Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Du nouveau sur la formation des gorges des vallées de montagnes Lundi, 21 novembre 2016 Une étude géomorphologique des gorges de la Tinée et de la Vésubie, menée par une équipe de chercheurs du laboratoire Géoazur (Géoazur : CNRS / IRD / OCA / Université Nice Sophia Antipolis), du Centre européen de recherche et d'enseignement de géosciences de l'environnement (CEREGE : CNRS / Collège de France / IRD / Université Aix Marseille) et de l’Institut Français du Pétrole - Energies Nouvelles de Paris (IFPEN), a permis d’apporter une réponse à la question scientifique de la formation des gorges étroites incisées dans les vallées de montagnes. Cette étude, basée sur la méthode de datation par la méthode des nucléides cosmogéniques, a en effet permis de déterminer que les gorges se sont formées principalement au cours de phases d’incision succédant aux glaciations quaternaires. Ainsi, deux phases de forte incision post-glaciaires ont été mises en évidence : (1) il y a 14 à 16 000 ans, après la dernière glaciation majeure (LGM) ; puis, (2) il y a 8 à 11 000 ans, après la phase de glaciation moins intense du Younger Dryas. De plus, une phase de forte incision est également mise en évidence pendant la période humide de l’optimum climatique Holocène (4 à 5 000 ans). Les résultats de cette recherche et leurs implications sont présentés dans le journal Earth and Planetary Science Letters de novembre 2016. Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Gorges de Salso-Moreno (Haute Tinée). Profil d’âges 10Be obtenus sur un profil vertical de surfaces polies par la rivière dans les gorges, et taux d’incision estimés. A droite, échantillonnage d’une surface polie de rivière. Photos Y. Rolland. Le paysage des Alpes Maritimes est caractérisé par la chaîne du Mercantour, culminant à plus de 3000 mètres d’altitude, et le relief extrême entaillé par des rivières connectant ces hauts reliefs à la Méditerranée en moins de 100 km de distance. Tandis que la partie haute des vallées a périodiquement été soumise à l’influence des glaciers, leur partie inférieure est uniquement façonnée par un régime alluvial. L’existence de gorges incisées dans ces deux contextes permet de tester le rôle des glaciers dans le creusement de ces gorges par érosion sous-glaciaire, ou celui des fluctuations du régime hydrique des rivières en réponse aux changements climatiques. Le creusement de gorges étroites préservant la surface lisse laissée par l’écoulement de l’eau et le frottement des particules, il est possible de dater ces surfaces en utilisant les nucléides cosmogéniques, datation qui permet d’accéder à l’histoire du creusement des gorges au cours du temps. Une équipe de chercheurs de Nice, Aix-En-Provence et Paris vient d’apporter un nouvel éclairage sur la formation de ces gorges depuis les sources de la Tinée (2000 m) jusqu’à proximité de l’embouchure de celle-ci située à 300 m d’altitude. Ils ont en effet pu préciser l’histoire géomorphologique de ces gorges depuis la déglaciation succédant au LGM (dernier Maximum glaciaire culminant autour de 22 000 ans) jusqu’à l’actuel. Pour ce faire, ils ont déterminé et interprété les âges obtenus en mesurant les concentrations des nucléides cosmogéniques Béryllium-10 (dans le quartz des roches cristallines) et Chlore-36 (dans la Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU calcite des roches carbonatées), le long de profils verticaux de roches polies échantillonnées en rappel sur une vingtaine de mètres de haut. Ils ont ainsi montré que le creusement des gorges a débuté immédiatement après le retrait glaciaire du LGM. Extrêmement rapide (de 3 à plus de 30 mm/an) juste après le LGM (entre 14 et 16 ka), l’incision a été également particulièrement efficace après l’incursion glaciaire du Younger Dryas entre 8 et 11 ka, puis, pendant la phase humide de l’Holocène (4-5 ka). Par contre, l’incision fut très faible à quasi nulle (< 1 mm/an) sur des périodes de quelques milliers d’années pendant la glaciation du Younger Dryas dans les gorges de basse altitude, et depuis 4 ka à l’échelle de l’ensemble des vallées sauf pour les zones les plus élevées. En effet, à l’opposé des basses et moyennes vallées, les plus hautes gorges sont encore marquées par un relief en déséquilibre lié à la morphologie en « marches d’escalier » laissée par l’héritage glaciaire entre les hauts plateaux (>2000 m) et les principales vallées d’altitude (1000-1500 m). Ces nouveaux résultats remettent en question les modèles d’érosion dérivés de l’étude des rivières supposées à l’équilibre sur le long terme pour lesquelles l’érosion est censée contre-balancer le soulèvement d’origine tectonique. Ils montrent aussi que les gorges constituent des archives climatiques très précieuses puisque enregistrant des phases transitoires de l’évolution des cours d’eau. Ces travaux publiés dans le journal EPSL montrent que l’étude géomorphologique et géochronologique des gorges préservées depuis des milliers d’années dans les chaînes de montagnes devrait permettre de reconstituer les fluctuations passées du climat et la réponse des cours d’eaux aux changements des régimes d’érosion. Source(s): Rolland, Y., Petit, C., Saillard, M., Braucher, R., Bourlès, D., Darnault, R., Cassol, D., ASTER Team, 2016. Inner gorges incision history: A proxy for deglaciation? Insights from Cosmic Ray Exposure dating (10Be and 36Cl) of river-polished surfaces (Tinée River, SW Alps, France). Earth and Planetary Science Letters, DOI: 10.1016/j.epsl.2016.10.007 Contact(s): Yann Rolland, Géoazur (CNRS / IRD / OCA / Université Nice Sophia Antipolis) [email protected], 04 83 61 85 86 Carole Petit, Géoazur (CNRS / IRD / OCA / Université Nice Sophia Antipolis) [email protected], 04 83 61 87 54 A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/node/6141 Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Séisme du 30 octobre en Italie : la rupture cosismique la plus importante jamais observée en Méditerranée sur une faille normale Lundi 21 novembre 2016 Une équipe composée d’une dizaine de chercheurs provenant du CEREGE [1], de l’IPGP [2], de l’EOST [3], du LIVE [4], de Géosciences Montpellier [5] et de GeoAzur [6], en collaboration avec l’INGV et l’Université de Chieti-Pescara, s’est rendue sur le terrain en Apennin Central (Italie) sur le lieu des épicentres qui se sont succédés depuis août 2016 (24 août Mw=6, 26 octobre Mw=5.9) et dernièrement avec le séisme de Mw=6.5 près de Norcia du 30 octobre, le plus fort séisme enregistré en Italie depuis les 36 dernières années. Leurs observations montrent que ce dernier a engendré la rupture co-sismique la plus importante jamais observée en Méditerranée sur une faille normale. Séisme du 30 octobre en Italie : la rupture co-sismique la plus importante jamais observée en Méditerranée sur une faille normale Les chercheurs géologues, tectoniciens, géographes et geomaticiens, se sont succédés sur le terrain entre le 5 et le 14 novembre 2016 pour acquérir des données sur les ruptures de surface associées à ces séismes. Une partie de l’équipe s’était rendue sur le terrain entre le 11 et 16 septembre suite au séisme du 24 août. Ils avaient observé des déplacements verticaux le long de la faille du Mt Vettore de 20 à 30 cm sur une longueur de plus de 7 km (voir photo). A partir d’outils de pointe en géomatique (scanner 3D Faro, TLS LiDAR Riegl, photogrammétrie) l’équipe a acquis l’affleurement numérique 3D à très haute résolution des zones rompues le long du Mt Vettore avant le dernier séisme du 30 octobre. Les acquisitions faites au cours de cette deuxième mission ont permis de cartographier précisément les ruptures associées à ce nouveau choc et d’acquérir une nouvelle image de la topographie des zones précedemment étudiées. Photo d’une partie de l’équipe francoitalienne rassemblant 6 laboratoires français sur la rupture co-sismique du Mt Vettore. Crédit : Julien Point / EOST Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Ces données fournissent une image sans précédent de l’évolution spatio-temporelle d’un plan de faille avant et après séisme et sont fondamentales pour comprendre le lien entre le déplacement cosismique et la formation des reliefs topographiques associés aux failles actives. En Italie et en Europe en général, il existe très peu d’exemples de ruptures co-sismiques visibles dans le paysage. Les observations récoltées dans le cadre de cette mission post-sismique sont donc uniques et montrent que le séisme du 30 octobre a engendré la rupture co-sismique la plus importante jamais observée en Méditerranée sur une faille normale. Le séisme de Mw=6.5 a entraîné un déplacement co-sismique vertical compris entre 1 et 2 m, localisé sur la trace morphologique de la faille du Mt. Vettore et ce sur une longueur de 7 km au minimum. La rupture co-sismique s’est produite sur la même faille et a entraîné le décalage des mêmes objets morphologiques que lors de la rupture du 24 août. Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU L’ensemble des partenaires a contribué au financement de cette mission qui a également bénéficié du soutien de l’INSU et du Labex OT-MED. Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Photo prise sur le terrain montrant le glissement de 25 cm continue le long du plan de faille associé au séisme du 24 août 2016 et sur le même endroit à droite où on voit le déplacement de presque 1.8 m suite au séisme du 30 octobre. On reconnaît sur les deux photos le même bloc de roche en bas à droite. Le plan de faille s’est donc déplacé de presque 2 m au total depuis le 24 août par rapport à ce bloc de roches . Crédit : Jim Tesson / CEREGE et Lucilla Benedetti / CEREGE Rupture de surface sur la portion sud de la Faille du Mt Vettore (près de Mte Vettoreto), associée au séisme du 30 octobre, on observe environ 1 m de déplacement vertical. Crédit : Lucilla Benedetti / CEREGE Sur le plan de faille du Mt Vettore près de la Cima del Redentore, ruptures co-sismiques associées à la séquence de séisme. A la base de l’escarpement cumulé (gris) on voit une trace blanche de 25 cm exhumée lors du séisme du 24 août, et en dessous la trace blanche-jaune de 2 m exhumée lors du séisme du 30 octobre. Crédit : Lucilla Benedetti / CEREGE Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Rupture co-sismique associée au séisme du 30 octobre sur la faille du Mt Vettore, entre 1.5 et 2 m de déplacement vertical décalant tout sur son passage et ce sur au moins 7 km de longueur. Crédit : Lucilla Benedetti / CEREGE Notes [1] Centre européen de recherche et d’enseignement de géosciences de l’environnement (CEREGE : CNRS / Collège de France / IRD / Université Aix Marseille) [2] Institut de physique du globe de Paris (IPGP : CNRS / IPGP / Université Paris-Diderot, Université Sorbonne Paris Cité) [3] Ecole et Observatoire des sciences de la Terre (EOST : CNRS / Université de Strabourg) [4] Laboratoire Image, Ville, Environnement (LIVE : CNRS / Université de Strabourg) [5] Géosciences Montpellier : CNRS / Université Antilles / Université de Montpellier [6] GéoAzur : CNRS / IRD / OCA / Université Nice Sophia Antipolis Pour en savoir plus... En italien : https://ingvterremoti.wordpress.com Source(s) Benedetti L., Manighetti I., Gaudemer Y., Finkel R., Malavieille J., Pou K., Arnold M., Aumaître G., Bourlès D.L. and Keddadouche K. (2013) Earthquake synchrony and clustering on Fucino faults (Central Italy) as revealed from in situ 36Cl exposure dating. Journal of Geophysical Research - Solid Earth 118, 4948–4974. Contact scientifique Lucilla Benedetti Centre européen de recherche et d’enseignement de géosciences de l’environnement (CEREGE : CNRS / Collège de France / IRD / Université Aix Marseille) Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Tél : 04 42 97 15 50 [email protected] A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/node/6142 Du nouveau sur la présence controversée de calottes glaciaires durant l’optimum climatique du Crétacé Dimanche, 9 octobre 2016 Grâce à des simulations réalisées à l’aide d’une combinaison de modèles numériques du climat (GCM) et d’un modèle de calottes de glace, deux chercheurs du Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE/IPSL, CNRS / CEA / UVSQ) et du Centre européen de recherche et d’enseignement de géosciences de l’environnement (CEREGE/PYTHÉAS, CNRS / Université Aix-Marseille / IRD / Collège de France) viennent de démontrer que les changements de paléogéographie au cours du Crétacé ont grandement influé sur la possibilité de mise en place de calottes glaciaires sur Terre. Notamment, le développement de calottes de glace au cours du Cénomanien-Turonien apparaît très peu probable, en raison de rétroactions entre l’océan et l’atmosphère liées à la configuration paléogéographique particulière de cet étage géologique. Le Crétacé moyen et supérieur (~ 120 – 65 Ma) est historiquement considéré comme une période climatique extrêmement chaude de l’histoire de la Terre, caractérisée par l’absence de calottes de glace et par des températures océaniques et continentales bien supérieures à celles du monde moderne. Pourtant, sur la base d’indices indirects, des chercheurs ont émis l’hypothèse que des calottes de glace se seraient développées sur Terre, en particulier sur l’Antarctique, au cours de certains étages géologiques du Crétacé, notamment au cours de l’Aptien (~ 115 Ma), du Cénomanien-Turonien (~ 95 Ma) et du Maastrichtien (~ 70 Ma). Ces hypothèses restent cependant assez controversées, en particulier pour l’étage du Cénomanien-Turonien car celui-ci correspond à l’optimum climatique du Crétacé, c’est-à-dire à sa période la plus chaude. Étudier l’apparition dans le passé de calottes glaciaires à la surface du globe à l’aide de simulations climatiques n’est pas aisé. En effet, la vitesse de calcul informatique des GCMs (entre 1 et 300 ans simulés par jour selon la complexité du modèle) n’est actuellement pas compatible avec le temps requis pour étudier le développement d’une calotte de glace (nécessité de simuler plusieurs dizaines de milliers d’années). Plusieurs méthodes ont été développées ces dernières années pour étudier les interactions climat – calotte de glace avec des temps de calcul raisonnables. Dans le cas présent, l’absence de contrainte sur l’évolution des paramètres orbitaux et la nécessité d’étudier l’englacement de 3 paléogéographies(1) ont conduit les chercheurs à utiliser une méthode simplifiée par rapport aux précédentes mais plus efficace qu’ils ont pu valider à partir des résultats antérieurs obtenus Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU sur la glaciation du continent Antarctique. Calottes glaciaires obtenues par modélisation numérique pour différentes paléogéographies du Crétacé et différents taux de CO2 atmosphérique. Les résultats de ces travaux suggèrent que les changements de paléogéographie influent fortement sur le climat global, en modulant notamment les seuils de concentration en CO2 atmosphérique endessous desquels une calotte glaciaire peut se développer sur l’Antarctique. Les modèles prédisent ainsi que, pour des conditions aux limites (telle la composition de l’atmosphère) identiques à l’exception de la paléogéographie, une calotte ne peut se former sur l’Antarctique et rester stable que lorsque la concentration en CO2 chute en-dessous des seuils suivants : 800 ppm environ (presque 3 fois le taux préindustriel égal à 280 ppm) au cours de l’Aptien ; 400 ppm environ au cours du Cénomanien-Turonien ; 700 ppm environ au cours du Maastrichtien. Les auteurs expliquent la résistance à l’englacement du monde Cénomanien-Turonien de la manière suivante. La paléogéographie de cet étage géologique induit une augmentation du transport de chaleur par l’océan vers les moyennes et hautes latitudes de l’hémisphère sud qui se traduit par une série de rétroactions internes au système atmosphérique. Ainsi, en été, cette chaleur supplémentaire apportée par l’océan génère une redistribution de la saturation en eau de l’atmosphère aux latitudes polaires : cette saturation augmente à haute altitude et diminue à moyenne et basse altitude. La quantité accrue d’eau à haute altitude augmente alors l’effet de serre. Quant à la quantité moindre d’eau à moyenne et basse altitude, elle diminue la quantité de nuages de basse altitude, ce qui augmente la quantité d’énergie solaire absorbée par la terre car les nuages de basse altitude ont surtout un effet sur le rayonnement solaire qu’ils réfléchissent très efficacement. Par effet domino, l’augmentation du flux d’énergie solaire à la surface induit la disparition progressive de la neige tombée en hiver, Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU ce qui se traduit par une plus grande quantité d’énergie solaire absorbée à la surface. En résumé, l’augmentation de l’effet de serre et de l’énergie solaire reçue aux moyennes-hautes latitudes de l’hémisphère sud réchauffe fortement l’Antarctique, induisant un seuil de CO2 plus bas pour contrebalancer ce réchauffement et permettre une glaciation. La confrontation qualitative des résultats de l’étude avec les tendances climatiques issues des données de température et de CO2 disponibles suggère que des épisodes glaciaires ont effectivement pu survenir au cours de l’Aptien et du Maastrichtien, lorsque le taux de CO2 et les paramètres orbitaux de la Terre y étaient favorables. En revanche, elle accrédite l’hypothèse d’un monde CénomanienTuronien libre de glace et climatiquement très chaud, et donc représentant véritablement l’optimum climatique du Crétacé. Note(s): 1. La paléogéographie désigne la disposition continents-océans, l’orographie, la bathymétrie… d’une période passée de l’histoire de la Terre. Source(s): Ladant, J.