Anthropologie chrétienne Ouvrages du même auteur Une alternative sociologique, Aristote –Marx, Éditions universitaires Fribourg (1978), 6e éd. 2011 L’Harmattan. La Grève générale en 1905, le mythe français et la réalité russe, Éditions universitaires, Paris (1978), 2e éd.1989. Idées sociales, Éditions universitaires Fribourg, 1982. La politique sociale dans les sociétés industrielles, 1800 à nos jours (1979), Economica, 1984. La pensée sociale de l’Église catholique de Léon XIII à nos jours (1980), Éditions universitaires Fribourg 1984, 3e éd. augmentée, 2011, Téqui. Histoire et sociologie du syndicalisme (1981), Masson 1985. Visages de l’Église, (Collectif), Éditions universitaires Fribourg, 1989. Introduction à la sociologie politique, Masson, 1985. Pour une civilisation de l’amour, Fayard, 1990. Sociologie de l’Église catholique, Éditions universitaires Fribourg, 1993. Le Temps de la fin des temps, FX de Guibert, 1994. L’eschatologie, Que sais-je ? PUF, 1998. Jésus mon Frère, Beauchesne, 1998. Prophétie et Jubilé, Téqui, 1998. L’avenir d’un passé, Rome, saint Pétersbourg, Moscou, Téqui, 2001. L’Église Corps du Christ dans l’histoire, FX de Guibert, 2005. La loi naturelle, la politique et la religion, Parole et silence, 2004. Phénoménologie de la religion, DDB, 2007. Quand l’histoire a un sens, Salvator, 2009. L’enseignement social de l’Église (avec JP Audoyer), Salvator, 2010. Les Russes et Rome, FX de Guibert, 2010. Patrick de Laubier Anthropologie chrétienne ,OOXVWUDWLRQGHFRXYHUWXUHOH&KULVWDYHFVHVGLVFLSOHVDXWHXULQFRQQX © L'Harmattan, 2012 5-7, rue de l'École-Polytechnique ; 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com [email protected] [email protected] ISBN : 978-2-296-99313-6 EAN : 9782296993136 Sommaire I - Connaissance et vérité ................................................... 9 II - La hiérarchie des savoirs et les causes ....................... 13 III - La Personne humaine................................................ 17 IV - La loi naturelle.......................................................... 21 V - La vertu de prudence ................................................. 31 VI - Philosophie de la religion et philosophie d’inspiration chrétienne chez Étienne Gilson et Jacques Maritain ............................................................................ 41 VII - Lumière théologique et théologie de l’histoire ...... 59 VIII - La mystique chrétienne .......................................... 93 IX - Les Fins dernières ................................................... 101 Aujourd’hui la philosophie a perdu non seulement son vocabulaire mais aussi sa finalité. Les Grecs avaient donné au monde la distinction entre Raison et croyances, le christianisme a fondé une philosophie qui, en lien avec la théologie, a permis à celle-ci de devenir une science qui de son côté conforte et éclaire la raison. Deux mille ans de christianisme ont donné lieu à une philosophie d’inspiration chrétienne permettant le développement d’une anthropologie fondée sur la personne humaine. Il faut donc commencer par établir ce qu’est la personne humaine et ses liens avec la Personne du Christ. Philosophie et théologie sont radicalement distinguées mais non séparées. On l’a noté, la philosophie grecque, antérieure au christianisme, a joué un rôle capital dans le développement de la philosophie d’inspiration chrétienne et, parmi ces philosophes, Aristote se présente comme celui qui s’est rapproché le plus de la vérité de l’homme sans pour autant éviter des erreurs fondamentales sur la personne humaine et sa liberté. Sa métaphysique va dans le bon sens, mais il faudra la théologie pour couronner sa philosophie première avec le primat de l’être, pas seulement dans les choses (ens), mais aussi comme existence (esse). Deux questions préalables doivent être évoquées : d’abord la théorie de la connaissance (gnoséologie) et ensuite la théorie des sciences (épistémologie). 