Magazine de la Clinique Générale-Beaulieu n°18 | automne 2015
> Dossier:
ERAS: les patients lui disent merci!
beaulieu.ch
ERAS Society
Un pas de
plus vers l’avenir...
Sommaire
EDITO
Comment permettre à un patient d’aller mieux plus vite
après une intervention chirurgicale lourde? Cette ques-
tion fut soulevée dans les années 1990 par le Prof. Henrik
Kehlet et à laquelle toute une génération de chirurgiens
a répondu dans les années 2000 par un programme bap-
tisé ERAS: Enhanced Recovery after Surgery.
Sanctionné par une certification, ce programme repose
sur l’évidence scientifique et regroupe les meilleures pra-
tiques en matière de nutrition, de chirurgie, de mobilisa-
tion et d’antalgie. Il est donc mis en place avant, pendant
et après l’intervention.
Révolution? Oui et non. Non car il ne fait qu’appliquer
des pratiques déjà connues, oui car il le fait en harmonie
entre les différents intervenants. ERAS est plutôt une
évolution, mais une évolution significative pour le bien-
être du patient qui, du coup, devient acteur de sa propre
guérison, et pas seulement après l’intervention, comme le
laisse entendre l’acronyme ERAS.
En plus d’être certifiée ISO 9001 et ISO 13485, et d’être
membre du Swiss Leading Hospitals, la Clinique Géné-
rale-Beaulieu est, depuis juin 2014, certifiée ERAS. C’est
pour nous un objet de fierté car cette distinction s’inscrit
dans une politique qualité à laquelle nous tenons et
que nous entretenons avec le plus grand sérieux. Si les
normes ISO sont très importantes, le programme ERAS
est essentiel car il touche directement le patient.
Il convient également de souligner l’aspect multidiscipli-
naire du programme, car, pour être une avancée majeure
en faveur du patient, il a également fédéré beaucoup de
monde à la Clinique: les médecins à l’origine du projet,
bien sûr, mais également l’infirmière référente, le per-
sonnel soignant ainsi que nombre de chirurgiens, anes-
thésistes, médecins nutritionnistes qui se sont très vite
ralliés à ce fantastique projet.
Assurer au patient la meilleure prise en charge, la meil-
leure qualité de soins et la plus grande sécurité possibles
fait partie de notre mission. Avec ERAS, nous anticipons
l’évolution de la pratique et faisons un pas de plus vers
l’excellence.
Nous tenons à exprimer notre reconnaissance aux
médecins impliqués dans ce programme, à l’infirmière
référente et à nos collaborateurs qui l’appliquent au
quotidien. Nos remerciements vont également au Conseil
d’administration et au Conseil médical qui ont largement
soutenu ce projet depuis le début.
Ce numéro est aussi l’occasion de faire le portrait de
Krisztina Bagamery, qui nous a récemment rejoints en
qualité de nouvelle Responsable des Affaires Médicales.
Très bonne lecture!
La Direction
Edito p. 2
Une grande idée p. 3
Rencontre p. 6
L’ im pl ém en t at io n p. 9
ERAS en un coup d’œil p. 11
L’ in fir mi èr e r éf é r en t e p. 12
Paroles d’inrmres p. 13
Un patient témoigne p. 15
La nutrition p. 16
L’a n e s t h é s i e p. 18
L’u r ol og ie o pé r a to ir e p. 20
Nouveau site web p. 22
Nouvelle Responsable des Affaires Médicales p. 24
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ERAS: les patients lui disent merci!
Une grande idée née du
bon sens
DOSSIER
On ne saurait évoquer ERAS à la Clinique Générale-Beaulieu sans
parler au Docteur Ihsan Inan, Spécialiste FMH en chirurgie, qui
est à l’origine de son implémentation, contribuant ainsi à l’image
d’avant-garde de la Clinique. Entretien avec un précurseur…
Quel est le but du programme ERAS?
Le but ultime de ce programme est de diminuer le stress engen-
dré par l’acte chirurgical en exploitant tous les moyens connus et
recommandés par la littérature dans une harmonie et un langage
commun aux chirurgiens, anesthésistes, infirmières, physiothéra-
peutes, nutritionnistes et bien entendu aux patients. ERAS défi-
nit le patient comme l’acteur principal de sa propre guérison. Le
sultat est mesuré par différents paramètres, le principal étant la
diminution du taux de complications.
