
Journal Identification = ABC Article Identification = 0822 Date: May 31, 2013 Time: 12:15 pm
350 Ann Biol Clin, vol. 71, n◦3, mai-juin 2013
Biologie au quotidien
3f. Le patient a bénéficié d’un traitement symptoma-
tique excluant les traitements hépatotoxiques et d’une
surveillance biologique des paramètres hépatiques jusqu’à
normalisation de ceux-ci. L’évolution a été spontanément
favorable ; le patient a quitté le service au trentième jour
après normalisation du bilan hépatique. Le patient n’a pas
été revu en consultation, celui-ci vivant à présent en insti-
tution médicalisée.
La reprise de l’interrogatoire a posteriori révélait une
consommation de figatelles crues et de produits à base
de porc apparaissant comme le vecteur de contamination
le plus probable. Cependant, en l’absence d’échantillons
alimentaires, cette hypothèse ne peut être confirmée.
Discussion
Le virus de l’hépatite E (VHE) est connu depuis 1978. Il
s’agit d’un virus du genre Hepevirus, de la famille des Hepe-
viridae. Il existe cinq génotypes dont un génotype aviaire
[1].
Il sévit selon deux modes épidémiologiques. L’expression
sur un mode épidémique concerne les pays émergents où
l’hépatite E est avant tout une maladie du péril oro-fécal.
Cette contamination est responsable de cas sporadiques
d’importation dans les pays industrialisés. Les génotypes
principalement retrouvés sont les génotypes 1 (Asie et
Afrique), 2 (Mexique) et 4 (Chine, Taïwan au Japon,
Vietnam) qui sont responsables de formes graves, principa-
lement chez les femmes enceintes. Les génotypes 1 et 2 sont
retrouvés exclusivement chez l’homme contrairement aux
génotypes 3 et 4 qui ont une prévalence humaine et animale.
L’expression sur un mode endémo-sporadique concerne les
pays industrialisés (Europe, Japon, Amérique du Nord).
Le génotype 3 est en général impliqué dans ces formes
autochtones (principalement le génotype 3f en Europe) qui
représentent la majorité des cas décrits dans ces zones (plus
de 85 %). La transmission est indirecte, le plus souvent par
voie orofécale. Les vecteurs de contamination sont soit la
consommation d’eau, soit l’exposition au réservoir animal
via les suidés par consommation de viandes crues ou insuf-
fisamment cuites (salaisons, jambon, saucisses crues type
figatelles) [2]. De rares cas de transmission par transfusion
sanguine ont été rapportés dans ces zones endémiques [3].
L’origine de la contamination demeure cependant inconnue
dans un tiers des cas d’hépatites E autochtones.
Les cas autochtones d’hépatite E aiguë sont de plus en
plus rencontrés dans les pays comme la France où leur
incidence est en augmentation (19 cas rapportés en 2005,
145 en 2008, 200 cas en 2010) [4]. La séroprévalence des
anticorps anti-VHE de type IgG dans les pays non endé-
miques est hétérogène selon les zones géographiques et les
populations étudiées (13,5 % chez les transplantés) [5]. En
France, un gradient nord-sud de cette prévalence est décrit,
il passe de 3,2 % en région parisienne à 16,6 % en région
toulousaine. Ces résultats sont en accord avec la réparti-
tion des cas autochtones qui sont majoritairement décrits en
région Paca, Languedoc Roussillon et Midi-Pyrénées (plus
de 50 % des cas). La région Rhône-Alpes en a recensé 3,5 %
de cas en 2008 [1].
L’âge moyen des patients est supérieur à 55 ans. La plupart
du temps, l’infection est asymptomatique ou pauci symp-
tomatique (environ 50 % des cas). Lorsque l’infection se
manifeste, le tableau clinique est celui d’une hépatite aiguë
virale classique associant une phase pré-ictérique d’une
durée d’un à dix jours avec des symptômes digestifs de
type nausées, vomissements et douleurs abdominales suivie
d’une phase ictérique inconstante. La guérison est obtenue
le plus souvent en 1 mois sans séquelles.
Des formes chroniques susceptibles d’évoluer vers une
cirrhose et ses complications sont rapportées. Elles ne sur-
viennent que chez les patients à risques : patients porteurs
d’hépatopathie chronique, immunodéprimés et patients
transplantés pour lesquels la mortalité atteint8à12%.
Par contre, les formes d’hépatite fulminante paraissent
exceptionnelles dans les pays industrialisés. Ceci est à
opposer aux formes graves décrites chez la femme enceinte
dans les pays à haut niveau d’endémicité (20 % de décès
au 3etrimestre de grossesse). Cette différence pourrait
s’expliquer par le génotype en cause ou par l’âge de
l’infection.
Le diagnostic de certitude de l’infection par le virus de
l’hépatite E est biologique. Il repose sur la détection du
virus par RT-PCR dans le sang et/ou dans les selles et sur
les analyses sérologiques. Le prélèvement est contributif
s’il est fait dans les 5 jours précédant l’ictère ou dans les
28 jours qui suivent son apparition. La RT-PCR est plus
sensible que la sérologie pour le diagnostic d’infection à
VHE chez les patients immunodéprimés. L’analyse du frag-
ment du génome viral mis en évidence permet de déterminer
le génotype de la souche impliquée. Cette information est
importante pour la recherche du vecteur de contamination et
les études épidémiologiques [4]. La détection des anticorps
spécifiques du VHE (IgG et IgM) a des limites. La détection
des IgM spécifiques est en faveur d’une infection récente,
avec une spécificité supérieure à 95 % et une sensibilité de
85 % qui diminue chez les immunodéprimés [6]. Les IgG
spécifiques du VHE sont produits précocement et persistent
plus de 10 ans après l’infection. Le taux protecteur d’IgG
n’a pas encore été établi [7]. Un test d’avidité des IgG peut
être utilisé, notamment lorsque la RT-PCR est négative, afin
de distinguer une infection récente d’une infection ancienne
selon la force de liaison des antigènes-anticorps mais n’est
disponible qu’en laboratoire spécialisé.
En cas d’hépatite chez un patient à risque, et particu-
lièrement chez les immunodéprimés, la recherche d’une
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