La période de guerre Rapport Final - 39
militaire dut proclamer elle-même toutes les mesures antisémites par le
biais d’ordonnances allemandes.
L’administration militaire continua à insister auprès de l’OKH pour
que le ‘désenjuivement’ ne soit pas réalisé par des ordonnances générales,
mais bien par l’intervention d’administrateurs-commissaires qui auraient
été responsables de la liquidation des patrimoines juifs. L’OKH approuva
cette méthode de travail.12 Cependant, pas moins de 18 ordonnances furent
décrétées entre le 23 octobre 1940 et le 21 septembre 1942; elles entraînèrent
l’identification et l’isolement de la population juive de Belgique.13
La première ordonnance anti-juive du 28 octobre 1940 rendait obli-
gatoires l’inscription des Juifs au registre des Juifs et la déclaration des en-
treprises juives auprès de l’Office de déclaration de la propriété juive. Ce
service faisait partie du Groupe 12 (du département de l’Economie) de
l’administration militaire. L’administration belge fut chargée d’ouvrir un
registre des Juifs dans chaque commune. En outre, la création de
l’Association des Juifs en Belgique, le 25 novembre 1941, aida à mieux cer-
ner la Communauté juive.14 L’occupant enregistra finalement de 55.671 ins-
criptions identifiant la population juive de Belgique.
La deuxième ordonnance (28 octobre 1940) disposait que les Juifs
devaient être écartés des postes de la Fonction publique. Le 31 mai 1941,
l’administration militaire publia deux ordonnances complémentaires. Il
s’agissait d’un amendement à l’ordonnance du 28 octobre 1940 qui, sur le
fond, correspondait à l’ordonnance publiée par l’OKH le 16 novem-
bre 1940.15 Ces ordonnances constituèrent le point d’orgue des mesures éco-
nomiques prises à l’encontre de la population juive : elles imposaient la dé-
claration des entreprises et biens immobiliers juifs à l’Office de déclaration
de la propriété juive. Les Juifs et les entreprises juives durent déposer leurs
titres et leurs liquidités auprès de banques de devises. Une deuxième phase
vit le démantèlement forcé ou le placement sous gestion allemande des en-
treprises juives ainsi que la vente forcée ou confiscation des diamants. En-
suite, les comptes juifs furent centralisés auprès de la Société française de
Banque et de Dépôts, une institution financière sous le contrôle de
l’occupant. Cette banque recueillit également le produit de la vente des
fonds de commerce, propriétés immobilières et autres biens juifs.
Au début du mois de janvier 1942, Hitler ordonna la confiscation des
meubles appartenant aux Juifs déportés (“Möbelaktion”). La mesure visant la
saisie du mobilier entra en vigueur le 25 mars 1942. Les Feldkommandanturen
(FK) constatèrent que les Juifs qui devaient se faire inscrire pour la déporta-
tion à partir de l’été 1942, commençaient à vendre les biens de leur ménage.
Pour les en empêcher, l’administration militaire publia le 21 septembre 1942
une ordonnance interdisant la vente du mobilier juif. Afin d’éviter au
maximum d’éveiller les soupçons, Reeder ne promulgua cette décision
qu’après les grandes razzias sur les Juifs.16
Cependant, les ordonnances antisémites ne s’appliquaient pas à tous
les Juifs vivant en Belgique sous l’occupation. L’administration militaire
opéra une distinction entre la déclaration des biens ‘ennemis’ et celle des