Qu’est-ce qui a motivé l’initiative du programme ERAS à la
Clinique Générale-Beaulieu?
Les principes d’ERAS ne sont pas des secrets: chaque élément du
protocole est prouvé par des recherches cliniques de longue date
et largement publiées dans la littérature médicale.
Il n’est cependant pas évident de changer d’un jour à l’autre les
habitudes, croyances et dogmes de notre pratique quotidienne.
Cela prend beaucoup de temps et dénergie. Un protocole comme
ERAS permet un changement de mentalité assez radical grâce à
un consensus multidisciplinaire. Dans d’autres domaines de la
médecine, ce genre de programme existe, à l’image d’ATLS (Ad-
vanced trauma life support) ou d’ACLS (Advanced cardiovascular
life support), utilisé par les urgentistes.
3
DOSSIER
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Le cas de la Clinique Générale-Beaulieu est assez unique. La plu-
part des centres qui adoptent ce protocole sont des centres uni-
versitaires ou publics travaillant selon une certaine hiérarchie. Le
déploiement de protocoles se fait donc par des ordres de service. A
la Clinique, cela a été le contraire: le mouvement est parti sur une
base de volontariat participatif motivé.
ERAS est-il synonyme de révolution dans les soins?
Pas tout à fait. La plupart des recommandations majeures du pro-
gramme, comme l’utilisation récurrente des techniques minima-
lement invasives et la restriction au minimum des divers drains et
cathéters, s’inscrivent depuis longtemps dans notre pratique.
Ce programme orchestre plutôt une multitude de mini-révolu-
tions sur les plans nutritionnel, métabolique et physiologique qui
agissent en synergie et impactent de manière positive pour pro-
duire un résultat final nettement amélioré.
Cela dit, si l’on prend une photo d’un patient dans son fauteuil en
train de boire sa boisson protéinée après avoir fait un tour de la
salle de réveil à pied, deux heures après une intervention digestive
majeure qui a duré plusieurs heures, oui, on peut parler de révolu-
tion, du moins dans les mentalités!
A une époque pas si lointaine, le même patient ne sortait pas du
lit durant des jours, restait bardé de drains et de cathéters, était en
douleur et sous morphine, il ne buvait pas et restait à jeun pen-
dant des jours.
Donc les changements pour le patient sont considérables. Quels
sont-ils d’une manière générale?
D’abord, ce protocole met le patient au centre, il le responsabilise
et le fait participer au travail d’équipe qui se constitue autour de
lui.
L’information est la pierre angulaire. Dès le premier contact avec
son chirurgien, le patient reçoit des renseignements clairs qui lui
seront répétés par les autres membres de léquipe tout au long de
son parcours chirurgical. Le fil conducteur étant le protocole ERAS,
toute l’équipe partage donc le même langage.
Le patient prend connaissance en détail de son parcours futur, il
est informé non seulement par son chirurgien et l’anesthésiste
qu’il rencontre longtemps à l’avance, mais aussi par l’infirmière
dédiée au programme ERAS qui lui explique comment se préparer
correctement pour le jour de l’intervention, à l’image d’un athlète
qui se prépare pour une compétition. L’infirmière supervisera et
accompagnera ensuite tout le parcours du patient jusquà son
retour à domicile après la chirurgie (ndr: voir aussi l’interview d’Eli-
sabeth Eugster, infirmière référente).
Quels sont les autres piliers du programme ERAS?
Le contrôle des douleurs sans le recours au morphinique, le réta-
blissement de la fonction intestinale pratiquement sans interrup-
tion et la mobilisation hors du lit le plus rapidement possible.
En plus de l’anesthésie générale, nous utilisons des moyens pour
bloquer la transmission des douleurs. Cela nous permet de mini-
miser l’utilisation des morphiniques pendant et après la chirurgie.
Le patient qui ne prend pas de morphine ne ressent pas les effets
secondaires de cette dernière, peut rapidement sortir du lit, mar-
cher, commencer ses exercices respiratoires et surtout boire, man-
ger et rétablir son transit intestinal (ndr: voir aussi l’interview du
Dr Vincent Baeriswyl, anesthésiste).
La mobilisation précoce est l’un des incontournables du pro-
gramme. Elle facilite le retour à la vie normale et diminue incon-
testablement les complications postopératoires.
Vous venez d’évoquer la nutrition et le métabolisme. Qu’est-ce
qui change pour le patient?
Bien que les principes ERAS peuvent s’appliquer à toute prise en
charge chirurgicale, le protocole ERAS est plus particulièrement
destiné à des chirurgies majeures. La plupart du temps, nos pa-
tients sont déjà fatigués, parfois dénutris avec une perte de poids
considérable. Dans ce contexte de faiblesse, lagression supp-
mentaire que constitue une chirurgie majeure peut se révéler
dévastatrice.
S’il ne s’agit pas d’une situation d’urgence, nous préférons pré-
parer nos patients pour leur opération en améliorant leur état
nutritionnel, la plupart du temps avec une immunonutrition et
en optimisant leur métabolisme. Nous leur proposons une mobi-
lisation douce mais régulière. S’ils fument, nous essayons de les
convaincre de cesser immédiatement.
ERAS: les patients lui disent merci!
DOSSIER
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Jusqu’à cemment, les patients jeûnaient dès la veille du jour de
leur intervention. Aujourd’hui, nos patients qui suivent le proto-
cole ERAS mangent léger jusqu’à six heures avant l’intervention et
reçoivent une boisson sucrée spécialement préparée jusqu’à deux
heures avant l’intervention pour aider leurtabolisme à résister
à l’agression chirurgicale.
A moins d’avoir une raison spéciale qui l’interdit, nos patients
recommencent à boire et à manger progressivement s les pre-
mières heures après l’intervention chirurgicale. Cela contribue
au rétablissement de la fonction intestinale et procure l’énergie
nécessaire à la guérison (ndr: voir aussi l’interview du Dr Dimitrios
Samaras, nutritionniste).
Dr Ihsan Inan: portrait.
dans une famille suisse à l’étranger, Ihsan Inan obtient son
diplôme de docteur en médecine à l’Université Ege à Izmir, en
Turq uie . I l co mme nce e n 1 991 s a fo rmat ion d e c hir urgi e gé né -
rale dans le canton de Neuchâtel, formation qu’il terminera à
l’Hôpital Cantonal de Fribourg en 1998 auprès de son mentor,
le Dr Panayotis Petropoulos, considéré comme l’un des pion-
niers mondiaux dans le domaine des techniques chirurgicales
laparoscopiques. Il accompagnera le Dr Petropoulos durant la
naissance et le développement des techniques chirurgicales minimalement invasives, devenues aujourd’hui les standards de la
chirurgie.
A partir de 1998, il poursuit sa carrière de chirurgie en milieu académique, aux Hôpitaux Universitaires de Genève, où il est nommé
Chef de clinique en Chirurgie Viscérale et exercera jusqu’en 2008. Durant cette période, il obtient sa spécialisation FMH en chirurgie
(1999) et sa sous-spécialisation FMH en chirurgie viscérale (2006).
Lors de son parcours universitaire, il poursuit ses travaux de développement des nouvelles technologies minimalement invasives et
robotiques en chirurgie viscérale, particulièrement dans le domaine de la chirurgie colorectale, oeso-gastrique, bilio-pancréatique
et celle des hernies de la paroi abdominale et hiatale complexes. Avec ses collègues, il publie sur ces sujets de nombreux articles
scientifiques dans des journaux prestigieux de chirurgie.
En 2008, il rejoint la Clinique Générale-Beaulieu en qualité de Spécialiste FMH en chirurgie générale et viscérale (digestive), en par-
ticulier dans les techniques laparoscopiques et robotiquement assistées pour la chirurgie des pathologies bénignes et du cancer.
A la Clinique Générale-Beaulieu, il introduit le programme ERAS (Enhanced Recovery After Surgery) qui vise à améliorer la récupéra-
tion des patients après une intervention chirurgicale lourde. Il est en charge de ce projet depuis mars 2013 et réussira, au terme d’un
effort produit avec son équipe, à obtenir une certification officielle pour la Clinique en mars 2014.
Le Dr Inan est membre de nombreuses associations chirurgicales suisses et internationales. Parallèlement à son activiclinique en
milieu privé, il poursuit ses activités de recherche et d’enseignement.
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