-B. & Donnadieu, Y. Palaeogeographic regulation of glacial events during the Cretaceous supergreenhouse, Nature Communications, 7:12771, doi:10.1038/ncomms12771 (2016). Contact(s): Jean-Baptiste Ladant, LSCE/IPSL [email protected], 01 69 08 31 97 A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/node/6051 Une crue glaciaire pourrait avoir freiné l’expansion viking au nord du Groenland Lundi, 26 septembre 2016 La colonisation du Groenland, qui a eu lieu durant la période qualifiée d’optimum climatique médiéval, a longtemps été attribuée à la douceur du climat. Pourtant, dans le nord du Groenland, un climat rigoureux régnait qui a provoqué une avancée importante des glaciers autour de l’an 1000 et probablement participé à limiter la colonisation des Vikings au sud du Groenland. C’est ce que vient de démontrer une équipe de chercheurs du CNRS, des universités Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Grenoble-Alpes, Aix-Marseille et Bordeaux et du CEA, en collaboration avec des chercheurs du Royaume-Uni(1). La baisse des températures au nord du Groenland est vraisemblablement liée aux taches solaires et aux éruptions volcaniques dont l’intensité au cours de l’optimum climatique médiéval a été récemment révisée à la hausse. En l’an 982 apr. J.-C., le célèbre Viking Érik le Rouge débarquait dans le sud du Groenland, pays qui sera appelé Terre verte (Green Land). À cette époque, qualifiée d’optimum climatique médiéval, un climat chaud, favorable aux récoltes et aux vendanges précoces, régnait en Europe et les glaciers alpins connaissaient un net recul, similaire au recul actuel. Collecte d’échantillons de roche sur une moraine de l’île de Disko. © LGP, Vincent Jomelli Une équipe de chercheurs a étudié l’évolution de plusieurs glaciers situés à l’ouest du Groenland autour de l’île de Disko, à environ 1000 km au nord des sites vikings, en datant leurs phases d’extension. Pour réaliser cette datation, ils ont analysé les concentrations en chlore 36 des moraines, ces débris rocheux charriés puis laissés sur place par les glaciers. En effet, lorsqu’un glacier commence à reculer, ses moraines frontales ne sont plus protégées par la glace. Les roches commencent alors à accumuler du chlore 36, issu des réactions nucléaires provoquées par l'impact sur ces roches des particules du rayonnement cosmique, déclenchant un "chronomètre géologique". Les chercheurs ont ainsi pu montrer que ces glaciers avaient connu plusieurs avancées au cours du dernier millénaire et que la première, très marquée, a eu lieu au plein cœur de l’optimum climatique médiéval et de la colonisation viking. Contrairement à ce qui a été observé dans les Alpes et dans plusieurs autres massifs montagneux de l’hémisphère nord, l’extension des glaciers dans cette partie de l’Arctique a été au moins aussi importante pendant l’époque médiévale que pendant la très célèbre phase de crue du "petit âge glaciaire". Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU a) et b) Localisation de l’île de Disko à proximité du Groenland. c) Localisation des moraines du site de Disko (traits de couleurs) et âge de stabilisation de chacune d’elles (dans le carré de même couleur que le trait). L’âge est donné par rapport à aujourd’hui (BP : Before Present), mais aussi par rapport à l’année du dépôt selon notre calendrier (CE : Current Era). En l’absence de variations significatives des précipitations neigeuses dans cette région, ces phases de crue glaciaire impliquent qu’il y ait eu une diminution pluridécennale des températures estivales pendant l’optimum médiéval, laquelle n’est décrite ni dans les reconstructions de températures, ni dans les modèles paléo-climatiques. Les causes de ces crues glaciaires sont donc encore obscures. Néanmoins, les chercheurs ont constaté que les variations de l’Oscillation Nord Atlantique (NAO) classiquement évoquées dans la région n’étaient pas la cause principale de ce refroidissement. Ils estiment que la baisse des températures était vraisemblablement liée aux taches solaires et aux éruptions volcaniques dont l’intensité au cours de l’optimum climatique médiéval a été récemment révisée à la hausse. Ayant comparé leurs données aux résultats des simulations du climat passé disponibles, ils ont pu montrer qu’effectivement ces simulations sous-estimaient l’intensité des éruptions de l’optimum climatique médiéval et qu’elles devront donc être révisées. Enfin, en raison du caractère régional de ces crues glaciaires, ils n’excluent pas qu’une partie du refroidissement responsable de ces avancées ait été la conséquence de la variabilité interne (aléatoire) du climat. Pour déterminer précisément les parts respectives jouées par ces forçages et par la variabilité interne dans les variations du climat durant cette période, il va donc être nécessaire de mieux documenter l’intensité des éruptions volcaniques du dernier millénaire et leurs effets sur le climat. Les conditions environnementales autour de l’île de Disko, située à la même latitude que l’Islande, créées par ces avancées glaciaires et par une importante extension de la glace de mer, ont vraisemblablement été peu favorables à l’expansion viking fondée sur la navigation en drakkar et l’agriculture. Elles pourraient donc expliquer, au moins en partie, pourquoi les colonies vikings étaient inexistantes au-delà de Nuuk, la capitale du Groenland. Note(s): Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU 1. Les laboratoires français impliqués sont les suivants : Laboratoire de Géographie Physique : Environnements Quaternaires et Actuels (LGP, CNRS / Université Panthéon-Sorbonne / UPEC / INRAP), Laboratoire de glaciologie et géophysique de l’environnement (LGGE/OSUG, CNRS / UGA), Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE/IPSL, CNRS / CEA / UVSQ), Environnements et paléoenvironnements océaniques (EPOC/OASU , Université de Bordeaux/ CNRS) et Centre européen de recherche et d’enseignement de géosciences de l’environnement (CEREGE/PYTHÉAS, CNRS / Université Aix-Marseille / IRD / Collège de France). Les organismes étrangers impliqués sont les suivants : Liverpool John Moores University et University of St Andrews (UK). Source(s): Jomelli, V., T. Lane, V. Favier, V. Masson-Delmotte, D. Swingedouw, V. Rinterknecht, I. Schimmelpfennig, D. Brunstein, D. Verfaillie, K. Adamson, L. Leanni, F. Mokadem & ASTER Team Paradoxical cold conditions during the medieval climate anomaly in the Western Arctic. Sci. Rep. 6, 32984; doi: 10.1038/srep32984 (2016) Contact(s): Vincent Jomelli, LGP [email protected], 01 45 07 55 81 A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/node/6009 Le réchauffement climatique provoqué par les activités humaines déjà détectable il y a 180 ans dans les archives paléoclimatiques Un groupe international de chercheurs a montré que le réchauffement climatique actuel associé aux activités humaines aurait débuté il y a près de deux siècles. Ce travail, publié dans la revue Nature du 25 août 2016, s’appuie sur une synthèse de données paléo-climatiques réalisée dans le cadre du programme international « Past Global Changes 2k ». Le réchauffement climatique provoqué par les activités humaines déjà détectable il y a 180 ans dans les archives paléoclimatiques Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Parce que les mesures directes de température sont rares et incertaines avant 1900, la période instrumentale, pendant laquelle les relevés de thermomètres permettent de prendre la température de la planète, ne recouvre qu’une fenêtre temporelle restreinte. Pendant cette période, qui débute à la fin du 19ème siècle, le réchauffement climatique imputable à l’homme qui est en moyenne de l’ordre de 1°C est évident. Ainsi, le changement climatique anthropique est généralement considéré comme un phénomène datant du début du 20ème siècle. Une équipe de 25 scientifiques provenant d’Australie, des États-Unis, d’Europe et d’Asie et travaillant ensemble dans le consortium « Past Global Changes 2000 years (PAGES 2K) » vient de publier une synthèse de reconstructions de la température à la surface de la planète couvrant les 5 derniers siècles. Ces données ont permis de mettre en perspective le réchauffement climatique anthropique vis-à-vis de la variabilité naturelle du climat au-delà de la période instrumentale. Les températures océaniques ont principalement été obtenues grâce à l’analyse de coraux et de sédiments marins ; celles de l’atmosphère à la surface des continents sont issues de l’analyse de cernes d’arbres, de spéléothèmes et de carottes de glace. Comme le souligne Nerilie Abram, Professeure à l’Université nationale australienne (ANU) et auteure principale de cet article, le réchauffement climatique auquel nous assistons a commencé au tout début de la révolution industrielle. « C’est une découverte étonnante, un de ces moments lors desquels la science nous surprend. Mais les résultats sont clairs : le réchauffement climatique auquel nous assistons a débuté il y a environ 180 ans », déclare Nerilie Abram. Cette étude met donc en évidence un réchauffement plus précoce que les scientifiques ne l’avaient envisagé auparavant. Ces résultats ont des implications importantes sur l’impact de l’activité humaine sur le climat en datant précisément le moment où il a dévié de son état naturel. De plus, « Cette synthèse unique de données à l’échelle globale montre que le réchauffement actuel n’a pas débuté de manière synchrone sur l’ensemble de la planète » souligne Marie-Alexandrine Sicre, Directrice de recherche CNRS au LOCEAN à Paris, co-auteure de l’article. En effet, le réchauffement a d’abord touché la région Arctique et les océans tropicaux, dès les années 1830, avant d’atteindre les autres régions de l’hémisphère Nord. Dans l’hémisphère Sud, comme en Australie ou en Amérique du Sud, il a fallu attendre près d’un siècle pour que le réchauffement soit détectable dans les archives paléo-climatiques », ajoute-t-elle. Seules les données paléoclimatiques permettent de prendre le recul nécessaire de plusieurs siècles pour détecter des changements de températures aussi ténus que ceux rapportés dans cette étude. En effet, le réchauffement ayant impacté le 19ème siècle était tel qu’il n’aurait pas pu être ressenti par la population vivant à cette époque. « Les températures ont certes augmenté dès le début du 19ème siècle, mais l’émergence de ce signal, à savoir la période à partir de laquelle la magnitude du réchauffement excède celle des fluctuations naturelles des températures, ne s’est fait qu’un siècle plus Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU tard » ajoute Guillaume Leduc, Chercheur CNRS au CEREGE à Aix-Marseille, également co-signataire de l’article. De plus, « les simulations réalisées par les modèles climatiques prenant en compte les forçages solaires, volcaniques et anthropiques, confirment ce que révèlent les données paléo-climatiques tant sur la précocité que sur l’asymétrie du réchauffement lié à l’homme ». Ce résultat illustre l’extrême sensibilité du climat aux perturbations anthropiques. « Bien que les niveaux de gaz à effet de serre issus de l’activité humaine dans les années 1800 soient encore faibles, leur effet sur les températures est détectable dès le début de l’Ere industrielle. Le climat de la Terre réagit donc très vite à une augmentation même faible d’émission de gaz à effet de serre, et de manière détectable par les archives paléoclimatiques », remarque Helen McGregor, chercheuse à l’université de Wollongong (UW), co-auteure de cet article. Ce travail est publié dans la dernière édition de la Nature. Pour en savoir plus http://www.pastglobalchanges.org/index.php?option=com_content&view=article&id=1517 Source Abram, N. J., H. V. McGregor, J. E. Tierney, M. N. Evans, N. P. McKay, D. S. Kaufman, & the PAGES2k Consortium (K. J. Anchukaitis, K. Thirumalai, B. Martrat, H. Goosse, S. J. Phipps, E. J. Steig, K. H. Kilbourne, C. P. Saenger, J. Zinke, G. Leduc, J. A. Addison, P. G. Mortyn, M.-S. Seidenkrantz, M.-A. Sicre, K. Selvaraj, H. L. Filipsson, R. Neukom, J. Gergis, M. A. J. Curran, V. Trouet and L. von Gunten) : Early onset of industrial-era warming across the oceans and continents, publié dans le Nature du 25 août 2016. http://dx.doi.org/10.1038/nature19082 Contacts Marie-Alexandrine Sicre, LOCEAN/Ecce Terra - 01 44 27 84 14 Guillaume Leduc, CEREGE - 04 42 97 15 42 A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/node/5977 Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Du nouveau sur la formation et l’évolution des plaines côtières, l'exemple du Sud-Ouest de l'Inde Lundi, 11 avril 2016 Une étude des plaines côtières du sud-ouest de l’Inde menée par une équipe internationale1 de chercheurs a permis d’apporter une réponse à une question scientifique de longue date sur la formation et l’histoire de ces plaines principalement couvertes de latérites. Cette étude, basée sur la méthode de datation par l’argon, a en effet permis de déterminer que les latérites de ces plaines se sont formées il y a au moins 47 millions d’années au pied d’un vieux relief érigé il y a environ 60 millions d’années. Les résultats de cette recherche et leurs implications sont présentés dans l’édition du journal Geology du mois d’Avril 2016. Paysage de collines exposant les sols latéritiques (latérites) de la plaine côtière (au pied de l’Escarpement des Western Ghats sur la marge sud-ouest de l’Inde péninsulaire – Formation de minerais d’oxydes de manganèse dans les sols latéritiques de la plaine côtière – Oxydes de manganèse vus en microscopie optique à lumière réfléchie – Image de micro-fluorescence X montrant les oxydes de manganèse potassiques (cryptomélane) en vert parmi les autres oxydes de manganèse en bleu et les oxydes de fer en rouge. © A. Beauvais et al. Geology 2016 Les plaines côtières ou marges continentales qui résultent de la séparation des continents sont marquées par de grands escarpements dont l’âge et l’évolution géomorphologique sont matières à débat dans la communauté des géosciences. Des études ont montré une érosion rapide des marges après la séparation des continents impliquant l’installation précoce des escarpements tandis que d’autres ont argumenté pour une évolution plus lente au cours de phases d’érosion successives et par conséquent une stabilisation plus tardive de ces reliefs. Or, le mode et le rythme de l’érosion des marges continentales sont déterminants pour reconstituer leur évolution topographique, reconstruire le développement des réseaux de drainage, et quantifier Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU les transferts sédimentaires depuis les continents vers les bassins océaniques marginaux au cours des temps géologiques. Aujourd’hui, une équipe de chercheurs internationale vient d’apporter un nouvel éclairage sur l’évolution des marges continentales. Ils ont en effet pu préciser l’histoire géomorphologique de la marge continentale sud-ouest de l’Inde Péninsulaire2 depuis la mise en place il y a environ 65 millions d’années des roches basaltiques des trapps de la province du Deccan. Pour cela, ils ont déterminé et interprété les âges obtenus par la méthode de datation à l’argon (40Ar/39Ar) sur des oxydes de manganèse potassiques (appelés cryptomélane) formés dans les sols latéritiques (latérites) de part et d’autre du grand escarpement des Western Ghats qui borde la marge sud-ouest de l’Inde Péninsulaire. Ils ont ainsi montré que la préservation de ces sols épais de plusieurs dizaines de mètres et vieux d’au moins 47 millions d’années ont pu se former en un minimum de 12 millions d’années au pied de l’escarpement ce qui atteste de l’installation rapide (à l'échelle des temps géologiques) et de la stabilisation précoce de ce relief, il y a probablement 60 millions d’années. De plus, les résultats de ces recherches impliquent des vitesses d‘érosion des sols latéritiques datés très faibles (< 5 mètres par million d’années) depuis leur formation au pied de l’escarpement. Ces nouveaux résultats questionnent les modèles d’érosion dérivés de l’étude de l’histoire thermique (refroidissement) des roches contenant des minéraux de phosphate de