d’hébergement et de restauration, du gravois et des
matériaux de remplissage, des matériaux de construction et des services de location d’outils et de machinerie. En outre, le transport aérien et
maritime est assuré par des entreprises appartenant aux sociétés représentant les Inuit de plein droit du Nunavut.
Les parts de la NCC sont réparties également entre les quatre sociétés de développement représentant les Inuit de plein droit : la Qikiqtaaluk
Corporation, la Sakku Investments Corporation, la Kitikmeot Corporation et la Nunasi Corporation.
Dans le cadre du projet d’infrastructure du gouvernement du Nunavut, la NCC avait terminé, le 31 mars 1999, la construction de 146 unités de
logement et de trois édifices à bureaux. Au début de 2000, elle comptait à son actif 104 unités de logements et sept édifices à bureaux régionaux
supplémentaires.
Source : http://pooka.nunanet.com/-thencc/about_ncc.htm.
31
Le Conference Board du Canada
24 Archibald et Grey, op. cit., p. 3.
1 George Wenzel, « Inuit Sealing and Subsistence Managing After the E.U. Sealskin
Ban », Geoghraphische Zeitschrift, 32:2, p. 130-142.
25 Statistics Greenland, Greenland 1997 — Statistical Yearbook,
http://www.statgreen.gl/english/yearbook/yb1997.htm.
2 Gouvernement du Nunavut, A Commitment to New Organisational Values, rapport
final du Groupe de travail sur le logement du Nunavut, 2000.
26 Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, Services communautaires de
développement économique, Environmental Scan.
http://www.gov.nt.ca/RWED/ced/env_scan/scan.html.
3 Iqaluit Community Economic Development Study, 2000.
4 Société d’habitation du Nunavut, Plan d’affaires 2001-2002.
27 Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, ministère de la Santé et des Services
sociaux, cité dans Hicks et White, op. cit., p. 89.
5 Ibid.
6 Cela dit, selon le supplément de l’Enquête de 1999 sur la population active du
Nunavut, du Bureau de la statistique du Nunavut, plus de 60 p. 100 des Inuit qualifient leur logement d’adéquat ou de plus qu’adéquat. L’écart entre l’opinion des
experts et les cotes du sondage est sans doute imputable au fait que les Inuit sont
plus tolérants à l’égard des mauvaises conditions de logement et aux différences
culturelles entre les Inuit et le reste de la population en ce qui a trait au logement.
28 Gouvernement du Nunavut, ministère de la Santé et des Services sociaux,
Nunavut Brighter Futures: 1999-2000 Year-end Report, http://www.gov.nu.ca.
29 Sandy Isaacs et coll., « Suicide in the Northwest Territories: a Descriptive Review »,
Maladies chroniques au Canada, 1998, 19:4.
30 CRPA, op. cit., vol. 2, chapitre 5, s. 1.2.
7 Gouvernement du Nunavut, Transportation Strategy 2001, inventaire des systèmes
de transport du Nunavut commandé dans le cadre de l’élaboration d’une stratégie
de transport, Iqaluit.
31 James Franklin et Nunavut Environmental Ltd.
8 Municipalité d’Iqaluit, soumission déposée au Comité des finances de la Chambre
des communes, 31 août 2000.
32 À Qikiqtarjuaq, plus de 60 p. 100 des enfants inuits de moins de 15 ans et près de
40 p. 100 des femmes en âge de procréer présentaient un taux de PCB supérieur au
taux jugé « tolérable » par Santé Canada. Santé Canada, A Second Diagnostic on
the Health of First Nations and Inuit People in Canada, novembre 1999.
9 Voir, par exemple, Commission d’établissement du Nunavut, L’empreinte de nos pas
dans la neige fraîche, rapport global à l’intention du ministère des Affaires indiennes
et du Nord canadien, du gouvernement des T.N.-O. et de la Nunavut Tunngavik Inc.,
qui traite de l’organisation et de la structure du gouvernement du Nunavut, Iqaluit,
NU, mars 1995.
33 Terry Fenge, « Political Development and Environmental Management in Northern
Canada: The Case of the Nunavut Agreement », Études/Inuit/Studies, 1992,
16 (1-2), p. 115-141.
34 Accord entre les Inuit de la région du Nunavut et sa Majesté la Reine du chef du
Canada, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et la Tunngavik, 1993.
10 Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, Le
CRTC approuve un plan visant à réduire les tarifs interurbains et à améliorer les
services téléphoniques des abonnés de Northwestel, Communiqué de presse,
30 novembre 2000.
35 William Hamley, « The Nunavut Settlement: A Critical Appraisal », Revue internationale d’études canadiennes, automne 1995, vol. 12.
36 Le présent rapport est un exemple du travail que permet ce partenariat.
11 Conseil communautaire du développement économique d’Iqaluit, Balanced
Development, 2000.
37 Les premières élections au Nunavut ont eu lieu le 15 février 1999.
12 Conseil des ministres de l’Éducation du Canada (CMEC), Indicateurs de l’éducation
au Canada 1999, 2000. http://www.cmec.ca/stats/pceip/1999pdf/
38 Mary Simon, discours prononcé lors de la collection des grades d’octobre 1994, à
l’Université Queen’s, cité dans L’Empreinte de nos pas dans la neige fraîche, p. 13.
13 Ibid.
39 L’Empreinte de nos pas dans la neige fraîche, op. cit., p. 57.
14 Ministère de l’Éducation du Nunavut, Ajunngittutit!, Iqaluit, septembre 2000.
40 Voir, par exemple, la résolution no 00-01 portant sur l’activité économique au sein des
collectivités dépourvues d’infrastructures de l’Association des municipalités du
Nunavut. Celle-ci demande au gouvernement du Nunavut d’élaborer un plan qui garantira aux 15 collectivités plus petites d’être traitées équitablement et de recevoir leur
juste part des budgets d’immobilisation et des budgets de fonctionnement et d’entretien.
15 Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, Toward Excellence: A Report on
Education in the NWT, 1996-1997, Yellowknife, 1997.
16 CMEC, op. cit.
41 Hicks et White, op. cit., p. 66.
17 Linda Archibald et Roda Grey, Evaluation of Models of Health Care Delivery in Inuit
Regions, Ottawa, Inuit Tapirisat du Canada, 8 septembre 2000.
42 Gouvernement du Nunavut, The Bathurst Mandate Pinasuaqtavut: That Which We’ve
Set Out To Do, 1999. http://www.gov.nu.ca/Bathurst/ve.htm.
18 Le Conference Board du Canada, Performance and Potential 2000.
43 Gouvernement du Nunavut, ministère de la Culture, des Langues, des Aînés et de la
Jeunesse, Report from the September Inuit Qaujimajatuqangit Workshop,
Niaqunngnut, Nunavut, du 29 au 30 septembre 1999.
19 Jack Hicks et Graham White, « Nunavut: Inuit Self-Determination Through a Land
Claim and Public Government? », Nunavut: Inuit Regain Control of Their Lands
and Their Lives, Copenhague, Danemark, J. Dahl, J. Hicks et P. Jull, Groupe
international de travail pour les affaires indigènes, 2000, p. 34-35.
20 Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, Toward Excellence: A Report on
Education in the NWT 1996-97. http://siksik.learnet.ca/to_excellence/mainfram.htm.
21 Ces chiffres nous ont été fournis par le ministère de l’Éducation du Nunavut.
22 Hicks et White, op. cit., p. 37.
23 Canada, Rapport final de la Commission royale sur les peuples autochtones (CRPA),
Ottawa, Approvisionnements et Services Canada, 1994, volume 4, chapitre 6.
44 Gouvernement du Nunavut, communiqué de presse, 2 décembre 1999, Iqaluit.
http://www.gov.nu.ca/eng/news/1999-45-C.html.
45 Le Conseil fédéral du Nunavut, composé de cadres de direction de tous les
ministères fédéraux chargés des programmes et services au Nunavut, se réunit
régulièrement en vue de favoriser la coopération en matière de politiques et
de programmes.
46 Hicks et White, op. cit., p. 85.
47 Site Web de la Qikiqtaaluk Corporation (http://pooka.nunanet.com/~qc/index.html).
Le Conference Board du Canada
32
5—Aperçu de l’economie mixte du Nunavut
c’est que l’activité économique du Nunavut est bien différente de celle du reste du Canada. L’économie, unique en
son genre, du Nunavut ne se prête pas aux analyses qui
s’appuient sur les méthodes d’évaluation économique conventionnelles utilisées pour les économies numéraires.
Nous tenterons, dans ce chapitre, d’évaluer le rendement
de l’économie « mixte » ou « globale » du Nunavut à la
lumière des informations dont nous disposons sur l’économie
de subsistance et sur l’économie basée sur les salaires.
Faits saillants
• L’économie mixte du Nunavut, unique en son genre, est un
mélange d’économie de subsistance et d’économie basée sur
les salaires. L’économie de subsistance (ou économie non
monétaire) englobe un certain nombre d’activités dont la
chasse, la pêche, le piégeage, l’artisanat, la couture et la
garde d’enfants non organisée.
• Malgré l’importance de l’économie de subsistance, il n’existe
que très peu de données sur sa valeur. On situe celle-ci entre
40 millions et 60 millions de dollars, en incluant les secteurs
des pêcheries et de la fabrication, la chasse de subsistance et
la confection de vêtements.
Les dirigeants du Nunavut parlent d’une « économie mixte »
combinant l’économie de subsistance et l’économie basée
sur les salaires. Ces deux systèmes économiques ne sont
pas diamétralement opposés et, pour la plupart des
Nunavummiut, il ne s’agit pas de choisir à quel système
participer, mais plutôt de trouver un juste équilibre entre
les deux. Au Nunavut, les revenus proviennent de quatre
sources : des activités économiques, des activités de production et de vente ou de troc de biens et de services associés aux activités de subsistance (p. ex., peaux de phoque),
de l’activité économique basée sur les salaires et des transferts de fonds du gouvernement, telles les prestations
d’assurance-emploi, d’aide sociale ou de primes de retraite.
Le revenu d’un ménage peut provenir de toutes ces sources
et représenter la contribution de plusieurs membres de la
famille1. Comme en faisait état la Commission royale sur
les peuples autochtones, « c'est en combinant le revenu
provenant de ces sources que la plupart des autochtones parviennent à subvenir à leurs besoins depuis plusieurs dizaines
d'années et qu'ils continuent de le faire aujourd'hui »2.
• Les données annuelles complètes sur l’économie basée sur
les salaires du Nunavut ne remontent pas plus loin que 1999.
Bien qu’il faille procéder avec circonspection à l’analyse de
l’économie du territoire à la lumière d’un seul point de données, les chiffres montrent à quel point l’économie du
Nunavut repose sur le secteur public.
• Le PIB révèle également la mesure dans laquelle les importations dominent le relief économique du Nunavut : importations d’une valeur de 562 millions de dollars par rapport à
une économie intérieure de 1,06 milliard de dollars.
• Le fait de dépendre du secteur public pour combler les
besoins d’emplois d’une population en croissance n’est
manifestement pas une solution durable. Au-delà du moyen
terme, la croissance du secteur public ralentira par rapport
à celle de la population. Cela pourrait poser un sérieux
problème si le Nunavut ne veille pas à diversifier ses
activités économiques.
5.1
Compte tenu de l’état des quatre formes de capital essentielles à la création de richesses au Nunavut, quel est le
rendement économique du Nunavut? Une chose est sûre,
L’ÉCONOMIE DE SUBSISTANCE ET SON RÔLE DANS
L’ÉCONOMIE MIXTE
Nombre d'économies autochtones demeurent fondées sur les
activités traditionnelles que sont la chasse, la pêche et le
piégeage, surtout à des fins de subsistance. Souvent, la
33
Le Conference Board du Canada
politique gouvernementale a laissé de côté ces économies
traditionnelles ou, ce qui est plus grave, a miné leur viabilité. Pourtant, ces activités demeurent un élément essentiel
des économies mixtes des communautés du Nord en ce sens
qu'elles représentent un mode de vie de prédilection pour
leurs participants, et un fondement très important de la
culture et de l'identité autochtones3.
L’intérêt de l’exploitation des ressources fauniques dépasse
les seuls avantages économiques. Les aliments du terroir
peuvent être très nutritifs. La viande de caribou, par
exemple, contient 27 p. 100 de protéines et très peu de
gras. Sur le plan social, la première prise de chasse d’un
garçon marque une étape importante de son développement qui contribue à son estime de lui-même. C’est aussi
un premier pas vers un rôle productif dans la collectivité.
Toute description de l’économie de subsistance doit
d’abord reconnaître qu’il ne s’agit pas seulement d’une
simple activité économique, mais d’une partie intégrante
du patrimoine social et culturel, inhérent au mode de vie
des Inuit. En tant que composante du QI, décrit plus tôt,
l’économie de subsistance suppose le partage des ressources
en fonction des rôles et des responsabilités de chacun
selon le sexe, l’âge, l’expérience et l’affiliation hiérarchique.
Le maintien d’une économie de subsistance peut s’avérer
onéreux. Les activités d’exploitation des ressources fauniques suffisent rarement à assurer toutes les ressources
GRAPHIQUE 3
Fréquence de la consommation de caribou par les Inuit
(en pourcentage)
L’économie de subsistance englobe toutes les activités
économiques non rémunérées comme la pêche, la chasse,
la confection de vêtements et la garde d’enfants non
organisée. Comme nous l’avons mentionné plus tôt, l’ARTN
compte de nombreuses dispositions qui soutiennent l’économie de subsistance. Il concède aux Inuit des droits
d’exploitation des ressources fauniques qui suffisent à
combler leurs besoins économiques, sociaux et culturels.
Non précisé (3 %)
Rarement ou
jamais (16 %)
1 ou 2 fois
par semaine (27 %)
La nourriture traditionnelle, produit de l’exploitation des
ressources fauniques, est à la base du régime alimentaire de
la majorité des ménages inuits. Tel que l’illustre le graphique
3, près de 31 p. 100 des ménages inuits consomment quotidiennement ou presque de la viande de caribou alors que
16 p. 100 seulement disent ne jamais ou rarement consommer du caribou. Le poisson et la viande de phoque, de bœuf
musqué, de ptarmigan, de narval et de baleine comptent
également parmi les aliments. Selon l’Enquête de 1999 sur
la population active du Nunavut (graphique 4), une forte
proportion (78 p. 100) d’Inuit de sexe masculin âgés de 15
à 54 ans prennent part fréquemment ou occasionnellement
aux activités d’exploitation des ressources fauniques.
3 ou 4 fois
par semaine (23 %)
Source : Enquête sur la population active du Nunavut, 1999.
GRAPHIQUE 4
Fréquence des activités d’exploitation des ressources
naturelles par les Inuit de sexe masculin (qui ont un emploi)
(en pourcentage)
Non précisé (5 %)
Le coût-valeur de remplacement de la nourriture provenant
de l’exploitation des ressources fauniques du Nunavut
s’élève à 30 millions de dollars au minimum ou au coût de
l’importation de denrées alimentaires du sud du Canada4.
Sans l’exploitation de ressources fauniques, ces coûts
d’importation augmenteraient de manière importante5.
Le gouvernement du Nunavut envisage actuellement l’adoption de stratégies visant à favoriser l’accès aux aliments du
terroir en en assurant une meilleure distribution dans les
différentes collectivités. L’exploitation des ressources fauniques fournit également de précieux sous-produits, notamment pour l’artisanat (p. ex., peaux pour la confection de
vêtements ou ivoire pour les sculptures et les bijoux).
Le Conference Board du Canada
Quotidiennement
ou presque (31 %)
Rarement ou
jamais (17 %)
Fréquemment (37 %)
Occasionnellement (41 %)
Source : Enquête sur la population active du Nunavut, 1999.
34
dans le cadre de l’économie basée sur les salaires, elle inclut
aussi quelques activités non rémunérées dans le calcul estimatif du PIB. Il s’agit, pour les plus importantes, de valeurs
« imputées » aux frais de logement des propriétaires et aux
aliments consommés par les ménages d’agriculteurs.
nécessaires au maintien de cette forme d’économie. Le
recours à l’économie monétaire est incontournable si l’on
considère que l’activité d’exploitation suppose l’achat de
l’équipement nécessaire à la chasse (p. ex., motoneiges,
essence, munitions et armes à feu) et du temps consacré
à la chasse6. Bien souvent, ceux qui peuvent se permettre
de pratiquer la chasse ne disposent pas du temps et de
l’expertise nécessaires alors que ceux qui en possèdent
les compétences ne disposent pas de l’argent nécessaire
à l’achat de l’équipement7. Conjointement, ces activités
et compétences peuvent se soutenir mutuellement.
Comme nous l’avons mentionné dans la section précédente, le problème que soulève le recours à cette seule
méthode d’évaluation de la production tient au fait qu’une
large part de l’activité économique du Nunavut se déroule
au sein des ménages dans le cadre des activités de subsistance. Cet élément est essentiel à la détermination du
revenu des ménages du Nunavut. Dans le sud du pays,
la taille relativement faible de l’économie de subsistance
ainsi que le manque de données statistiques à ce sujet a
mené à son exclusion pratiquement complète des Comptes
du revenu national par Statistique Canada. Comme les
comptes provinciaux sont calqués sur le modèle des
comptes nationaux, la valeur de production estimative
« imputée » à l’économie de subsistance ne figure pas
dans l’estimation du PIB du Nunavut récemment produite
par Statistique Canada.
Le partage des ressources contribue donc de manière
importante à l’économie mixte où les revenus salariaux
sont intégrés aux biens et services produits à l’extérieur
du système basé sur les salaires et partagés entre les
membres de la famille et entre les familles de la collectivité. La participation à l’économie basée sur les salaires
ne représente souvent pas une fin, mais plutôt un moyen
d’assurer la continuité des activités socio-économiques
propres à l’économie de subsistance8.
Compte tenu de l’importance de ces activités dans la vie
des Nunavummiut, nombreux sont les chercheurs et les
universitaires qui insistent pour que l’on voit dans les
activités d’exploitation des ressources fauniques un métier
ou une forme d’emploi autonome. Il a été également
recommandé, par exemple par la Commission royale sur les
peuples autochtones, de remanier les programmes d’aide
sociale et d’en faire des programmes d’aide à l’exploitation
des ressources fauniques en vue de rendre ces activités
légitimes et de les encourager.
L’inclusion d’estimations du produit de l’économie de subsistance dans le calcul du PIB est conceptuellement justifiable9. Dans le cas du Nunavut, toute discussion du PIB
doit inclure des estimations de l’économie de subsistance
étant donné sa taille appréciable par rapport à l’autre
système économique et son importance dans l’activité
économique locale.
La détermination de la valeur réelle de l’économie de
subsistance au Nunavut n’est pas une tâche facile, et ce,
pour nombre de raisons. L’échange de biens et de services
en l’absence de transactions financières élimine toute
possibilité d’accorder une valeur exacte aux produits
troqués. Par ailleurs, la production de biens à l’usage
du ménage est rarement consignée avec précision.
La NTI administre le Nunavut Harvesters Support Program
dans l’idée de fournir une aide financière aux particuliers
et aux collectivités désireuses d’entreprendre des activités
d’exploitation des ressources fauniques (p. ex. équipement
de chasse). Le budget accordé au programme s’élève à
30 millions de dollars et vient à parts égales de la NTI et
du gouvernement territorial. Depuis les années 70, celui-ci
offre également certains programmes de soutien des activités d’exploitation des ressources fauniques. Il a alloué
2,4 millions de dollars à ces programmes en 2000-2001.
5.1.1
Il n’en demeure pas moins que toute production extérieure
à l’économie basée sur les salaires doit, autant que
possible, être reconnue et quantifiée. La NTI et le gouvernement du Nunavut, comme nous l’avons dit, fournissent déjà une aide aux Inuit œuvrant au sein de
l’économie de subsistance. Cependant, si l’on arrive à
attribuer une valeur quantitative à l’économie de subsistance, on permettra aux participants à cette économie de
subsistance de se faire entendre par un auditoire beaucoup
plus vaste, un auditoire qui a tendance à ne saisir les concepts économiques que lorsqu’ils sont exprimés en termes
numériques. Cette visibilité accrue sera indéniablement
favorable au marketing de la valeur et des actifs du
Nunavut sur la scène canadienne et internationale.
Estimation de la taille de l’économie
de subsistance
Tous les systèmes économiques comptent des activités
rémunérées et des activités non rémunérées. Or, si la
méthode adoptée par Statistique Canada pour estimer la
valeur de production ou le produit intérieur brut (PIB) se
limite presque exclusivement à la valeur attribuée aux biens
et services produits et ensuite échangés contre de l’argent
35
Le Conference Board du Canada
trouve donc à la base de presque toutes les activités de
subsistance (p. ex. l’enfant apprend à coudre et à chasser
auprès de ses parents ou de ses grands-parents).
C’est donc dans cette optique que l’on veut tenter d’estimer la valeur de l’économie de subsistance du Nunavut.