7 I Connaissance et vérité Le réalisme des Grecs (Aristote) a été contredit par Descartes, initiateur de l’« idéalisme » (idée des choses) dont la formule célèbre dit bien ce qu’elle veut dire : Je pense, donc je suis ; tandis que le réalisme part du monde existant pour le connaître, puis s’interroge sur celui qui pense : Le monde existe, je le pense, ou plutôt j’apprends à le connaître. Ce qui est essentiel ici c’est l’être, qui existe, toujours menacé d’être remplacé par une idée (idéalisme) exprimée par des paroles. Le philosophe idéaliste pense les choses tandis que le philosophe réaliste les connaît (Gilson). La vérité, c'est-à-dire l’adéquation de la chose avec la connaissance que l’on en a, est possible. Notre esprit est fait pour la vérité et perçoit l’essence des choses, non pas de manière exhaustive mais pour l’essentiel. Les choses sensibles, que nos sens captent, passent par un processus admirable de dématérialisation qui les fait connaître à l’état intentionnel dans l’esprit au sens large. Cet état intentionnel permet de connaître les choses et de les penser par concepts. La théorie thomiste de la connaissance utilise le terme species (espèce) ou similitudo pour désigner le fait de la connaissance d’une chose, sa quiddité, telle qu’elle est dans son essence, pour la pensée qui connaît : Toute l’objectivité de la connaissance humaine tient en fin de compte à ce fait que ce n’est pas un intermédiaire surajouté, ou un substitut distinct qui s’introduit dans notre pensée à la place de la chose, mais bien l’espèce sensible de la chose même 9 (similitudo) qui, rendue intelligible par l’intellect agent, se trouve être devenue la forme de notre intellect possible (…) L’espèce (species) n’est donc pas ce que la pensée connaît de la chose, mais ce par quoi elle la connaît, et nul être intermédiaire ne s’interpose, dans l’acte de connaissance, entre la pensée et son objet…1 Le succès de l’idéalisme philosophique s’explique par le sentiment qu’on a de pouvoir contrôler, voire de créer un monde par la pensée au lieu d’être contraint de revenir constamment à l’être des choses. Les mathématiques qui travaillent avec des êtres de raison, conventionnels, sont pour Descartes l’expression par excellence de la vérité scientifique, celle qui l’intéressait au premier chef puisqu’il a préféré la science à la sagesse : la pensée humaine apparaîtra comme une sorte de démiurge fabriquant le monde connaissable avec ses concepts ; et ce n’est pas la réalité qui demandera à la science d’être vraie, c’est la science qui demandera à la réalité d’être scientifique...2. On pourra alors parler d’une adéquation de la chose et de l’intellect, c’est-à-dire de la vérité. L’idéalisme philosophique part de la pensée et non de la chose dont l’intellect agent saisit l’essence par la similitude ou species (et non par une image). Notre intelligence est faite pour l’être mais comme nous procédons par abstraction à partir des choses concrètes nous sommes perpétuellement menacés de perdre le contact avec l’être et de le remplacer par nos idées qui ont besoin du langage source lui aussi d’erreurs. 1 Étienne Gilson, Le Thomisme, p.286-7. Ce n’est pas un tableau ou une image de la chose que l’intellect agent présente à l’intellect passif, qui constituent tous les deux une même faculté cognitive naturelle, mais une lumière purement intelligible qui s’exprimera par des concepts, des idées, des notions. 2 Jacques Maritain, Le songe de Descartes, O.C., vol V, p.49. 10 La meilleure preuve de la difficulté rencontrée pour trouver la vérité est donnée par l’histoire de la philosophie moderne en Europe. On a voulu séparer la métaphysique de la théologie puis abandonner la métaphysique au nom de la science. Comme la personne humaine est une réalité métaphysique et non une notion morale ni une chose matérielle, la personne humaine est devenue inintelligible et ceci d’autant plus que les sciences biologiques apportaient un grand nombre d’informations sur le corps humain et que les savoirs psychiques multipliaient les découvertes. Cette personne humaine on peut tenter de la représenter à l’aide d’un schéma situant ses différentes facultés : ÂME LIBERTