Mini-revue
Alcool, métabolisme glucidique et diabète
Jean Louis Schlienger, Alain Pradignac, Stéphane Vinzio
Service de Médecine Interne et Nutrition, Hôpital de Hautepierre, Avenue Molière, 67098 Strasbourg Cedex
Les relations entre la consommation d’alcool et le diabète sont
ambiguës. Les données épidémiologiques indiquent qu’une
consommation modérée et régulière d’alcool est associée à une
diminution de l’incidence du diabète de type 2 et à une
amélioration de la sensibilité à l’insuline.
Chez le diabétique comme dans la population générale, elle est
associée à une réduction du risque cardiovasculaire et n’a
guère d’effets métaboliques délétères lorsque la consommation
se fait au cours d’un repas. Cet effet bénéfique pourrait être
secondaire à une action sur la sensibilité à l’insuline et sur la
répartition adipeuse. Il s’y ajoute les effets bien connus sur le
profil lipidique caractérisé par une élévation du cholestérol HDL
et sur les paramètres de la thrombose et de la fibrinolyse. En
revanche, une consommation d’alcool excessive ou par accès
augmente le risque de diabète, accentue la résistance à l’insu-
line, majore le risque cardiovasculaire et expose à des compli-
cations métaboliques chez le diabétique avec, notamment, un
risque d’hypoglycémie dû à une inhibition de la néoglucoge-
nèse. La consommation d’une boisson alcoolisée en quantité
modérée et sur un mode régulier peut être tolérée chez les sujets
à risque de diabète ou au cours du diabète de type 2.
Mots clés :alcool, diabète, métabolisme glucidique
La consommation de boissons fermentées ou distillées contenant de
l’alcool est un trait caractérisant de nombreuses sociétés à travers le
monde. Elle n’en est pas moins source de débats et de polémiques car
l’alcool est au cœur de plusieurs paradoxes. A la fois aliment énergé-
tique, drogue et toxique, son usage a des conséquences notables sur la santé.
Chacun connaît les effets délétères d’une consommation chronique excessive
sur de nombreux appareils et organes dont le foie, le système nerveux, le tube
digestif et le système cardiovasculaire sans compter les troubles du comporte-
ment aigus ou chroniques. Pourtant, il n’est plus douteux aujourd’hui que sa
consommation régulière et modérée est bénéfique sur la morbimortalité corona-
rienne. La place des boissons alcoolisées en cas de troubles du métabolisme
glucosé ou de diabète est également ambiguë. Il peut aggraver une intolérance
glucosée et dans le diabète avéré être à l’origine de complications métaboliques.
En revanche, une consommation régulière et modérée peut s’avérer bénéfique
puisqu’elle est associée à une diminution de l’incidence du diabète non insulino-
Tirés à part :
J.L. Schlienger
Sang Thrombose Vaisseaux 2008 ;
20, n° 1 : 13-8
STV, vol. 20, n° 1, janvier 2008 13
doi: 10.1684/stv.2008.0233
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dépendant et du syndrome métabolique comme le suggè-
rent plusieurs études épidémiologiques et méta-analyses.
Pour inattendues et contrastées que soient ces données, il
convient d’en tenir compte afin d’en comprendre les méca-
nismes en faisant la part des données épidémiologiques et
expérimentales d’une consommation d’usage et d’une
consommation excessive aiguë ou chronique et du type de
boisson alcoolisée.
Définition d’une consommation modérée
Toute définition est arbitraire puisqu’il n’y a pas de dose
seuil de consommation d’alcool par jour. L’absence de
frontière tranchée entre une consommation acceptable,
voire souhaitable, et une consommation excessive et inac-
ceptable tient à l’existence d’un continuum entre le normal
et le pathologique avec une sensibilité individuelle liée à
des variables mal connues en dehors de l’âge et du sexe.
D’après les données épidémiologiques, la relation entre
alcool et morbidité ou mortalité se fait selon une courbe en J
avec un seuil de 3 verres d’une boisson alcoolisée chez
l’homme et 2 verres chez la femme, pour la branche ascen-
dante du J. La teneur en alcool des verres dévolus aux
différentes boissons étant globalement constante, de l’ordre
de 10 g, la consommation maximale acceptable par jour se
situe à 30 g d’alcool chez les hommes et 20 g chez les
femmes. Il s’agit là d’un consensus d’expert [1].