Des sondages ont déjà été entrepris en vue de déterminer
le nombre de personnes participant à l’économie de subsistance et d’estimer la valeur monétaire de certains biens
et services. Les informations ainsi recueillies permettront
d’attribuer une valeur approximative à l’économie de subsistance du Nunavut, bien que d’importantes lacunes dans
les données font obstacle à un calcul exact. Dans le cadre
de cette étude du Conference Board, nous n’avons pas
essayé de refaire le calcul de ces estimations, mais nous
jugeons essentiel de connaître la gamme des valeurs
potentielles afin de déterminer la taille relative de l’économie de subsistance.
5.2
Lorsque les comptes économiques du Nunavut pour l’année
1999 ont été rendus publics, le monde a reçu son premier
instantané de l’économie basée sur les salaires du territoire.
Contrairement aux autres régions, pour lesquelles on
détient des données passées, le Nunavut est encore trop
jeune pour avoir un point de données. On ne doit donc
utiliser qu’avec beaucoup de circonspection ces chiffres
qui, en fait, ne peuvent vraiment servir qu’à donner une
idée de l’année à laquelle ils se rapportent. Cette circonspection est d’autant plus nécessaire dans le cadre de l’étude
d’une économie en transition comme celle du Nunavut.
À partir des informations recueillies auprès de diverses
sources, y compris les principaux intervenants, nous avons
établi que la valeur de l’économie de subsistance du
Nunavut se situait aux environs de 40 millions à 60 millions
de dollars. Cette fourchette comprend une valeur de
30 millions attribuée à l’activité économique associée
aux denrées alimentaires10. Au-delà de ce stade, il devient
difficile d’attribuer des chiffres aux activités spécifiques.
L’industrie de l’artisanat, par exemple, comporte une part
d’activité minière (extraction de la pierre à sculpter), ainsi
que certaines activités de chasse (fournissant le cuir,
les os, etc. ) et bien entendu l’activité artisanale comme
telle, c’est-à-dire la sculpture ou la couture. Ces activités
débouchent également sur l’industrie du textile et du
vêtement et comblent l’écart entre l’économie de subsistance et l’économie basée sur les salaires puisque certains
des produits font l’objet de troc ou sont simplement donnés
à des membres de la famille alors que d’autres sont vendus
à des commerçants grossistes. L’activité touristique, dont
les expéditions de chasse à l’ours polaire et les camps de
chasse sportive, rentabilise l’économie de subsistance bien
qu’encore une fois, il soit difficile d’en déterminer la
valeur. Certains estiment que celle-ci rapporte plus de
4 millions de dollars par année. Ces chiffres ne comptent
pas la valeur non consignée de la garde d’enfants, du
travail bénévole ou des actifs partagés. L’inclusion de
ces activités ajouterait considérablement à la taille de
l’économie de subsistance, mais il faut bien reconnaître
que si la valeur des activités au foyer telles la garde
d’enfants et les travaux ménagers était incluse dans les
calculs nationaux, l’économie canadienne connaîtrait
également un essor considérable.
Cela ne veut pas dire que ces chiffres sont sans intérêt.
Au contraire, la première année d’existence du Nunavut
révèle certains hauts points intéressants. Le produit
intérieur brut (PIB) réel est la mesure la plus courante
du rendement économique et exprime en dollars la valeur
des biens et services finals produits par une région. Les
économistes se servent de chiffres réels (c.-à-d. de chiffres
basés sur un prix constant) afin d’empêcher que l’inflation
ne déforme la valeur monétaire réelle d’une économie.
Au Nunavut, la valeur réelle du PIB de 1999 se chiffrait
à 682 millions de dollars aux prix constants de 1992.
Parallèlement, le PIB réel par habitant, jalon du bien-être
économique, se chiffrait à 25 259 dollars au Nunavut par
rapport à une moyenne nationale de 24 642 dollars par
habitant. En vertu de la définition conventionnelle, ces
chiffres suggèrent que le Nunavummiut est plus à l’aise
que le Canadien moyen. Cependant, si nous examinons les
revenus personnels par habitant pour ces deux régions,
mesure plus pertinente pour la majorité de la population,
il en ressort que le revenu des Nunavummiut se chiffre à
18 630 dollars par personne alors que, dans l’ensemble du
Canada, la moyenne est de 25 485 dollars par personne.
Ce résultat plutôt singulier s’explique si l’on décompose
les chiffres de l’année 1999. Le tableau 8 donne la liste
des principales rubriques composant le PIB basé sur les
dépenses du Nunavut. De toute évidence, au Nunavut, le
secteur public (fédéral, territorial et municipal) est un
intervenant vital de l’économie basée sur les salaires. En
termes réels, les dépenses publiques totales au chapitre
des biens, des services et des investissements ont dépassé
de 55 p. 100 la demande intérieure globale par rapport à
environ 22 p. 100 à l’échelle nationale. Pendant la même
L’attribution d’une « valeur » à l’économie de subsistance
du Nunavut est aussi importante dans la mesure où celleci contribue largement au patrimoine social du peuple
inuit, aspect auquel il est difficile de fixer une « valeur ».
Néanmoins, il renforce le capital humain du Nunavut et se
Le Conference Board du Canada
APERÇU DE L’ÉCONOMIE BASÉE SUR LES SALAIRES
DU NUNAVUT
36
période, le gouvernement a employé 4 006 personnes,
ce qui représente près de la moitié de l’emploi territorial
global. Ce chiffre a atteint 5 290 au cours du premier
trimestre de l’exercice 2000-2001. Statistique Canada
estime aussi à 185 millions de dollars les salaires et
revenus d’emploi versés aux fonctionnaires du Nunavut au
cours de l’exercice 1999-2000, ce qui laisse 300 millions de
dollars en dépenses nominales pour les biens et services
non rémunérés. Cela explique peut-être la dichotomie
entre un PIB élevé et, parallèlement, un faible taux de
revenu par habitant. Au Nunavut, le gouvernement a
consacré la plus grande part de son budget au secteur
des produits et services non rémunérés. Cela contribue
à gonfler les chiffres du PIB basé sur les dépenses, mais
n’a que des répercussions indirectes et intentionnelles
sur les niveaux de revenu personnel.
et les écoles est devenu de plus en plus onéreux partout
au Canada en raison de la prolifération d’outils électroniques
tels les ordinateurs de bureau et les réseaux informatiques.
D’ailleurs, le Conference Board prévoit que les dépenses
non salariales réelles du gouvernement excéderont les
dépenses salariales réelles au cours des vingt prochaines
années (voir le graphique 5). Soulignons également que
les gouvernements provinciaux et territoriaux assument
une plus grosse part des dépenses salariales, puisqu’ils
sont responsables des salaires du personnel enseignant
et hospitalier alors que le gouvernement fédéral doit, lui,
maintenir un pourcentage plus élevé de personnel administratif. Néanmoins, une question se pose : « À l’avenir,
une fois le gouvernement bien établi, comment dépenserat-il les fonds publics? » On peut supposer que la tendance
générale des dépenses au Nunavut se rapprochera de la
moyenne nationale où les dépenses actuelles en biens
et services sont réparties plus uniformément entre les
dépenses salariales et les dépenses non salariales. À
moyen terme, cela pourrait se traduire par une augmentation des sommes allouées aux programmes et peut-être
même, dans une plus grande mesure, à des projets d’investissement.
Les tendances observées actuellement sur le plan des
dépenses gouvernementales n’ont rien d’étonnant si l’on
se rappelle que le nouveau gouvernement du Nunavut a
besoin de s’« outiller » dans tous les secteurs pour bien
fonctionner. L’« outillage » des fonctionnaires du gouvernement et des services publics comme les hôpitaux
TABLEAU 8
Produit intérieur brut de 1999 en termes de dépenses, aux prix du marché
(en millions de dollars)
Nominal
Réel
(prix de 1992)
Dépenses personnelles en biens et services de consommation
340
320
Dépenses des administrations publiques courantes
en biens et services
527
460
69
74
Construction
49
40
Machinerie et équipement
20
34
127
113
Ouvrages résidentiels
10
9
Ouvrages non résidentiels
75
62
Machinerie et équipement
42
42
Demande intérieure finale
1063
967
Exportations nettes
–235
–195
Exportation de biens et services
327
298
Importation de biens et services
–562
–493
Divergence statistique
–97
–90
Produit national brut aux prix du marché
731
682
Formation brute de capital fixe des administrations publiques
Formation brute de capital fixe des entreprises
Source : Statistique Canada.
37
La comparaison de la demande
intérieure réelle avec la production
révèle également un autre aspect particulier à l’économie du Nunavut. En
1999, la demande intérieure réelle s’élevait à 967 millions de dollars alors que
le PIB réel était de 682 millions. Ces
chiffres indiquent que la population
consomme une quantité beaucoup plus
grande de biens et de services qu’elle
n’en produit, ce qui provoque un déficit
commercial de 195 millions de dollars
ou de 6 851 dollars par habitant. Ce
déficit est possible sans entraîner de
ramifications économiques en raison
des flux monétaires importants du
gouvernement fédéral au Nunavut,
sous forme de transferts et de salaires
directs. En outre, l’expansion de l’administration publique a favorisé l’essor
du secteur local d’approvisionnement
en services, la création d’emplois et la
circulation monétaire qui faisait largement défaut. Cependant, à plus long
terme, on a lieu de s’inquiéter du taux
relatif d’augmentation de ces transferts
comparativement au taux de croissance
démographique. Inévitablement, après
l’essor initial, le secteur public va se
Le Conference Board du Canada
GRAPHIQUE 5
Dépenses publiques au Canada
(tous les ordres de gouvernement, en milliards de $ de 1992)
Salariales
Non salariales
160
140
120
100
80
60
40
20
0
1971
74
77
80
83
86
89
92
95
98
01
04
07
10
13
16
19
Sources : Statistique Canada, Le Conference Board du Canada.
stabiliser et, comme l’économie repose dans une très
grande mesure sur ce secteur, le rythme de croissance
économique général s’en trouvera également freiné.
D’autre part, la population continuera de croître, de sorte
que la croissance économique par habitant ralentira.
Dans certains secteurs de la vente au détail de biens
durables, tels les véhicules automobiles, l’ameublement et
les appareils ménagers, les commandes par correspondance
ainsi que le transport maritime tiennent un rôle de toute
première importance. Ajoutons que, bien souvent, les particuliers, ne comptant travailler au Nunavut que pendant
quelqués années, gardent actifs leurs comptes et placements du Sud. Encore une fois, ce facteur n’a pas les
mêmes implications que dans le cas d’autres régions
puisque le gouvernement fédéral compense les déboursements du Nunavut par des paiements de transfert. Cette
forme d’aide permet, bien entendu, aux Nunavummiut
d’accéder à un plus vaste éventail de biens de consommation, mais est également extrêmement favorable aux
entreprises du sud du Canada.
On peut également parler du déficit commercial en termes
de fuite économique, c’est-à-dire en termes de dollars du
Nunavut qui quittent le territoire. Dans une optique
nationale, on pourrait dire qu’en règle générale, pour
chaque dollar dépensé, 30 cents vont aux importations et
quittent donc le pays. Dans le cas d’une province ou d’un
territoire, il faut tenir compte des importations intérieures
et internationales. Bien que nous ne disposions pas de
chiffres exacts dans le cas du Nunavut, il est possible de
se faire une idée de la situation à la lumière des valeurs
nominales du PIB basé sur les dépenses. Ces chiffres
révèlent qu’en 1999, les dépenses d’importation au
chapitre des biens et services atteignaient 562 millions
de dollars pour une demande intérieure de 1,06 milliard.
Avant même de considérer la répartition des importations
entre les consommateurs, le secteur public et les biens et
services d’investissement, le taux de fuite économique
s’élève déjà à 53 cents pour chaque dollar dépensé. Des
données seront bientôt disponibles et permettront de
déterminer quelle part du taux de consommation global
relève de l’importation au Nunavut. Compte tenu du fait
que Statistique Canada estime la valeur de la production
manufacturière globale du territoire à 2,1 millions de
dollars (voir la section 5.3), il est raisonnable de supposer
que le taux de fuite économique, en termes de consommation, sera extrêmement élevé.
Le Conference Board du Canada
Toutefois, la tendance actuelle à l’approvisionnement par
catalogue auprès des détaillants du Sud fait obstacle au
développement de l’économie locale, plus précisément à
l’entreprise de vente au détail privée, et limite sérieusement son potentiel d’impulsion économique. Cette situation est semblable à celle de nombreuses collectivités
rurales du Canada qui, autrefois prospères, sont pratiquement devenues des villages fantômes. Le problème tient
également au fait que le secteur des services offre à bon
nombre de personnes et aux jeunes en particulier des possibilités d’emplois intéressantes et l’occasion d’acquérir
une précieuse expérience de travail. Lorsqu’aucun poste de
niveau débutant n’est disponible dans une collectivité, il
faut prévoir que nombre de jeunes Nunavummiut désireux
de participer à l’économie salariale se verront dans l’obligation de rechercher des emplois ailleurs qu’au Nunavut.
38
5.2.1
l’économie basée sur les salaires au Nunavut, où dominent
les emplois spécialisés au sein du secteur public. Les
jeunes doivent pouvoir bénéficier de la formation nécessaire à l’acquisition des compétences qui leur permettront
d’accéder à des postes de fonctionnaires, au niveau administratif ou professionnel.
Taux d’emploi
D’après l’enquête sur la population active des collectivités
du Nunavut, menée par le Nunavummit Kiglisiniartiit
(Bureau de la statistique du Nunavut) en 1999, le territoire offrait cette année-là 8 646 emplois en moyenne. Le
rapport de dépendance économique du territoire se situait
alors à 32 p. 100, c’est-à-dire que 32 Nunavummiut sur
100 détenaient un emploi rattaché à l’économie basée sur
les salaires. Ce rapport donne une idée du nombre de personnes à la charge de la population de travailleurs. Il sert
fréquemment à déterminer la viabilité des programmes
sociaux. Au Canada, ce rapport est de 47,7 p. 100. Dans
le cas du Nunavut, il est révélateur du petit nombre d’emplois au sein de l’économie salariale, d’un taux de population active relativement faible et d’une assiette fiscale
proportionnellement réduite.
5.3
ANALYSE DU RENDEMENT SECTORIEL DU NUNAVUT
EN 1999 (BASÉ SUR LES SALAIRES)
Comme on l’a déjà mentionné, l’évaluation des données
relatives à l’année 1999 est difficile parce qu’il n’existe
pas encore de base de comparaison. Par exemple, la valeur
réelle des activités de construction s’est élevée à 60 millions
de dollars en 1999, année au cours de laquelle la demande
pour des locaux à bureaux, des logements et d’autres
installations était à la hausse en raison de l’expansion
rapide du secteur gouvernemental. Cette activité accrue a
sûrement contribué à une augmentation de la production
dans le secteur de la construction par rapport à 1998,
mais dans quelle mesure exactement? Question plus
importante encore, les chiffres de 1999 reflètent-ils une
base d’activité sous-jacente solide? Si l’on excluait tout
projet de construction « spécial », comme l’ouverture
d’une mine ou une initiative gouvernementale ponctuelle,
quelles seraient les retombées durables du secteur de la
construction? Par ailleurs, la création du Nunavut comme
territoire autonome a suscité beaucoup d’intérêt au
Canada, ce qui s’est manifesté par une augmentation de
l’activité. Cependant, cet intérêt sera vraisemblablement
de courte durée. Lorsque la situation reviendra à la normale, quelle sera la croissance sous-jacente de l’économie?
En 1999, le Nunavummit Kiglisiniartiit estimait le taux de
chômage au Nunavut, basé sur une population active de
10 904 habitants, à environ 20,7 p. 100. Cette estimation
est conforme à la définition nationale du chômage qui
n’inclut que les personnes ayant activement cherché un
emploi dans le mois précédant le sondage. Cependant,
cette définition ne convient pas parfaitement au Nunavut,
car souvent les membres des collectivités dont l’économie
salariale n’est pas très solide ne recherchent pas d’emplois
de manière active puisqu’ils savent que lorsqu’un emploi
deviendra disponible, le poste sera affiché au magasin
général ou annoncé sur les ondes de la radio communautaire ou les deux. Lorsque la définition « aucune occasion
d’emploi » est appliquée et englobe les chômeurs ayant
mentionné ne pas avoir activement recherché d’emploi
au cours du mois précédent parce qu’ils croyaient qu’il
n’y avait effectivement aucune ouverture, le taux de
chômage grimpe alors à 27,2 p. 100 pour une population
active de 11 886 habitants.
Le graphique 6 illustre la répartition des principaux
secteurs économiques en pourcentage du PIB réel global.
Il est intéressant de noter que certains secteurs clés de
l’économie du Nunavut semblent ne contribuer que légèrement au rendement économique du territoire, notamment
les secteurs de la pêche et du piégeage ainsi que celui de
la fabrication. Comme on l’a souligné auparavant, l’activité
économique basée sur les ressources naturelles de la collectivité n’entre pas dans le calcul du PIB, alors qu’elle
domine ces secteurs. Aussi est-il essentiel d’inclure les
deux types d’économie, celle basée sur les salaires et celle
axée sur l’exploitation des ressources, dans toute analyse
économique du Nunavut.
Le tableau s’assombrit davantage quand on pense à l’écart
qui existe au Nunavut entre le taux de chômage chez les
Inuit et chez les populations actives d’autres origines. En
1999, selon le critère « aucune occasion d’emploi », le
taux de chômage chez les Inuit s’élevait à 35,8 p. 100 par
rapport à 3,3 p. 100 dans le reste de la population active
du Nunavut. Ajoutons que, chez les Inuit de 15 à 24 ans,
le taux de chômage annuel s’élevait à 48,1 p. 100. Ce
calcul fait exclusion de ceux qui sont encore aux études
ou de ceux qui sont occupés à plein temps aux activités
de subsistance et qui ne cherchent pas d’emploi salarié.
Les jeunes du Nunavut ont manifestement besoin d’emplois,
mais pour en obtenir, ils doivent acquérir les compétences
qui assureront leur succès professionnel. Cela nous ramène
à la question du capital humain et de la composition de
Le tableau 9 renferme des estimations nominales très provisoires du PIB en fonction des salaires ou des marchés, au
moyen du système de Classification type des industries de
Statistique Canada. Ces estimations sont fondées sur celles
qu’a récemment diffusées Statistique Canada pour calculer
le PIB par secteur, en dollars constants de 1992. Elles ont
39
Le Conference Board du Canada
GRAPHIQUE 6
Aperçu sectoriel de l’économie numéraire du Nunavut pour 1999
(pourcentage du produit intérieur brut réel)
Pêche et piégeage commerciaux (0,1 %)
Activité minière (18 %)
Fabrication (0,3 %)
Administration publique (39 %)
Construction (9 %)
Commerce (7 %)
Transport, communications et services publics (4 %)
Services commerciaux et personnels (5 %)
Finance, assurances et affaires immobilières (18 %)
Source : Statistique Canada.
ensuite été « indexées » en dollars courants de 1999, et
les estimations de Statistique Canada relatives à certains
secteurs ont été modifiées en vue d’intégrer d’autres
données.
essor et offre de bonnes possibilités de formation et d’emploi pour les résidants du Nunavut.
En ce qui concerne le flétan noir, le Nunavut détient le
droit de pêcher environ 27 p. 100 de ses ressources adjacentes (divisions 0A et 0B de l’Organisation des pêches de
l’Atlantique Nord (OPAN)), ce qui équivaut à 1 500 tonnes
par an. À partir de 2001, son quota annuel s’élèvera à
4 000 tonnes dans la division 0A de l’OPAN, ce qui augmentera d’environ 47 p. 100 les contingents de flétan
noir à ses pêcheurs. Les revenus de vente subséquents
devraient s’élever à 8 millions de dollars. L’industrie du
flétan noir crée près de 100 emplois saisonniers dans les
secteurs de la pêche et de la transformation du poisson,
en plus de générer entre 2,1 et 2,4 millions de dollars
en salaires aux résidants du Nunavut ainsi qu’entre
1,7 et 2,0 millions de dollars en redevances.
Les points suivants examinent les secteurs industriels les
plus déterminants dans l’économie du Nunavut. Les données sur le PIB relèvent parfois de plus d’une catégorie
dans le cas de certains de ces secteurs. Par exemple,
comme on le verra, le secteur touristique peut comprendre
des données économiques relevant des catégories du transport, de la construction et du commerce. (Voir l’encadré
de la section 5.3.3 pour un autre exemple de la façon dont
le secteur de fabrication peut figurer dans plus d’une catégorie industrielle, tout en étant intégré aux économies
traditionnelle et contemporaine.)
5.3.1
Chasse, pêche et piégeage
En 1998, le Conseil de gestion des ressources fauniques
du Nunavut accordait au territoire un quota de 500 tonnes
pour la pêche de la crevette ésope dans la zone autour
de l’île Resolution. Le Conseil a prévu des dispositions
autorisant la pêche de 500 tonnes supplémentaires à la
condition que le quota de crevettes ésopes dans les zones
de pêche de crevettes (ZPC) 2, 3 et 4 n’ait pas été atteint.