calcium (apatites). Plus généralement, les âges obtenus sur les oxydes de manganèse des sols latéritiques remettent en question l’idée selon laquelle la topographie des marges et des surfaces continentales serait due à des soulèvements et des rajeunissements récents. Ces travaux publiés dans le journal Geology montrent que l’étude géomorphologique et géochronologique des sols latéritiques formés et préservés depuis des millions d’années sur les marges et les continents des régions intertropicales est prometteuse pour quantifier les vitesses d’érosion et les sédiments exportés vers les bassins marins à l’échelle des temps géologiques. Note(s): 1- L’équipe est composée de chercheurs du Centre Européen de Recherches et d’Enseignements des Géosciences de l’Environnement (CEREGE-OSU Institut Pythéas / CNRS, IRD, Aix-Marseille Université), de Géosciences Environnement Toulouse (GET - IRD, Université Toulouse Paul Sabatier, CNRS ), de Géosciences Montpellier (Université de Montpellier 2, CNRS) et du Centre for Earth and Space Sciences (University of Hyderabad) 2- On trouve des surfaces présentant les mêmes caractéristiques dans les plaines côtières et même à l’intérieur des terres en Inde, en Afrique, en Australie, et en Amérique du Sud. Source(s): Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Very long-term stability of passive margin escarpment constrained by 40Ar/39Ar dating of KMn oxides, Anicet Beauvais, Nicolas J. Bonnet, Dominique Chardon, Nicolas Arnaud, and Mudlappa Jayananda (2016), Geology, v. 44, p. 299-302, doi:10.1130/G37303.1 Contact(s) : Anicet Beauvais, IRD, Cerege (Aix-Marseille université, CNRS, OSU Institut Pythéas) [email protected], 0442971773 A lire sur le site de l'INSU :http://www.insu.cnrs.fr/node/5763 Andes : un paléolac géant au pays des glaciers Au pied de la cordillère des Andes, un gigantesque lac, le lac Tauca, a recouvert l’Altiplano bolivien pendant la dernière déglaciation. Grâce à une méthode originale développée à partir de micro-algues fossiles, les diatomées, une équipes de chercheurs de l’IRD, du CNRS et d’Aix-Marseille Université à laquelle participent des chercheurs du CEREGE (OSU Pythéas) vient de montrer le rôle sur le climat régional de la disparition il y a 14 000 ans de ce géant d’eau salé, perché à quelque 3 500 m d’altitude. Son assèchement a par ailleurs donné naissance à la croûte de sel la plus grande du monde (11 000 km2) qui recouvre aujourd’hui le célèbre salar d’Uyuni. La dernière déglaciation dans les Andes boliviennes Des chercheurs de l’IRD et leurs partenaires du CNRS et d’Aix-Marseille Université viennent de montrer l’influence régionale du paléolac Tauca, qui occupait l’Altiplano bolivien à l’époque de la dernière déglaciation. Ce gigantesque lac a connu une phase d’extension maximale qui a débuté il y a 16 000 ans. Puis, il s’est asséché progressivement pour disparaître près de 2 000 ans plus tard. Pour étudier la possible influence du lac sur le climat de la région, les scientifiques ont reconstitué sa composition isotopique. Pour cela, ils ont mis en œuvre une méthode originale utilisant des micro-algues fossiles, les diatomées. Des micro-algues témoins des conditions d’humidité La quantité d’isotopes lourds de l’oxygène (δ18O) contenue dans ces fossiles retrace les conditions géochimiques des eaux du lac dans lesquelles ces algues se sont développées. Cette composition isotopique fournit aux scientifiques un indicateur précis des températures et des conditions d’humidité dans la région à l’époque où ces algues vivaient. Lorsque la pluie augmente et que le niveau du Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU lac s’élève, le rapport isotopique de l’oxygène des eaux baisse et inversement lorsque les précipitations diminuent. Une influence climatique régionale Les chercheurs ont alors mis en regard l’évolution de la composition isotopique du lac qu’ils ont reconstituée avec un autre signal isotopique, enregistré dans une carotte de glace forée au sommet du mont Sajama, surplombant l’ancien emplacement du Tauca. Cette carotte de glace a révélé, vers 14 500 ans, un pic de δ18O exceptionnel comparé aux autres enregistrements dans les glaces dans la région andine. En revanche, ce pic est cohérent avec les mesures effectuées sur les fossiles de diatomées contenus dans les sédiments de l’ancien lac. Cette étude met donc en évidence que les neiges prélevées au Sajama se seraient formées à cette période à partir du mélange entre l’humidité présente dans l’atmosphère et celle apportée par l’évaporation du lac. Ce résultat suggère que dans des cas très spécifiques comme celui-ci, avec la présence d’une étendue lacustre à proximité, un enregistrement paléoclimatique comme celui des précipitations dans les carottes de glaces peut être biaisé par le cycle hydrologique local. Son interprétation doit tenir compte de cette influence. L’ancien méga-lac Tauca a donné naissance au célèbre Salar d’Uyuni et sa croûte de sel Crédit : IRD / Denis Wirrmann Partenaires : CNRS et Aix-Marseille Université. Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Références B. Quesada, Florence Sylvestre, Françoise Vimeux, J. Black, C. Paillès, C. Sonzogni, A. Alexandre, P-H. Blard, A.Tonetto, J.C Mazur, H. Bruneton. Impact of Bolivian paleolake evaporation on the δ18O of the Andean glaciers during the last deglaciation (18.5-11.7 ka) : diatom-inferred δ18O values and hydro-isotopic modeling. Quaternary Science Reviews, 2015, 120, p. 93-106. doi:10.1016/j.quascirev.2015.04.022 Contacts Florence Sylvestre, chercheuse IRD au CEREGE T. +33 (0)4 42 97 15 89 Benjamin Quesada, post-doctorant au Karlsruhe Institute of Technology T. +49 (0) 8821 183 188 Françoise Vimeux, chercheuse à l’IRD T. +33 (0)1 69 08 57 71 Laboratoire HydroSciences Montpellier (HSM) Voir en ligne : L’information sur le site de l’IRD https://www.ird.fr/la-mediatheque/fiches-dactualite-scientifique/484-andes-un-paleolac-geant-au-pays-des-glaciers Les algues microscopiques privilégient la photosynthèse plutôt que la calcification des coquilles en cas de baisse du CO2 océanique Jeudi, 14 janvier 2016 Une nouvelle étude pilotée par des chercheurs du Département de Géologie de l’Université d’Oviedo (Espagne) et du CEREGE (CNRS - Université d’Aix-Marseille - IRD / France) laisse supposer qu'un taux de CO2 atmosphérique élevé n’est pas forcément une mauvaise nouvelle pour les algues microscopiques que sont les coccolithophores. Cette recherche, publiée dans le journal Nature Communications le 14/01/2016, montre pour la première fois que l’épaisseur des coquilles de coccolithophores a diminué d’environ de moitié au cours des 10 derniers millions d’années. Étonnamment, cette diminution suit la baisse sur le long terme de la concentration de CO2 dans les océans ; pour les auteurs ceci suggère qu’une importante quantité de CO2 pourrait aider les coccolithophores à construire des coquilles plus épaisses, au moins sur les échelles temporelles de plusieurs millions d’années. En apportant des données nouvelles Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU sur les changements passés dans le CO2, cette étude apporte également la preuve du lien étroit existant entre taux du CO2 et les climats chauds. Coccolithophores cultivées en laboratoire, photographiés sur un filtre en cellulose avec un microscope à balayage électronique (MEB). © : Lorena Abrevaya (Univ. Oviedo). Zoom © : Lorena Abrevaya (Univ. Oviedo). Les organismes marins qui fabriquent des coquilles de carbonate de calcium - des moules aux coraux en passant par les algues microscopiques - sont emblématiques de la vie dans l'océan et risquent d’être les premières victimes des changements climatiques. En effet, les océans absorbent des quantités toujours plus grandes du dioxyde de carbone (CO2) émis par les activités humaines, et s’acidifient à l’échelle globale. Cette acidification pourrait empêcher la formation des coquilles ou squelettes calcaires ou les amincir. Pour étudier les relations entre changements climatiques et organismes à coquilles calcaires, les chercheurs se sont intéressés aux coccolithophores, un groupe de minuscules algues unicellulaires du phytoplancton dont les coquilles fossiles s'accumulent au fond des océans constituant d’inestimables archives de l’histoire de la Terre. C’est à ces organismes que l’on doit les grandes falaises Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU de craie de la côte normande. De même, l’étude de ces coquilles fossiles les aide à mieux comprendre comment ces organismes, à la base de la chaîne alimentaire océanique, se sont adaptés aux changements de l’océan dans le passé géologique. Pour cette nouvelle étude, les chercheurs ont extrait les minuscules coquilles fossiles de carottes sédimentaires prélevées dans l’océan Indien et dans l’océan Atlantique tropical. En mesurant la quantité de lumière passant à travers les coquilles avec un microscope spécialisé, ils ont déterminé l’épaisseur de chaque coquille. En combinant de telles mesures effectuées pour des milliers de coquilles, ils ont pu montrer que simultanément, dans les deux océans, les coquilles ont commencé à s’amincir il y a environ 9 millions d’années. La synchronicité de ce changement dans deux zones considérablement éloignées indique qu’il est probable que la cause de l’amincissement des coquilles est due à un changement global de l’état de l’océan. Pour comprendre les causes de ce changement global de l’épaisseur des coquilles, l’équipe a effectué des mesures géochimiques des coquilles et des résidus de matière grasse appelés alcénones, produite par les algues conservés dans les mêmes sédiments pendant des millions d’années. Les mesures de la chimie des alcénones témoignent de changements dans la concentration de CO2 dans l’océan, une ressource essentielle pour la croissance des algues. Les mesures des types de carbone dans les coquilles ont permis de montrer comment la cellule est capable de répartir le carbone prélevé de l'eau de mer entre les processus de calcification et de photosynthèse qui en consomment tous les deux. Ces résultats confirment que les coquilles se sont amincies alors que le CO2 global diminuait et que les coccolithophores se sont adaptées en détournant le carbone disponible vers la photosynthèse au détriment de la fabrication de la coquille. Ces résultats sont en accord avec une étude précédente datant de 2013 *, montrant qu’avec peu de CO2 ces algues s’adaptent en réduisant le carbone réservé pour la formation des coquilles. En même temps, la démonstration d’une diminution du CO2 sur cette période de temps permet de mieux comprendre la sensibilité du climat aux variations de CO2 sur des échelles de temps longues dans le passé. Des preuves d’un fort refroidissement des océans au cours des 15 derniers millions d’années ont été accumulées par de nombreuses équipes de scientifiques au cours de la dernière décennie. En montrant clairement un important déclin de la concentration de CO2 dans l’océan dans cet intervalle de temps, les nouvelles données prouvent le lien suspecté par de nombreux scientifiques entre CO2 et climat sur cette période, et permettent d’expliquer le refroidissement. Les conditions chaudes et le haut niveau de la mer d’il y a 10 à 15 millions d’années, comparé à aujourd’hui, ont très probablement été causés par une plus forte concentration en CO2 atmosphérique à cette époque. Le fait que les algues calcifiantes étudiées synthétisent des coquilles plus épaisses pendant les périodes pendant lesquelles le CO2 est élevé, ne signifie pas qu’il n’y a pas de danger pour tous les organismes calcifiants de l’océan. Les coccolithophores font figure d’exception parmi les organismes calcifiants océaniques : ce sont des plantes, et ont donc besoin de carbone à la fois pour la Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU photosynthèse et pour la calcification. Les organismes calcifiants qui ne font pas de photosynthèse, comme les coraux, les huîtres et certains planctons (les foraminifères par exemple), répondront très probablement de manière spécifique pour la calcification et les adaptations potentielles à un fort taux de CO2. De plus, les vitesses de changement de la chimie des océans sont bien plus graduelles dans cette étude que celles des changements en cours et prédits pour les prochaines centaines d’années. Source(s): Decrease in coccolithophore calcification and CO2 since the middle Miocene Clara T. Bolton1,2, Marıa T. Hernandez-Sanchez1, Miguel-Angel Fuertes3, Saul Gonzalez-Lemos1, Lorena Abrevaya1, Ana Mendez-Vicente1, Jose-Abel Flores3, Ian Probert4, Liviu Giosan5, Joel Johnson6 & Heather M. Stoll1 - Nature Communication, 14 janvier 2016, DOI: 10.1038/ncomms10284 1 Geology Department, Oviedo University, Spain. 2 Aix-Marseille University, CNRS, IRD, CEREGE France. 3 Grupo de Geociencias Oceanicas, Geology Department, University of Salamanca, Spain. 4 CNRS, Sorbonne Universites-Universite Pierre et Marie Curie (UPMC) Paris Roscoff Culture Collection, Station Biologique de Roscoff, France. 5 Department of Geology and Geophysics, Woods Hole Oceanographic Institution, USA. 6 University of New Hampshire, Department of Earth Sciences, USA. Contact Mme Clara BOLTON Mél : [email protected] Tél. : 04 42 97 15 01 CEREGE (AMU-CNRS-IRD-Collège de France) A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/node/5618 Quantifier l’impact des éruptions volcaniques sur le climat Lundi 31 août 2015 Les grandes éruptions volcaniques éjectent dans la stratosphère des quantités considérables de soufre qui, après conversion en aérosols, bloquent une partie du rayonnement solaire et tendent à refroidir la surface de la Terre pendant quelques années. Une équipe internationale de chercheurs à laquelle participe Joël Guiot, chercheur au Centre Européen de Recherche et d’Enseignement des Géosciences de l’Environnement (OSU Pythéas – CNRS / IRD / Université d’Aix-Marseille) vient de mettre au point une méthode, présentée dans la revue Nature Geoscience, pour mesurer et simuler avec précision le refroidissement induit. Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU L’éruption du volcan Pinatubo, survenue en juin 1991 et considérée comme la plus importante du XXe siècle, a injecté 20 millions de tonnes de dioxyde de soufre dans la stratosphère et provoqué un refroidissement global moyen de 0,4°C. Pour quantifier le refroidissement temporaire induit par les grandes éruptions de magnitude supérieure à celle du Mont Pinatubo survenues ces 1 500 dernières années, les scientifiques ont généralement recours à deux approches : la dendroclimatologie, basée sur l’analyse des cernes de croissance des arbres, et la simulation numérique en réponse à l’effet des particules volcaniques. Mais jusqu’à maintenant ces deux approches fournissaient des résultats assez contradictoires, ce qui ne permettait pas de déterminer avec précision l’impact des grandes éruptions volcaniques sur le climat. Les refroidissements simulés par les modèles de climat étaient en effet deux à quatre fois plus importants et duraient plus longtemps que ce que les reconstitutions dendroclimatiques établissaient. Les écarts entre ces deux approches ont même conduit certains géophysiciens à douter de la capacité des cernes de croissance d’arbres à enregistrer les impacts climatiques des grandes éruptions volcaniques passées et à remettre en cause la capacité des modèles à les simuler fidèlement. Réconcilier les deux approches Aujourd’hui, des chercheurs de l’Université de Genève (UNIGE), de l’IRD, du CNRS, du CEA, de l’Université de Berne, de l’Université de Western Ontario et de Université de Cambridge sont parvenus à réconcilier les deux approches et à proposer une méthode capable d’estimer avec précision les effets que pourraient avoir les futures éruptions de forte magnitude sur le climat, pour ensuite mieux anticiper leurs impacts sur nos sociétés. Dans cette équipe pluridisciplinaire, les dendrochronologues ont réalisé une nouvelle reconstitution des températures estivales de l’hémisphère nord pour les 1 500 dernières années. Ils ont analysé la largeur mais surtout la densité de cernes d’arbres, qui est très sensible aux variations de température et qui avait été négligée par le passé. Les données ont été récoltées à travers tout l’hémisphère nord, de la Scandinavie à la Sibérie, en passant par le Québec, l’Alaska, les Alpes et les Pyrénées. Toutes les éruptions majeures ont ainsi été clairement détectées dans cette reconstitution. Les résultats ont montré que l’année qui suit une grande éruption est caractérisée par un refroidissement plus prononcé que celui observé dans les reconstitutions précédentes. Ces refroidissements ne semblent toutefois pas persister plus de trois ans à l’échelle hémisphérique. Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Les physiciens du climat ont, quant à eux, calculé le refroidissement engendré par les deux plus grandes éruptions du dernier millénaire, les éruptions du Samalas et du Tambora, toutes deux survenues en Indonésie en 1257 et 1815 respectivement, à l’aide d’un modèle climatique sophistiqué. Ce modèle prend en compte la localisation des volcans, la saison de l’éruption et la hauteur d’injection du dioxyde de soufre et intègre un module microphysique capable de simuler le cycle de vie des aérosols volcaniques depuis leur formation, suite à l’oxydation du dioxyde de soufre, jusqu’à leur sédimentation et élimination de l’atmosphère. "Cette approche inhabituelle permet de simuler de façon réaliste la taille des particules d’aérosols volcaniques et leur espérance de vie dans l’atmosphère, ce qui conditionne directement l’ampleur et la persistance du refroidissement provoqué par l’éruption", explique Markus Stoffel, chercheur à l’UNIGE. Ces nouvelles simulations montrent que les perturbations des échanges de rayonnement, dues à l’activité volcanique, étaient largement surestimées dans les simulations précédentes, utilisées dans le dernier rapport du GIEC (Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat). Pour la première fois, les résultats produits par les reconstitutions et les modèles climatiques convergent quant à l’intensité du refroidissement et démontrent que les éruptions de Tambora et du Samalas ont induit, à l’échelle de l’hémisphère nord, un refroidissement moyen oscillant entre 0,8 et 1,3°C pendant les étés 1258 et 1816. Les deux approches s’accordent également sur la persistance moyenne de ce refroidissement évaluée à deux-trois ans. Ces résultats ouvrent la voie à une meilleure évaluation du rôle du volcanisme dans l’évolution du climat. Contact Chercheur Joël Guiot, chercheur CNRS - Tel : +33 4 42 97 15 32 A lire sur le site de l'INSU : www.insu.cnrs.fr/node/5428 Coup de froid sur les tropiques Dimanche, 24 août 2014 Les glaciers tropicaux ont réagi aux coups de froid de l’Antarctique et du Groenland au cours des 20 000 dernières années, d’après des travaux menés principalement par des chercheurs du CNRS, de l’Université Joseph Fourier, d’Aix-Marseille Université et de l’IRD, en collaboration avec d’autres chercheurs français(1) et des collègues des États-Unis, de Colombie et du Royaume-Uni. Leur étude, menée sur 21 glaciers andins, est publiée le 24 août 2014 dans la revue Nature. Comme ailleurs sur la planète, les glaciers des tropiques (situés de part et d’autre de l’équateur, entre 23°N et 23°S) sont en retrait depuis le dernier maximum glaciaire, il y a environ 20 000 ans. Un recul ponctué de pauses et de ré-avancées, mais dont la chronologie détaillée, dans les régions tropicales, restait floue. Les analyses réalisées par un groupe international de chercheurs dans les Andes (où se trouvent plus de 99 % des glaciers tropicaux) montrent qu’ils ont avancé lors d’un refroidissement du Groenland (voici 12 000 ans) mais plus encore au cours d’une période de froid sur l’Antarctique (il y a 14 000 ans). Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Les chercheurs se sont intéressés à ces époques car les hémisphères nord et sud ont alors connu des tendances climatiques contrastées. Il y a 14 500 à 12 900 ans, le réchauffement de l’Antarctique s’interrompt ("Antarctic xold reversal" ou ACR), alors que les températures du Groenland sont plutôt élevées. À l’inverse, la période suivante, le "Younger Dryas" (YD, voici 12 900 à 11 600 ans), est marquée par un refroidissement de l’hémisphère nord tandis que les températures de l’Antarctique repartent à la hausse. Les glaciers tropicaux étant situés à mi-distance, on pourrait s’attendre à les voir répondre indifféremment à chacun des coups de froid. Pourtant, jusqu’ici, les connaissances basées sur les datations des avancées glaciaires passées laissaient penser que ces glaciers étaient sous l’influence unique de l’hémisphère nord. S’assurer de la qualité de ces datations était donc crucial pour analyser la réponse passée du climat dans les Andes. La datation des phases d’extension glaciaire repose sur l’analyse de moraines, débris rocheux charriés par le glacier. Lorsqu’il commence à reculer, les moraines frontales ne sont plus protégées par la glace et une sorte de "chronomètre géologique" se déclenche alors : les roches accumulent du béryllium 10 et de l’hélium 3 créés par les particules issues du rayonnement cosmique(2). Une vingtaine de glaciers du Venezuela, du Pérou, de Bolivie et du nord de l’Argentine avaient été datés de cette manière. Mais les incertitudes élevées et les différences de méthodes employées empêchaient toute comparaison précise. Après avoir amélioré la précision et la fiabilité des géochronomètres utilisés, l’équipe de chercheurs a ensuite recalculé les dates de manière homogène, et y a ajouté la datation des moraines du glacier Ritacuba negro, en Colombie (Andes tropicales nord). Le glacier Ritacuba negro, dans les Andes colombiennes, où ont été prélevés des échantillons rocheux dans le cadre de cette étude. © IRD / Bernard Francou Échantillonnage d’une roche pour procéder à sa datation par comptage des éléments cosmogéniques. © LGP, Vincent Jomelli. Les scientifiques ont ainsi montré qu’à l’échelle du millier d’années, les glaciers tropicaux du nord et du sud de l’équateur ont évolué de la même manière. Le recul global de plusieurs kilomètres depuis 20 000 ans a notamment été interrompu par une pause ou une ré-avancée de quelques centaines d'années au début de l’ACR, puis par des épisodes glaciaires d’ampleur de plus en plus faible à la Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU fin du YD, au début de l’Holocène (il y a environ 10 000 ans) et au petit âge glaciaire (XIIIe-XIXe siècles). Un modèle climatique a ensuite été utilisé pour comprendre l’origine de ces fluctuations. Il montre que les variations de température, et non de précipitations, sont responsables des principales fluctuations des glaciers lors de l’ACR et du YD. Ces variations de température locales sont ellesmêmes attribuées à l’augmentation globale du taux de CO2, combinée aux changements d’intensité de courants océaniques qui redistribuent la chaleur et homogénéisent les températures entre les pôles et les tropiques. Ces recherches montrent que les glaciers tropicaux ont une dynamique propre (différente de celle des glaciers alpins, plus étudiés), qui intègre des influences climatiques des deux hémisphères (et non majoritairement de l’hémisphère nord, comme c’est le cas pour les glaciers alpins). Or, ces glaciers revêtent une importance cruciale pour les populations des Andes, qui en dépendent pour l’eau potable et l’électricité. Alors que les glaciers tropicaux des Andes ont déjà perdu 30 à 50 % de leur surface depuis 4 décennies, il importe donc de bien comprendre comment ils répondent aux variations climatiques. La connaissance tirée de ces glaciers permettra de mieux appréhender les impacts régionaux d’un changement climatique global sous influence du taux croissant de CO2 dans l’atmosphère et de la redistribution de l’énergie par les océans. Note(s): 1. Liste des laboratoires français impliqués : Laboratoire de géographie physique : environnements quaternaires et actuels ( LGP, CNRS / Université Paris 1 / UPEC), Laboratoire de glaciologie et géophysique de l'environnement (LGGE/OSUG, CNRS / UJF), Centre européen de recherche et d'enseignement de géosciences de l'environnement (CEREGE/PITHÉAS, CNRS / AMU / IRD / Collège de France), Centre de recherches pétrographiques et géochimiques (CRPG, CNRS / Université de Lorraine), Laboratoire d’océanographie et du cimat : expérimentations et approches numériques (LOCEAN/IPSL, CNRS / IRD / UPMC / MNHN), Laboratoire d'étude des transferts en hydrologie et rnvironnement (LTHE/OSUG, CNRS / UJF / Grenoble-INP / IRD). 2. Le rayonnement cosmique est composé de particules (protons, particules alpha) de haute énergie provenant de l’espace qui interagissent avec l’atmosphère où elles développent des cascades de particules secondaires également énergétiques dont une faible proportion interagit avec la croûte terrestre. Source(s): A major advance of tropical Andean glaciers during the Antarctic Cold Reversal, V. Jomelli, V. Favier, M. Vuille, R. Braucher, L. Martin, P-H. Blard, C. Colose, D. Brunstein, F. He, M. Khodri, D. Bourlès, L. Leanni, V. Rinterknecht, D. Grancher, B. Francou, J.L. Ceballos, H. Fonseca, Z. Liu, B. Otto-Bliesner, Nature, 24 August 2014, doi:10.1038/nature13546. Contact(s): Vincent Jomelli, LGP [email protected], 01 45 07 55 81 Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/node/4958 Mesure des gaz à effet de serre à l'Observatoire de Haute Provence pour le réseau international ICOS Dimanche, 6 juillet 2014 Le réseau international ICOS (Integrated Carbon Observation System) pour la mesure des gaz à effet de serre, auquel collaborent plusieurs acteurs (CNRS, CEA, Université Versailles-SaintQuentin, INRA) et laboratoires français, s'implante à l'Observatoire de Haute Provence (OHP). Cette infrastructure de recherche européenne a pour mission de mesurer les concentrations atmosphériques des gaz à effet de serre et les flux de carbone sur les écosystèmes et l’océan. La tour ICOS installée à l'OHP, haute de 100 m est une antenne régionale du dispositif permettant d’étudier la place de la forêt méditerranéenne dans le bilan de carbone. Elle sera inaugurée le 11 juillet prochain à l'OHP. La tour ICOS est équipée d’instruments à trois niveaux (10, 50, 100 m), ce dispositif permet de : mesurer la contribution de la région en gaz à effet de serre (GES) ; suivre son évolution en relation avec les changements climatiques ; mesurer l'impact des mesures de remédiation que la région va Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU mettre en place. Elle vient compléter le dispositif de mesures environnementales démarré avec l'O3HP (Oak Observatory at the OHP). Les objectifs d'ICOS Les objectifs scientifiques de ce programme européen sont de : tracer les flux de carbone en Europe et dans les régions adjacentes par observation des écosystèmes, de l'atmosphère et des océans à travers des réseaux intégrés, fournir les observations à long terme nécessaires pour comprendre l'état présent et prévoir le comportement du carbone global et des émissions des gaz à effet de serre, surveiller et évaluer l'efficacité de la séquestration du carbone et/ou de la réduction des émissions de gaz à effet de serre sur la composition globale de l'atmosphère, en prenant en compte les sources et les puits par région géographique et par secteur d'activité. Le réseau est ainsi doté de 3 types de stations réparties sur le territoire : continentales, côtières et de montagne. Chacune de ces stations mesure les paramètres suivants : température, direction et vitesse du vent, pression atmosphérique, humidité CO2, CH4, CO H2O, N2O, isotopes du carbone, …. Equipements de la tour ICOS de l’OHP Capteur météo (Vent, Température, Humidité) Analyseur GES (CO2, CH4, H2O) Ligne prélèvement air pour N2O, SF6, H2 et isotopes CO2 Ligne prélèvement particules Lidar basse couche (couche limite et aérosols, entre 0 et 5 km) Webcam (développement de la végétation) La tour ICOS est donc un nouvel instrument de pointe qui vient renforcer le potentiel d’étude environnementale de l’OHP. Elle rejoint ainsi trois autres structures associées tout aussi performantes sur le site, l’O3HP (Observatoire du Chêne blanc), la station géophysique Gérard Mégie, la station AirPACA. Les équipes scientifiques et techniques Plusieurs équipes de l’Université d’Aix-Marseille et du CNRS sont impliquées dans ce projet de recherche : 3 laboratoires de l’OSU Pythéas (- le Centre Européen de Recherche et d’Enseignement des Géosciences de l’Environnement (CEREGE), - l’Institut Méditerranéen de Biodiversité et d’Ecologie marine et continentale (IMBE), - l’Institut Méditerranéen d’Océanologie (MIO) et l’UMS Pythéas-OHP) le Laboratoire de Chimie de l’Environnement (LCE) le Service de Biologie Végétale et de Microbiologie Environnementales (SBVME) ICOS@OHP, qui a été initié par la fédération de recherche ECCOREV (FR3098), est un équipement associé au LABEX OTMED. Le Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU (LSCE-IPSL), le Laboratoire Atmosphères, Milieux, Observations Spatiales (LATMOS) et le Laboratoire d'Aérologie de Toulouse (LA Toulouse) sont également partenaires du projet. Le budget de 460 000 € a été financé par le Fonds Européen de Développement Régional (FEDER) (46%), le CNRS (19%), le Conseil Régional PACA (30%) et le Conseil Général Alpes de HauteProvence (5%). Pour en savoir plus: La vidéo de l'inauguration A lire sur le site de l'INSU : www.insu.cnrs.fr/node/4931 Une équipe franco-suisse réévalue à la hausse l'aléa sismique au Bhoutan Lundi, 30 juin 2014 Depuis le XVIème siècle, de puissants séismes de magnitude 7 à 8 ont rompu la bordure sud de l’Himalaya sur toute sa longueur sauf au Bhoutan. Cette absence de séismes relève-t-elle d’un processus tectonique particulier dans cette partie de la chaîne ou simplement de l’absence de données dans un pays resté longtemps coupé du monde ? C’est la question à laquelle a tenté de répondre une équipe de chercheurs français, bhoutanais et suisses. Leurs conclusions sont parues dans la revue Geology. Vue frontale vers le Nord d’un escarpement de faille inverse de 8 m de haut (cumulant 2 séismes s’étant produits au cours du dernier millénaire) le long du chevauchement frontal himalayen (région de Gelephu, Bhoutan Central). Carte sismotectonique simplifiée de l’Himalaya central et oriental. Ellipses roses : séismes historiques. Rectangles oranges : âges des ruptures de surfaces majeures (d’après Lavé et al, 2005; Yule et al, 2006; Sapkota et al, 2013; Kumar et al, 2010; Jayangondaperumal et al., 2011). Rectangles bleus : taux de raccourcissement holocènes (d’après Lavé et Avouac, 2000; Burgess et al., 2012). Rectangles verts : taux de raccourcissement GPS (Ader et al., 2012). Cadre noir: région étudiée. Points jaunes séismes instrumentaux enregistrésentre 1973 et 2013 (catalogue NEIC). Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Escarpement de faille inverse de 8 m de haut (cumulant 2 séismes s’étant produits au cours du dernier millénaire) le long du chevauchement frontal himalayen (région de Gelephu, Bhoutan Central). Comprendre la distribution de la déformation le long de la chaîne himalayenne ainsi que le comportement des failles qui génèrent les séismes majeurs est crucial pour évaluer l’aléa sismique auquel sont exposés le Bhoutan, l’Inde, le Népal et le Pakistan. Les études paléosismologiques menées depuis quelques dizaines d’années en Himalaya ont montré l’occurrence de grands séismes dans la période historique qui viennent compléter le catalogue de sismicité instrumentale et permettent d’étudier le cycle sismique sur le dernier millénaire. Cependant, le Bhoutan ne semble pas avoir été affecté par un séisme majeur et la sismicité instrumentale sur les 75 dernières années ne montre pas de séismes de magnitude supérieure à 6,7. Ajoutée à cela le fait que le plateau du Shillong au sud de la chaîne pourrait absorber une part non négligeable du raccourcissement, il serait tentant de considérer le Bhoutan comme un pays relativement « tranquille » en termes d’aléa sismique. Cependant, en analysant sur le terrain les décalages de terrasses fluviatiles au niveau du chevauchement actif à la frontière entre le Bhoutan et l’Inde, l’équipe Risques du Laboratoire Géosciences Montpellier et ses collaborateurs ont mis à jour des ruptures de surfaces associées à deux séismes majeurs dans la région au cours du dernier millénaire : l’un postérieur à l’an 1150 (+/-100) et l’autre postérieur à l’an 1570 (+/-80). Cette première étude morpho-tectonique au Bhoutan conclut également que le taux de déformation au travers du chevauchement frontal bhoutanais pour la période Holocène (10000 ans) est de ~ 20 mm / an. Ce taux est comparable à celui déterminé au Népal et atteste que le processus de raccourcissement observé au niveau du plateau du Shillong n’a que peu d’effet sur la façon dont la déformation s'accumule au niveau du Bhoutan. Cette découverte de deux séismes majeurs au cours du dernier millénaire au Bhoutan montre que l’aléa sismique y est aussi important que dans les pays voisins. Outre leur aspect scientifique fondamental en lien avec la tectonique de l’Himalaya, ces résultats montrent qu’il faut continuer l’effort initié par les autorités bhoutanaises pour éduquer les populations par rapport aux aléas sismiques, et remettre en question les normes parasismiques utilisées actuellement au Bhoutan. Celles-ci sont en effet sous-estimées car basées sur les niveaux d’aléas (bien plus faibles) calculés pour l’Inde. Source(s): Active tectonics of the eastern Himalaya: New constraints from the first tectonic geomorphology study in southern Bhutan.Théo Berthet1, Jean-François Ritz1, Matthieu Ferry1, Phuntsho Pelgay2, Rodolphe Cattin1, Dowchu Drukpa2, Régis Braucher3, and György Hetényi4,5 Geology, mai 2014 vol 42, N°5 doi:10.1130/G35162.1 1- Géosciences Montpellier (CNRS-Université Montpellier) Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU 2- Seismology and Geophysics Division, Department of Geology and Mines, Ministry of Economic Affairs, Bhutan 3- CEREGE (Aix-Marseille Université, CNRS-IRD-Collège de France) 4- Swiss Seismological Service, ETH-Zürich, Suisse 5- Department of Earth Sciences, ETH-Zürich, Suisse Contact(s): Jean-François Ritz, Géosciences Montpellier (CNRS, Montpellier) [email protected], 04 67 14 39 07 A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/node/4920 Datation du plus vieil hominidé de Turquie, le chaînon manquant entre l’Europe et l’Afrique ? Mardi, 4 février 2014 Une équipe franco-turque, codirigée par le Centre de Recherche en Géosciences de l’Environnement (CNRS, Université d’Aix-Marseille Aix-en-Provence), le laboratoire Histoire naturelle de l’Homme Préhistorique (CNRS, MNHN) et l’Institut de paléontologie humaine (Paris) a pu dater à plus de 1 à 1,1 millions d’années les dépôts renfermant l’homme de Kocabas, le plus vieux fossile d’hominidé découvert en Turquie. Ce résultat précise l’histoire de la dispersion des hominidés. Une étude parue dans la revue Earth and Planetary Science Letters. La dispersion du genre Homo à partir de son berceau africain vers l’Eurasie, avec en particulier les relations entre Asie orientale (Indonésie, Chine) et Europe de l’Ouest, reste encore très mal connue du fait de la rareté des fossiles géographiquement intermédiaires. En particulier le nombre de vagues de colonisation et leur époque, par différentes espèces (ergaster, erectus, antecessor…) dont la distinction est sujette à controverse, est disputée. C’est pourquoi la datation du plus vieil hominidé de Turquie, retrouvé dans un travertin du bassin de Denizli (dans une formation voisine du fameux travertin de Pamukkale) était très attendue. Bien peu de reste d’hominidés sont connus en Turquie, principalement des Homo neanderthalensis dans la grotte de Karain. Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Le crâne, récupéré par MC Alcicek de l’Université de Pamukkale, est morphologiquement proche des fossiles éthiopiens datés entre 1 et 1,6 Ma et pourrait donc correspondre au passage de la « première vague » d’Homo erectus en Europe, datée vers 1 à 1,3 Ma en Espagne, France et Italie. Par contre coté asiatique (Géorgie, Chine et Java) l’arrivée du genre Homo serait antérieure (autour de 1,6 à 1,8 Ma). La datation directe des fragments de crâne découverts n’étant pas possible, ce sont les sédiments qui les contenaient qui ont été analysés par différentes méthodes [1] (nucléides cosmogéniques, magnétostratigraphie, paléontologie des mammifères). Les auteurs ont ainsi pu dater la fin du dépôt des travertins à plus de 1,1 Ma grâce à l’étude détaillée d’une coupe continue de plus de 120 m de haut affleurant dans des carrières de travertins. Cette datation est donc cohérente avec l’hypothèse d’un passage de l’Homo erectus africain par l’Asie mineure dans sa conquête de l’Europe. Techniquement elle illustre une nouvelle fois, après les succès obtenus par le CEREGE au Tchad (datation de Toumai) et en Inde (datation des premières industries à bifaces), les potentialités majeures des méthodes utilisant les nucléides cosmogéniques (10Be atmosphérique et couple 26Al/10Be ), combinée à la magnétostratigraphie, pour dater les séries continentales à hominidés. Les techniques de datation précédemment développées étaient en effet limitées à moins de 1 Ma environ. Source(s) Dating the Homo erectus bearing travertine from Kocabaş (Denizli, Turkey) at at least 1.1 Ma. A.E. Lebatard, M. C. Alçiçek, P. Rochette, S. Khatib, A. Vialet, N. Boulbes, D.L. Bourlès, F. Demory, G. Guipert, S. Mayda, V.V. Titov, L. Vidal, H. de Lumley, 2014. Earth and Planetary Science Letters 390, 8-18. Contacts Anne-Elizabeth Lebatard / Tél : 0442971776 Pierre Rochette / Tél : 0442971562 Amélie Vialet / Tél : 014331629 Notes [1] Concrètement la méthode appliquée a consisté, à partir d’une étude stratigraphique détaillée, à déterminer la polarité du champ magnétique enregistré en continu sur l’ensemble de la coupe et à comparer cette polarité à l’échelle de référence des inversions du champ magnétique terrestre. L’ensemble de la coupe montre une polarité inverse (champ vers le sud) sauf un petit intervalle normal (champ identique à l’actuel) coiffant le travertin où a été trouvé le fossile. La méthode 26Al/10Be est basée sur la décroissance, après enfouissement, de ces isotopes radioactifs produits lors de l’exposition au rayonnement cosmique de galets de quartz initialement présents en surface. Divers niveaux de galets étudiés ont permis d’encadrer la couche de travertin fossilifère entre 1,6 et 1,1 Ma. L’événement normal est donc soit celui de Jaramillo (base à 1,07 Ma) soit celui Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU de Cobb Mountain (base à 1,21 Ma). L’abondante faune de mammifères (chevaux, cervidés, rhinoceros, éléphant, girafe, etc.) typique de la fin du Villafranchien, est aussi compatible avec cette fourchette d’âge. Voir en ligne : Le communiqué sur le site de l’INSU http://www.insu.cnrs.fr/node/4711?utm_source=DNI&utm_medium=email&utm_campaign=DNI Des grappes de forts séismes observés sur 7 failles d’Italie centrale aux mêmes périodes préhistoriques Lundi, 16 septembre 2013 Une équipe française vient de dater les forts séismes survenus, au cours des derniers 12 000 ans, sur sept failles actives de la région de l’Italie centrale par la méthode du chlore 36 (36Cl). Cette étude révèle un comportement inattendu de cet ensemble de failles où 30 forts séismes se sont produits en salves synchrones. Elle suggère de plus de nouvelles pistes pour anticiper la magnitude et la période d’occurrence à 100/200 ans près des prochains grands séismes. Cette étude est parue le 6 septembre en ligne dans Journal of Geophysical Research. Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Figure 1 Figure 2 Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Figure 3 Depuis plusieurs décennies, les géologues étudient le passé des failles actives pour tenter de déterminer « l’intensité » (i.e., la magnitude) et le temps de retour des plus forts séismes que ces failles ont produits, et produiront donc encore. C’est à une étude de ce type que se sont livrés les auteurs de l’article dans la région sismique de l’Italie centrale, où s’est produit le séisme meurtrier de l’Aquila en 2009. Sept failles ont été identifiées pour cette étude. La méthode novatrice qu’ils ont utilisée a consisté à dater le temps d’exposition à l’air libre de roches carbonatées par le dosage du nucléide cosmogénique 36Cl. En effet, lorsqu’un séisme se produit, dans le cas notamment de failles normales où un bloc se soulève par rapport à un autre, des roches sont mises brutalement à nu. Elles deviennent exposées à l’air et soumises au rayonnement cosmique. L’interaction entre les particules très énergétiques du rayonnement cosmique, en particulier les neutrons et des muons, et le calcium (Ca) contenu dans les roches carbonatées entraîne la production de 36Cl. Les spécialistes peuvent ainsi dater un fort séisme en mesurant la durée de l’exhumation des roches par le dosage du 36Cl qu’elles contiennent en surface, et déterminer les déplacements produits par le séisme en mesurant la surface exhumée. Plus de 800 mesures chimiques du 36Cl ont ainsi été réalisées sur des accélérateurs nationaux (ASTER - CEREGE ) et américains (Lawrence Livermore, CA) permettant de documenter de façon très précise les âges et déplacements de plus de 30 forts séismes s’étant produit au cours des derniers 12 000 ans dans la région de l’Aquila. Ces résultats sont sans précédent car ils constituent les plus longs enregistrements de forts séismes passés jamais obtenus à ce jour dans le monde. La plupart de ces forts séismes se sont produits de façon synchrone sur toutes les failles analysées, pourtant généralement distantes de plusieurs dizaines de km. Les forts séismes se sont par ailleurs répétés en grands cycles pluri-événements, alternant des phases sans séisme relativement longues (pas ou ≈ 1 événement pendant 3000-4000 ans) et des phases d’activité sismique paroxysmale voyant la succession de 3 à 5 forts séismes sur une même faille dans une période de temps très courte de l’ordre de 1000 ans. Sur chaque faille, le déclenchement des phases paroxysmales semble avoir été contrôlé par un niveau-seuil de déformation atteint sur la faille. Par ailleurs, la quantité de déformation relative accumulée sur une faille à un instant donné semble contrôler la taille du prochain fort séisme, c’est–àdire l’amplitude de déplacement produit et donc sa magnitude, ainsi que sa date d’occurrence. C’est Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU la première fois qu’un tel contrôle est déterminé. Ce résultat est extrêmement important car il met en avant un comportement de failles qui pourrait peut-être permettre d’anticiper la magnitude (Mw à ± 0.1-0.2 près) et la date d’occurrence, à ± 100-200 ans près, du prochain fort séisme à venir sur une faille donnée. Ce travail a été mené grâce au soutien de l’ANR (programme CATELL 2006), dans le cadre du projet QUAKonSCARPS coordonné par I. Manighetti et qui a fédéré 5 laboratoires nationaux -Isterre (porteur du projet ANR), Cerege, IPGP, Montpellier II, et Géoazur. Source(s) : Earthquake synchrony and clustering on Fucino faults (Central Italy) as revealed from in situ 36Cl exposure dating, Lucilla Benedetti1, Isabelle Manighetti2, Yves Gaudemer3, Robert Finkel1,4, Jacques Malavieille5, Khemrak Pou1, Maurice Arnold1, Georges Aumaître1, Didier Bourlès1 and Karim Keddadouche1, à paraître dans Journal of Geophysical Research 1- CEREGE (Aix-Marseille Université, CNRS-IRD ). 2- GEOAZUR (CNRS, IRD, Observatoire de la Côte d’Azur, Université de Nice Sophia Antipolis) 3- IPGP (CNRS, Université Paris Diderot, Sorbonne Paris Cité) 4- Now at Earth and Planetary Science Department, University of California, Berkeley, California, USA. 5- Géosciences Montpellier (CNRS, Université Montpellier) Contact(s) : Lucilla BENEDETTI, CEREGE (Aix-Marseille Université/CNRS/IRD) : 0686562498 Isabelle MANIGHETTI, Géoazur (CNRS-UNS-IRD/OCA) : 0483618635 Retour de campagne A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/node/4492 Cartographie des organismes planctoniques marins Lundi, 22 juillet 2013 Après avoir effectué un énorme travail de récupération puis de traitement de plus d’un demimillion de données existantes, une collaboration internationale de modélisateurs marins et d’analystes de données de terrain vient d’éditer le premier atlas global de la biomasse et de la diversité des onze principaux groupes planctoniques marins. L’exploitation de cette mine d’information, qui n’en est qu’à ses débuts, apporte déjà des résultats étonnants. Destiné à être enrichi de toutes nouvelles données, cet atlas permettra notamment de suivre l’évolution des stocks des espèces étudiées. Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Collecte du plancton à l’aide d’un filet, à Isla Magueyes au large de Puerto Rico en 2004. © Ralf Schiebel Les organismes planctoniques(1) ont une importance fondamentale pour l’environnement : d’une part ils constituent la base des réseaux trophiques marins, lesquels procurent des services essentiels à l’homme, et d’autre part ils contrôlent les cycles biogéochimiques de plusieurs éléments majeurs. Ainsi, grâce à la photosynthèse, les algues microscopiques (phytoplancton) piègent du CO2 atmosphérique qui est ensuite transféré dans la chaîne alimentaire planctonique. À leur mort, les organismes chutent et leur contenu en carbone est exporté vers l’océan profond où il peut rester stocké plusieurs milliers d’années. En limitant ainsi l’accumulation de CO2 dans l’atmosphère, l’activité du plancton régule le climat à l’échelle globale. Le plancton contrôle également le cycle marin de l’azote. Enfin, il a une influence sur la formation des nuages via le relargage de composés soufrés dans l’atmosphère. La connaissance fine de la distribution et de la concentration des espèces planctoniques marines est donc un enjeu majeur. Elle reste néanmoins trop limitée pour permettre de prédire leurs réponses face au changement climatique en cours. Plus d’une dizaine de chercheurs français(2) ont collaboré à un large effort international visant à quantifier la distribution, dans l’espace et dans le temps, ainsi que le contenu en carbone de onze principaux groupes fonctionnels du plancton(3), qui sont des groupes clés pour le cycle du carbone. Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Exemple d’espèces pour chaque groupe fonctionnel. Distribution des données dans l’espace pour chaque groupe fonctionnel du zooplancton et du phytoplancton. Chaque point représente un lieu pour lequel des données existent. Pour cela, ils sont partis à la recherche des données existantes concernant ces organismes, en utilisant les bases de données déjà constituées et en lançant un appel à contribution auprès des taxonomistes du monde entier. Ils ont ainsi pu rassembler plus d’un demi-million de données issues de tous les océans du globe et portant sur des espèces planctoniques allant du picomètre pour la bactérie à plusieurs centimètres pour les organismes gélatineux, le krill et autres petits crustacés. Ces données (nom de l’espèce, date, latitude, longitude, profondeur et abondance) ont été rigoureusement contrôlées, chaque abondance a été convertie en biomasse, puis l’ensemble a été compilé pour former un atlas global de la biomasse et de la diversité du plancton, l’atlas MAREDAT (Marine ecosystem data) qui vient d’être mis à disposition du public. Cet effort de compilation va continuer. L’atlas a en effet été conçu de manière à pouvoir être régulièrement alimenté de nouvelles données. Les chercheurs ont également prévu de lancer un nouvel appel à contribution en vue de rééditer cet atlas en 2015. L’objectif de cet effort dans la durée est de documenter d’éventuels changements dans les stocks du plancton marin, tels que des migrations, Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU apparitions ou disparitions d’espèces dans l’espace et dans le temps. Cet atlas montre d’ores et déjà clairement que les régions éloignées géographiquement des centres de recherche, tels l’océan Pacifique Sud et l’océan Austral, sont sous-échantillonnées de façon chronique et qu’un effort particulier vers ces régions devra être fait à l’avenir. En conséquences, les cartes de biomasse en fonction des groupes fonctionnels que ces données ont permis de dresser devraient évoluer de façon significative au cours des 10 prochaines années. Biomasse moyenne (µg C l-1), dans les 200 premiers mètres, des différents groupes fonctionnels planctoniques étudiés et de la chlorophylle a. L’exploitation de cette base n’en est qu’à ses débuts. Un premier effort de synthèse a néanmoins été réalisé. Il montre que : la biomasse globale des hétérotrophes (2.0–6.4 Pg C) est au moins égale, voire supérieure à celle des autotrophes (0.5–2.6 PgC) (en excluant le nanophytoplancton et les dinoflagellés autotrophes) ; la biomasse du zooplancton calcifiant (0.9–2.3 Pg C) est substantiellement plus élevée que celle du phytoplancton calcifiant (0.01–0.14 Pg C) représenté par les coccolithophoridés ; le "patchiness" (hétérogénéité) dans la distribution de la biomasse augmente avec la taille des organismes ; même si les mesures de biomasse du zooplancton en-dessous des 200 m restent rares, les quelques données disponibles suggèrent que les bactéries et les Archaea ne sont pas les seuls organismes hétérotrophes présents en profondeur. Des analyses préliminaires montrent également que l’océan profond abrite plus d’organismes planctoniques que les scientifiques n’en attendaient. Une exploitation des données taxonomiques portant sur les diatomées montre aussi que sur l’ensemble des données de la base, moins de 50 espèces, sur les quelques milliers d’espèces répertoriées, représenteraient à elles seules plus de 90 % de la biomasse de ce groupe. L’intérêt de l’atlas MAREDAT est qu’il va permettre de mieux quantifier la biodiversité planctonique (nombre d’espèces répertoriées dans chaque groupe), de mieux comprendre les raisons de la Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU coexistence de certaines espèces au sein d’un même biome(4), de mieux connaître les effets de l’acidification ou de la surpêche … Il pourrait aussi aider à déterminer si certains biomes jouent un rôle prépondérant sur les grands cycles biogéochimiques et si de ce fait il est nécessaire de recentrer les efforts scientifiques sur ces régions. Il permettra aussi aux climatologues de confronter leurs modèles à des données biologiques de terrain dûment référencées. Un des enjeux de la modélisation du climat est en effet de mieux prédire l’évolution de la capacité des océans à pomper le carbone atmosphérique et pour ce faire d’affiner connaissance de l’impact de la biodiversité en prenant en considération un plus grand nombre de groupes planctoniques clés réalisant des fonctions différentes au sein des écosystèmes. Note(s): 1. Le planton regroupe l’ensemble des organismes incapables de mouvements propres par rapport au courant. 2. Les laboratoires français impliqués dans cette collaboration : Institut méditerranéen d’océanographie (MIO/PYTHÉAS, CNRS / Université du Sud - Toulon - Var / IRD / Université Aix-Marseille), Laboratoire de planétologie et géodynamique de Nantes (LPGN, Université de Nantes / CNRS / Université d’Angers / Université du Maine / Université de la Rochelle / CNES), Laboratoire d’océanographie de Villefranche (LOV/OOV, UPMC Paris 6 / CNRS), Centre européen de recherche et d’enseignement de géosciences de l’environnement (CEREGE/PYTHÉAS, CNRS / Université Aix-Marseille / IRD / Collège de France), Adaptation et diversité en milieu marin (CNRS / UPMC Paris 6) et Laboratoire d'écogéochimie des environnements benthiques (LECOB, CNRS / UPMC Paris 6). 3. Il s’agit des groupes suivants : picophytoplancton (Pico), picohétérotrophes (Bact), diazotrophes (Diaz), microzooplancton (Micro), coccolithophoridés (Cocco), foraminifères (Fora), phaeocystis (Phae), mésozooplankton (Meso), diatomées (Diat), ptéropodes (Pter), et macrozooplancton (Macro). 4. Un biome est un ensemble d'écosystèmes caractéristiques d'une aire biogéographique. Source(s): MAREDAT - Towards a world atlas of marine plankton functional types, Editor(s): W. Smith and S. Pesant, Special Issue, Earth System Science Data. Contact(s): Karine Leblanc, MIO/PYTHÉAS [email protected], 04 91 82 91 09 Ralf Schiebel, LPGN [email protected], 02 41 73 52 38 A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/node/4444 Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Les sédiments de la mer Noire témoignent de l’instabilité de l’ancienne calotte glaciaire nord-européenne Mardi, 23 avril 2013 L’analyse des sédiments déposés au fond de la mer Noire ont permis à des chercheurs du Centre européen d’enseignement et de recherche des géosciences de l’environnement (CEREGE/PYTHÉAS, Université Aix-Marseille / CNRS / IRD / Collège de France) et de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) de Brest de reconstituer l’activité d’un fleuve d’Europe centrale au cours des 25 derniers millénaires et de mettre en évidence la dynamique instable de la calotte glaciaire nord-européenne et son impact profond sur l’hydrologie de la mer Noire durant cette période. Ces travaux, représentent un pas important dans la compréhension de la dynamique des calottes glaciaires et de leurs interactions avec l’environnement et le climat. Au Dernier Maximum Glaciaire, il y a environ 21 000 ans, la géographie de l’Europe était bien différente de celle d’aujourd’hui. Une véritable montagne de glace, la calotte fennoscandienne, recouvrait toute l’Europe du Nord depuis les îles britanniques jusqu’à la Sibérie, et au sud, de vastes glaciers s’écoulaient des vallées alpines. Le niveau des océans était plus bas de 120 mètres et un fleuve géant, le fleuve Manche, coulait sur une plaine entre la France et l’Angleterre. En Europe centrale, la mer Noire n’était pas connectée à la mer Méditerranée mais formait un grand lac dont le niveau était d’environ 100 mètres en-dessous du niveau actuel, ses eaux exondant 100 000 km2 de terre de plus qu’aujourd’hui. Les fleuves Danube et Dniepr avaient une embouchure commune en mer Noire, mais tandis que le Danube drainait les eaux de fonte et les sédiments relâchés par les glaciers alpins, le Dniepr collectait, quand à lui, ceux de la calotte fennoscandienne. Du fait de cette situation particulière, les sédiments déposés au fond de la mer Noire représentent une archive de choix pour reconstituer et comprendre les profondes réorganisations environnementales qui ont accompagné la fin de la dernière époque glaciaire en Europe centrale. Or, à quelques mètres sous le fond de la mer Noire se trouve une série de quatre couches de sédiments rouges, dont la couleur contraste fortement avec le gris bleuté caractérisant communément la colonne sédimentaire. Depuis une dizaine d’années, les chercheurs soupçonnent ces couches rouges de représenter l’empreinte sédimentaire, en mer Noire, de la fonte des glaces d’Europe. Encore fallait-il le prouver, Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU déterminer la calotte à l’origine de ces dépôts et comprendre la dynamique de leur genèse. Pour lever le voile, des chercheurs du CEREGE et de l’Ifremer à Brest ont daté les sédiments d’une carotte collectée en mer Noire en 2004 à l’aide du carottier du Marion Dufresne (navire de l’IPEV) dans le cadre du projet Assemblage (5e PCRD), et analysé trois indicateurs géochimiques présents dans les sédiments de cette carotte. Ils ont montré que le premier dépôt des sédiments rouges avait commencé il y a environ 17 000 ans et que les quatre couches sont de même épaisseur et régulièrement espacées, cette épaisseur et cet espacement correspondant à une durée de deux cents ans. Grâce à deux indicateurs géochimiques organiques sensibles à l’érosion des sols par les rivières, ils ont pu mettre en évidence que chacune des couches rouges avait été déposée en réponse à une augmentation forte et brutale de l’activité fluviale. Par ailleurs, l’analyse de la signature isotopique du néodyme de nombreux terrains actuels d’Europe centrale leur a permis de montrer que seuls les sols actuellement présents aux sources du fleuve Dniepr (actuelle Biélorussie) avaient une signature comparable à celle des sédiments formant les couches rouges. L’ensemble de ces résultats prouve que la formation des couches rouges en mer Noire, entre 17 000 et 15 500 ans, est due à des apports majeurs d’eau de fonte issue de la désintégration de la calotte fennoscandienne. En se fondant sur l’analyse des morphologies glaciaires présentes aux sources du Dniepr et sur l’organisation temporelle des couches rouges, les chercheurs ont proposé un mécanisme pour expliquer la genèse de ces couches. Il y a 20 000 ans, le réchauffement post-glaciaire a fait fondre et donc reculer la calotte fennoscandienne et un lac proglaciaire de grande taille, le lac Disna, s’est progressivement formé dans une dépression située au pied de la calotte. La propagation de l’eau de fonte de la surface vers le fond de la calotte et de l’eau du lac sous la calotte l’aurait progressivement déstabilisé par lubrification de sa base, jusqu’à déclencher(1), il y a 17 000 ans, son écoulement brutal dans la dépression proglaciaire et l’expulsion de l’eau du lac Disna dans le bassin versant du Dniepr, provoquant pendant deux cents ans l’arrivée en mer Noire d’énormes quantités d’eau de fonte. Une fois vidangé, le lac Disna se serait progressivement reformé par fonte de la glace déposée dans la dépression jusqu’au déclen- Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU chement d’un nouvel effondrement de la calotte. Entre 17 000 et 15 500 ans, cette succession se serait produite quatre fois, tous les quatre cents ans. Ce mécanisme permet en outre d’expliquer deux phénomènes répertoriés dans cette région et à cette époque : l’élévation de 100 mètres en l’espace de 1500 ans du niveau de la mer Noire, qui a conduit à l’inondation de 100 000 km2 de terres et à un recul du trait de côte d’environ 100 m par an, ainsi que les modifications substantielles de l’hydrologie de la mer de Marmara et la mer Egée dans lesquelles la mer Noire se déversait. Ces résultats indiquent que la disparition d’une calotte de glace n’est pas un phénomène linéaire uniquement due à sa fonte superficielle, une calotte pouvant s’effondrer ponctuellement en perdant d’énormes quantités de glace ce qui accélère fortement sa disparition. Selon les auteurs, ils représentent de ce fait une avancée dans la compréhension de la dynamique de retrait des calottes. Note(s): 1. Par gravité, la calotte avance continuellement, mais son extrémité recule quand la vitesse de fonte est supérieure à la vitesse de son avancée. L’effondrement se produit lorsque cette dernière devient supérieure à la vitesse de fonte du fait de l’augmentation de la lubrification basale, une situation directement reliée au volume du lac. Source(s): Abrupt drainage cycles of the Fennoscandian Ice Sheet. G. Soulet, G. Ménot, G. Bayon, F. Rostek, E. Ponzevera, S. Toucanne, G. Lericolais, E. Bard. Proceedings of the National Academy of Science, 8 avril 2013, vol. 110(17), 6682-6687, doi:10.1073/pnas.1214676110. Contact(s): Guillaume Soulet, CEREGE/PYTHÉAS [email protected], 04 42 50 74 25 Edouard Bard, CEREGE/PYTHÉAS [email protected], 04 42 50 74 18 A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/node/4345 Voyage au coeur d’un cratère d’impact dans l’arctique Canadien Trois chercheurs du CEREGE (CNRS, Université d’Aix-Marseille), J. Gattacceca, Y. Quesnel et P. Rochette, reviennent d’une expédition dirigée par G. Osinski (Western University de London, Canada) sur l’île de Devon, la plus grande île déserte du monde (latitude 75,3 N) située dans la province du Nunavut (Canada). Il s’agissait pour l’équipe du CEREGE, financée par l’IPEV et l’INSU-CNRS, de comprendre l’origine d’une anomalie géophysique inhabituelle située exactement au centre du cratère d’impact de Haughton, d’un diamètre de 23 km et d’un âge de 39 millions d’années. Les participants canadiens ont travaillé, quant à eux, sur Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU les méthodes de spectroscopie de terrain des roches impactées, en vue de valider les protocoles de mesures des sondes spatiales, tandis que l’astronaute de l’Agence Spatiale Canadienne Jeremy Hansen se formait à la géologie dans des conditions approchant les surfaces lunaires ou martiennes. Lors d’une mission précédente en 2010, l’anomalie avait été précisée à l’échelle kilométrique (cf schéma). Elle associe une anomalie magnétique positive, indiquant la présence de roches plus aimantées que l’entourage, et d’une anomalie gravimétrique négative, indiquant la présence de roches moins denses. La modélisation suggère que le corps magnétique pouvait être très proche de la surface. Une telle combinaison d’anomalies n’avait jamais été observée au centre de cratères terrestres. L’impact d’Haughton, sur des roches carbonatées, se caractérise par une formation bréchifiée (débris de roches cimentés) et fondue très développée, ainsi que par un fort hydrothermalisme dû à la circulation de fluide chaud induite par l’impact. La mission 2013 (14 au 27 juillet) s’est focalisée sur la partie la plus superficielle de l’anomalie, d’une dizaine de mètres de large, dans le but d’obtenir des échantillons du matériel à son origine. Il a fallu d’abord localiser précisément cette anomalie par cartographie du champ magnétique et tomographie électrique à haute résolution, puis forer jusqu’à 13 mètres de profondeur pour retrouver la roche a priori responsable de l’anomalie, sous le permafrost et les sédiments glaciaires. Le matériel a été transporté sur la zone d’étude en petit avion (Twin Otter) à partir de la base de Resolute Bay, puis quad. La profondeur atteinte avec un matériel de forage de moins de 300 kg au total était une gageure. Les échantillons rapportés font partie de la formation de brèche d’impact fondue mais présentent une altération hydrothermale à première vue bien différente par la coloration et l’abondance de gypse de celle des brèches entourant l’anomalie. L’étude de ces échantillons au CEREGE, confrontée aux données géophysiques, va permettre de préciser les processus complexes se produisant au centre d’un cratère d’impact, et par exemple aider à comprendre les minéralisations associées aux impacts. Référence : Origin of the central magnetic anomaly at the Haughton impact structure, Canada, Y. Quesnel, J. Gattacceca, G. Osinski, P. Rochette, 2013. EPSL 367, 116-122. Contacts P. Rochette (CEREGE) : [email protected] ; 0677457380 Y. Quesnel (CEREGE) : [email protected] ; 0442971590 Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Panache plinien de l’éruption du Sarychev (Russie) le 12 juin 2009. Crédit : NASA A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/node/5428 Un événement de l'histoire du champ magnétique terrestre révélé par l'action du rayonnement cosmique Vendredi, 23 novembre 2012 Il y a 41 000 ans, le champ magnétique de la Terre s'est estompé jusqu'à pratiquement disparaître, laissant notre planète sans protection face au bombardement de particules cosmiques. Des traces de cet événement ont été retrouvées dans des carottes de sédiments océaniques par une équipe du Centre de recherche et d'enseignement de géosciences de l'environnement (CEREGE, CNRS/Aix-Marseille Université/IRD/Collège de France). Dans ces carottes, les chercheurs ont mesuré des variations dans la concentration de Béryllium 10, un isotope radioactif produit par l'action des particules cosmiques sur les atomes d'oxygène ou d'azote de l'atmosphère. Ces travaux, publiés dans le Journal of Geophysical Research, sont un pas important vers la mise au point d'une nouvelle méthode pour étudier l'histoire du champ magnétique terrestre, qui permettra de mieux comprendre sa baisse d'intensité en cours depuis trois millénaires. Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Le champ magnétique terrestre forme un efficace bouclier déviant les particules chargées d'origine cosmique qui se dirigent vers nous. Loin d'être constant, celui-ci a connu de nombreuses inversions, le Nord magnétique se retrouvant au pôle Sud géographique. Ces inversions sont toujours accompagnées d'une annulation du champ magnétique. La dernière est survenue il y a 780 000 ans. Le champ magnétique peut aussi connaître des excursions, des périodes où il s'effondre comme s'il allait s'inverser, avant de retrouver sa polarité normale. Le dernier de ces événements, appelé excursion de Laschamp, date d'il y a 41 000 ans. Ce sont des traces de cet événement que les chercheurs ont retrouvé dans des carottes de sédiments récoltées au large du Portugal et de la Papouasie-Nouvelle Guinée. Dans ces échantillons, ils ont retrouvé des excès de Béryllium 10, un élément produit exclusivement lors de la collision entre particules d'origine cosmique et atomes d'azote ou d'oxygène. Le Beryllium 10 (10Be) produit dans l'atmosphère retombe ensuite à la surface de la Terre où il s'incorpore aux glaces et aux sédiments. Dans les couches correspondant à l'excursion de Laschamp, les chercheurs ont retrouvé jusqu'à deux fois plus de 10Be que le taux normal, témoignant de l'intense bombardement de particules cosmiques qu'a subi la Terre durant plusieurs millénaires. Classiquement, l'étude de l'histoire du champ magnétique se fait grâce à la présence dans les laves volcaniques, les sédiments ou les poteries antiques de certains oxydes de fer, notamment la magnétite, qui indiquent la direction et l'intensité du champ magnétique existant au moment où ces matériaux se sont figés. Parfois, cette approche, dite paléomagnétique, n'est pas suffisante pour quantifier précisément les variations globales du champ. Les chercheurs ont couplé cette méthode avec la mesure de la concentration de Béryllium 10 sur les mêmes archives sédimentaires. Ils ont ainsi Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU montré que les pics de concentration de cet isotope sont synchrones et présentent la même dynamique et la même amplitude dans les sédiments du Pacifique et de l'Atlantique que dans les glaces carottées au Groenland précédemment analysées. La méthode basée sur le Béryllium 10, affinée depuis 10 ans au CEREGE, permet donc de reconstituer de façon continue les variations d'intensité du champ magnétique terrestre dans sa globalité. Par ailleurs, on sait que depuis 3000 ans le champ magnétique a perdu 30% de sa force. Cette évolution laisse penser que la Terre pourrait connaître dans les siècles à venir, une excursion semblable à celle survenue il y a 41 000 ans. Les rayons cosmiques de haute énergie pouvant provoquer des mutations et lésions cellulaires, cet événement ne serait pas sans conséquences sur la biodiversité, et notamment sur l'espèce humaine. Voilà pourquoi les chercheurs veulent connaître précisément les rythmes des séquences d'inversions et excursions du champ magnétique afin de retrouver d'éventuelles régularités dans son comportement, et mieux comprendre ainsi l'origine de ces phénomènes dont le siège est le noyau terrestre. C'est le but du projet Magorb lancé en 2009, avec le financement de l'ANR, et porté par le CEREGE, l'Institut de physique du globe de Paris (IPGP) et le Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (LSCE, CNRS/CEA/UVSQ). Source(s): Amplitude and timing of the Laschamp geomagnetic dipole low from the global atmospheric 10Be overproduction: contribution of authigenic 10Be/9Be ratios in West Equatorial Pacific sediments. L. Ménabréaz, D. L. Bourlès, N. Thouveny, in press. Journal of Geophysical Research. 8 novembre 2012. Contact(s): Nicolas Thouveny, CEREGE (CNRS - Aix-Marseille Université) [email protected], 04 42 97 15 01 A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/node/4069 Une météorite tombée en Californie révèle le destin d'un astéroide primitif Vendredi, 21 décembre 2012 Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Fragments de la météorite de Sutter Mill En Avril 2012 une météorite carbonée a été récupérée en Californie deux jours après sa chute grâce à l'observation de sa fin de parcours par un radar météorologique, alors que la trajectoire du bolide visible jusqu’à 30 km d’altitude (en orange) indiquait un autre point de chute, du fait du vent. Une équipe internationale principalement américaine publie un article dans Science cette semaine présentant les caractéristiques extraordinaires de cette chute. D'un objet de 40 tonnes arrivant de l'extérieur de la ceinture d'astéroïdes (à proximité de Jupiter) à près de 30 km/s, il n'est resté que moins d'un kg récupéré au sol en une centaine de fragments de 1 à 200 grammes, près du site historique de la ruée vers l’or, Sutter's Mill, qui a donné son nom à la météorite. La caractérisation de cet objet révèle un matériel hydraté et oxydé, ayant subi une histoire très complexe à la surface d'un corps parent, peut-être intermédiaire entre astéroïde et comète. Les impacts multiples à la surface de cet objet ont produit un mélange de matériaux en provenance de différents corps parents et ayant subi un chauffage très variable. La lithologie principale, poreuse, hydratée et riche en carbonates, a pu être fortement deshydratée par ce chauffage. L'étude magnétique de Sutter's Mill, réalisée au CEREGE (CNRS, Université Aix-Marseille) à Aix en Provence, révèle cette importante hétérogénéité, et un champ magnétique très faible régnant lors de sa formation. Malgré la relativement faible teneur en matière organique de nombreuses molécules complexes ont été détectées avec la participation de l’ENSCMu (Université de Mulhouse). La recherche sur cet objet ne fait que commencer, en particulier sur l’effet thermique de l’entrée atmosphérique. Cette étude nous procure un avant goût des découvertes attendues des trois missions vers des astéroïdes primitifs prévues par les agences spatiales américaine, européenne et japonaise, avec retour d'échantillons dans les année 2020. Elle démontre aussi l'intérêt de moyens nouveaux et proactifs de détection des chutes de météorite. Un réseau de détection dédié aux météorites commence d'ailleurs à être installé en France sous la responsabilité de l'Observatoire de Paris (projet FRIPON). Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Carte de la zone de Sutter Mill (voir texte). Le signal marqué par les bandes bleues indique la trajectoire de fin de parcours de l'astéroïde. Les points oranges indiquent la trajectoire de l'astéroïde au-dessus de 30 km. Les points rouges indiquent les fragments récupérés. Pour en savoir plus: Pour en savoir plus sur les météorites voir la série vidéo : "Météorites messagères du cosmos" Source(s): Radar enabled recovery of Sutter’s Mill, a unique carbonaceous chondrite regolith breccia. Jenniskens P. et al. (69 auteurs dont P. Rochette et J. Gattacceca à Aix en Provence, Z. Gabelica à Mulhouse), 2012. Science, 21 December. Contact(s): Pierre Rochette, CEREGE [email protected], 04 42 97 15 62 A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/node/4093 De nouvelles datations repoussent l'âge de l'apparition d'outils sur le sous-continent Indien Mardi, 5 avril 2011 Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Deux équipes scientifiques du Centre Européen de Recherche et d'Enseignement en Géosciences de l'Environnement (CEREGE, CNRS - Université Paul Cézanne Aix-Marseille III), installé à Aix-en -Provence, viennent d'apporter une contribution essentielle à l'étude d'un site archéologique majeur d'Inde du Sud. Notamment, leurs expertises complémentaires dans les méthodes de datation ont révélé que les outils découverts sur ce site ont été fabriqués il y a au moins un million d'années. Cette découverte permet donc de supposer que la dispersion des hominidés à travers l'Asie du Sud est beaucoup plus ancienne que ce que les scientifiques imaginaient jusqu'à présent. Des travaux publiés dans la revue Science. Fouille d'Attirampakkam au Sud Est de l'Inde (site T8) daté à plus d'un million d'années. Les excavations cubiques correspondent aux blocs de sédiments orientés qui ont servi pour les datations paléomagnétiques. La taille totale du baton rouge et blanc est de 2 mètres. © CEREGE-CNRS, M.Taieb. Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Outils Acheuléens de la tranchée T8 du site archéologique d'Attirampakkam. Artefacts de la strate 6 (A) et strate 7 (B). Les artefacts comprennent des hachereaux (C et D), de grands éclats avec un côté tranchant (E,F, G), des bifaces en pointes(H). © CEREGE-CNRS, M.Taieb. Un site archéologique d'une richesse exceptionnelle a été découvert et fouillé à Attirampakkam au Sud-Est de l'Inde. Les fouilles ont impliqué des équipes de recherches indiennes et françaises dont le CEREGE à Aix-en-Provence. Ces fouilles ont permis de mettre au jour près de 4000 outils préhistoriques, dont des bifaces et hachereaux, qui sont l'expression de l'industrie paléolithique ancien (Acheuléen). Cette "période industrielle" s'étend, en fonction des déplacements des populations d'hominidés sur les divers continents, entre 1,7 millions d'années (Ma) et 300 mille ans avant le présent. Alors que les sites d'Afrique et d'Asie du Sud-Ouest sont connus comme les plus anciens, les sites d'Inde restaient mal datés et étaient considérés comme beaucoup plus récents. Il était donc primordial de mobiliser les techniques de datations les plus adaptées pour pouvoir déterminer l'âge de ce site. Dans cette perspective, deux équipes du CEREGE, travaillant d'une part sur les isotopes cosmogéniques radioactifs et d'autre part sur le magnétisme terrestre ont été mobilisées. Des datations radiogéniques sur quelques bifaces en quartzite prélevés in situ lors des fouilles, ont été effectuées sur l'accélérateur ASTER, au CEREGE. Ainsi, les mesures de nucléides cosmogéniques radioactifs, Béryllium 10 et Aluminium 26 indiquent que l'enfouissement des artefacts s'est produit il y a 1, 5 Ma avec des barres d'erreur satisfaisantes. De plus des mesures paléomagnétiques ont été effectuées par l'équipe de géophysique sur les sédiments contenant les artéfacts. Ces mesures ont révélé que ces sédiments se sont déposés alors que le champ magnétique terrestre était inversé (l'aiguille de la boussole aurait indiqué le Sud) c'est-à-dire avant un âge de 780 mille ans, âge de la dernière inversion du champ magnétique terrestre. L'association des résultats des isotopes radioactifs cosmogéniques et du paléomagnétisme, montre que le site est plus ancien que 1,07 Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU million d'années, ce qui fait du site Acheuléen d'Attirampakkam le plus ancien d'Inde et une clé pour comprendre l'évolution de l'occupation du globe par les hominidés. En effet cet âge se rapproche du seuil de l'hominisation associé aux premières cultures techniques africaines. Source(s): Early Pleistocene Presence of Acheulian Hominins in South India. Science, 25 mars 2011. 10.1126/science.1200183. Shanti Pappu1*, Yanni Gunnell2, Kumar Akhilesh1, Régis Braucher3, Maurice Taieb3, François Demory3, Nicolas Thouveny3 1. Sharma Centre for Heritage Education,Tamil Nadu, India; 2. Department of Geography, Université Lumière-Lyon 2, CNRS-UMR 5600, Bron 3. Centre Européen de Recherche et d'Enseignement en Géosciences de l'Environnement (CEREGE), CNRS - Université Paul Cézanne Aix-Marseille III, Aix-en-Provence Contact(s): Nicolas Thouveny, CEREGE (CNRS - Aix-Marseille Université) [email protected], 04 42 97 15 01 François Demory, CEREGE (CNRS - Paul Cézanne, Aix marseille III) [email protected], 04 42 97 17 94 Maurice Taïeb, CEREGE (CNRS - Paul Cézanne, Aix marseille III) [email protected], 04 42 97 15 82 A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/terre-solide/terre-et-vie/de-nouvelles-datations-repoussent-l-age-de-l-apparition-d-outils-sur-le-so Bascule climatique bipolaire enregistrée dans les carottes de glace antarctiques durant la dernière déglaciation Vendredi, 17 décembre 2010 Sur la base des analyses d'une nouvelle carotte de glace forée par le consortium européen TALDICE(1) au site de Talos Dôme en Antarctique (secteur de la mer de Ross), les chercheurs de ce consortium viennent de démontrer que la dernière transition glaciaire-interglaciaire a connu, comme la période glaciaire précédente, le phénomène dit de bascule climatique caractérisé par une évolution synchrone mais opposée des climats des deux pôles. Leurs analyses révèlent par ailleurs des différences régionales significatives dans les vitesses de réchauf- Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU fement observées aux sites de forage antarctiques selon qu'ils font face aux secteurs atlantiques ou indiens de l'océan Austral. Cette étude a été mise en ligne en avant-première le 5 décembre sur le site internet de Nature Geoscience. L'analyse de carottes de glace forées au Groenland et en Antarctique a montré l'existence, au cours de la dernière glaciation, d'une interdépendance entre les climats des deux pôles appelée "bascule bipolaire" : vraisemblablement due à des bouleversements dans la circulation océanique atlantique, cette bascule se traduisait soit par des réchauffements rapides et intenses du Groenland alors que l'Antarctique commençait à se refroidir, soit par des réchauffements graduels de l'Antarctique alors qu'il faisait particulièrement froid au Groenland (communiqué de presse du [13-11-2006]). Ce phénomène a-t-il perduré durant la période de déglaciation qui a suivi, entre le dernier maximum glaciaire et l'interglaciaire actuel ? La question faisait controverse en raison de résultats contradictoires : des enregistrements climatiques obtenus sur le plateau antarctique (à Dôme C, Vostok ou Dronning Maud Land) montraient une telle bascule alors que l'enregistrement acquis par les Américains sur le site côtier de Taylor Dôme en bordure de la mer de Ross suggérait que les structures régionales de la circulation océanique dans l'océan Austral avaient conduit le secteur de la mer de Ross à suivre une évolution climatique similaire à celle du Groenland. Et c'est ainsi que le projet TALDICE a vu le jour (nouvelle du [06-02-2007]). Le carottier franco-britannique Berkner en action dans la tranchée de forage située sous la surface afin de conserver une température constante (voisine de -25°C) lors du prétraitement des échantillons de glace. © Jérôme Chappellaz, LGGE/CNRS. La nouvelle carotte de glace forée par le consortium TALDICE à Talos Dôme, le site antarctique le plus éloigné de l'océan atlantique nord (centre d'action de la bascule bipolaire), et dont le forage s'est terminé en décembre 2007 à 1620 mètres de profondeur par l'obtention d'un enregistrement climatique couvrant les 250 000 dernières années, représente l'enregistrement glaciologique le plus long disponible à ce jour à partir d'un site côtier antarctique. Grâce à un taux d'accumulation de la neige relativement plus important sur cette région côtière que sur le plateau antarctique, ce forage offre en outre la possibilité de reconstituer les conditions climatiques et atmosphériques en Antarctique de l'Est avec une résolution temporelle sans précédent. Les enregistrements très détaillés du méthane piégé dans les bulles d'air présentes dans la glace ont Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU par ailleurs permis aux chercheurs du consortium de relier temporellement de manière très précise les différentes strates de glace de la carotte à celles d'autres carottes de glace du Groenland et de l'Antarctique, et ainsi de réaliser des comparaisons temporelles fines de leurs enregistrements respectifs des isotopes de l'eau, lesquels reflètent les évolutions climatiques aux différents sites de forage. La comparaison des tendances climatiques sur ces différents sites révèle qu'un phénomène de bascule bipolaire, associé à un important transfert de chaleur entre les deux hémisphères suite à la réorganisation de la circulation océanique, s'est bien exprimé durant la dernière déglaciation, avec des réponses synchrones aussi bien sur le plateau antarctique qu'en bordure de la mer de Ross, un résultat qui vient invalider ceux obtenus précédemment par les chercheurs américains. Ainsi, quatre phases se sont succédées durant cette dernière déglaciation : un réchauffement graduel en Antarctique allant de pair avec une période froide au Groenland ; un réchauffement abrupt au Groenland suivi d'une période chaude tandis que l'Antarctique se refroidit graduellement ; une seconde phase de réchauffement graduel en Antarctique alors que le Groenland subit à nouveau des conditions très froides (période dite du Dryas récent) ; un second réchauffement abrupt au Groenland tandis que le réchauffement en Antarctique atteint son point culminant avant de donner suite à un très lent refroidissement durant le début de l'Holocène. Cependant, si l'évolution climatique à Talos Dôme, dont la datation s'avère bien plus fiable que celle du forage américain de Taylor Dôme, apparaît tout à fait comparable, même dans le détail, à celle observée précédemment sur le site de Concordia sur le plateau antarctique, elle diffère sensiblement de celle issue du forage réalisé à la base allemande Köhnen (forage EDML) située face au secteur atlantique de l'océan Austral. Par rapport à Talos Dôme et Concordia où la première phase de réchauffement antarctique en début de déglaciation paraît régulière, l'enregistrement réalisé à Köhnen montre en effet un ralentissement du réchauffement à la fin de cette phase, entre moins 16 000 et moins 14 500 ans, qui va de pair avec une réduction du taux d'augmentation du gaz carbonique dans l'atmosphère. Ainsi, des disparités régionales apparaissent dans la réponse du climat antarctique à la réorganisation majeure de la circulation océanique à cette époque, qui reflètent très probablement une évolution contrastée régionalement de l'étendue de la glace de mer et/ou des vents zonaux dans l'océan Austral. Ces données constituent donc un apport de tout premier plan pour tester les réponses climatiques simulées avec les modèles couplés océan-atmosphère qui tentent de reproduire la séquence et les spécificités régionales des événements lors du passage d'une période glaciaire à une période interglaciaire. Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU La proximité de plusieurs volcans actifs (Mt Melbourne, volcans des Pléiades) au voisinage du site de forage a engendré plusieurs dizaines de couches de cendres parfaitement visibles dans la carotte de glace. © Jérôme Chappellaz, LGGE/CNRS. L'organisation logistique du forage TALDICE à Talos Dôme était sous la responsabilité du programme italien de recherche en Antarctique (PNRA). La France a largement contribué à plusieurs éléments clés de l'opération. Le forage a entièrement reposé sur le carottier franco-britannique Berkner conçu et réalisé par le Centre de carottage et de forage national (C2FN, branche glaciologie) du CNRS (http://c2fn.dt.insu.cnrs.fr/spip/). Les isotopes de l'eau ont été analysés en partie par le LSCE(2). Le LGGE(3) a pris en main la plus grande partie des analyses du méthane piégé dans la glace, lesquelles sont utilisées pour contraindre la chronologie du forage. La chronologie elle-même a été produite par le LGGE sur la base d'une nouvelle méthode inverse mise au point par ce laboratoire. Le CEREGE(4) a conduit des analyses détaillées du béryllium-10 dans ce forage, qui ont permis d'évaluer les changements temporels du taux d'accumulation. Le projet TALDICE a bénéficié en France du soutien financier de l'Institut national des sciences de l'Univers (programme LEFE) et de l'Institut polaire français Paul-Emile Victor. Note(s): 1. Le consortium TALDICE regroupe des laboratoires issus de 5 pays européens : l'Italie, la France, l'Allemagne, la Suisse et le Royaume-Uni. En France, les laboratoires impliqués sont le LGGE de Grenoble, le LSCE de Saclay et le CEREGE d'Aix en Provence. 2. Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement, de l'Institut Pierre Simon Laplace (IPSL) (CNRS / CEA / Université Versailles St Quentin) 3. Laboratoire de glaciologie et géophysique de l'environnement, de l'Observatoire des sciences de l'Univers de Grenoble (OSUG) (CNRS / Université Joseph Fourier) Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU 4. Centre européen de recherche et d'enseignement des géosciences de l'environnement, (CNRS / Université Paul Cézanne / IRD / Université de Provence / Collège de France) Source(s): B. Stenni, D. Buiron, M. Frezzotti, S. Albani, C. Barbante, E. Bard, J. M. Barnola, M. Baroni, M. Baumgartner, M. Bonazza, E. Capron, E. Castellano, J. Chappellaz, B. Delmonte, S. Falourd, L. Genoni, P. Iacumin, J. Jouzel, S. Kipfstuhl, A. Landais, B. Lemieux-Dudon, V. Maggi, V. MassonDelmotte, C. Mazzola, B. Minster, M. Montagnat, R. Mulvaney, B. Narcisi, H. Oerter, F. Parrenin, J. R. Petit, C. Ritz, C. Scarchilli, A. Schilt, S. Schüpbach, J. Schwander, E. Selmo, M. Severi, T. F. Stocker and R. Udisti, Expression of the bipolar see-saw in Antarctic climate records during the last deglaciation, Nature Geoscience, "advance online publication" du 5 décembre 2010. Parution dans le numéro de janvier 2011. Contact(s): Jérôme Chappellaz, LGGE/OSUG [email protected], 04 76 82 42 64 Valerie Masson-Delmotte, LSCE / IPSL [email protected] Edouard Bard, CEREGE/PYTHÉAS [email protected], 04 42 50 74 18 A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/environnement/climats-du-passe/basculeclimatique-bipolaire-enregistree-dans-les-carottes-de-glace-a Croissance très singulière de la graine dans le noyau de la Terre Lundi, 31 mai 2010 La graine, partie solide du noyau de la Terre, présente une asymétrie de ses propriétés sismiques entre deux hémisphères Est et Ouest. Des chercheurs du Laboratoire "Dynamique Terrestre et Planétaire" (INSU-CNRS, OMP) à Toulouse et du CEREGE (INEE-INSUCNRS) à Aix-Marseille proposent, dans une publication à Science, un modèle original. Le mode de croissance dissymétrique de la graine impliquerait une translation d'Ouest en Est entraînée par une cristallisation du fer sur l'hémisphère Ouest et sa fusion sur l'hémisphère Est. Ce mouvement de translation, entretenu par le refroidissement séculaire de la Terre, génère une distribution asymétrique de la taille des grains de fer qui grossissent au cours deleur transit. Ce modèle s'appuie sur de nouvelles données sismologiqueset sur le calcul de la vitesse et de l'atténuation des ondes sismiques sepropageant dans des agrégats de fer. Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Trajet des ondes sismiques (PKIKP). La graine est la structure la plus profonde de la Terre. Cette sphère de 1220 km de rayon est constituée d'un alliage solide de fer et de nickel, qui au cours du refroidissement de la Terre cristallise et grossit au dépend du noyau liquide qui l'entoure. Inaccessible, la graine reste énigmatique à bien des points de vue. Une de ses propriétés les plus étranges est l'asymétrie qu'elle présente entre ses faces Ouest et Est. En effet, les ondes sismiques qui traversent les 100 premiers kilomètres sont plus lentes et moins atténuées en parcourant l'hémisphère Ouest centré sur l'Amérique qu'en parcourant l'hémisphère Est centré sur l'Indonésie. Carte des différences de temps de trajet entre les ondes PKiKP qui rasent la graine et les ondes PKiKP qui y pénètre jusqu'à 100km de profondeur environ. Cet écart temporel est révélateur des propriétés de la graine à faible profondeur. Les cercles indiquent la position géographique des zones échantillonnées sous la surface de la graine. Les points G et M correspondent à la position du minimum et du maximum de cette distribution. © Monnereau et al. 2010 L'étude présentée ici, montre à partir de nouveaux enregistrements sismologiques que cette anomalie hémisphérique s'organise autour d'un axe de symétrie traversant la Terre dans le plan équatorial. La vitesse et l'atténuation* des ondes sismiques sont minimales sous une région localisée à l'aplomb de Quito en Équateur, elles augmentent progressivement pour atteindre des valeurs maximales aux antipodes, sous Padang en Indonésie. Quelle peut être la cause physique de ces variations ? Dans la graine, les ondes sismiques sont atténuées par des obstacles qui renvoient une partie de leur énergie en dehors de la direction moyenne de propagation. Ces obstacles sont les grains de fer eux mêmes ! En effet, dans la graine superficielle, les grains de fer très anisotropes sont orientés dans toutes les directions. Lorsque que l'onde sismique passe d'un grain à un autre, elle est affectée par Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU d'importantes variations de propriétés élastiques et l'énergie sismique est alors fortement diffusée. On parle de diffusion multiple. Ainsi l'anisotropie ouest-est de la graine, peut-elle être interprétée en terme de propriété des grains de fer, et en particulier de leur taille. Schéma présentant le modèle de croissance de la graine. Dans un régime super-adiabatique, la graine est instable et la moindre hétérogénéité de température est susceptible de déplacer le centre de masse de la graine vers son hémisphère le plus froid et donc le plus dense (gauche). À l'équilibre, les centres de masse de la graine et celui de la Terre (o) coïncident et une translation (de la position en pointillé à celle en trait plein) induit une topographie (h). Celle-ci ne correspond plus aux conditions thermodynamiques du changement de phase liquide-solide (la pression essentiellement) et devient instable. Ainsi, cristallisation à la surface du coté dense et fusion de l'autre coté tendent à effacer cette topographie, mais en retour amplifient l'hétérogénéité de densité. Il en résulte un mouvement de translation permanent dont la vitesse est contrôlée par la cinétique du changement de phase. Les principales conséquences sont une augmentation de l'âge (en couleur) d'un coté (bleu) à l'autre (jaune) et une variation de la taille des grains qui grossissent au cours de leur transit. © Monnereau et al. 2010 À partir d'un modèle de diffusion multiple, l'équipe a pu calculer la taille de ces grains de fer : environ 500 m dans l'hémisphère Ouest et 5 à 10 km dans l'hémisphère Est. Cette taille de grains peut sembler élevée, mais elle reste compatible avec les modèles classiques de croissance cristalline décrits en métallurgie. La croissance des grains étant directement reliée au temps écoulé pour les former, les observations sismiques suggèrent donc que les grains sont plus jeunes à l'Ouest qu'à l'Est. Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Pour expliquer cette particularité, les auteurs proposent un modèle où les grains qui constituent la graine migrent en permanence d'Ouest en Est. Cristallisés à l'Ouest à partir du noyau liquide, ils traversent la graine vieillissant et grossissant à la fois, jusqu'à atteindre le bord opposé et fondre en franchissant la limite avec le noyau liquide. Le moteur de ce processus est le refroidissement du noyau, lié au refroidissement de la Terre ellemême. On estime que le noyau liquide, brassé par des courants de convection très vigoureux, se maintient dans des conditions telles que toute baisse de sa température en surface (c'est-à-dire au contact du manteau) se répercute à sa base, à la surface de la graine où des grains de fer peuvent cristalliser. Dans la partie solide, l'évacuation de chaleur par la seule conduction est moins efficace et peut laisser l'intérieur de la graine suffisamment chaud pour que celle-ci soit gravitationnellement instable. Les conditions de cette instabilité sont favorisées par un taux de refroidissement séculaire important, correspondant à une graine relativement jeune, âgée de seulement 1 à 2 milliards d'années. Si la graine se trouve dans cet état, la moindre dissymétrie de cristallisation à sa surface engendrera un déplacement de son centre de masse vers le coté le plus dense, c'est-à-dire celui qui cristallise davantage. En fait, comme la position d'équilibre du centre de masse de la graine coïncide avec celui de la Terre, c'est toute la graine qui se translate, plaçant la face du côté dense et celle qui lui est opposée dans des conditions thermodynamiques telles que la première cristallise et la seconde fond. Ainsi, la dissymétrie de cristallisation et le mouvement se trouvent amplifiés. Il s'agit là d'un mode de convection très particulier, car il se produit sans déformation. Selon ce modèle, le déplacement est une simple translation. La graine grossit sur une face et fond de l'autre et c'est le processus de cristallisation-fusion qui contrôle la vitesse de la translation. Les auteurs ont pu évaluer qu'il était au moins trois fois supérieur au taux moyen de cristallisation de la graine, soit supérieur à 1,5 mm/an. La principale conséquence de ce processus est que le fer dans la graine est perpétuellement renouvelé. Non seulement son âge n'est pas partout le même (il est plus jeune à l'Ouest), mais il est souvent plus jeune que la graine elle-même. Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Modélisation de l'âge et taille des grains de fer dans la graine pour trois vitesses de translation (V) et deux dates du début de la translation (t0). La vitesse V est normalisée par le taux de croissance de la graine et la date t0 par l'âge de la graine. t0=0 indique que ce mouvement affecte la graine depuis le début de sa cristallisation alors pour to=0.8, le processus a débuté à 0.8 fois l'âge de la graine. Ces répartitions sont présentées à la superficie de la graine et par une coupe transversale contenant l'axe GM. © Monnereau et al. 2010 Source(s): Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU Lopsided growth of Earth's inner core, M. Monnereau, M. Calvet, L. Margerin et A. Souriau, 2010 Science:10.1126/science.1186212 Contact(s): Marc Monnereau, Dynamique terrestre et planétaire (INSU-CNRS, UPS -OMP) [email protected], 05 61 33 29 68 Marie Calvet, Dynamique terrestre et planétaire (INSU-CNRS, UPS -OMP) [email protected], 05 61 33 30 14 A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/terre-solide/dynamique-interne/noyaumanteau/croissance-tres-singuliere-de-la-graine-dans-le-noyau-d De l'Antarctique au désert de l'Atacama, la quête de la matière extraterrestre Lundi, 24 novembre 2008 Après avoir rapporté en 2006 une collecte exceptionnelle de micrométéorites en provenance d'un gisement découvert fortuitement dans la chaîne Transantarctique (Antarctique), dont ils publient les premiers résultats cette semaine dans la revue PNAS avec leurs collègues italiens (MNA Siena), les chercheurs du CEREGE (INSU-CNRS, Aix-Marseille Université) reviennent, cette fois-ci, du désert d'Atacama, chargés d'une nouvelle collecte abondante de microet macro- météorites. Il s'agissait d'une expédition effectuée dans le cadre d'une coopération franco-chilienne (CNRS-CONYCIT) avec l'Université du Chili à Santiago. Les micrométéorites sont de petites particules d'origine extraterrestre dont l'étude est primordiale pour la compréhension de la matière extraterrestre puisqu'elles constituent l'essentiel, en masse, du flux de matière arrivant de l'espace sur notre planète. Les micrométéorites sont le plus souvent collectées en fondant la glace ou la neige de l'Antarctique, mais depuis quelques années, les chercheurs d'Aix-Marseille ont conduit leurs pas et leurs méthodes sur les contreforts de la chaîne andine, dans le désert d'Atacama. Les micrométéorites des Monts Transantarctiques (publication PNAS) Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU La collection rapportée d'Antarctique en 2006, lors d'une expédition du programme Antarctique italien (PNRA) dirigée par L. Folco à laquelle participait P. Rochette au sommet d'une montagne située au milieu de la calotte Antarctique, provient d'un nouveau type de piège à micrométéorites, découvert fortuitement en 2003 grâce à l'utilisation d'un capteur magnétique. Il s'agit d'anfractuosités de la surface granitique où a pu s'accumuler la précieuse matière extraterrestre, ce qui a permis de rapporter une collection de micrométéorites dépassant de plusieurs ordres de grandeur en nombre tout ce qui a été ramené jusqu'à présent d'Antarctique du fait de la durée d'accumulation des poussières extraterrestres sur cette surface estimée à environ un million d'années. L'étude de la taille, des caractéristiques chimiques et minéralogiques de ces particules montre l'absence de biais importants de conservation qui auraient pu être causés par l'érosion éolienne ou l'altération. Cette collection Antarctique contient environ un million de particules extraterrestres de taille supérieure à 100 µm, et 3 500 particules de taille supérieures à 400 µm (allant jusqu'à deux mm). Les « micrométéorites géantes » permettront d'effectuer des mesures impossibles à effectuer sur les petites particules et d'étudier la transition entre météorites et micrométéorites : deux populations d'objets extraterrestres souvent présentés comme provenant respectivement d'astéroïdes ou de comètes. Différents types d'objets ont été répertoriés : des micrométéorites non fondues contenant plusieurs chondres (des « billes » fondues dans la nébuleuse proto-planétaire) et correspondant manifestement à des chondrites dites « ordinaires » (le type le plus commun de météorites non différenciées, en provenance de petits astéroïdes) ; des billes de verre terrestre, microfragments d'un impact géant survenu à proximité de l'Indochine, à onze mille kilomètre du site de prélèvement, il y a huit cent mille ans ! enfin de grosses particules identiques à celles (beaucoup plus petites) retrouvées dans la carotte de glace EPICA à la profondeur correspondant à quatre cent soixante mille ans. Ces particules, d'un type jamais observé auparavant, signent un événement cosmique majeur et encore inconnu. L'abondance et la durée pendant laquelle cette matière extraterrestre s'est accumulées - près d'un million d'années- laissent augurer de la découverte d'autres phénomènes nouveaux et d'autres types Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU de micrométéorite, liés à des variations temporelles brutales ou graduelles du flux de matière extraterrestre. Expédition Franco-Chilienne dans le désert d'Atacama Orientation d'une météorite telle que trouvée sur le terrain par J. Gattacceca (Atacama 2008) © CEREGE (INSU-CNRS Aix-Marseille université) M. Valenzuela et J. Gattacceca une météorite en main (Atacama 2007) © CEREGE (INSU-CNRS Aix-Marseille université) P. Rochette prélevant une météorite de 3,6 kg (Atacama 2006) © CEREGE (INSU-CNRS Aix-Marseille université) Le désert de l'Atacama (Andes) étant potentiellement un site nouveau de collecte de matière extraterrestre, les chercheurs du CEREGE y ont effectué trois expéditions avec leurs collègues Chiliens. La dernière s'est achevée en octobre dernier. Lors de ces trois campagnes, 34 météorites différentes ont été récoltées pour un total d'une dizaine de kg. Ce qui dépasse la totalité de la collection antérieure de météorites pierreuses du Chili. Une météorite rare a été rapportée : il s'agit d'une chondrite carbonée de type CO3 dont seulement six autres exemples ont été trouvés en dehors du Sahara et de l'Antarctique. Outre l'intérêt pour Titre de l'article : Communiqué de Presse INSU l'étude de la matière extraterrestre, ce travail permet d'aborder de manière originale l'âge des surfaces du désert de l'Atacama, estimé en fonction du nombre de météorites retrouvées par km2. Cet âge apparaît plus grand que pour le Sahara, du fait de l'absence de période humide à l'époque glaciaire. L'équipe a aussi collecté des sols pour en déterminer leur contenu en micrométéorites et vérifier la proportionnalité attendue entre le nombre de météorites et de micrométéorites récoltées par unité de surface. Cette méthode, beaucoup plus rapide que la collecte de météorites en nombre statistiquement suffisant, permettra de guider les futures expéditions et de mieux comprendre la géomorphologie de l'Atacama. Ces missions ont été l'occasion de former la première spécialiste chilienne des météorites (Millarca Valenzuela), et d'instaurer une collecte de météorites « éthique » puisque les masses principales resteront dans une collection académique du Chili. Note(s): 1. Mission Antarctique : financement PNRA, IPEV, programmes ANR jeune chercheur et PNP, réseau Marie Curie ORIGINS. 2. Missions Atacama, participants : Jérôme Gattacceca, Pierre Rochette et Clément Suavet (doctorant) du CEREGE UMR6635 CNRS Aix-Marseille Université - Millarca Valenzuela (doctorante) et Diego Morata, Département de Géologie de l'Université de Santiago. 3. Expéditions financées par le programme d'échange CNRS/CONICYT et l' ANR, accompagnées en 2008 par Minoru Uehara (CEREGE - Université de Tohoku, Japon) et Pablo Munayco (CBPF, Rio de Janeiro, Brésil) Source(s): Micrometeorites from the Transantarctic Mountains, Proceedings of the National Academy of Sciences of the USA. 25 novembre 2008, Rochette P., Folco L., Suavet C., van Ginneken M., Gattacceca J., Perchiazzi N., Braucher R., Harvey R. Contact(s): Pierre Rochette, CEREGE [email protected], 04 42 97 15 62 Jérôme Gattacceca, CEREGE [email protected], 04 42 97 15 08 A lire sur le site de l'INSU : http://www.insu.cnrs.fr/terre-solide/origine-evolution-histoire/del-antarctique-au-desert-de-l-atacama-la-quete-de-la-matie