Effets métaboliques des boissons alcoolisées
sur le métabolisme glucidique
Le pouvoir hyperglycémiant des boissons alcoolisées a été
souvent stipendié et a conduit à l’éviction des boissons
alcoolisées chez le diabétique. En réalité, l’hyperglycémie
induite dépend de la teneur en glucides de la boisson et non
de sa teneur alcoolique. La teneur en glucides du vin rouge
ou blanc ou des alcools forts est insignifiante. La bière
apporte environ 40 g/L de glucides mais son impact sur la
glycémie est modeste lorsqu’elle est consommée au cours
d’un repas.
Il existe peu de données concernant l’index glycémique des
boissons alcoolisées. Vins rouge et blanc sont pratiquement
dépourvus de glucides. Riche en glucides, la bière a un
index glycémique de l’ordre de 70 %. L’alcool atténue
l’hyperglycémie postprandiale en retardant la vidange gas-
trique. Administré en même temps qu’une boisson sucrée,
il réduit la glycémie post-ingestive.
La réduction du coenzyme NAD+ en NADH favorisée par
l’alcool déshydrogénase et l’aldéhyde déshydrogénase en-
traîne une inhibition du cycle tricarboxylique hépatique
avec une mise en circulation excessive d’acétate ainsi
qu’une inhibition de l’oxydation hépatique des acides gras
par bêtaoxydation. Il en résulte un excès de production des
triglycérides et un excès de réduction des pyruvates en
lactates liés à l’excès de NADH. L’augmentation du rapport
NADH/NAD+ freine la néoglucogenèse, élève la lactaté-
mie et stimule la cétogenèse. En fait, l’alcool est un inhibi-
teur puissant de la néoglucogenèse ce qui conduit à une
diminution de l’utilisation des substrats de la néoglucoge-
nèse (lactates, acides aminés glucoformateurs et glycérol)
et parfois à une hyperglycémie chez les sujets normaux et
plus encore chez les diabétiques traités par insuline ou par
insulino-secrétagogues.
Les conséquences de l’alcool sur la tolérance au glucose sont
contrastées et dépendent de la quantité d’alcool ingéré [2]
.
Effets dans le diabète
La consommation de 40 g d’alcool au cours d’un repas
standard chez les sujets diabétiques supprime la réponse
des incrétines intestinales qui favorisent la sécrétion d’insu-
line - GLP1 (glucagon like peptide) et GIP (glucose dépen-
dant insulinotropic peptide). Elle diminue l’élévation post-
prandiale des acides gras mais accroît les triglycérides à la
phase postprandiale tardive du fait d’une diminution de leur
clairance [3]. La consommation de deux verres de vin rouge
lors d’un repas standard n’entraîne pas de modifications
significatives des besoins insuliniques estimés à l’aide d’un
pancréas artificiel [4].Aucune différence de la glycémie, de
l’insulinémie et des concentrations plasmatiques d’acides
gras libres ou de triglycérides n’a été constatée après admi-
nistration de 500 mL de bière avec ou sans alcool au cours
d’un repas. De façon plus inattendue, l’administration d’al-
cool à la dose conséquente de 1 g/kg (apéritif, vin durant le
repas et digestif) n’a pas entraîné de modifications notables
du profil glycémique chez des diabétiques de type 1 ou de
type 2 par rapport à une consommation d’eau minérale [5].
Dans le diabète de type 1, la consommation excessive
d’alcool peut être à l’origine d’un déséquilibre glycémique
du fait d’une hypoglycémie de survenue volontiers retar-
dée. L’ingestion d’environ un litre de bière en soirée en-
traîne une diminution des glycémies avec un plus grand
nombre d’épisodes hypoglycémiques le lendemain. Les
études expérimentales colligées dans une revue systémati-
que des effets de l’alcool sur l’équilibre glycémique four-
nissent des résultats rassurants avec néanmoins un effet
hypoglycémiant retrouvé lorsque l’alcool est administré à
jeun à des sujets traités par sulfonylurée [2].
L’hypoglycémie est la complication métabolique la plus
sévère et la plus fréquente d’une alcoolisation excessive et
peut même survenir chez des sujets non diabétiques en
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situation de fragilité métabolique. L’administration de vin
blanc à la dose de 0,75 g d’alcool/kg à des diabétiques
insulino-dépendants diminue les glycémies matinales et
post-prandiales et favorise la survenue d’hypoglycémies
vers 10 h le matin [6]. L’hypoglycémie induite par l’alcool
est réputée réfractaire à l’administration de glucagon. Elle
peut être méconnue en raison d’une confusion possible
entre les signes d’alerte de l’hypoglycémie et les symptô-
mes de l’alcoolisation excessive. Dans le diabète de type 2,
l’ingestion concomitante d’alcool et de glucides peut être à
l’origine d’une hypoglycémie réactionnelle. La teneur en
glucides de certaines boissons alcoolisées loin d’être com-
pensatrice peut, au contraire, être l’élément facilitant d’une
hypoglycémie réactionnelle.
En revanche, la consommation modérée et régulière d’al-
cool au cours d’un repas ne modifie ni la glycémie ni les
besoins en insuline des sujets diabétiques.
Autres conséquences métaboliques
de l’alcool dans le diabète
L’hypertriglycéridémie alcoolo-induite survient chez des
sujets prédisposés. Composée de VLDL de grande taille
sans perturbation du LDL cholestérol, elle ne contribue
guère à une majoration du risque cardiovasculaire d’autant
qu’elle peut être associée à un taux de HDL augmenté par
l’alcool.
L’acidose lactique, beaucoup plus rare, peut être la consé-
quence d’une inhibition de la néoglucogenèse liée à l’al-
cool et d’un déficit en thiamine lors d’une période d’alcoo-
lisation aiguë. Elle est favorisée par un traitement par
metformine ou par une hépatopathie associée.
L’acidose alcoolique est la conséquence d’une ingestion
massive d’alcool qui interagit avec le métabolisme intermé-
diaire. Elle n’est pas favorisée par le diabète. La constata-
tion d’une glycémie normale permet de distinguer l’acido-
cétose alcoolique de l’acidocétose diabétique.
Consommation d’alcool et risque de diabète
De nombreuses études épidémiologiques concluent à
l’existence d’une relation favorable quelque peu inattendue
entre une consommation modérée d’alcool et l’incidence
du diabète de type 2 selon une courbe en J, suggérant
qu’une consommation excessive a un effet néfaste.
Une telle relation favorable avait été décrite dès 1988 dans
une étude prospective de population [7]. D’autres études de
population ont confirmé cette relation. Une revue systéma-
tique ayant pris en compte 32 études sélectionnées à partir
de 974 références consacrées de près ou de loin à ce sujet
entre 1996 et 2003 a montré que la consommation de une à
trois boissons alcoolisées par jour était associée à une
diminution de l’incidence du diabète de 33 à 56 % et à des
maladies ischémiques du cœur chez les diabétiques de 34 à
55 %. En revanche, une consommation excessive est asso-
ciée à un accroissement de l’incidence du diabète pouvant
atteindre 43 % [8].
Deux méta-analyses ultérieures ont confirmé ces données.
La méta-analyse de Carlson [9] décrit une diminution de
l’incidence du diabète de type 2 de 28 % (RR : 0,72 ;
0,67-0,77), comparable chez les hommes et les femmes.
Dans cette méta-analyse, une consommation importante
n’accroît pas le risque de diabète mais s’avère non protec-
trice. Une autre méta-analyse [10] porte sur 15 études
prospectives dont 10 étaient communes avec la précédente
et rassemble 11 959 cas-incidents de diabète de type 2 chez
369 862 sujets suivis en moyenne pendant 12 ans. Les
consommateurs d’alcool ont une incidence de diabète infé-
rieure à celle des abstinents. Au-delà de 48 g/jour d’alcool,
il n’existe plus d’effet significatif. La diminution du risque
de l’ordre de 30 % apparaît plus nettement chez les femmes
que chez les hommes. Elle n’est pas influencée par l’indice
de corpulence.
Quelques études ont permis de préciser cette relation. Dans
une étude prospective menée chez 8000 hommes, la surve-
nue d’un diabète de type 2 est plus fréquente chez les
abstinents que chez les consommateurs (RR = 1,8) mais il
existe une relation en U entre la quantité d’alcool consom-
mée et l’incidence du diabète, le nadir se situant à hauteur
du 2e quartile de consommation de la population soit 62 à
123 g d’alcool par semaine, correspondant à un à deux
verres/jour [11]. Dans la cohorte des professionnels de
santé, après un recul de 12 ans, la consommation d’au
moins un verre d’une boisson alcoolisée est associée à une
réduction significative du risque de diabète de type 2, le
risque le plus faible étant observé pour une consommation
de5à6verres par semaine (RR : 0,67 ; 0,51-0,89). Cette
relation persiste chez les buveurs occasionnels et chez les
femmes. Dans la cohorte des nurses, le RR est de 0,8 chez
celles qui consomment5à15g/jd’alcool et de 0,6 chez
celles dont la consommation est > 15 g [12]. A l’exception
des spiritueux, toutes les boissons alcooliques semblent
avoir le même effet favorable.
L’effet protecteur est plus apparent chez les sujets à haut
risque de diabète en raison de la présence d’un surpoids ou
d’un syndrome métabolique. Cet effet persiste après ajuste-
ment sur l’insulinémie et le HDL cholestérol. Une étude
finlandaise de paires de jumeaux (n = 11501) menée sur
une période de 20 ans aboutit aux mêmes conclusions chez
les hommes et chez les femmes pour des consommations
quotidiennes respectivement de5à30g/jet5à20g/j. Les
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sujets de poids normal ont un risque de diabète plus élevé
lorsque la consommation est excessive. Une consommation
compulsive ou par accès est associée à un risque de diabète
plus élevé chez les femmes (RR : 2,1 ; 1,0-4,4). L’analyse
par paires de jumeaux ayant une consommation d’alcool
différente montre que le risque de diabète est moindre chez
le jumeau consommateur par rapport au jumeau de la paire
abstinent ou faible consommateur (RR : 0,50 ; 0,2-1,5)
[13].
Syndrome métabolique
Dans l’enquête de population nord américaine NHANES
III, la consommation d’alcool est associée à une moindre
prévalence du syndrome métabolique (SM) que chez les
abstinents (RR : 0,50 ; 0,45-0,71) après ajustement sur le
sexe, l’âge, l’ethnie, le niveau d’éducation, la consomma-
tion de tabac, les revenus, le style alimentaire et l’activité
physique. La protection s’accroît paradoxalement avec le
niveau des consommations qui est corrélé inversement avec
trois des composantes majeures du SM : HDL cholestérol
bas, triglycérides élevés et tour de taille. Les buveurs de vin
et de bière présentent une association favorable avec le
HDL-C, les triglycérides et l’hyperinsulinémie.
D’autres études de population ont suggéré un effet bénéfi-
que de l’alcool en termes de prévention du SM. Une étude
transversale comparant les consommateurs à ceux qui ont
toujours été abstinents met en évidence après une analyse
multivariée, un odds ratio qui diminue avec la consom-
mation de 1,12 à 0,66 pour une consommation de moins de
2,5 g/j d’alcool à 24 g/j. Au-delà de ce seuil, l’OR est de
0,8. L’effet protecteur de l’alcool est plus marqué chez les
femmes que chez les hommes. Cette réduction de préva-
lence du SM est observée quel que soit le type de boissons
alcoolisées [14].
Consommation modérée d’alcool
et risque cardiovasculaire
chez le diabétique de type 2
Le diabète de type 2 est à ce point associé au risque
cardiovasculaire qu’il peut être considéré comme un équi-
valent de maladie cardiovasculaire davantage que comme
un simple facteur de risque. Dans la population générale, de
très nombreuses études épidémiologiques et des méta-
analyses ont validé l’existence d’une relation bénéfique
entre la consommation modérée d’alcool et la morbimorta-
lité cardio et cérébro-vasculaire. Quatre études de cohorte
se sont attachées à préciser le risque cardiovasculaire dans
le diabète selon la consommation d’alcool. La relation est
significativement favorable dans 3 études sur 4 et la relation
persiste après ajustement sur d’autres facteurs de risque.
L’analyse en sous-groupe effectuée dans la cohorte des
médecins démontre un bénéfice comparable chez les sujets
diabétiques et non diabétiques [15]. Dans la cohorte des
professionnels de santé, les hommes présentant un diabète
de type 2 bénéficient d’une consommation d’au moins
2 verres de boissons alcoolisées par jour par rapport aux
abstinents (RR : 0,59). Une réduction comparable du ris-
que cardiovasculaire est notée dans l’étude des Nurses
(RR : 0,48).
Effet des modalités de consommation
et nature des boissons alcooliques
Les quantités d’alcool considérées comme favorables sont
comparables pour la prévention du diabète et celle des
maladies cardiovasculaires. La régularité et la modération
de la consommation sont les clés de la prévention. La
consommation « à la française » est la plus recommandable
alors que la consommation de quantités comparables d’al-
cool en fin de semaine à la scandinave ou à l’anglo-saxonne
est plutôt délétère. L’effet nocif sur le risque cardiovascu-
laire d’une consommation par accès est établi dans plu-
sieurs études de cohorte ; il est probable pour la prévention
du diabète.
Un effet spécifique de la nature de la boisson alcoolisée a
été recherché bien qu’il existe de nombreux arguments en
faveur d’un effet intrinsèque de l’alcool. Un effet plus
protecteur du vin a néanmoins été mis en exergue pour la
morbimortalité cardiovasculaire dans certaines études mais
il semble que ce soit moins par l’intermédiaire des compo-
sants spécifiques du vin (polyphénols) que par le style de
vie qui caractérise les buveurs de vin rouge dans les popula-
tions majoritairement consommatrices de bière qui consti-
tuent la plupart des études. Dans le domaine du diabète, la
relation paraît liée à la consommation d’alcool et non à la
nature de la boisson. Dans certaines études, un moindre
risque de diabète est constaté pour la bière et le vin par
rapport aux spiritueux alors que dans l’étude des profes-
sionnels de santé, il n’est observé aucun effet de la nature
des boissons alcoolisées sur le risque de diabète [1].
L’analyse de l’impact du style de vie sur le risque de
diabète confirme le rôle favorable de la consommation
d’alcool. La mise au point d’un score prédictif à partir de la
cohorte EPIC, validé auprès d’autres cohortes, intègre le
paramètre de consommation modérée d’alcool et lui affecte
une pondération de – 20 points sur un total allant de 300 à
700 points alors que, par exemple, la consommation de pain
complet (50 g/jour) ou une heure d’activité physique heb-
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domadaire ne comptent respectivement que pour–9et
– 2 points dans ce score [16].
Mécanismes
Diabète de type 2
Les mécanismes responsables d’un effet positif des bois-
sons alcoolisées sur la prévention du risque cardiovascu-
laire et du diabète de type 2 sont multiples et cohérents
quoique spéculatifs dans la mesure où il n’existe pas d’étu-
des d’intervention permettant d’établir une relation de cau-
salité formelle.
L’amélioration de la sensibilité à l’insuline est l’explication
retenue. Dans l’étude DESIR, il existe une relation inverse
entre la consommation d’alcool et l’insulinémie basale
après ajustement sur plusieurs facteurs de confusion [17].
Dans l’étude IRAS, c’est une relation en forme de courbe
en U entre la consommation d’alcool et l’insulinosensibi-
lité qui est décrite [18]. Les concentrations d’insuline ou de
peptide C sont plus basses chez des consommateurs régu-
liers et modérés que chez les abstinents et il existe une
relation en J entre la consommation d’alcool et l’insuliné-
mie à jeun ou un index d’insulinorésistance. En revanche,
une consommation excessive perturbe la sensibilité à l’in-
suline [19]. Expérimentalement, l’ingestion de 40 g d’al-
cool au cours d’une épreuve d’hyperglycémie provoquée
améliore un index de sensibilité à l’insuline sans modifier
l’insulinosécrétion. La réalisation d’un clamp hyperinsuli-
nique euglycémique confirme l’amélioration de la consom-
mation périphérique du glucose chez les consommateurs
par rapport aux abstinents [4].
La relation favorable entre la consommation d’alcool et la
sensibilité à l’insuline pourrait être médiée en partie par
l’impact de l’alcool sur l’obésité abdominale. En effet, par
rapport aux abstinents, les consommateurs réguliers pré-
sentent une diminution de la graisse totale et abdominale
(p= 0,03). Evaluée chez des paires de jumeaux, cette rela-
tion apparaît indépendante de toute interaction génétique
ou environnementale et est particulièrement significative
chez les sujets ayant une prédisposition génétique à l’obé-
sité abdominale. La prévention du diabète de type 2 impu-
tée à l’alcool pourrait donc s’exercer par le biais d’une
action sur l’obésité abdominale ou plus généralement sur la
répartition adipeuse [20].
Risque cardiovasculaire
Le diabète de type 2 étant souvent considéré comme l’équi-
valent d’une maladie cardiovasculaire, il est intéressant de
rappeler qu’une consommation modérée d’alcool agit favo-
rablement sur plusieurs composantes du risque de macroan-
giopathie et de dysfonction endothéliale.
La diminution du risque cardiovasculaire est principale-
ment attribuée à une augmentation franche et constante de
la concentration du cholestérol-HDL. Celle-ci, due à un
effet alcool, n’expliquerait cependant que 50 % de l’effet
protecteur. D’autres facteurs protecteurs au premier rang
desquels figurent les facteurs de thrombogenèse sont à
considérer. Une consommation modérée et régulière est
associée à un profil favorable de la coagulation et de la
fibrinolyse : diminution des taux de fibrinogène, du facteur
VII et du facteur de Von Willebrand, diminution de la
viscosité sanguine et moindre activité plaquettaire. A l’in-
verse, une consommation excessive ou compulsive entraîne
d’une part une diminution de la capacité fibrinolytique par
élévation relative du PAI 1 et de l’antigène TPA par rapport
à l’activité TPA et d’autre part, un rebond d’hyperagrégabi-
lité. Ce mode de consommation favorise de plus un état
procoagulant susceptible d’expliquer l’augmentation de
l’incidence des accidents vasculaires cérébraux et des in-
farctus du myocarde chez les buveurs excessifs ou par
accès. Par ailleurs, l’amélioration de l’insulino-sensibilité
est également un élément positif intervenant sur l’endothé-
lium vasculaire [21].
Une méta-analyse portant sur les études expérimentales
ayant évalué les effets d’une ingestion standardisée d’al-
cool sur les paramètres lipidiques et de l’hémostase a conclu
que la consommation de 30 g/jour d’alcool, sous quelque
forme que ce soit, était associée à une diminution du risque
cardiovasculaire de 24,7 % principalement médiée par
l’augmentation du cholestérol HDL et la diminution du
fibrinogène plasmatique [22].
Effet antioxydant
La consommation de vin rouge, riche en polyphénols, pour-
rait réduire le risque cardiovasculaire en améliorant le stress
oxydatif chez le diabétique. Elle améliore le statut antioxy-
dant qui est particulièrement altéré dans cette maladie ainsi
qu’en témoigne l’augmentation de la production des espè-
ces réactives de l’oxygène susceptible d’altérer les biomo-
lécules, les membranes et l’endothélium vasculaire.
Conclusion
Les effets de la consommation d’alcool sur le métabolisme
glucidique et le diabète sont complexes et dépendent des
modalités de consommation plus que de la nature des
boissons ingérées. Une consommation excessive est res-
ponsable d’une élévation de la glycémie et d’un contrôle
médiocre du diabète avec de surcroît le risque d’induire une
hypoglycémie paradoxale. Une consommation modérée et
régulière peut au contraire être considérée comme un fac-
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