Statistique Canada estime qu’en 1999, l’industrie de la
chasse, de la pêche et du piégeage a contribué pour
7,6 millions de dollars au PIB basé sur les salaires. Bien
qu’ils ne forment pas un secteur de première importance
en termes de dollars, le piégeage, la chasse et la pêche
représentent une source de recettes et d’emplois croissante au Nunavut.
En 1999, on a permis une pêche exploratoire de la crevette
rose dans la ZPC 2, qui a donné au Nunavut l’autorisation
de capturer 1 750 tonnes de crevettes roses, ou 50 p. 100
du quota exploratoire, fixé à 3 500 tonnes. De plus, la
Qikiqtaaluk Corporation (QC) détient le droit de pêcher
Les principales activités commerciales s’appuient sur la
pêche du flétan noir, de l’omble et de la crevette.
L’industrie de la pêche commerciale en haute mer, notamment axée sur la crevette et le flétan noir, est en plein
Le Conference Board du Canada
40
1,5 million de crevettes dans ses eaux adjacentes ou non
adjacentes. Les quotas correspondant à ce droit varient
entre 2 500 et 3 000 tonnes par année. La valeur marchande
d’une telle prise se situe entre 15 millions et 25 millions
de dollars, bien que, à l’heure actuelle, toute la production
soit débarquée ailleurs qu’au Nunavut et profite donc peu
à ses habitants.
Actuellement, tous les propriétaires de bateaux utilisés pour
la pêche à la crevette sont de l’extérieur. L’investissement
important que représente l’achat de bateaux de pêche
constitue l’un des principaux obstacles à une plus grande
participation locale dans ce secteur. Avec l’augmentation
des contingents, peut-être investira-t-on dans l’achat de
bateaux et les installations portuaires. Ainsi, on pourrait
débarquer et traiter les crevettes au Nunavut, ce qui pourrait déboucher sur des possibilités d’emplois et d’affaires
intéressantes.
L’industrie de la crevette fournit des emplois saisonniers
à environ 50 Inuit de la région du Nunavut, une valeur
approximative en salaires de 1,8 à 2,0 millions de dollars.
De plus, les redevances provenant de cette industrie sont
évaluées entre 1,7 et 2,0 millions de dollars par année.
La pêche sur le littoral de l’omble et du flétan noir est relativement peu importante. Elle fournit peu d’emplois, mais
offre de grandes possibilités pour élargir
et développer à la fois les secteurs de la
TABLEAU 9
transformation et de l’exploitation des
PIB du Nunavut au coût des facteurs en 1999
ressources. De plus, les pêches en émer(valeurs nominales en millions de dollars)
gence, comme celles de l’oursin, de la
palourde et du pétoncle, pourraient
Économie conventionnelle
fournir l’élan dont ont tant besoin les
(numéraire)
économies locales. Le traitement des
produits de la pêche figure à la catéIndustries du piégeage et de la pêche
7,6
gorie « Traitement et transformation des
Exploitation minière (y compris broyage), carrières et puits de pétrole
129,9
aliments » du système de classification.
Il fait l’objet du point 5.3.3.2.
Industries manufacturières*
9,4
Construction
Secteur des biens
65,1
212 (total partiel)
Industries du transport et de l’entreposage
21,3
Industries des communications et autres services publics
25,6
Vente au détail et vente de gros
47,2
Industries des finances et des assurances
127,6
Industries des services aux entreprises
Industries des services gouvernementaux
12,2
141,7
Administration fédérale
16,2
Administration du Nunavut
67,5
Administrations locales
57,9
Industries des services d’enseignement et des services connexes
78,3
Services de soins de santé et sociaux
63,6
Services d’hébergement et de restauration
14,6
Autres industries de services
Secteur des services
Produit intérieur brut au coût des facteurs
9,9
542 (total partiel)
754
*Les industries manufacturières comprennent la transformation des aliments, les industries artisanales et d’autres
activités manufacturières.
Nota : Les chiffres donnés ici ne correspondent pas à ceux du diagramme 5, car ils tiennent compte d’information que
Statistique Canada n’a pas déclarée actuellement et parce qu’ils ont été convertis en termes nominaux.
Sources : Statistique Canada, Gouvernement du Nunavut.
41
La plus importante région de chasse
commerciale au caribou au Nunavut se
situe à Coral Harbour, sur l’île de
Southhampton, dans la baie d’Hudson.
Quelque 2 200 caribous ont été capturés
pendant la saison 2000 et la société
Keewatin Meat and Fish, à Rankin Inlet,
a assuré le traitement des viandes. Cette
chasse autorisée par le gouvernement
fédéral a permis l’embauche d’environ
40 résidants de Coral Harbour.
Le bœuf musqué est chassé et traité
dans un abattoir installé temporairement près de Cambridge Bay, et la
viande obtenue est ensuite transportée
à l’usine de Kitikmeot Food pour y être
davantage transformée. Ces activités
liées à la chasse du bœuf musqué ont
créé environ 32 emplois et injecté
jusqu’à 160 000 $ dans l’économie locale.
Les coûts de transport et de transformation élevés, l’incertitude quant à la
stabilité des ressources disponibles et
les problèmes d’ordre météorologique
empêchent une exploitation plus
Le Conference Board du Canada
poussée des ressources fauniques du Nunavut. Ainsi,
le marché des peaux de phoque est en déclin depuis
quelques années. En 1999, en vertu de son programme
des fourrures, le gouvernement a acheté puis vendu aux
enchères environ 7 000 peaux de phoque, ce qui lui a permis de verser aux chasseurs une somme fixe de 30 $ par
peau de phoque. La valeur du commerce de la peau de
phoque s’élève à plus de 300 000 $. En 2000, le gouvernement du Nunavut a lancé un programme vigoureux visant
à promouvoir l’utilisation et le port de peaux de phoque.
la mine Polaris fermera probablement ses portes en juillet
2001. On prévoit que la mine Lupin, rouverte en l’an
2000, poursuivra ses activités jusqu’en 2004.
5.3.2
Si les autorisations sont accordées en temps opportun, la
Tahera Corporation compte entreprendre la construction de
la mine en 2001 et commencer à l’exploiter au début de
2002. Les dépenses en capital imputables à l’ouverture
d’une mine sont évaluées à 40 millions de dollars.
Bien que les mines du Nunavut réduisent progressivement
leur production, certains projets prometteurs sont à l’étape
de la prospection et de la mise en valeur. La société
torontoise Tahera Corporation a entrepris une étude
de faisabilité en vue de la prospection de diamants
à la pipe kimberlitique de Jericho, au Nunavut.
Industrie minière
En 1999, l’industrie minière du Nunavut a apporté
129,9 millions de dollars au PIB. Cette contribution résulte
de deux activités directes : l’exploration et l’extraction de
minéraux. L’exploitation minière entraîne une multitude
d’avantages connexes. Par exemple, elle stimule les activités de construction, de transport et d’entreposage ainsi
que la demande de services commerciaux. En vertu du système de Classification type des industries, toute activité
d’exploration menée par l’entreprise privée figure à la
catégorie « Services annexes aux industries extractives ».
Parmi les activités de cette catégorie figurent la cueillette
d’information sur les gîtes minéraux (cartographie aérienne et prélèvement d’échantillons) et les travaux effectués sur les lieux, comme le forage. Les secteurs public
et privé investissent des millions de dollars sur plusieurs
années afin de recueillir des données sur les dépôts de
minéraux avant l’établissement de tout site d’exploitation
minière. Ces activités sont garantes d’emplois pour de
nombreux habitants de la région et contribuent donc
directement à l’économie du territoire. Il est à noter
que les activités relevant du gouvernement entrent dans
la catégorie « Administration publique ».
Le Congrès minier mondial (CMM), responsable de la gestion et principal partenaire, a mené une étude préliminaire de faisabilité sur le projet Westmeg (autrefois
désigné le projet de Meliadine), situé près de Rankin Inlet.
Ce site contiendrait 4,9 millions d’onces d’or. Comme le roc
est près de la surface, les travaux d’exploitation pourraient
être effectués à ciel ouvert. Les coûts d’établissement du
projet sont évalués entre 250 et 300 millions de dollars,
et on prévoit que 300 emplois seraient créés, dont 100
seraient destinés à des résidants de la région. L’exploitation
de cette mine entraînerait l’essor du secteur de la construction à Rankin Inlet et nécessiterait des investissements
considérables dans l’infrastructure pour améliorer l’aire
portuaire et les installations de transport et d’entreposage,
et construire de nouveaux logements. Cependant, ce projet
est actuellement au point mort, car la chute du prix de
l’or nuit à sa rentabilité financière.
Les projets de Meadowbank et de Hope Bay, qui contiennent
des gisements d’or, suscitent aussi de l’espoir. Meadowbank,
situé à 70 kilomètres au nord du lac Baker, appartient à
Cumberland Resources. Ce site compte une réserve de
2,1 millions d’onces. Le projet de Hope Bay, fruit d’un partenariat entre Miramar et Cambiex, est situé près de Bathurst
Inlet et ses ressources sont évaluées à 4,3 millions d’onces.
L’extraction de minéraux est le principal facteur d’accroissement de la valeur du PIB au calcul de la production
minière réelle. Le Nunavut compte actuellement trois
mines en exploitation. Les mines de métaux communs
Polaris et Nanisivik sont situées dans l’est de l’Arctique,
alors que la mine d’or Lupin se trouve dans l’ouest,
presque à la frontière des T.N.-O. En raison de l’augmentation réelle et prévue des réserves de minerais, les perspectives de la mine de métaux communs de Nanisivik, située
au nord de l’île de Baffin, se sont améliorées et, si le
rythme actuel de production se maintient, la mine pourrait demeurer en exploitation pendant encore cinq ans. En
1999, Nanisivik affichait un revenu brut de 84,8 millions
de dollars. Au cours de cette même période, la mine
Polaris située sur la Petite Île Cornwallis produisait
245 000 tonnes de zinc et 57 000 tonnes de concentré
de plomb. Cependant, en raison de ses faibles réserves,
Le Conference Board du Canada
Izok Lake, à l’ouest de la mine de Lupin, renferme d’importants gisements plombo-zincifères, mais son exploitation ne peut commencer avant qu’on y construise des
routes et un port.
Les principaux obstacles à l’industrie minière au Nunavut
sont liés aux quatre formes de capital dont il était question au chapitre 4 : le manque d’infrastructures de surface;
les coûts de transport élevés et l’éloignement entre les
ressources et les marchés; la rareté de la main-d’œuvre
42
secteur minier devraient se traduire par des recettes
accrues au profit du Nunavut.
spécialisée et l’information parsemée relativement au
potentiel des minéraux et des autres ressources; une
réglementation stricte, susceptible de chevauchements
avec d’autres exigences. Les installations portuaires
dans la baie du Couronnement favoriseraient énormément
le développement du potentiel minéral dans la région
de Kitikmeot.
5.3.3
Industrie manufacturière
Au Nunavut, le secteur de la fabrication commerciale étant
particulièrement sous-développé, la plupart des biens sont
importés du sud du Canada. On évalue à 9,4 millions de
dollars l’apport du secteur manufacturier au PIB du
Nunavut, en 1999.
Comme l’illustre le chapitre 4, les accords de participation
ou les « ententes sur les avantages » qui lient les organismes bénéficiaires inuits et l’industrie minière sur des
projets spécifiques sont le principal moyen utilisé pour
veiller à ce que les collectivités locales profitent des
retombées de l’exploitation minière. Ces ententes prévoient
habituellement des niveaux d’embauche minimaux et
favorisent la participation locale dans les entreprises de
biens et de services plutôt que dans les sociétés minières.
Bien que, en raison des coûts de fabrication élevés, d’une
infrastructure de base restreinte et de la petite taille des
marchés locaux, il soit invraisemblable que le Nunavut
réussisse à développer une assise manufacturière diversifiée
et solide, ce secteur pourrait jouer un rôle plus important
dans la fabrication de produits spécialisés pour lesquels
le Nunavut détient un avantage sur ses concurrents. Par
exemple, le Nunavut possède une importante industrie
manufacturière traditionnelle axée sur les arts et l’artisanat ainsi que la transformation des aliments. Ces deux
domaines font l’objet des points suivants.
Un exemple en ce sens est la signature, à Kugluktuk,
d’une lettre d’intention de Diavik visant à établir un
contrat de 235 millions de dollars avec Lac De Gras
Constructors pour la construction d’un barrage à la
mine de diamants de Diavik, dans les T.N.-O. Lac de
Gras Constructors est une entreprise conjointe des sociétés
Peter Kiewitt & Sons Ltd., à 75 p. 100, et Nuna Logistics,
à 25 p. 100. La Kitikmeot Corporation, de l’ouest du
Nunavut, et la Société de développement économique du
Nunavut, la Nunasi, détiennent 51 p. 100 des parts de
Nuna Logistics.
5.3.3.1 Industrie des arts et de l’artisanat
L’industrie de l’artisanat, ou « l’économie des arts »,
englobe de nombreuses activités, non seulement la production artisanale traditionnelle, comme la sculpture, mais
aussi la mode et le cinéma. Il est plutôt difficile d’évaluer
la taille de cette industrie au moyen du système de classification de Statistique Canada en raison de la grande
diversité des activités qui la composent. Une sculpture,
par exemple, s’inscrirait dans la catégorie « Fabrication »,
alors qu’une production cinématographique pourrait
correspondre à plusieurs catégories, y compris celle
des « Services d’affaires ». Chose certaine, l’industrie
de l’artisanat regorge de possibilités.
Le secteur minier est actuellement le plus important
pour la création de richesses au Nunavut. De plus, comme
la plupart des nouveaux projets prévoient un service
de navette aérienne pour leurs employés, ce secteur
est parmi les plus prometteurs pour la création d’emplois
et la stimulation commerciale de nombreuses collectivités
locales. Le service de navette permet aux employés de
demeurer dans leur collectivité au Nunavut pour se rendre
à la mine, ce qui évite la construction d’une ville minière
laissée à l’abandon dès la fin de la période d’exploitation.
Grâce aux accords de participation, on s’attend à ce
qu’une plus grande part des retombées économiques
des activités minières profitent au Nunavut.
La production artisanale complète à merveille l’exploitation des ressources fauniques, et ce, de deux manières.
D’abord, ce secteur fait usage des produits de la pêche
et de la chasse en tant que matières premières. Ensuite,
les recettes de la vente de la production artisanale aident
à financer les activités d’exploitation (par exemple, achat
de l’essence pour les motoneiges ou des munitions).
Les progrès de l’industrie minière pourraient aussi contribuer à accroître le niveau de redevances liées aux
ressources du Nunavut et, par le fait même, à augmenter
les revenus des bénéficiaires inuits (bien qu’une faible part
des redevances soient versées aux organisations représentant les Inuit, la plupart étant payées au gouvernement
fédéral). On s’attend à ce que le Nunavut finisse par avoir
droit à une plus grande proportion des redevances liées à
l’exploitation des ressources. Cette possibilité et l’essor du
La vente de produits de fabrication artisanale rapporte
un revenu important aux Nunavummiut, bien que, pour
la plupart d’entre eux, il s’agisse d’un revenu d’appoint
plutôt que d’un emploi à plein temps. Les objets de
fabrication artisanale sont généralement produits à domicile et introduits sur le marché par l’un des principaux
grossistes du Nunavut, à moins d’être directement vendus
43
Le Conference Board du Canada
Les occasions de vendre des produits d’art et d’artisanat
sont fréquentes, que ce soit auprès des visiteurs en
affaires ou en vacances, des touristes en croisière ou de
grossistes, qui veilleront à les distribuer chez des commerçants du Sud. Il existe actuellement quelques centres
et lieux d’exposition où les visiteurs peuvent admirer les
produits artisanaux et en savoir plus sur la culture inuite.
au consommateur. Le commerce électronique offre la possibilité de transactions directes avec les marchés du Sud,
tant pour les artisans et artistes que pour les grossistes.
Dans le cadre de l’Enquête de 1999 sur la population active
du Nunavut, 27 p. 100 des répondants ont mentionné
qu’ils avaient collaboré à la fabrication de produits artisanaux nordiques. Le secteur de l’artisanat semble ouvrir
une porte inattendue à la participation économique :
environ 70 p. 100 des artistes et artisans n’ont pas
terminé leurs études secondaires et près de 60 p. 100
d’entre eux sont des femmes.
Une commercialisation insuffisante, le manque de points
et de systèmes de distribution et le besoin d’encaissements
pour financer la production sont autant d’obstacles à la
croissance de l’industrie des arts et de l’artisanat.
Le Nunavut compte plusieurs entreprises importantes
spécialisées dans la vente et le marketing de l’art inuit :
Dorset Fine Arts, la Société de développement du Nunavut,
les Producteurs de l’Arctique canadien (PAC) – grossiste
pour le compte d’Arctic Co-operatives Ltd., Arts Induvik
et l’Inuit Art Marketing Service, géré par la Compagnie du
Nord-Ouest, propriétaire de la chaîne Northern Stores, qui
appartenait autrefois à la Compagnie de la Baie d’Hudson.
La production artistique et artisanale est achetée auprès
des coopératives locales et mise en marché par des entreprises du Sud. La Compagnie du Nord-Ouest se procure
des œuvres d’art et d’artisanat dans ses magasins locaux
et les expédie dans un entrepôt de Toronto, d’où elles
sont distribuées aux détaillants du Sud.
5.3.3.2 Industrie du traitement et de la transformation
des aliments
Le gouvernement du Nunavut souhaite l’épanouissement du
secteur de la sculpture. En 1998, il a tenu une rencontre à
Cape Dorset en vue de discuter des perspectives de la sculpture sur pierre inuite. Quinze recommandations ont alors
été formulées pour favoriser la croissance de ce secteur.
Classification des activités d’un sculpteur de pierre
de savon
En 1999, l’apport économique de l’industrie du traitement
et de la transformation des aliments au PIB du Nunavut
s’élevait à 7,4 millions de dollars. Ce secteur compte des
usines de traitement spécialisées dans la commercialisation de viandes transformées localement. Bon nombre
d’entre elles appartiennent à la Société de développement
du Nunavut.
Pangnirtung Fisheries Limited est la plus importante usine
de traitement et de transformation des aliments au
La classification d’une activité de fabrication peut être ardue lorsque
l’on doit déterminer à quel secteur industriel et à quel type d’économie
(monétaire ou de subsistance) cette activité appartient. Prenons, par
exemple, le cas d’un sculpteur de pierre de savon. L’activité minière,
le troc ou le déboursement monétaire en vue de l’obtention de la
pierre à sculpter font partie de l’économie de subsistance et en tant
que tels ne sont vraisemblablement pas consignés dans les catégories
de données types de Statistique Canada. Le prix de vente, quant à
lui, reflète en principe la valeur du temps, de l’effort, des compétences et d’autres intangibles (réputation artistique, valeur accrue
des premières œuvres, etc. ) consentis à la production de la sculpture.
Une fois vendue, la « valeur » ajoutée à la pierre à l’état brut devrait
être inscrite, en vertu des normes de Statistique Canada, dans la
production du secteur manufacturier. Cependant, si la vente de la
sculpture n’est pas enregistrée, elle fait partie de l’économie de
subsistance. Si, en revanche, la sculpture est achetée par un détaillant ou un grossiste, la marge de profit s’inscrit dans l’économie
numéraire au chapitre du commerce de détail ou de gros. Il va
sans dire qu’en l’absence de comptabilisation précise des activités,
celles-ci ne peuvent figurer dans les statistiques officielles, ce
qui complique la mesure de l’importance qu’elles ont sur le plan
économique.
La mode inuite est un autre secteur de l’industrie des arts
et de l’artisanat qui suscite un intérêt croissant. Lorsqu’on
l’utilise localement pour la haute couture, la peau animale
gagne beaucoup en valeur. Quelques entreprises du
Nunavut ont réussi à se tailler une place sur le marché des
créations de mode. De plus, plusieurs petites entreprises
répondent à la demande croissante de vêtements fabriqués
avec des modèles et des tissus inuits traditionnels.
La production cinématographique est perçue comme un
secteur en émergence et très promtteur de l’économie
des arts. Des entreprises locales y œuvrent déjà (p. ex.,
Isuma Igloolik Production Inc.). De plus, on a nommé
un commissaire chargé de promouvoir l’industrie du
cinéma du Nunavut. L’industrie du cinéma emploierait
en tout temps une centaine de personnes au Nunavut13.
L’appui d’organismes du milieu cinématographique (p. ex.,
Téléfilm) compense pour le financement gouvernemental
limité (300 000 $).
Le Conference Board du Canada
44
techniques de la main-d’œuvre locale. La NCC a tenté de
promouvoir le recrutement de personnel local en offrant
des possibilités de formation à l’intention des résidants
de la région. Toutefois, un autre obstacle aussi difficile
s’est imposé : le fonctionnement même de l’industrie de
la construction au Nunavut. Le travail est généralement
effectué en été et comporte des semaines de travail de
60 heures ou plus, ce qui ne laisse aucune place aux
activités traditionnelles habituellement exercées durant
la saison estivale.
Nunavut. En 2000, cette usine a procédé au traitement de
306 178 kilogrammes de flétan noir et de 24 000 kilogrammes d’omble – un record. Au cours de cette même
période, Pangnirtung Fisheries avait plus de 60 employés
saisonniers à son service, dans ses installations portuaires
et dans son usine.
La société Keewatin Meat and Fish, située à Rankin Inlet,
exporte sa production en Californie, en Nouvelle-Angleterre
et au Midwest américain, en plus d’en vendre au Canada,
de la Colombie-Britannique au Québec. Ses produits se
retrouvent généralement dans les grands restaurants.
5.3.5
Kitikmeot Foods, une usine de traitement et de transformation du poisson et des viandes située à Cambridge Bay,
tient également un rôle de premier plan dans ce secteur.
Elle se spécialise dans le traitement de la viande de bœuf
musqué vendue localement et aux restaurants des principaux centres d’affaires du Nunavut, ainsi que dans certaines villes du sud du Canada et des États-Unis. La
fourrure du bœuf musqué est transformée en laine douce,
le qiviut, en vertu d’un partenariat entre l’Association des
chasseurs et trappeurs de Kitikmeot et International
Spinners Ltd., société basée à l’Île-du-Prince-Édouard.
Kitikmeot Foods transforme également de l’omble, vendu
en région ainsi qu’à l’extérieur du Nunavut.
Il est intéressant de noter la place restreinte qu’occupent
certains secteurs d’ordinaire importants dans l’industrie
des services — plus particulièrement le commerce au
détail et de gros ainsi que les services aux entreprises et
aux particuliers (p. ex., services offerts par des avocats,
des ingénieurs, des architectes, etc.). L’apport de ces
derniers secteurs à l’économie du Nunavut s’élevait à
44 millions et à 34 millions de dollars réels, respectivement, en 1999. En tant que part du PIB réel et total, ces
chiffres sont inférieurs aux pourcentages nationaux, soit
6,6 p. 100 par rapport à 11,1 p. 100 dans le secteur du
commerce au détail et de gros et 5,1 p. 100 par rapport
à 11,0 p. 100 dans le secteur des services aux entreprises
et aux particuliers. De tels chiffres apportent de l’eau au
moulin dans le débat concernant la faiblesse des entreprises locales au Nunavut. En l’absence d’une demande
réelle pour des services et en raison du grand nombre de
résidants qui commandent directement auprès des détaillants du Sud, la petite entreprise n’a pas de clientèle et,
donc, aucune raison d’exister. De plus, le tourisme, le
transport et les déplacements sont tributaires des conditions climatiques du Nord, ce qui se répercute sur le
secteur des services dans la mesure où, durant la saison
hivernale, le niveau d’activité est moins important.
Les coûts de transport et de production élevés sont un
obstacle important à l’essor de ce secteur. Le fait que les
produits de la chasse commerciale ne soient pas offerts
toute l’année nuit également.
5.3.4
Industries du commerce au détail et de gros et
des services aux entreprises
Industrie de la construction
La contribution de l’industrie de la construction au PIB
du Nunavut s’élevait à plus de 65 millions de dollars en
1999. Le principal moteur de cette industrie a été le
besoin d’infrastructures par le nouveau gouvernement
du Nunavut, combiné avec la demande de nouveaux
logements imputable à l’accroissement de la population.
Depuis la création du Nunavut, on a construit une assemblée législative, des édifices à bureaux ainsi que des
logements de fonction pour répondre aux besoins du personnel du gouvernement. Comme l’indique le chapitre 4,
la Nunavut Construction Corporation (NCC) vient d’achever
un projet d’infrastructure d’une valeur de 130 millions de
dollars pour le compte du gouvernement fédéral.
Le secteur des services aux entreprises, bien que sousdéveloppé, est appelé à prendre de l’expansion en raison
de la demande croissante de biens et de services consécutive à l’établissement du gouvernement du Nunavut. La
société Arctic Co-operatives Ltd. et la Compagnie du NordOuest sont les deux plus grands détaillants au Nunavut.
5.3.6
Industrie de l’assurance et des finances
Les banques, les sociétés de placements, les compagnies
d’assurance et les sociétés et agents immobiliers font
partie de l’industrie de l’assurance et des finances.
En 1999, l’apport de cette industrie au PIB nominal du
Nunavut était de 127,6 millions de dollars. Cette industrie
Les obstacles à la participation des résidants locaux à
l’industrie de la construction découlent en grande partie
de problèmes liés au développement du capital humain du
Nunavut, notamment le faible niveau de scolarisation et de
formation spécialisée ainsi que le manque de compétences
45
Le Conference Board du Canada
l’exercice 2000-2001 et, estime-t-on, 563 millions de
dollars durant l’exercice 2001-2002, constitue la plus
importante source fédérale de recettes. Ce fonds a pour
objet de combler l’écart entre les dépenses nécessaires
du territoire et les recettes qu’il s’attend à tirer.
souffre du manque de services bancaires dans les collectivités peu peuplées du Nunavut, lequel nuit au développement de la petite entreprise.
La taille relativement importante du secteur de l’assurance, de l’immobilier et des finances en étonne plusieurs.
Il n’est pourtant pas rare de constater un tel état de
choses dans les économies transitoires. Ce secteur compte
toutes les activités se rattachant à l’achat et à la vente
de biens, aux transactions bancaires ainsi qu’aux salaires
et traitements des employés au service de cette industrie.
À l’échelle nationale, le secteur des finances, de l’immobilier et de l’assurance représente environ 14 p. 100 du
PIB canadien. Ces chiffres sont toutefois plus élevés dans
les régions où l’activité économique (y compris les migrations) est supérieure à la moyenne nationale. Au Nunavut,
l’effervescence économique et le boum démographique
imputable aux migrations ont fait monter en flèche
le taux de croissance de ce secteur à un niveau bien
supérieur à la norme canadienne. Il se peut que cette
tendance ralentisse avec les années et se stabilise pour
rejoindre la moyenne nationale.
5.3.7
Les subventions fédérales fournissent des fonds au gouvernement du Nunavut pour lui permettre d’offrir un
éventail de services publics comparable à celui des
gouvernements provinciaux. La forte proportion des
subventions par rapport aux recettes totales s’explique
par le fait que le territoire dispose d’une faible base de
revenu et doit engager des frais élevés pour fournir des
services gouvernementaux à un grand nombre de collectivités très petites, réparties partout dans le Nord.
Parmi les problèmes que soulève la formule de financement préétabli figure le fait que le gouvernement du
Nunavut ne peut retenir qu’une faible part des nouvelles
recettes. Autrement dit, si le gouvernement du Nunavut
tire de nouvelles recettes fiscales grâce à une augmentation de l’activité économique, il en perdra presque toute
la valeur en voyant sa part de subventions diminuer. On
a récemment modifié cette méthode de financement pour
intégrer des mesures de stimulation financière visant à
promouvoir l’activité économique et à encourager une plus
grande autonomie territoriale. Ainsi, la formule prévoit
désormais un octroi supplémentaire de 20 p. 100 lorsque
le Nunavut parviendra à augmenter ses recettes grâce
à l’expansion économique.
Industrie des services gouvernementaux
et connexes
L’industrie des services gouvernementaux (y compris l’administration publique, l’éducation et la santé ainsi que les
services sociaux) est celle qui contribue le plus au PIB du
Nunavut. On estime que la contribution du secteur gouvernemental au PIB du Nunavut s’élevait à 141,7 millions
de dollars en 1999 (à l’exclusion des systèmes d’éducation,
de santé et de services sociaux). L’apport du gouvernement
au PIB comprend les revenus du travail et l’amortissement
des immobilisations.
Un autre sujet de préoccupation concerne le fait que,
contrairement aux gouvernements provinciaux, les gouvernements territoriaux ne tirent aucune recette de
l’exploitation des ressources. Cette situation pose un problème dans la mesure où les gouvernements territoriaux
doivent souvent engager des dépenses supplémentaires
(p. ex., assurer l’infrastructure nécessaire et la prestation
d’autres services gouvernementaux) pour lancer de nouveaux projets économiques, sans pour autant tirer beaucoup de nouvelles recettes fiscales. Cette équation risque
d’entraver le développement économique.
Le gouvernement fédéral a apporté 16,2 millions au
PIB du Nunavut en 1999, alors que la contribution du
gouvernement du Nunavut s’élevait à 67,5 millions. Les
revenus des gouvernements locaux ainsi que des secteurs
de l’éducation, de la santé et des services sociaux proviennent presque entièrement des coffres du gouvernement du Nunavut. En 1999, les gouvernements locaux
ont apporté 57,9 millions de dollars au PIB du territoire,
le secteur de l’éducation, 78,3 millions, et le secteur des
services sociaux et de la santé, 63,6 millions.
Le gouvernement du Nunavut a de grands défis à relever,
notamment trouver les recettes nécessaires au financement des investissements. La création de richesses essentielles à la prospérité future de l’économie entière du
territoire en dépend. Bien qu’il soit peut-être nécessaire
de revoir les priorités en matière de dépenses, Le
Conference Board du Canada croit peu vraisemblable que
cet exercice permette de dégager des fonds suffisants.
Aussi, de court à moyen terme, il faut garantir la perception de recettes supplémentaires (p. ex., d’autres octrois
Plus de 91 p. 100 des recettes du gouvernement du
Nunavut viennent directement du gouvernement fédéral.
Ses recettes autonomes, dont l’impôt sur le revenu,
les charges sociales et les autres impôts à la source,
génèrent 9 p. 100. La formule de financement préétabli,
qui prévoit l’octroi de 529 millions de dollars durant
Le Conference Board du Canada
46
On trouve au Nunavut quelques parcs nationaux et territoriaux. Comme nous l’avons déjà mentionné, trois nouveaux
parcs nationaux ont été établis dans le cadre de la mise
en œuvre de l’Accord sur les revendications territoriales du
Nunavut. Près de 39 p. 100 des touristes déclarent avoir
visité un parc national ou territorial lors de leur séjour
au Nunavut. Selon une étude menée en 1994, les visiteurs
des parcs ont tendance à séjourner plus longtemps au
Nunavut et à y dépenser plus d’argent15. Cependant,
très peu de parcs sont dotés d’abris ou d’installations
à l’intention des visiteurs.
fédéraux ou de nouvelles sources de recettes). Quoi qu’il
en soit, l’incapacité de répondre aux besoins du territoire
en matière de capital humain et de capital physique pourrait mettre en jeu l’avenir du Nunavut et contredire les
perspectives économiques présentées dans ce rapport.
5.3.8
Industries du tourisme
Le « tourisme » ne représente pas une seule industrie
selon le système de classification de Statistique Canada,
mais un secteur d’activité qui récolte une part des
extrants d’autres industries desservant tant les touristes
que la population locale. La définition de l’industrie du
tourisme, telle que formulée par Statistique Canada, inclut
une partie des activités de l’industrie de l’hébergement,
des aliments et des boissons, du transport et d’un certain
nombre d’autres industries. En fonction de cette définition, l’apport de l’industrie du tourisme au PIB de 1999
s’élevait à 35,7 millions de dollars ou à 4,8 p. 100 du PIB
du marché global du Nunavut.
Si la chasse et la pêche sportives tiennent toujours une
place importante dans l’industrie du tourisme, d’autres
types d’activités sont en plein essor au Nunavut.
Mentionnons, entre autres, le tourisme d’aventure (canotage et kayak, randonnée pédestre, etc.), les voyages
culturels, les loisirs en milieu naturel (écotourisme), le
tourisme éducatif ainsi que d’autres activités spécialisées.
Le secteur des croisières touristiques connaît actuellement
une grande popularité. Des paquebots de croisière jettent
actuellement l’ancre à Pond Inlet, à Cape Dorset, à Kimmirut,
à Pangnirtung et dans quelques autres collectivités du
Nunavut. Les passagers de ces paquebots dépensent approximativement 5 000 $ dans chaque collectivité en produits
d’art et d’artisanat, en nourriture et en activités d’interprétation. Le nombre de croisières augmentera probablement,
parallèlement à une hausse de la demande pour les produits
touristiques, comme des visites guidées des villages, des
spectacles culturels et des créations artisanales.
Le tourisme est une activité propice à la création de
richesses, et les dépenses des visiteurs du Nunavut ont
les mêmes retombées économiques que l’exportation de
biens et de services. Il crée des richesses parce que les
dépenses des touristes génèrent des revenus au profit
des entreprises comme des résidants du Nunavut. Ses
répercussions économiques sont comparables à celles de
l’exportation, car il s’ensuit de nouvelles dépenses (par
des visiteurs) dans le territoire. Le tourisme est donc une
activité économique très importante au Nunavut et pourrait contribuer davantage à l’essor du territoire et à la
création d’emplois pour les Nunavummiut, au sein même
de leurs collectivités.
À l’instar du secteur minier, les obstacles à l’essor de
l’industrie touristique proviennent des lacunes des quatre
formes de capital : un investissement insuffisant dans
l’infrastructure des parcs et des autres installations
touristiques; les frais de transport relativement élevés
que doivent engager les voyageurs vers le Nord; l’absence
de mesures promotionnelles pour inciter les gens du Sud à
voir les attraits uniques du Nord; le manque de formation
dans le secteur de l’hôtellerie; l’absence de bons réseaux
pour relier les agences et fournir aux exploitants de
l’information précieuse sur les tendances et les pratiques
en matière de tourisme.
On estime que plus de 18 000 personnes ont visité le
Nunavut en 1999, pour y dépenser plus de 30 millions de
dollars. En outre, depuis quelques années, le nombre de
gens d’affaires de passage au Nunavut a considérablement
augmenté. En 1999, près des trois quarts de tous les visiteurs étaient des gens d’affaires. Le Nunavut compte plus
de 123 entreprises touristiques et 500 employés dans le
secteur du tourisme et des parcs.
47
Le Conference Board du Canada
1 Peter D. Elias, « Models of Aboriginal Communities in Canada’s North »,
International Journal of Social Economics, 1997, vol. 24, no 11, p. 1241-1255.
10 Pour vraiment permettre la comparaison entre les PIB, il faudrait estimer les coûts
de production et les soustraire pour obtenir une valeur nette.
2 Commission royale sur les peuples autochtones, op. cit., vol. 4, chapitre 7, p. 256.
11 Comme nous le verrons à la section 7.2.2, certaines activités rémunérées du
domaine des pêcheries ne figurent pas dans les données consignées par Statistique
Canada pour le Nunavut, de sorte que cette industrie paraît moins importante par
rapport au reste de l’économie territoriale qu’elle ne l’est en réalité.
3 Commission royale sur les peuples autochtones, op. cit., chapitre 5, p. 875.
4 Hicks et White, op. cit., p. 38.
12 Fred Weihs et Sam Pitsiulak, The Meeting to Discuss the Future of Inuit Stone
Carving in Nunavut, du 19 au 21 octobre 1998, Cape Dorset, Nunavut.
5 Larry Simpson, The Subsistence Economy, Nunavut 1999,
www.nunavut.com/nunavut 99/english/subsistence.html.
13 Denise Rideout, « Nunavut Filmmakers Plea For Recognition, Support », Nunatsiaq
News, le 23 mars 2001, Iqaluit.
6 Le déplacement et le réétablissement des collectivités imposé par le gouvernement
du Canada pendant les années 50 a entraîné le regroupement d’un grand nombre de
chasseurs en des endroits éloignés des terres propices à la chasse. Cela a eu pour
effet d’épuiser les réserves des régions situées près des collectivités nouvellement
formées et de créer une dépendance à l’égard des moyens de transport motorisés
(nécessaires pour accéder aux régions plus éloignées). George Wenzel, « Inuit
Sealing Subsistence Managing After the EU Sealskin Ban », op. cit., p. 130-142.
14 Il n’est pas facile de mesurer l’apport, sous forme de valeur ajoutée, des activités de
traitement et de transformation des aliments au PIB. Par exemple, la prise du poisson,
comme telle, s’inscrit dans le secteur de la pêche alors que le dépeçage en filets est
consigné dans le secteur du traitement et de la transformation des aliments et que
les activités de distribution se répartissent entre les catégories « entreposage »,
« transport » et « vente en gros ». En l’absence de comptabilisation précise, il est
pratiquement impossible de suivre ces activités séparément. Entre autres, on peut
déterminer la valeur du produit de consommation finale et essayer ensuite de
départager cette valeur par secteur, en s’inspirant du modèle de l’économie
numéraire.
7 Le manque de temps et la difficulté posée par l’entretien des habiletés et des
compétences de chasse limitent inévitablement les possibilités d’exploitation
des ressources (p. ex. la chasse au phoque et à la baleine exige un niveau de
compétence et de connaissance élevé).
8 Heather Myers, op. cit., p. 25-40.
15 Ministère du Tourisme et du Développement économique, Gouvernement des
Territoires du Nord-Ouest, Direction de la planification et des ressources humaines,
Tourists Visiting Nunavut. A Profile, 1996.
9 Voir les recommandations figurant dans le Système des comptes nationaux des
Nations Unies.
Le Conference Board du Canada
48
6—Où va le Nunavut?
6.1
LE CONTEXTE PLANÉTAIRE
Faits saillants
Si l’économie mondiale est en perpétuelle évolution, il
semble que le rythme du changement va en s’accélérant.
Quelles sont les modifications en cours et en quoi
influeront-elles sur l’économie du Nunavut?
• Nous vivons dans une économie de plus en plus fondée
sur le savoir. Le travailleur du savoir de nos jours doit posséder de bonnes capacités de lecture et d’écriture, ainsi que
des habiletés en mathématiques, en vue d’obtenir un poste
bien rémunéré. La formation et l’acquisition de connaissances
— sur le tas ou dans un établissement d’enseignement —
sont perçues comme étant essentielles au succès.
Il va sans dire que le phénomène de mondialisation
constitue l’un des plus grands changements de l’heure.
La mondialisation est ce processus d’intégration croissante
des marchés de biens, de services, de capitaux et de
main-d’œuvre auquel on assiste à l’échelle mondiale. Ce
phénomène a pris un sens concret en 1997, lorsque la
crise économique asiatique a fait prendre conscience des
liens financiers étroits qui existent entre les marchés du
monde entier. Au Canada, les accords commerciaux avec
les États-Unis et les tribunes multilatérales ont donné
tout un élan aux échanges et aux investissements. Ces
accords sont toutefois la cause de pertes d’emplois dans
quelques secteurs, car certaines entreprises ne sont plus
capables de soutenir la concurrence. L’économie du
Nunavut n’est pas du tout isolée, ce qui laisse présager
à la fois des menaces et des possibilités de croissance
au cours des années à venir.
• Les principaux transferts fédéraux consentis au Nunavut
augmenteront de 5,19 p. 100 en moyenne au cours des
cinq prochaines années. Cette augmentation est, de loin,
supérieure au taux de croissance démographique, ce qui
signifie que les transferts par habitant s’élèveront à plus
de 24 000 $.
• On s’attend à ce que le taux de croissance démographique
du Nunavut, en données composées annuellement, augmente
en moyenne de 2,32 p. 100 au cours des vingt prochaines
années. Ainsi, le nombre d’habitants passera de 27 002,
en 1999, à 43 834 d’ici à 2020.
• Le Nunavut peut s’attendre à une hausse de l’activité
économique traditionnelle, notamment dans le secteur
des arts et de l’artisanat. Les autres pratiques traditionnelles,
telles la chasse et la pêche, augmenteront en popularité
au moins aussi rapidement que le taux de croissance
démographique, mais tout dépendra de la capacité de
tolérance du caribou, du morse et des autres ressources
fauniques du Nunavut.
L’ère de l’informatique a aussi eu des répercussions importantes sur l’économie du monde entier. Nous vivons
dans une économie de plus en plus fondée sur le savoir.
Il n’y a pas si longtemps, celui qui abandonnait ses
études secondaires pouvait trouver un bon emploi dans
le secteur des métiers, mais cette époque tire à sa fin.
Le travailleur du savoir de nos jours doit posséder de
bonnes capacités de lecture et d’écriture, ainsi que des
habiletés en mathématiques, en vue d’obtenir un poste
bien rémunéré. La formation et l’acquisition de connaissances — sur le tas ou dans un établissement d’enseignement — sont perçues comme étant essentielles au succès.
• Le Conference Board prévoit une augmentation du PIB réel
de 2,42 p. 100, en données composées annuellement, entre
1999 et 2020. La croissance la plus rapide aura lieu au cours
des dix premières années d’existence du territoire en raison
de l’effervescence suscitée par la création du Nunavut et de
son statut dans la Confédération canadienne.
49
Le Conference Board du Canada
La croissance de l’économie du savoir est étroitement liée
à l’expansion des technologies de l’information. L’impact
des nouvelles technologies de l’information et des communications est absolument stupéfiant, comme en témoigne
la progression géométrique d’Internet. Les communications ont révolutionné les méthodes de travail, entre
autres par le télétravail, les téléconférences et bien
d’autres activités que nous tenons désormais pour
acquises. Les retombées économiques mondiales des
nouvelles technologies sont déjà étonnantes, et la plupart
des experts pensent que le rythme du changement n’ira
qu’en s’accélérant.
pour autant aggraver l’inflation. On s’attend à un ralentissement général du taux de développement technologique
par la suite, du fait que le secteur des technologies
évolue, parallèlement à un relâchement des investissements
ainsi qu’à une baisse du taux de croissance de la maind’œuvre. Aussi, on peut s’attendre à une augmentation
du PIB réel total de l’ordre de 2,5 p. 100.
La politique monétaire canadienne demeurera vraisemblablement axée sur le maintien de la stabilité des prix.
Puisque l’on ne prévoit pas que la production effective
dépasse la production potentielle à long terme, le taux
d’inflation devrait demeurer à moins de 2 p. 100 au cours
des cinq prochaines années, une tendance à laquelle contribuera en partie une légère baisse du coût de l’énergie
durant cette période. Au-delà des prévisions à moyen
terme, l’indice des prix à la consommation grimpera
lentement pour atteindre 2,2 p. 100 vers 2020. Dans
l’intervalle, une fois le facteur d’inflation sous contrôle
et avec un taux de croissance correspondant à la production potentielle tant au Canada qu’aux États-Unis, on
prévoit une baisse graduelle des taux d’intérêt. À court
terme, les bons du Trésor représenteront en moyenne
5,03 p. 100 en 2005, une baisse par rapport à la pointe
prévue de 5,67 p. 100 en 2002.
L’économie mondiale a également entraîné l’essor du
secteur des services. Le fait que certaines opérations de
fabrication à forte main-d’œuvre soient transférées vers
des pays à bas salaires découle du phénomène de mondialisation. L’épuisement des assises manufacturières de
nombreux pays industrialisés a eu pour effet de stimuler
le secteur des services. Celui-ci compte notamment les services financiers et publics ainsi que l’hôtellerie. Le secteur
des services génère jusqu’à trois quarts des emplois dans
certaines économies industrielles contemporaines.
L’abondance des ressources naturelles au Canada nous a
longtemps valu le titre mondial de « bûcherons et porteurs
d’eau ». De nos jours, les ressources comptent encore pour
près de 40 p. 100 des exportations canadiennes. Aussi, le
déclin à long terme des prix des marchandises est l’une
des tendances les plus préoccupantes pour le Canada et le
Nunavut. Lorsque la crise asiatique a éclaté en 1997, le
dollar canadien a chuté de manière inquiétante en raison
de l’effondrement mondial du prix des marchandises.
Même si les prix augmenteront à nouveau avec la reprise
de la demande mondiale, il reste que la tendance à la
baisse, qui semble vouloir durer, inquiète quant à l’avenir
des économies basées sur les ressources naturelles.
6.2
Aux États-Unis, la constance du secteur technologique
continuera d’attirer les capitaux étrangers et de soutenir
le dollar américain. Ainsi, malgré un solide excédent du
compte courant, des nouvelles de plus en plus favorables
sur le plan financier et une légère amélioration du prix
des marchandises, on ne prévoit pas que le dollar canadien
prenne beaucoup de valeur au cours des cinq prochaines
années, s’échangeant à 0,708 $ US en 2005, en moyenne.
Ce n’est pas avant 2010, alors que la révolution technologique s’essoufflera et que l’entrée de capitaux aux
États-Unis ralentira, que le dollar canadien commencera
à connaître une appréciation importante, pour s’établir
à 0,768 $ US vers 2020.
PERSPECTIVES CANADIENNES1
Les prévisions relatives au gouvernement du Canada,
plus particulièrement celles sur les plans de dépenses,
intéresseront peut-être davantage les Nunavummiut. Les
cinq premières années de la dernière décennie ont été
marquées par un repli financier, l’élimination de programmes ainsi que l’augmentation de la dette et du déficit
du pays. Après avoir vécu selon ses moyens en s’appuyant
sur une économie croissante pendant quelques années, le
gouvernement fédéral est maintenant en mesure d’allouer
des fonds considérablement plus élevés ainsi que des
réductions d’impôt. Parmi les dépenses renouvelées,
mentionnons une augmentation des transferts fédéraux
aux régions (voir le graphique 7).
Depuis la crise économique de 1990-1991, le Canada a
connu neuf années consécutives de croissance ininterrompue. Depuis peu, l’économie canadienne est en pleine
effervescence, avec une expansion moyenne de 4,2 p. 100
durant la période de 1997 à 2000. À court terme, soit
jusqu’à la fin de 2002, on prévoit une croissance relativement importante de près de 3,5 p. 100. Cet essor contribuera à réduire la capacité excédentaire de plus ou
moins 4 p. 100 en 1996 à près de zéro en 2000. Les
progrès technologiques et la hausse rapide du capital
national ont stimulé la croissance de la production potentielle et, par le fait même, augmenté le PIB réel à un
rythme moyen de 3,4 p. 100 entre 2000 et 2007, sans
Le Conference Board du Canada
50
insuffisantes. Cette impossibilité ne signifie aucunement que ce volet est moins
important ou croît plus lentement. En
fait, la prospérité future de l’économie
du Nunavut repose sur le maintien du
mode de vie traditionnel des Inuit.
GRAPHIQUE 7
Évolution des transferts fédéraux
(variation en pourcentage)
25
20
15
6.3.1 Méthode
10
5
Les prévisions relatives au développement économique sur de longues périodes, comme vingt ans, représentent
-5
un exercice tout autre que la détermina-10
tion des perspectives à court et à moyen
-15
terme. L’évaluation du niveau de pro1992 93 94 95 96 97 98 99 00 01p 02p 03p 04p 05p 06p 07p 08p 09p 10p
duction potentielle d’une économie est
Sources : Statistique Canada, Le Conference Board du Canada.
habituellement le point de départ de
l’établissement de prévisions à long
Selon les prévisions fédérales actuelles, le Nunavut se
terme. La production potentielle représente la taille maxiverrait allouer des sommes plus élevées dans le cadre du
male que peut atteindre une économie sans engendrer de
Transfert canadien en matière de santé et de programmes
pressions inflationnistes. Autrement dit, il s’agit de la
sociaux ainsi qu’en vertu de la formule de financement
capacité de production du stock de capital d’une région,
préétabli. Au total, pour les exercices 2000-2001 à 2005combinée avec le plein emploi de sa population active
2006, les principaux transferts du fédéral au Nunavut
(prévoyant un taux naturel de chômage), à un niveau
augmenteront en moyenne de 5,19 p. 100, en données
de productivité donné. La productivité se définit comme
composées annuellement. Cette hausse des transferts
le niveau d’efficacité auquel la main-d’œuvre et l’inest considérablement supérieure à la croissance démovestissement de capitaux concourent à la production
graphique, ce qui signifie que la somme transférée par
d’extrants. La productivité totale des facteurs (PTF) est
habitant s’élèvera à plus de 24 000 $, une augmentation
à la fois tributaire des changements touchant la qualité
de plus de 2 800 $.
de la main-d’œuvre et du stock de capital. Ces facteurs
déterminent les tendances sous-jacentes à l’expansion
6.3
PERSPECTIVES DU NUNAVUT
économique à long terme. On établit ensuite des prévisions sur la production potentielle en fonction de la
Ce rapport avait entre autres pour objet de définir le
croissance à long terme de la main-d’œuvre et du stock
scénario économique le plus plausible pour le Nunavut
de capital, outre des hypothèses sur la PTF.
des vingt prochaines années. L’étude effectuée par Le
Conference Board du Canada révèle tout autant de possiLa production réelle de l’économie est ensuite évaluée.
bilités à saisir que, semble-t-il, d’obstacles à surmonter
L’écart entre la production potentielle et la production
pour favoriser la croissance du Nunavut. Il était essentiel
réelle, soit l’écart de production, permet aux économistes
de procéder à l’examen minutieux des nombreux points
de déterminer si le rendement d’une économie est supérieur
de vue de toutes les parties intéressées. On s’assurait ainsi
ou inférieur à sa capacité. À long terme, on s’attend à ce
un aperçu complet des prévisions, en tenant compte de
qu’une économie finisse par atteindre sa capacité. On dira
l’ensemble des éléments économiques, et ce, à toutes les
alors qu’elle est dans un état stationnaire.
étapes de l’analyse.
Dans le cas du Nunavut, le processus de prévision a
Les prévisions présentées ci-dessous visent à mesurer
débuté par l’évaluation du niveau de croissance prévu de
l’économie contemporaine. Elles sont surtout fondées
la main-d’œuvre en tant que composante des projections
sur l’hypothèse selon laquelle le principal objectif des
démographiques fournies par le Bureau de la statistique
Nunavummiut est d’améliorer leur niveau de vie dans le
du Nunavut (Nunavummit Kiglisiniartiit). Le calcul du
cadre de l’économie monétaire et de contribuer au succès
stock de capital actuel se base sur le PIB de 1999 pour
financier du territoire. Comme on l’expliquera plus tard, il
évaluer la production actuelle, les investissements et
est impossible de mesurer à la même échelle le volet tradil’emploi. On a dressé la liste des projets d’investissement
tionnel de l’économie du Nunavut en raison de données
afin d’évaluer la croissance du stock de capital. En ce qui
0
51
Le Conference Board du Canada
qui lui confère le plus haut taux de croissance naturelle
au pays. Cependant, c’est au Nunavut qu’on trouve la plus
courte espérance de vie moyenne au Canada. En ce qui a
trait au taux de migration nette, il ressort des entrevues
menées par le Conference Board que, si les Inuit se déplacent
à l’intérieur du territoire, très peu s’aventurent vers le
Sud. Parallèlement, la population habitant au sud du
Nunavut n’y demeure généralement que temporairement.
Les nouveaux arrivants au Nunavut remplacent souvent
des concitoyens regagnant le Sud. Aussi, à part l’immigration récente de gens du Sud subséquente à la création
du Nunavut (phénomène qui perdurera quelques années),
cette tranche de la population ne contribuera pas à la
croissance démographique à long terme. À la lumière de
ces hypothèses, on s’attend à ce que la population du
Nunavut augmente de 2,32 p. 100, en données composées
annuellement, au cours des vingt prochaines années.
Le nombre d’habitants passera donc de 27 002 en 1999
à 43 824 d’ici à 2020.
concerne la PTF, les prévisions comptaient une augmentation des dépenses dans les secteurs de la santé et de
l’éducation, qui devrait faire augmenter la productivité par
rapport au niveau affiché en 1999. C’est en conjuguant
tous ces facteurs qu’on a pu formuler les prévisions relatives à la croissance sous-jacente de la production réelle
du Nunavut durant la période visée.
Malheureusement, l’absence de données portant sur des
séries chronologiques à partir desquelles sont habituellement établies les tendances sous-jacentes à la croissance
de la main-d’œuvre et du stock de capital a compliqué le
calcul de la production potentielle. On n’a donc pu évaluer
où en était l’économie contemporaine du Nunavut par rapport à sa production potentielle, ni mesurer les pressions
inflationnistes actuelles et futures.
Finalement, on a évalué les prévisions établies par
secteur en tentant de jauger la vraisemblance de l’activité
économique basée sur les salaires. Le choix des projets
et l’établissement de leur calendrier étaient fondés sur
le scénario le plus susceptible de correspondre au
développement du territoire. Cette approche n’exclut
pas la possibilité que certains projets soient mis en
œuvre plus rapidement que d’autres. Par ailleurs, l’exclusion d’un projet n’équivaut pas à un dénigrement, mais
signifie plutôt qu’on ne dispose pas actuellement d’assez
de données pour l’intégrer aux prévisions.
6.3.2
6.3.3
Le Conference Board du Canada a intégré comme un élément
essentiel quelques projets d’ouverture de mines à son étude
des perspectives économiques du Nunavut. Malgré les
différends qu’ils peuvent soulever en rapport avec l’environnement ou la crainte qu’ils n’entraînent un phénomène
d’emballement et d’effondrement particulier aux régions
axées sur les ressources naturelles, le Conference Board n’a
rien trouvé de suffisamment probant pour indiquer un arrêt
des activités d’exploitation minière. Il semble même que l’on
ne s’intéresse qu’au choix des nouvelles mines et au moment
de leur ouverture. Il va sans dire que l’inclusion des projets
miniers dans les prévisions produit un profil de croissance
économique marqué par des années d’expansion exceptionnelle à mesure que les sites sont établis et que l’exploitation
est lancée, suivies d’années de croissance faible (si ce n’est
d’un véritable déclin) lorsque les travaux de construction
sont achevés et que les mines sont fermées.
Population
L’établissement de prévisions à long terme débute avec
une évaluation de la croissance démographique. Le Bureau
de la statistique du Nunavut, Nunavummit Kiglisiniartiit,
a établi les projections démographiques sur lesquelles
s’appuie ce rapport.
Pour prévoir les tendances démographiques, il faut tenir
compte de deux composantes. La première, le taux naturel
de croissance, est le produit de la soustraction du nombre
de décès au nombre de naissances. Cette donnée est
obtenue en évaluant le taux de fécondité (nombre moyen
de naissances par femme en âge de procréer) par rapport
à l’espérance de vie moyenne d’un nouveau-né. La seconde
composante est le taux hypothétique de migration nette,
c’est-à-dire la soustraction du nombre de personnes quittant une région au nombre de celles qui y immigrent.
Au Nunavut, ce calcul compte les migrations intérieures
et internationales.
On a déjà souligné que la mine d’or Lupin a repris ses
activités à la fin de 1999 et demeurera en exploitation
jusqu’en 2004. En réalité, on prévoit que cette mine ainsi
que celles de Polaris et de Nanisivik fermeront leurs portes
pour de bon vers 2002 et 2005, respectivement. Le taux
de croissance économique chutera alors rapidement.
Heureusement, le Nunavut connaîtra immédiatement une
reprise économique en raison de l’activité minière entreprise
ailleurs. La mine de diamants de Jericho, dans la région de
Kitikmeot sera la première à entrer en exploitation, soit en
2003. Les gisements d’or de Hope Bay et de Meliadine
devraient être mis en production en 2006, alors que le site
Comme le soulève le point 4.2, qui porte sur le capital
humain, le Nunavut se caractérise par le taux de fécondité
le plus élevé et la population la plus jeune au Canada, ce
Le Conference Board du Canada
Projets d’exploitation minière
52
On n’a pas tenu compte de l’important gisement de minerai d’Izok Lake dans les prévisions puisqu’il n’est pas vraiment garanti que l’infrastructure nécessaire, y compris un
réseau de routes toutes saisons et des installations portuaires de haute mer, sera en place à Bathurst Inlet. Dans
l’éventualité où ce projet irait de l’avant, les secteurs de la
construction et des mines du Nunavut connaîtraient un
essor incroyable, qui compenserait largement pour la fermeture des mines mentionnées ci-dessus.
de Meadowbank devrait ouvrir vers 2012. L’exploitation
de ces quatre mines et les travaux de construction qu’elle
entraîne seront les principaux moteurs de croissance
économique après le ralentissement de l’expansion gouvernementale (voir le graphique 8). Cependant, selon les
rapports préliminaires sur la richesse des sols de ces sites,
toutes les mines devraient fermer au cours des cinq
dernières années de la période couverte par les prévisions
(de 2016 à 2020). Sans nouvelles mises en chantier après
2012, la production économique globale du Nunavut,
particulièrement dans le secteur minier, stagnera, pour
ensuite chuter dans les dernières années de la période
prévisionnelle. Il serait toutefois hâtif de craindre qu’on
ne découvre pas de nouveaux gisements minéraux
au cours des vingt prochaines années. Les prévisions
comportent une hypothèse prudente, soit qu’au moins
une nouvelle mine sera mise en chantier au cours des
cinq dernières années de la période à l’étude, bien qu’elle
n’ait pas encore été découverte. Selon cette hypothèse,
le Nunavut éviterait une récession au cours des trois
dernières années de la période prévisionnelle.
Certains rapports indiquent également que la valeur des
réserves pétrolières et gazières du Nunavut pourrait
dépasser le seuil du billion de dollars. On estime pouvoir
exploiter ces réserves dès 2015. L’énorme mise de fonds
nécessaire à la construction d’un pipeline reliant le
Nunavut au principal réseau maillé de canalisation de
gaz nord-américain empêche toutefois de progresser. En
outre, la quantité de réserves pouvant justifier la rentabilité d’un pipeline risque d’exercer un effet choc sur les
marchés existants, et ne pas constituer une perspective
intéressante pour les producteurs. Il reste que, si les fonds
étaient dégagés et que le projet était mis en œuvre, le
Nunavut vivrait un boum économique, particulièrement
durant la phase de construction. Dans l’état actuel des
choses, les nouvelles opérations minières et les activités
de construction connexes dont fait mention cette étude
entraîneront une croissance moyenne du PIB réel du
Nunavut de plus de 110 millions de dollars au cours de
chacune des vingt années de la période prévisionnelle3.
Le manque de données géoscientifiques empêche de bien
prévoir l’activité minière au-delà du moyen terme. Il est
difficile de déterminer ce que valent les réserves minérales
en l’absence de données fiables2. De plus, les principaux
intervenants du secteur minier et le gouvernement ont
besoin de ces renseignements pour planifier l’avenir : les
premiers s’en servent pour dégager les fonds nécessaires
au développement des sites, alors que le second les utilise
pour cerner où il pourrait le mieux investir les fonds
publics. Aussi, la prévision de l’activité minière au-delà
des vingt prochaines années est strictement conjecturale.
Une certaine prudence s’impose à l’égard du secteur
minier. Celui-ci contribuera à la croissance de la production réelle du Nunavut, mais exercera peu d’incidence sur
les Nunavummiut. Au cours des années
passées, la plus grande part de la mainGRAPHIQUE 8
d’œuvre provenait du Sud, et les collecLes mines et la construction au Nunavut : moteurs de croissance
tivités ne tiraient pas de profits si elles
(en millions de dollars de 1992)
ne comptaient pas d’actionnaires locaux.
De plus, les entreprises d’exploitation
Production minière
Production de la construction
radiaient du bilan une énorme propor250
tion du PIB officiellement déclaré (voir
l’encadré « Exploitation minière : ce
200
que les chiffres signifient »). Ainsi, les
salaires sont le principal facteur influant
150
sur l’économie contemporaine du
Nunavut, même si ce facteur est tribu100
taire du nombre de Nunavummiut
employés. En vertu de l’Accord sur les
50
revendications territoriales du Nunavut,
0
l’industrie minière est tenue d’em1999 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
baucher un pourcentage convenu
Sources : Statistique Canada, Le Conference Board du Canada.
d’Inuit, en vue de leur prodiguer une
formation en cours d’emploi qui pourra
53
Le Conference Board du Canada
de l’infrastructure et de la vente au détail locale, le capital
humain du Nunavut devra acquérir des compétences dans
le domaine de l’hôtellerie. Il faudra former des gens d’affaires,
du personnel de bureau, des guides et des interprètes
pour offrir des services de qualité aux touristes. Une plus
grande concurrence entre transporteurs, ou la réduction
des tarifs aériens, rendrait la région plus accessible aux
voyageurs. Actuellement, bon nombre d’entre eux doivent
allouer la plus grande part de leur budget de voyage aux
frais de déplacement.
leur être utile dans d’autres secteurs ou d’autres sites
d’exploitation minière. Le secteur des services devrait
également connaître un essor sous l’effet indirect de
l’activité minière. Dans ce cas, il sera essentiel de veiller
à ce que les Inuit puissent bénéficier de l’acquisition des
connaissances et des compétences de base nécessaires
pour œuvrer dans l’industrie minière contemporaine.
Encore une fois, la question du capital humain comme
source de croissance du Nunavut se pose. Si la population
locale n’est pas formée et, donc, pas qualifiée pour travailler
dans les mines, les avantages de ce type d’activités pour le
Nunavut sont négligeables. Dans le pire des scénarios, le
manque de main-d’œuvre qualifiée chez les Nunavummiut
risquerait de compromettre l’ouverture de mines.
6.3.4
Cela dit, on s’attend à ce que l’industrie du tourisme
s’implante au Nunavut. Il est vraisemblable que bon
nombre des lacunes mentionnées seront comblées et que,
après les minéraux bruts, le tourisme deviendra le secteur
d’exportation le plus rentable au Nunavut. Fait plus important encore, ce secteur ouvrira un éventail beaucoup plus
large de possibilités d’emploi et calmera la pression
économique attribuable au manque de diversification.
Le développement de l’industrie du tourisme
Les prévisions couvrent quelques dépenses d’infrastructure
visant à améliorer le capital physique du Nunavut au cours
des dix prochaines années. Ces améliorations sont essentielles pour stimuler la croissance du capital humain du
territoire et créer des débouchés dans l’industrie du
tourisme. Les activités touchant l’infrastructure comportent la construction de 750 nouvelles habitations,
l’amélioration des systèmes de gestion des eaux, des
déchets et des eaux usées ainsi que de légères réparations
sur les routes municipales. Au cours des dix prochaines
années, les travaux municipaux, à l’exclusion des mises
en chantier, relèveront d’au moins 4 millions de dollars
par année le niveau actuel de dépenses de construction
(valeur ajoutée réelle). Ces réparations générales profiteront d’abord aux collectivités du Nunavut, mais, à long
terme, auront des retombées avantageuses sur l’industrie
du tourisme. En outre, le Conference Board a tenu compte
dans ses prévisions de la construction, avant la fin de
la décennie, d’un immeuble faisant office de palais des
congrès et de centre culturel à Iqaluit à l’intention de
la collectivité locale et des visiteurs. On pourra alors
construire un nouvel hôtel dans la capitale du Nunavut.
6.3.5
Malgré l’intégration de cinq nouvelles mines à cette
étude prévisionnelle couvrant vingt ans et l’augmentation
de l’activité dans les secteurs de la construction et de
l’hôtellerie, le gouvernement demeurera le plus important
employeur au Nunavut et continuera de représenter le plus
important secteur d’apport économique. Comme le soulève
le chapitre 5, la dépendance envers le secteur public en tant
que principal facteur de croissance économique au Nunavut
vient surtout des transferts fédéraux. Le budget global
du gouvernement du Nunavut pour l’exercice 1999-2000
s’élevait à 619 millions de dollars, dont 574 millions
provenaient de transferts fédéraux. Cette formule devrait
toutefois tenir le coup à long terme, puisque les fonds
fédéraux ne sont pas près de disparaître.
Une fois le gouvernement du Nunavut et son administration établis, les dépenses gouvernementales privilégieront
certains secteurs, comme la santé et l’éducation. Il est
urgent d’accorder une attention particulière à ces deux
services publics pour permettre à la population du
Nunavut de participer pleinement à l’économie basée
sur les salaires. En fait, l’incapacité d’améliorer les conditions de santé et de rehausser les niveaux d’éducation
est le principal facteur de risque pouvant compromettre
ces prévisions. Conscient de ce facteur de risque, le
Conference Board s’attend à ce que le gouvernement
axe ses efforts sur ces problèmes au cours des cinq à
dix prochaines années. Il s’ensuivra une effervescence
durable de l’activité gouvernementale. Les niveaux
de croissance de la production gouvernementale réelle
ne chuteront probablement pas avant 2010.
Actuellement, l’industrie hôtelière bénéficie des efforts
du gouvernement fédéral pour inscrire le Nunavut à son
itinéraire de congrès et de conférences4. Ce moteur de
croissance a cependant un potentiel limité, qui devrait
être atteint au cours des deux à trois prochaines années.
L’industrie touristique devrait se tourner vers les
vacanciers, dont les besoins sont très différents de
ceux des gens d’affaires.
Les vacanciers sont habituellement à la recherche de plus
d’activités et d’une variété d’attraits touristiques, en plus
de demander davantage de services. Au Nunavut, tous
ces aspects doivent être développés. Outre les secteurs
Le Conference Board du Canada
Le gouvernement
54
Exploitation minière : ce que les chiffres signifient
Il est dangereux de trop vouloir miser sur les projets d’exploitation minière régionaux dans l’espoir qu’ils sauveront l’économie. Certes, les travaux de
construction que suscitent ces projets peuvent avoir des conséquences directes et indirectes énormes sur l’économie locale, mais c’est surtout vrai
lorsque la main-d’œuvre est principalement composée de résidants locaux qui tirent de l’expérience une précieuse formation. En revanche, une fois
le projet en marche, les retombées économiques locales risquent d’être très réduites.
Pour mieux comprendre ce phénomène, étudions le cas d’une mine d’or en exploitation au Nunavut et supposons qu’elle compte des réserves
minérales de 4,9 millions d’onces d’or d’une valeur de 325 dollars l’once. Il s’agirait là du prix de l’or au moment de la mise en exploitation de la mine
et on choisirait de faire de la première année d’exploitation l’année de base. La mine rapporterait donc 1,6 milliard de dollars en revenus réels sur une
période de 12 ans. Au Canada, l’apport économique habituel d’une mine d’or au PIB à valeur ajoutée représente environ la moitié de sa production
globale. Dans le cas de la mine qui nous intéresse, ce chiffre s’élèverait à 800 millions de dollars. Dans la conjoncture actuelle, 800 millions de dollars
donneraient un élan très appréciable à l’économie du Nunavut, même réparti sur 12 ans. Mais rappelons-nous que le PIB au coût des facteurs est égal
à la somme de toutes les composantes économiques de la valeur ajoutée (VA), c.-à-d. les traitements et les salaires, les profits, l’amortissement et les
impôts indirects moins les subventions. Les 800 millions de dollars seraient donc répartis parmi les composantes du PIB comme suit :
1) Traitements et salaires
2) Profits
3) Amortissement et impôts indirects moins les subventions
252 millions $
240 millions $
308 millions $
Il reste à savoir quelle part de ces 800 millions de dollars demeurerait au Nunavut. Une mine de cette taille emploierait environ 300 personnes à
l’année dont une centaine pourraient être des employés locaux. À raison d’un salaire moyen de 70 000 dollars, les Nunavummiut tireraient 84 millions
de dollars de la composante des traitements et des salaires. D’autre part, en procédant à une analyse de rentabilité standard qui attribue des profits de
15 p. 100 aux exploitations minières dans le Nord canadien, on arrive à une estimation des profits de 240 millions de dollars. Ce montant irait aux
actionnaires des entreprises ayant contribué au financement du projet et ne demeurerait au Nunavut que si les actionnaires sont de la région. Les
exploitants de la mine, quant à eux, radieraient au titre de l’amortissement une énorme part du produit global à valeur ajoutée. Nous ne disposons pas
de chiffres à cet effet, mais l’expérience permet de supposer que jusqu’à 250 millions de dollars de la VA globale pourraient aller à l’amortissement,
lequel correspond aux chiffres consignés par Statistique Canada pour la valeur d’utilisation du capital social. Enfin, par impôts indirects moins les
subventions, on entend les redevances au chapitre des ressources naturelles. Selon l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, 2,5 p. 100
des ressources souterraines appartiennent à la NTI qui en assure l’administration. Aussi, toutes les redevances connexes doivent donc lui être versées.
Le reste des ressources souterraines relevant de l’administration fédérale, les redevances qui y sont rattachées doivent être versées au gouvernement
du Canada. En vertu d’une entente sur la cession des terres, les responsabilités et redevances associées aux ressources seront graduellement transférées au gouvernement du Nunavut, mais la mise en œuvre de cette entente pourrait prendre encore un certain temps.
Par conséquent, sur les 800 millions de dollars qui viendraient s’ajouter à la production minière réelle et donc au PIB total du territoire, le Nunavut
retirerait environ 84 millions de dollars au chapitre des traitements et des salaires. Mais, comme pour n’importe quelle source d’emploi, il faudrait
alors tenir compte du fait que le gouvernement du Canada retiendrait une autre part de cette somme sous forme d’impôts sur le revenu des particuliers. Et si l’on pense que le taux de fuite économique au Nunavut se situe à au moins 53 cents le dollar, en réalité, l’apport total à l’économie réelle
du Nunavut serait bien inférieur aux 800 millions de dollars déclarés dans le PIB réel au coût des facteurs.
Ces estimations ne représentent en fait que la comptabilisation statistique du PIB réel au coût des facteurs. Elles ne tiennent compte ni des avantages
économiques dérivés de l’activité minière, notamment des activités de construction et d’exploration préalables à la mise en exploitation, ni de l’activité
créée dans le secteur des services desservant la mine et ses employés, ni des avantages sociaux associés à la formation en cours d’emploi et à
l’expérience de travail. Néanmoins, il est important de reconnaître qu’effectivement, si les nouvelles mises en chantier contribuent directement à
la croissance du PIB réel, elles n’entraînent pas nécessairement une amélioration équivalente du niveau de vie de la population.
Sources : Conference Board du Canada, Statistique Canada, renseignements miniers extraits du magasine Nunatsiaq News (numéro du 1er décembre 2000).
Ce ralentissement éventuel devrait préoccuper le Nunavut.
Vers la fin de 2001, plus de la moitié de la population
active du Nunavut sera au service de l’un ou l’autre des
trois ordres de gouvernement (dans une économie basée
sur les salaires). Cependant, après 2010, l’activité non
commerciale du gouvernement territorial devrait être plus
apte à répondre aux besoins de la population. Parallèlement,
les économies d’échelle feront en sorte que le volet
55
Le Conference Board du Canada
Nunavut toute leur vie. Aussi, si le Conference Board ne
prévoit pas que la majorité des Nunavummiut choisiront
le retour à la terre pour gagner leur vie, la nécessité de
maintenir les activités économiques traditionnelles lui
paraît évidente. Leur sauvegarde devrait figurer en tête
des priorités du gouvernement et de la population.
administratif du gouvernement ne gagnera plus en importance. Aussi, les dépenses réelles du gouvernement
diminueront par rapport à la croissance démographique,
ce qui entraînera une baisse du PIB réel par habitant,
à moins que d’autres secteurs ne contribuent davantage
à la croissance économique. Cette tendance illustre
à quel point il est important de diversifier la base
économique du Nunavut.
6.3.6
Le Nunavut peut s’attendre, au cours de la période prévisionnelle, à connaître une augmentation de sa production
d’objets d’art et d’artisanat traditionnels en raison de la
demande croissante des touristes de passage sur son territoire. Il est également possible de voir certains artisans
qui ont du succès constituer des sociétés en vue de se
protéger contre un revirement économique, mais cette
éventualité est rare6. Un tel choix introduirait leurs
œuvres dans l’économie basée sur les salaires. Il faut
reconnaître que la production d’objets d’art et d’artisanat
traditionnels ne peut croître qu’au rythme de la demande,
qui dépend de la croissance de l’industrie du tourisme et
des marchés de gros investisseurs.
L’expansion de l’économie traditionnelle
Il est très difficile d’établir des prévisions relativement
à l’économie axée sur les ressources naturelles en raison,
surtout, du manque de données objectives. Toutes les
économies doivent composer avec ce phénomène, y compris celle du sud du Canada où l’économie « au noir » (ou
parallèle) représente jusqu’à 10 p. 100 de la production
nationale. Les activités au noir ne peuvent être mesurées,
puisqu’elles n’apparaissent pas dans les statistiques officielles. Il est manifestement difficile, voire impossible,
de déterminer les perspectives économiques d’activités
non consignées.
En ce qui a trait aux autres activités traditionnelles,
telles la chasse et la pêche, leur croissance correspondra
à celle du taux démographique, mais dépendra aussi de
la capacité de tolérance des ressources fauniques, notamment du caribou et du morse. Si les activités de chasse
et de pêche devaient excéder le taux de croissance de
la population, on assisterait à la commercialisation des
ressources fauniques. Cependant, l’article 5 de l’Accord
sur les revendications territoriales du Nunavut stipule
que l’exploitation des ressources fauniques (particulièrement la chasse et la pêche) à des fins commerciales ne
doit jamais prévaloir sur l’utilisation traditionnelle de
ces richesses par les Inuit.
L’étude sur l’exploitation des ressources fauniques du
Nunavut, mentionnée au chapitre 4, est un exemple
témoignant de l’importance des activités parallèles.
Une fois terminée, cette étude aidera les analystes à
mieux évaluer l’état actuel des ressources fauniques du
Nunavut. Elle permettra de préciser la quantité d’animaux
chassés et leur valeur intrinsèque.
Même si les données ne sont pas faciles à obtenir, il n’en
demeure pas moins que l’économie du Nunavut repose
sur les activités traditionnelles. Elles sont une source de
revenus pour une bonne part de la population, qui se
nourrit et se vêt d’ailleurs en exploitant les ressources
naturelles. Qui plus est, ces activités seront un pilier pour
l’industrie du tourisme, en plus d’être essentielles à la
prospérité future du Nunavut. La culture est l’un des plus
grands atouts du Nunavut, ainsi qu’un précieux outil de
commercialisation. Le secteur de l’exportation du Nunavut
perdrait beaucoup si l’exploitation traditionnelle des
ressources devait un jour disparaître.
6.3.7
Le chapitre 5 examinait les possibilités à court et à
moyen terme du secteur des pêches du Nunavut. On peut
s’attendre à une augmentation des quotas de pêche au
Nunavut au cours des cinq prochaines années. Toutefois, si
le territoire désire tirer pleinement avantage de la valeur
ajoutée de cette industrie, il devra veiller à l’établissement
d’installations de traitement et de transformation du
poisson. Il s’agit d’une proposition provisoire, puisqu’elle
demande une contribution de toutes les formes de capital
du Nunavut.
Le déclin ou la disparition de la culture inuite est l’un des
grands facteurs de risque influant sur les prévisions. Bien
que certains éléments laissent supposer une diminution de
l’intérêt envers les activités de subsistance traditionnelles,
il est encore difficile d’établir avec certitude si le niveau
de participation à cette économie a vraiment baissé5.
Comme il en sera question au chapitre suivant, les jeunes
Nunavummiut représentent la cohorte d’âge dominante et,
à ce titre, ils influeront sur l’orientation économique du
Le Conference Board du Canada
Perspectives relatives aux pêches
Parmi les améliorations qui s’imposent figure l’obtention
de données plus complètes sur le capital naturel, mais
il sera nécessaire d’entreprendre d’autres études en vue
de déterminer la taille et la durabilité à long terme de
l’industrie des pêches. On pourrait ainsi s’assurer de sa
56
contribuer à combler les lacunes relevées dans les secteurs
de la santé et de l’éducation.
rentabilité à plus long terme. La construction d’une usine
de traitement et de transformation du poisson viable exige
que le territoire améliore son infrastructure maritime. De
plus, une formation technique des pêcheurs inuits leur
permettrait d’accéder à des emplois plus intéressants dans
l’équipage des bateaux de pêche. Enfin, l’expansion de ce
secteur dépend de l’appui financier du milieu d’affaires.
Le capital organisationnel du Nunavut pose également
beaucoup de risques. Il reste encore de nombreux détails
à régler relativement à l’établissement du Nunavut comme
nouveau territoire politique. Les questions touchant les
droits miniers, les accords de pêche, les méthodes de
recrutement des Inuit au sein de l’administration publique
et du secteur privé, pour n’en nommer que quelques-unes,
doivent encore faire l’objet de négociations et de consensus. La plupart de ces questions devraient être résolues
avec le temps. Entre-temps, l’absence d’un accord
autorisant des pêches plus volumineuses, par exemple,
n’entraînera pas l’effondrement économique du Nunavut,
mais pourrait freiner le développement de ce secteur. Le
Conference Board du Canada reconnaît que toutes ces
questions reçoivent l’attention nécessaire et que les défis
qu’elles comportent sont très clairs pour les dirigeants
du Nunavut et leur personnel. Les risques d’échec relatifs
aux activités organisationnelles sont donc minces et ne
devraient pas, à long terme, menacer la concrétisation des
prévisions. Il n’en demeure pas moins qu’il faut y voir.
Il est difficile de prévoir exactement le niveau de croissance de ce secteur, comme il reste encore beaucoup de
détails à clarifier. Cette industrie pourrait sans doute contribuer à la création d’au moins 100 emplois saisonniers
dans l’économie contemporaine. Bon nombre d’entre eux
se trouveraient dans le secteur du traitement et de la
transformation des aliments, qui offre d’excellents
débouchés pour les Inuit. Un tel essor pourrait doubler la
production issue des pêches et de la transformation du
poisson d’ici à 2010. Ces prévisions notent une augmentation des pêches consécutive à la hausse des contingents
(voir le chapitre 5), en tenant compte de l’établissement
d’une usine de traitement et de transformation au cours
des cinq dernières années de la présente décennie.
L’accroissement des gains à long terme dépendra de l’aptitude du Nunavut à répondre aux questions en suspens
touchant cette industrie.
6.3.8
6.4
PERSPECTIVES DE CROISSANCE ÉCONOMIQUE
DE L’ÉCONOMIE NUMÉRAIRE
Risques inhérents aux prévisions
Le Conference Board prévoit que le PIB réel, composé tous
les ans, augmentera de 2,42 p. 100 en moyenne entre
1999 et 2020 (voir le graphique 9). La croissance la plus
rapide s’effectuera au cours des dix premières années
d’existence du territoire en raison du grand nombre
d’activités entourant l’établissement du Nunavut en
Le plus grand risque compromettant ces prévisions concerne le développement du capital humain du Nunavut,
plus particulièrement de sa jeunesse. Au cours des vingt
prochaines années, l’augmentation de l’activité économique
prévue dans ces perspectives devrait contribuer à la création
d’un grand nombre d’emplois au Nunavut. Toutefois, le
manque de compétences actuellement observé dans la
population active pourrait mettre ces possibilités en jeu,
et menacer l’essor économique prévu. Le Nunavut se voit
donc pressé de placer en tête de ses priorités l’acquisition
de connaissances et de compétences spécialisées.
GRAPHIQUE 9
Croissance du PIB réel, au Nunavut et au Canada
(taux de croissance annuels moyens composés)
Nunavut
Dans le même ordre d’idées, on note le besoin urgent
d’améliorer l’état de santé et le bien-être social des Inuit.
Un candidat à un emploi doit être en aussi bonne santé
qu‘il a une bonne instruction. Les faits présentés au
chapitre 4 mettent en relief d’inquiétantes tendances
chez les Nunavummiut, qu’il est impérieux de rectifier
avant qu’elles n’entraînent des répercussions irréversibles
sur leur employabilité.
5
On a fait mention au chapitre 5 du besoin d’augmenter
le financement pour stimuler les investissements propices
à la création de richesses. Sans égard à leur provenance,
ces dépenses absolument nécessaires devraient également
0
Canada
4
3
2
1
2000–04
2005–09
2010–20
Sources : Statistique Canada, Le Conference Board du Canada.
57
Le Conference Board du Canada
tant que nouveau membre de la Confédération canadienne.
En 2000 seulement, le PIB affichera une croissance se
situant dans les deux chiffres. Au cours des cinq premières
années, dès 1999, l’économie basée sur les salaires
affichera un taux de croissance moyen composé de
4,17 p. 100 qui ralentira quelque peu au cours de la
décennie pour atteindre 3,46 p. 100 en moyenne.
Quelques mines fermeront, alors que d’autres ouvriront,
au cours de cette période, d’où un taux de croissance
économique variable. Durant les dernières années de la
période prévisionnelle, la croissance économique sera
presque nulle à cause des fermetures anticipées qui
enrayeront les profits générés dans les secteurs liés à
l’hôtellerie. Aussi, de 2011 à 2020, le taux de croissance
moyen composé du PIB réel sera de 1,23 p. 100.
tous les gains attribuables à l’augmentation du PIB réel
par habitant, réalisés au cours des vingt années couvertes
par les prévisions, et de fixer le PIB à 25 257 $ par habitant en 2020, par rapport à 26 934 $ par habitant en
2000, en moyenne.
Le PIB réel par habitant sera sujet à certaines fluctuations
au cours de la période prévisionnelle de vingt ans, mais,
encore une fois, le ralentissement économique qui se produira vers la fin de cette période entraînera un retard du
taux de croissance du PIB réel par rapport à celui de la
population. Ce retard aura pour effet d’annuler presque
À l’exception des dernières années de la période prévisionnelle, qui sont des anomalies dans la mesure où elles ne
représentent pas le début d’une période de déclin à long
terme, on peut affirmer que les prévisions du Conference
Board relatives à l’économie contemporaine du Nunavut
sont optimistes. Cet optimisme est cependant conditionnel :
de nombreux ajustements économiques et sociaux doivent
être faits durant la période prévisionnelle. Par ailleurs,
il serait peu sage de considérer ces prévisions comme
une note de passage. Elles sont plutôt une vision des
possibilités offertes si chacun travaille à l’atteinte d’objectifs communs pour faire progresser toute l’économie. Ces
objectifs, ou les secteurs où il y a matière à amélioration,
sont mis en relief au chapitre 7, qui résume les conclusions de cette étude. Leur atteinte est nécessaire à la
réalisation de ces prévisions.
1 Ces perspectives sont fondées sur les prévisions annuelles à long terme du
Conference Board du Canada, réalisées en novembre 2000.
4 Selon le gouvernement du Nunavut, 72 p. 100 des voyageurs au Nunavut en
1999 y sont allés pour affaires.
2 Comme en faisait état le chapitre 4, il n’existe que très peu de données géoscientifiques portant sur l’ensemble du Nunavut. Il est donc difficile pour le gouvernement
et surtout l’entreprise d’inclure les gisements de minerai dans leur processus de
planification et d’établir des prévisions exactes pour le secteur minier au-delà d’une
période de 20 ans.
5 Le tableau 5, au chapitre 4, montre le peu d’intérêt des jeunes Inuit (4 p. 100) à
l’égard du mode de vie traditionnel à la fin de leurs études (Gouvernement des
Territoires du Nord-Ouest, 1996). Cependant, l’Enquête de 1999 sur la population
active du Nunavut révèle que plus de 70 p. 100 des Inuit de sexe masculin âgés
de 15 à 34 ans s’adonnent fréquemment, régulièrement ou occasionnellement à
la chasse ou à la pêche.
3 Nous sommes arrivés à ce chiffre en calculant la différence moyenne entre les PIB
réels obtenus selon deux scénarios : un premier, qui comprend le développement
minier discuté (à la base des prévisions du Conference Board), et un second, qui a
pour hypothèse de base qu’aucune nouvelle mine n’ouvrira après l’an 2000.
