AlainMeyer Optiquefévrier2009
Turbulenceatmosphérique
La caractérisation précise de la turbulence atmosphérique et ses effets sur les images est un
problème complexe. Cependant, pour en simplifier l'explication, on peut considérer que
l'atmosphère terrestre, la couche d'air qui nous sépare de l'espace, est en perpétuel
mouvement, et ce à une multitude d'échelles. Des grands mouvements de masses d'air à
l'échelle continentale, aux micro-mouvements de minuscules bulles d'air roulant les unes sur
les autres, en passant par les couches poussées par des vents de directions différentes suivant
l'altitude, tous contribuent à la turbulence atmosphérique. Or ces masses d'air variées, en
mouvement, ont des caractéristiques optiques différentes, essentiellement dues à leur
différentes températures (l'indice de réfraction de l'air, la vitesse de propagation de la lumière
en son sein, varient avec la température). Ainsi, au travers de l'air, les images sont
continuellement déformées.
Un modèle très étudié de l'atmosphère, et confirmé dans ses grandes lignes par plusieurs
études expérimentales, est celui de Kolmogorov. Ce modèle consiste à représenter
l'atmosphère comme une structure semi-fractale de masses d'air d'échelles décroissantes
depuis l'échelle externe correspondant aux plus grands phénomènes macroscopiques
(couches d'air, vents, perturbations météorologiques) et transmettant leur énergie cinétique
d'une échelle à l'autre par tourbillonnement jusqu'à la plus petite échelle où l'énergie se
dissipe en chaleur par frottements visqueux. L'étude mathématique de ce modèle permet de
faire ressortir plusieurs paramètres caractérisant l'état de la turbulence.
Les effets de la turbulence sont ainsi particulièrement sensibles pour l'astronome, qui, du sol,
tente de former des images à partir d'un faisceau qui a traversé des kilomètres d'atmosphère.
De plus, la perturbation due à la turbulence atmosphérique, déjà sensible pour les étoiles à
l'oeil nu, va devenir de plus en plus gênante, à mesure que l'instrument va se perfectionner.
Plus on tente de ``grossir'' les images, d'augmenter le pouvoir de résolution de l'instrument,
plus la turbulence se montre comme une barrière infranchissable.
En pratique, au sol, contrairement à la situation prévalant dans l'espace, la résolution des
images brutes que l'ont peut obtenir au foyer d'un grand télescope ne dépend pas de la taille
du miroir mais de la turbulence. Suivant les conditions (site, vents,...), la turbulence peut être
plus ou moins importante.
Les effets de la turbulence sont le plus souvent peu sensibles à l'oeil nu, de jour, car le pouvoir
de résolution de l'oeil -la finesse des détails qu'il peut distinguer- n'est pas très grand, et les
masses d'air que notre regard traverse ne sont en général pas assez grandes ou assez
turbulentes pour que l'effet de la turbulence soit sensible. Cependant il y a au moins deux cas
où cet effet est perceptible: lorsque l'on regarde par dessus une étendue assez importante de
bitume chauffé par le soleil en été (parking, route), les images sont déformées, dansantes...! Et
la nuit, lorsque l'on regarde les étoiles, la scintillation (le clignotement / tremblement) que l'on
peut observer sous nos cieux agités est aussi une conséquence de l'agitation de l'air au dessus
de nous.
C'est à cause de la turbulence atmosphérique que les astronomes s'attachent à placer leurs
observatoires sous les cieux les plus purs, en s'élevant en altitude par exemple, la masse d'air
entre le télescope et l'objet observée est réduite d'autant et la qualité des images s'accroît.
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