Le Conference Board du Canada
6 La constitution en société des entreprises d’artisanat n’est pas pour demain,
mais pourrait devenir nécessaire si la demande de l’industrie touristique dépassait
les attentes.
58
7—L’avenir : à nous d’en décider
croissance passe obligatoirement par le développement
tant de l’économie de subsistance que de l’économie basée
sur les salaires.
Faits saillants
• Les valeurs sociales continueront de jouer un rôle déterminant dans l’élaboration des politiques de développement
socio-économique du Nunavut.
Nous faisons état également de quatre facteurs essentiels
à la création de richesses : le capital physique, le capital
humain, le capital naturel et le capital social et organisationnel. L’analyse que nous avons faite de chacun de ces
facteurs indique qu’il faut tous les suivre de près pour
assurer la croissance économique. Il semble y avoir de
graves lacunes à combler dans l’infrastructure du Nunavut,
surtout si on veut qu’elle corresponde aux exigences d’une
population en croissance rapide. Notre évaluation du capital humain révèle qu’il reste beaucoup à faire pour relever
le faible niveau d’éducation des Nunavummiut et améliorer
leur piètre état de santé, compte tenu de l’importance
que ces aspects ont sur les plans de la qualité de vie et
du développement. Étant donné la place prépondérante
qu’occupe le capital naturel au Nunavut, il faudra s’efforcer
de mieux comprendre l’état des choses dans des domaines
comme les ressources fauniques et les données géoscientifiques publiques. Enfin, nous expliquons brièvement
comment la répartition du capital du Nunavut sera en
grande partie déterminée par les dispositions de l’Accord
sur les revendications territoriales. Le gouvernement
et les organismes inuits de même que les principes du
Qaujimajatuqangitt inuit exerceront sans doute une influence considérable sur les décisions relatives à la création
des richesses au Nunavut.
• Les lacunes dans les données sur les quatre formes de
capital et sur ce qu’elles signifient pour le Nunavut devront
être comblées si l’on veut fixer des objectifs réalistes et suivre
le progrès du développement.
• Il sera primordial de veiller à ce que les jeunes du Nunavut
possèdent le niveau d’éducation et les compétences qui leur
seront nécessaires.
• Une coopération accrue entre les principaux dépositaires
des enjeux économiques s’impose. Le gouvernement fédéral
devra fournir une aide selon des modalités suffisamment
souples pour permettre au Nunavut de l’adapter aux besoins
en matière de développement et aux exigences démographiques qui lui sont propres. Il est essentiel que tous
les intervenants œuvrent conjointement pour l’épanouissement de l’économie mixte du Nunavut.
7.1
RÉSUMÉ DES OBSERVATIONS
Le Conference Board du Canada a été chargé d’examiner
l’état actuel de l’économie mixte du Nunavut et d’en évaluer les perspectives à long terme. Pour ce faire, il s’est
penché notamment sur les éléments structurels sousjacents au rendement économique à long terme.
Dans le présent rapport, le Conference Board s’est penché
sur la taille et les composantes de l’économie de subsistance et de l’économie basée sur les salaires du Nunavut.
Nous avons fait ressortir les avantages d’une économie
mixte, par opposition à une économie duale, où l’on
encourage les participants à délaisser les activités non
rémunérées au profit des activités à salaire. L’approche
Notre rapport commence par un aperçu du développement
économique dans lequel nous soulignons que la croissance
économique au Nunavut est nécessaire à la satisfaction
des besoins d’une population grandissante et d’une
demande accrue de produits et de services. Cette
59
Le Conference Board du Canada
politiques. Ce sont des croyances profondément ancrées,
indépendantes de tout objet ou de toute situation, qui
reflètent nos attentes par rapport au comportement des
uns et des autres. Les valeurs contribuent à façonner
l’attitude individuelle à l’égard de certaines questions,
notamment le développement économique.
mixte tient compte du rôle et de la valeur des activités
de subsistance au Nunavut et admet leur existence simultanément avec les activités salariées1. Dans une optique
socio-économique, la dépendance à l’égard d’une seule
forme d’économie n’est pas viable.
Sur le plan quantitatif, il est difficile de traiter de la taille
de l’économie de subsistance ou de mesurer la participation à cette forme d’économie, puisque le PIB n’en rend
pas compte. Selon nos sources, le poids de cette économie
se situerait entre 40 et 60 millions de dollars. Dans le cas
de l’économie basée sur les salaires, la valeur du PIB réel
en 1999, exprimée en dollars constants de 1992, s’élevait à
682 millions de dollars. Le PIB réel par habitant pour cette
période se chiffrait à 25 259 $ par rapport à une moyenne
nationale de 24 642 $.
Les valeurs sont généralement stables, mais il arrive que
leur ordre de priorité varie sous l’effet de facteurs importants comme les changements socio-économiques (p. ex.
la transformation du paysage économique ou démographique). En effet, selon les circonstances, on pourra
accorder davantage d’importance à certaines valeurs et
moins à d’autres. De la même manière, une société pourra
simultanément admettre plusieurs valeurs contradictoires
(p. ex. prôner un plus grand degré d’individualisme tout
en valorisant une approche collective). Il est essentiel de
bien comprendre la nature des changements qui touchent
les valeurs puisque c’est ce qui détermine les choix d’une
société. Mais qui dit choix dit compromis.
Le Conference Board du Canada a fait des prévisions
économiques pour le Nunavut. Le taux d’accroissement
annuel composé du PIB réel devrait s’établir en moyenne
à 2,42 p. 100 entre 1999 et 2020. Le Nunavut connaîtra sa
croissance la plus rapide durant les dix premières années
de son existence grâce aux activités entourant sa création.
Les secteurs de l’exploitation minière, du tourisme et de
la pêche présentent le meilleur potentiel. Nos projections
sont fondées sur diverses suppositions, notamment le
développement des jeunes Nunavummiut (éducation,
santé et compétences) et de l’infrastructure.
Une récente recherche du Conference Board du Canada sur
les valeurs révèle qu’au cours des vingt dernières années,
la confiance des Canadiens en leur gouvernement a baissé;
que ceux-ci exigent que le gouvernement rende compte
davantage de ses décisions et gère les finances de l’État de
manière plus responsable; qu’ils sont favorables à une plus
grande responsabilité et à une plus grande autonomie personnelles; et qu’ils préconisent une réduction du soutien
aux programmes sociaux universels, à l’exception du régime
d’assurance-maladie. En conséquence, les gouvernements
ont été amenés à changer leurs politiques. Au nombre
de ces changements, il y a eu la décision du gouvernement
fédéral de réduire les transferts aux provinces et aux
territoires afin d’éliminer le déficit, l’insistance sur une
meilleure reddition des comptes et l’engagement des
dépenses sociales de façon plus ciblée2.
Ce dernier chapitre recense quelques-uns des éléments que
le Conference Board considère comme étant indispensables
à la réalisation de ces prévisions et à la croissance
économique.
7.2
QUESTIONS ESSENTIELLES À L’ESQUISSE DE
L’AVENIR ÉCONOMIQUE DU NUNAVUT
Le présent rapport n’a pas de prétentions normatives.
Cependant, Le Conference Board du Canada a cru bon de
faire ressortir quelques éléments clés se rapportant au
capital humain, physique, naturel ainsi que social et
organisationnel du Nunavut et qui favorisent l’expansion
économique. Chacun de ces éléments est traité individuellement dans ce qui suit, bien que l’on doive admettre
qu’ils sont interdépendants.
7.2.1
Il est important de bien comprendre les valeurs nunavummuites, notamment celles qui ont trait au développement
économique. Le développement économique est-il une
priorité pour les Nunavummiut? Le cas échéant, à quelles
formes de développement sont-ils favorables et à quelles
autres sont-ils opposés? Quel équilibre les Nunavummiut
aimeraient-ils atteindre entre l’économie de subsistance et
l’économie basée sur les salaires?
Quelles sont les valeurs primordiales des
Nunavummiut?
L’examen de grandes initiatives comme l’Accord politique
du Nunavut, l’Accord sur les revendications territoriales
du Nunavut, les travaux de la Commission d’établissement
du Nunavut et le Mandat de Bathurst révèle que le
développement du Nunavut est déjà influencé par
certaines valeurs :
Les valeurs sociales influenceront l’orientation que les
Nunavummiut choisiront d’imprimer à l’économie et au
développement de leur territoire. Les valeurs jouent un
rôle de premier plan dans la détermination des choix
Le Conference Board du Canada
60
Au Nunavut, le choix des orientations sera influencé par
deux considérations relatives à des valeurs. Premièrement,
il faut reconnaître que l’adoption de toute valeur comporte certains compromis et qu’il est essentiel d’élaborer
des politiques durables. Par exemple, la décentralisation
de l’administration publique entraînera une plus grande
répartition des possibilités d’emploi dans la fonction
publique du Territoire. Toutefois, cette décision entraînera
probablement une augmentation des coûts administratifs
et une réduction des dépenses au chapitre des programmes. Un processus décisionnel fondé sur le consensus
peut mener à des décisions qui bénéficieront d’un appui
plus répandu, mais cela risque également d’allonger les
délais.
• Une approche collective pour le développement socioéconomique : les Nunavummiut croient fermement que
les possibilités de développement économique doivent
être partagées par toutes les collectivités. Cette
approche collective n’implique pas nécessairement
une grande participation de la part du gouvernement,
comme le montrent les sociétés inuites depuis des
siècles. Cela dit, au cours des dernières décennies,
le gouvernement a pris une part active dans cette
approche, et la décentralisation est perçue comme
étant un moyen d’assurer le partage équitable des
possibilités d’emploi dans la fonction publique;
• La promotion de l’autonomie : le Mandat de Bathurst
fait de la promotion de l’autonomie une grande priorité.
Pour les Inuit, cela se traduit par un plus grand contrôle politique et économique sur le Nunavut et sur son
environnement. Nombre de politiques, dont les dispositions visant la participation des Inuit au sein de la
fonction publique, la politique NNI sur l’adjudication
des contrats ainsi que l’adoption de l’inuktitut comme
langue de travail, témoignent de l’importance, pour les
Inuit, de demeurer maîtres de l’avenir du Nunavut. La
dépendance à l’égard des ressources extérieures (entreprises, investisseurs et ressources humaines) n’est pas
activement encouragée. On hésite à solliciter les
investisseurs étrangers ou à former des partenariats
avec des entreprises de l’extérieur, par crainte de perdre
de l’influence;
• Le Qaujimajatuqangit inuit (QI) : on reconnaît l’importance du savoir inuit et de son intégration à d’autres
sources de connaissance. La prise de décisions repose
sur le consensus et la consultation. Des démarches ont
été entreprises en vue d’incorporer le QI aux méthodes
de travail et aux services du gouvernement du
Nunavut;
• Le développement économique doit se faire principalement à l’échelle communautaire : chez les Inuit,
l’attachement à la communauté est très fort. Bien des
universitaires et responsables publics recommandent
que les stratégies de développement économique soient
axées sur la collectivité plutôt que sur l’ensemble du
territoire (dans des secteurs d’activité comme l’exploitation minière, où la participation locale est faible);
• L’activité économique de subsistance est un aspect
important du mode de vie inuit qui doit être soutenu :
rien ne permet de supposer que l’on accorde une valeur
moindre aux activités de subsistance qu’aux activités
rémunérées. Beaucoup de Nunavummiut voudraient
participer aux deux types d’activités;
• Le développement durable : le développement économique
doit respecter les pratiques du développement durable
voulant que l’on accorde une importance égale au
développement du capital humain et du capital naturel.
Deuxièmement, il faudra déterminer si ces valeurs revêtent
une importance pour les jeunes Nunavummiut. L’Enquête
sur la population active du Nunavut de 1999 révèle qu’environ 60 p. 100 des Inuit seraient disposés à déménager
pour obtenir un emploi nouveau ou meilleur3. D’autres
études indiquent que les jeunes Inuit souhaitent faire carrière au sein de l’économie basée sur les salaires4. Comme
nous l’avons évoqué plus haut, seul un très faible nombre
d’étudiants inuits semblent préférer retourner au mode de
vie traditionnel. En raison de la démographie du Nunavut,
on peut s’attendre à ce que les valeurs et les aspirations
de sa jeune population dicte les politiques de développement socio-économique comme l’ont fait les « babyboomers » dans le reste du Canada et aux États-Unis.
La réponse à ces questions ne fera probablement pas
l’unanimité, mais si nous savions où réside le consensus
(p. ex., chez les aînés ou chez les jeunes), il serait plus
facile d’orienter le développement économique.
7.2.2
L’importance de mieux connaître le Nunavut
Mieux connaître le Nunavut et ses quatre formes de capital, c’est pouvoir fixer des objectifs socio-économiques
atteignables et en suivre les progrès. En raison de la forte
concurrence en matière de demandes de financement, il
sera de plus en plus nécessaire de disposer d’informations
et de connaissances solides pour s’assurer l’aide financière
des secteurs public ou privé.
La NTI soulignait, dans son évaluation de la mise en
œuvre de l’ARTN, que l’absence d’un portrait quantitatif
complet et fiable de la société du Nunavut fait sérieusement entrave à l’élaboration de politiques éclairées et à
l’usage optimal des ressources publiques5. En vertu de son
mandat, le gouvernement du Nunavut assume à peu près
les mêmes responsabilités que celles qui incombent à un
gouvernement provincial, d’où la nécessité de le doter
d’une base de données statistiques fiable pouvant soutenir
61
Le Conference Board du Canada
l’élaboration et le suivi des politiques et programmes qui
lui permettront de jouer son rôle. Le ministère des Affaires
indiennes et du Nord canadien et d’autres ministères
fédéraux compétents doivent pouvoir compter sur des
informations à jour pour appuyer les politiques et programmes touchant le Nunavut. Les secteurs de l’éducation,
de l’emploi et des affaires du Nunavut aussi ont les mêmes
besoins en matière de données statistiques que ceux du
reste du pays.
fournies à Statistique Canada ne font pas état des
répercussions des nouvelles initiatives de pêche à la
crevette sur la création d’emplois. Sont également
absentes les données relatives à une partie du secteur
de la transformation des aliments. La consignation
de ces données exigera la collaboration de tous
les intéressés. Il importe en outre d’avoir une meilleure
compréhension du rôle que jouent les entreprises
inuites dans l’économie du Nunavut.
Il ne faut pas chercher bien loin pour constater que
plusieurs facettes du Nunavut sont mal documentées.
Comme nous l’avons déjà souligné, il existe très peu d’informations sur :
• l’état de santé et la condition sociale des Nunavummiut :
bien que le capital humain soit une des plus grandes
composantes du développement économique du Nunavut,
il n’existe presque pas d’informations sur la condition
sociale et sur l’état de santé de cette population;
• le capital naturel et le manque de données géoscientifiques publiques : pour que l’activité de subsistance
continue de jouer un rôle de premier plan pour les
Inuit, il est essentiel de disposer de plus de données
cumulatives pour gérer cette économie de manière
durable. De même, à moins d’avoir une bonne appréciation des réserves minérales ou des stocks de poisson,
il sera difficile d’attirer les investissements. Chose
étonnante, on dispose de peu de connaissances scientifiques au sujet du capital naturel du Nunavut;
• l’économie de subsistance du Nunavut et son fonctionnement : comme nous l’avons montré plus haut, l’activité
économique de subsistance est une importante source
de revenu « imputé » pour les ménages du Nunavut.
Bien qu’il soit difficile d’obtenir des données détaillées
relatives à la consommation, on dispose de suffisamment d’informations pour faire des calculs approximatifs
une fois qu’on aura établi un cadre. Les organismes
chargés de la collecte de données, tels Statistique
Canada et le Bureau de la statistique du Nunavut
(le Nunavummit Kiglisiniartiit), devront travailler en
étroite collaboration pour veiller à ce qu’on consigne
adéquatement l’activité économique, qu’on établisse la
production de l’économie de subsistance et qu’on définisse
des méthodes d’estimation régulière et uniforme;
• l’économie basée sur les salaires : il faudrait disposer
de meilleurs calculs estimatifs de la taille des secteurs
de la chasse (au phoque, notamment) et de la pêche
commerciale et de la transformation des aliments,
lesquels sont particulièrement importants pour l’économie
du Nunavut. Ces calculs permettraient de recenser une
source importante et grandissante d’emplois pour les
Nunavummiut. Il semblerait qu’une partie de ces activités
économiques soit négligée. Par exemple, les informations
Le manque de données sur le Nunavut tient à plusieurs
facteurs. Premièrement, avant 1999, très peu d’informations étaient consignées au sujet de ce territoire, puisqu’il
faisait encore partie des T.N.-O. Or, les données historiques
peuvent nous aider à comprendre davantage les tendances
économiques et sociales grâce à l’élaboration de modèles
économétriques et à d’autres modèles économiques. Bien
que la ventilation des données combinées (T.N.-O. et
Nunavut) qui remontent aux années antérieures à 1999
soit difficile du point de vue méthodologique, les avantages
seraient néanmoins considérables. Ce genre de travail a déjà
été fait quand on a scindé les T.N.-O. et le Yukon dans les
années 80.
Le Conference Board du Canada
Deuxièmement, tant la population du Nunavut que sa base
économique sont petites. Cette combinaison présenterait
des difficultés de taille pour n’importe quel système statistique. Par exemple, le peu d’entreprises que compte le
Nunavut peut entraîner des contraintes en matière de confidentialité et empêcher la divulgation de certaines informations au public dans différents domaines. De plus, il
suffit que quelques entreprises ne figurent pas dans une
enquête pour fausser l’importance réelle de certaines
activités économiques. Le faible taux de population peut
également nuire à l’analyse des données sur les services de
santé et les services sociaux et à l’évaluation de l’ampleur
des activités de subsistance au Nunavut. Dans bien des
cas, il faut effectuer un recensement pour obtenir des
résultats d’analyse fiables, ce qui peut causer un problème
de taux de réponse quand les gens sont trop sollicités.
Troisièmement, les données relatives à certains indicateurs
sont parfois tout simplement inexistantes. Dans d’autres
cas, les bases de données du gouvernement n’ont pas
encore été établies ou, encore, la difficulté tient aux indicateurs mêmes. Notons, entre autres, le manque général de
données et le rejet des indicateurs servant à mesurer l’efficacité des services de santé et d’autres programmes sociaux.
Quatrièmement, il y a le fait qu’à ce jour, l’essentiel de
l’information a été géré et coordonné par des centres du
Sud. Cela dit, le Bureau géoscientifique Canada-Nunavut
et l’Institut de recherches du Nunavut du Collège de
62
l’Arctique contribuent grandement à une meilleure coordination des travaux de recherche, mais on devra manifestement faire davantage pour harmoniser les diverses sources
d’information et établir les priorités qui permettront de
combler les lacunes citées plus haut.
d’entreprendre de nombreuses études sur le capital naturel
du Territoire. Un financement sur cinq ans a été prévu
pour la réalisation de l’Étude sur l’exploitation des
ressources fauniques du Nunavut entre 1996 et 2001.
Cette recherche fournira de précieux renseignements au
sujet des activités d’exploitation. À l’heure actuelle, les
principaux intervenants, y compris le gouvernement du
Nunavut, le ministère des Affaires indiennes et du Nord
canadien et les organismes non gouvernementaux, s’efforcent ensemble de déterminer quelles seront les données en
matière d’exploitation qui leur seront nécessaires ultérieurement et de mettre en place les mécanismes qui permettront
de recueillir ces informations sur une base continue.
D’autres démarches ont été entreprises afin de combler
ces lacunes. Depuis l’établissement du gouvernement
du Nunavut, il y a peu de temps, un grand nombre de
données portant sur ce territoire en particulier ont été
générées. Il est évident qu’il faudra assurer la collecte
et la production d’informations importantes au sujet
du Nunavut et de sa population, comme en font foi les
travaux entrepris jusqu’à présent par le Nunavummit
Kiglisiniartiit (Bureau de la Statistique du Nunavut) et les
demarches du gouvernement du Nunavut visant à recueillir des renseignements et des connaissances auprès des
aînés. Le Nunavummit Kiglisiniartiit a également joint ses
efforts à ceux de Statistique Canada en vue de combler
certaines lacunes sur le plan statistique.
7.2.3
L’importance de l’éducation et du développement
des compétences
Il est clair que l’éducation joue un rôle capital au
Nunavut, compte tenu de sa population et des objectifs
qu’il s’est fixés. L’importante proportion de jeunes au
Nunavut constituera peut-être le plus grand facteur déterminant des 25 premières années d’existence de ce nouveau
territoire. Il est primordial de veiller à ce que la jeunesse
du Nunavut possède l’instruction et les compétences
nécessaires pour se prévaloir des possibilités qui s’offrent
à elle et, ainsi, soutenir l’économie du Nunavut et aider
à financer les services publics.
Une fois que l’information existe, on doit pouvoir la
trouver ou y accéder facilement. Or, il peut s’avérer
extrêmement difficile pour une entreprise de l’extérieur
de l’obtenir. Une bonne partie de cette information n’est
pas accessible sur Internet qui, de nos jours, constitue la
principale source d’information pour la plupart des gens.
Une meilleure intégration des sources d’information est
essentielle non seulement aux chercheurs, mais également
aux investisseurs.
Toutefois, il ne s’agit pas uniquement d’injecter de nouvelles ressources pour améliorer le système d’éducation
conventionnelle. Il faut également favoriser une culture
d’apprentissage dans de nombreux domaines dont ceux du
QI et de l’utilisation des technologies de l’information et
des communications. Cette jeune population croissante
devra pouvoir compter sur des modèles de comportement
et être témoin de preuves constantes de l’importance des
diverses formes d’éducation.
À ce jour, il ne semble exister aucun dépôt central ou
aucune source unique d’information au Nunavut. Les
données existantes sont stockées dans différents endroits,
ministères et bases de données. Nombre de régions, y compris certaines petites collectivités, produisent maintenant
des rapports et procèdent à la consignation de données qui
pourront aider à obtenir rapidement un instantané de certaines conditions. Le Greenland Yearbook, notamment, est
un excellent exemple de point de référence central donnant accès à la majorité des informations que nous avons
tenté d’intégrer au chapitre 46. Pour sa part, le gouvernement du Yukon a produit un rapport sur les conditions
de santé de sa population en 19987. Apparemment, le
ministère de la Santé et des Services sociaux du Nunavut
serait en train de préparer un rapport semblable sur l’état
de santé des Nunavummiut. Cela permettrait d’établir les
priorités et de suivre les progrès réalisés sur des grandes
questions sociales et sanitaires.
Le Conference Board du Canada s’est longuement penché
sur l’examen des compétences et habiletés nécessaires
en milieu de travail au sein d’une économie basée sur les
salaires. Dans son rapport intitulé Avantages économiques
du renforcement de l’alphabétisme en milieu de travail,
le Conference Board précise que :
[p]eu importe la valeur de l’investissement de capitaux, l’employeur ne pourra pas en tirer tous les
avantages tant qu’il n’offrira pas à ses employés des
programmes de formation et d’éducation adéquats.
Tant qu’on ne saura pas comment optimiser le potentiel des ressources humaines et maintenir leurs
niveaux de compétences, le bien-être économique du
pays en souffrira. Plus la main-d’œuvre sera qualifiée
et alphabétisée, plus la productivité augmentera8.
Mieux connaître le Nunavut exigera un engagement
soutenu. Tel que mentionné auparavant, l’Accord sur les
revendications territoriales du Nunavut recommandait
63
Le Conference Board du Canada
contrôle et des responsabilités accrus relativement aux
décisions touchant les facteurs de création des richesses,
dont le capital naturel. La Commission royale sur les
peuples autochtones a établi qu’une plus grande influence
politique en ce qui a trait aux ressources et à la prise
de décisions constitue une des conditions essentielles du
développement économique10. À ce propos, Hamley note
que le règlement des revendications territoriales n’a
jusqu’ici pas contribué à améliorer considérablement les
conditions socio-économiques des collectivités autochtones,
quoique l’Accord sur les revendications territoriales du
Nunavut semble avoir davantage tenu compte des aspirations des autochtones, promettre le plus de possibilités et
assurer les avantages les plus généreux11.
Le rapport révèle que les employés ayant des capacités de
lecture et d’écriture élevées sont moins susceptibles d’être
sans emploi et le cas échéant, vivent de plus courtes
périodes de chômage, ont plus de chances de trouver un
emploi à plein temps et sont plus susceptibles de pousser
leur formation.
Le Conference Board s’est également associé à un vaste
éventail de partenaires en vue de cerner les compétences
relatives à l’employabilité dont les travailleurs ont besoin
pour entrer, demeurer et progresser dans le monde du travail. Le document Compétences relatives à l’employabilité
2000+ fait état de trois principaux domaines de compétences exigibles : (1) les compétences de base (comment
communiquer, gérer l’information et utiliser les chiffres),
(2) les compétences personnelles en gestion (démontrer
des attitudes et des comportements positifs, être responsable, être souple et travailler en sécurité); et (3) les compétences pour le travail d’équipe (travailler avec d’autres,
participer aux projets et aux tâches)9. Bien qu’il puisse
exister des différences dans la mise en pratique de ces
compétences au Nunavut, il n’en demeure pas moins
qu’une bonne partie de la population active devra les
maîtriser pour pouvoir faire concurrence aux autres pour
la prestation de services tant au Nunavut qu’à l’extérieur
du territoire. On pourrait également tenter de rapatrier les
Inuit qualifiés qui travaillent actuellement dans les autres
régions du Canada.
En outre, l’Accord offre plus de certitude aux entreprises
et aux investisseurs que les régions dont les revendications n’ont pas encore été réglées. L’ARTN étant relativement récent, il faudra faire la promotion de cette
certitude politique et économique auprès des entreprises
et des groupes de l’extérieur qui ne sont peut-être pas
au courant que l’établissement du Nunavut comportait un
accord sur les revendications territoriales. Une incertitude
demeure quant à l’approche réglementaire et stratégique
qu’adopteront les autorités publiques instituées en vertu
de l’Accord.
En raison de l’important rôle du gouvernement dans l’économie du Nunavut, les articles 23 et 24 de l’Accord prévoyant une plus grande participation inuite au sein du
gouvernement et de son administration peuvent contribuer
grandement au développement économique du Territoire.
Il faut toutefois savoir que la mise en application de
nombre de ces dispositions prendra du temps. Comme il
ressort de la première évaluation indépendante quinquennale de la mise en œuvre de l’ARTN, qui couvre la période
de 1993 à 1998, bien des dispositions n’ont toujours pas
été appliquées. Selon cette évaluation, sur les 193 obligations de l’Accord, 98 ont été essentiellement exécutées, 46,
partiellement exécutées, et 49, pratiquement négligées12.
Entre autres, cette évaluation concluait que :
• l’application de l’article 23, qui porte sur le recrutement des Inuit au sein de la fonction publique du
Nunavut, laisse à désirer puisque la plupart des obligations ont été largement négligées;
• la mise en œuvre de l’article 24, visant à aider les
entreprises inuites à faire concurrence aux autres entreprises pour l’obtention des marchés de l’État, ne s’est
pas non plus avérée un succès en raison de la faiblesse
des mécanismes de contrôle de l’efficacité des politiques en la matière;
• l’Accord a mené à une participation et à un contrôle
accrus des Inuit en ce qui a trait aux décisions
Notre étude des compétences a porté aussi sur les aptitudes nécessaires à la participation à l’économie de subsistance. Cette forme d’économie exige des compétences
qui lui sont propres (p. ex. le QI, des connaissances en
matière de sculpture, des aptitudes pour la navigation, la
chasse et l’exploitation minière). Il s’agira donc de veiller
à ce que les structures et processus tant formels qu’informels soient mis en place pour que l’on enseigne ces
compétences essentielles.
7.2.4
L’impact de l’ARTN sur le développement
économique
L’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut
(ARTN) aura des conséquences considérables pour l’avenir
du Nunavut. On a demandé au Conference Board du
Canada d’examiner l’ARTN dans l’optique du développement économique du Nunavut. Comme nous l’avons mentionné au chapitre 4, l’ARTN, dont la portée est plutôt
vaste, compte de nombreuses dispositions visant le
développement économique du Nunavut.
D’une manière générale, l’ARTN prévoit des avantages
économiques dans la mesure où il accorde au Nunavut un
Le Conference Board du Canada
64
touchant leurs terres, leurs eaux et leurs ressources
naturelles.
rendement des mégaprojets est plutôt faible. L’aide financière au Nunavut devra refléter la situation particulière du
Nunavut, qui tient à ses différences démographiques, à
son capital physique restreint et à son immense potentiel
encore inexploité.
L’évaluation quinquennale a établi qu’il était impossible,
à l’heure actuelle, d’en arriver à une conclusion quant à
l’effet de l’ARTN sur les conditions socio-économiques des
Inuit. Cependant, un sondage connexe de 1999 a révélé
que 60 p. 100 des Inuit estiment que l’ARTN a influencé
leur vie de manière favorable.
Nous avons déjà établi que le Nunavut est rendu à un
stade de développement spécial. Pour assurer son
développement économique, il devra inéluctablement
améliorer son infrastructure (p. ex. le logement, les transports et les télécommunications) et combler ses lacunes au
chapitre des connaissances. Cela commande des investissements considérables. Il faudra donc déterminer le rôle qui
incombera au gouvernement fédéral en regard de ces questions et reconnaître que sa contribution devra s’inscrire
dans le cadre d’un effort collectif de tous les dépositaires
d’enjeux (voir plus bas).
Les résultats des évaluations des accords existants sur les
revendications territoriales se sont avérés quelque peu
décevants13. Les conditions socio-économiques ont très
peu changé à la suite de la signature de la Convention de
la Baie James et du Nord québécois et de la Convention
définitive des Inuivialuit. Des études commandées par la
Commission royale sur les peuples autochtones recensent
trois problèmes communs : des problèmes de mise en
œuvre, des possibilités d’investissement limitées au niveau
local, imputables aux économies régionales petites et de
portée restreinte, et une bureaucratisation excessive14.
7.2.5
7.2.6
La nécessité de collaborer
On s’entend sur le besoin d’adopter une approche du
développement économique axée sur la collaboration de
tous les principaux dépositaires d’enjeux mentionnés à la
section 4.4.5. Il s’agit de former un partenariat en sachant
qu’aucune partie ne peut assumer un rôle de direction.
Le rôle du gouvernement fédéral
Plusieurs responsables du Nunavut sont convaincus que,
bien que le nouveau gouvernement territorial soit établi,
le gouvernement fédéral doit encore tenir un rôle de
premier plan dans le développement socio-économique
du Nunavut. Ils sont d’avis que les fonds fédéraux sont
essentiels aux investissements publics de base qui renforceront la capacité du Nunavut de mener des activités
de développement économique. De plus, ils voudraient
que l’État fédéral alloue des fonds au développement
économique du Nord, comme il le fait pour d’autres
régions du Canada, au moyen d’ententes sur le développement économique ou par la création d’un organisme de
développement économique15.
Des mécanismes visant à favoriser une plus grande collaboration sont déjà en place. Le Comité de hauts fonctionnaires du Nunavut, comptant des cadres supérieurs du
ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, du
gouvernement du Nunavut et de la Nunavut Tunngavik
Inc., forment une tribune tripartite au sein de laquelle les
priorités organisationnelles sont communes et les possibilités de coopération, définies et concrétisées. Le ministre
du Développement durable du Nunavut a institué un
forum économique ministériel en 1999 pour permettre à
tous les intervenants de participer à la planification du
développement économique du Nunavut.
Les dirigeants du Nunavut demandent également que le
gouvernement fédéral fasse preuve de plus de souplesse
dans ses programmes afin que ceux-ci soient mieux adaptés au stade de développement du Nunavut, particulièrement en ce qui a trait à l’infrastructure. Les programmes
de développement basés sur le nombre d’habitants ou
conçus à l’appui d’industries établies auront peut-être des
répercussions limitées dans le cas du Nunavut parce que
sa population est petite et ses industries sont jeunes. Le
programme Infrastructures Canada, par exemple, n’allouera
que deux millions de dollars au développement du capital
physique du Nunavut.
Le Conference Board du Canada a tout de même observé
un manque de clarté et, dans certains cas, l’absence
d’un consensus en ce qui a trait au rôle de chacune des
principales parties concernées par le développement
économique. Cette situation peut poser des problèmes
lorsque les ressources sont rares. Des mesures peuventelles être prises en vue d’optimiser le capital physique et
le capital humain limités du Nunavut? Il faudra collaborer
davantage pour établir un plan d’action comportant des
objectifs précis et pour progresser au-delà du consensus
sur les principes communs.
L’aide au développement économique devra faire l’objet
d’une planification réfléchie. Au Canada, le taux de
Nous croyons également qu’il est nécessaire de faire participer le secteur privé à l’élaboration d’une stratégie
65
Le Conference Board du Canada
choix de carrière désirable, il sera possible de surmonter
ces difficultés. L’adoption d’une approche plus réaliste permettra aux deux principaux ordres de gouvernement de
recruter la plupart de leurs employés au Nunavut même
et, ainsi, de récolter les retombées économiques prévues
par les auteurs de l’article 23.
économique et de reconnaître sa contribution à la croissance économique et aux objectifs généraux de développement (voir le texte sur Falconbridge).
7.2.7
LA DÉFINITION D’OBJECTIFS RÉALISTES
L’établissement de tout nouveau territoire politique crée
inévitablement des attentes élevées, et le Nunavut ne fait
pas exception à la règle. Il est de toute première importance de fixer des objectifs réalisables et de réexaminer les
objectifs préalablement établis.
Le développement économique communautaire devra peutêtre être relégué au second plan au profit du développement économique territorial. Il se peut que les possibilités
de développement économique ne profitent pas à l’ensemble du Territoire. Cela a certainement été le cas dans
le reste du Canada. Il faudra peut-être également veiller à
ce que les Nunavummiut puissent se déplacer à l’intérieur
du Territoire.
Dans cette optique, certains objectifs ambitieux que s’est
fixés le Nunavut pourraient être redéfinis et ramenés à
une dimension plus réaliste. Mis à part le désir d’employer
la population locale et d’exercer un plus grand contrôle
sur les ressources, il faudra penser à s’attirer des
ressources extérieures (main-d’œuvre spécialisée et
investissements étrangers) en vue de s’assurer le savoirfaire et le capital nécessaires, comme c’est le cas pour la
plupart des économies.
Ces objectifs exigeront probablement certains compromis.
Citons, par exemple, la proposition visant à établir un
seul fuseau horaire pour tout le Territoire. Certaines collectivités ont trouvé cette idée irréaliste du fait qu’elles
font affaire avec des collectivités du Sud, lesquelles se
retrouveraient alors dans un autre fuseau horaire. À la
fin, il a fallu faire un compromis.
On a recommandé que l’on révise l’objectif de la représentation des Inuit (85 p. 100) au sein de la fonction
publique de manière à ce que la cible reflète la proportion
de la population inuite active (50 p. 100), puisque la
majorité des Inuit n’est pas encore en âge de travailler16.
À court et à moyen terme, cet objectif sera difficile à
atteindre. Cependant, étant donné qu’une bonne partie de
la population du Nunavut est très jeune, si l’on intègre cet
objectif à l’accès à l’éducation et à la formation des candidats éventuels aux postes de niveaux d’entrée et que la
fonction publique est perçue par les Inuit comme étant un
Il ne fait aucun doute que le gouvernement continuera de
tenir un rôle de premier plan dans l’économie du Nunavut.
Toutefois, cela ne signifie pas que le Nunavut ne doive
pas diversifier son économie. Comme nous l’avons montré
dans le chapitre précédent, nous prévoyons que le rythme
de croissance du secteur public des trois ordres de gouvernement accusera un ralentissement sur plusieurs
années. Il est donc essentiel de développer d’autres
secteurs économiques. Le gouvernement a une occasion
d’influencer la diversification
économique17. L’accès à de meilleurs
Falconbridge et le projet Raglan
systèmes d’information sera un
précieux outil pour la définition
Dans le cadre de son projet Raglan, dans le Nord du Québec, Falconbridge s’est jointe aux
et le développement des secteurs
dirigeants communautaires pour élaborer une stratégie de travail coopératif afin de répondre
les plus prometteurs.
au manque de main-d’œuvre locale apte à l’emploi et au besoin de programmes de formation
et d’initiatives d’éducation à l’intention des Inuit encore aux études.
7.3 CONCLUSION
En partenariat avec le gouvernement régional de Kativik (son conseil scolaire et son comité de
la formation et de l’emploi), Falconbridge participe à une initiative conjointe de formation qui
porte sur le rattrapage scolaire, les langues, l’orientation et la sécurité, les compétences de
base courantes dans le secteur de l’exploitation minière, le fonctionnement et l’entretien, et les
métiers menant à des programmes d’accréditation. Dans l’espoir de parer au manque relatif de
travailleurs locaux qualifiés auquel on s’attend à l’avenir, Falconbridge subventionne des programmes incitatifs pour que les enfants inuits puissent bénéficier de programmes éducatifs
axés sur l’exploitation minière à l’école.
Source : Stellos Loizides et Janusz Zieminski, Employment Prospects for Aboriginal People, Ottawa, Le Conference
Board du Canada, 1998.
Le Conference Board du Canada
66
Ce rapport prévisionnel diffère
en plusieurs points des rapports
économiques typiques. En outre, il
va bien au-delà de la simple présentation de perspectives économiques
sur une période de vingt ans. Tous
les partenaires du rapport, y compris
Le Conference Board du Canada, ont
reconnu qu’il était impératif d’entreprendre une étude exhaustive sur
le développement économique du
Nunavut. Les chiffres peuvent dresser un tableau partiel,
mais ne peuvent expliquer toute la dynamique sousjacente au rendement économique du Nunavut, notamment l’importance que revêt l’économie de subsistance
dans la vie de bien des Inuit.
au chapitre 3, c’est-à-dire le maintien de la vie, l’estime
de soi et la liberté de choix. Le développement de chacune
des formes de capital doit favoriser la réalisation de ces
objectifs.
La création du Nunavut a suscité un intérêt mondial et a
été suivie de près par plusieurs observateurs. Les attentes
tant de l’intérieur que de l’extérieur sont très élevées. Une
chose est pourtant claire : on doit d’abord satisfaire aux
exigences fondamentales de développement et s’assurer
que les niveaux de capital nécessaires sont en place pour
favoriser le développement économique. Nos prévisions
pour les vingt prochaines années ne demeurent optimistes
que si ces exigences ne sont pas négligées. Au bout du
compte, c’est aux Nunavummiut qu’il appartiendra de
décider ce qui représente une qualité de vie souhaitable
et soutenable, et de définir le type de développement
qu’ils veulent réaliser pour atteindre leurs objectifs.
Par conséquent, nous avons tenté de fournir dans ce
rapport un aperçu ou une explication du développement
socio-économique du Nunavut à la lumière de ses quatre
formes de capital : le capital physique, le capital humain,
le capital naturel et le capital social et organisationnel.
Bien que notre esquisse demeure incomplète, en partie à
cause du manque de données sur le Nunavut, elle permet
néanmoins de faire ressortir les aspects de chaque forme
de capital exigeant une attention particulière.
Sont associés à ces quatre formes de capital les trois
objectifs économiques fondamentaux dont il est question
1 Pour plus de détails au sujet de cette différence, voir Elias, Models of Aboriginal
Communities in Canada’s North.
10 Commission royale sur les peuples autochtones, vol. 2, chapitre 5.
11 Hamley, op. cit., p. 229.
2 Stephen Vail, Changing Values Challenge the Canadian Way, Ottawa, Le Conference
Board du Canada, 2000.
12 N. Louise Vertes, David M. H. Connelly et Bruce A. S. Knott, Évaluation
quinquennale 1993 à 1998 : Mise en œuvre de l’Accord sur les revendications
territoriales du Nunavut, Île Royale Enterprises Ltd., 2000, p. 4.
3 Bureau de la statistique du Nunavut, supplément à l’Enquête de 1999 sur la population active du Nunavut.
13 Hamley, op. cit., p. 232.
4 Heather Myers et Scott Forest, « Making Change: Economic Development in Pond
Inlet, 1987 to 1997 », Arctic, vol. 53, no 2, juin 2000, p. 134-145.
14 Commission royale sur les peuples autochtones, vol. 2, chapitre 5, p. 2.
5 Nunavut Tunngavik Inc., Taking Stock: A Review of the First Five Years of
Implementing the Nunavut Land Claims Agreement, NTI, décembre 1999, p. 21.
15 Par exemple, l’Initiative fédérale de développement économique du Nord de
l’Ontario, la FedNor, veille à promouvoir la croissance économique, la diversification de l’entreprise, la création d’emplois et l’établissement de collectivités
autonomes dotées d’une économie durable dans le Nord de l’Ontario. L’adoption
d’une approche globale aux fins du développement économique du Nunavut a fait
l’objet de discussions entre le MAINC, le gouvernement du Nunavut, la NTI ainsi
que les gouvernements des deux autres territoires.
6 Le Greenland Yearbook est disponible en ligne à l’adresse :
http://www.statgreen.gl/english/yearbook/yb1997.htm.
7 Ministère de la Santé et des Services sociaux du Yukon, Health Status Report 1998,
Whitehorse, 1999.
16 Vertes, Connelly et Knott, op. cit., p. 3 à 14.
8 Le Conference Board du Canada, Avantages économiques du renforcement de l’alphabétisme en milieu de travail, 1997, p. 2.
17 Notons que nombre de nos informateurs clés ont mentionné, lorsqu’on leur a
demandé d’identifier les secteurs ayant le plus grand potentiel de croissance, que
cela dépendait de l’endroit auquel le gouvernement allouerait la plus grande part de
son budget de dépenses.
9 Le Conference Board du Canada, Compétences relatives à l’employabilité 2000+,
www.conferenceboard.ca/nbec.
67
Le Conference Board du Canada
Le Conference Board du Canada
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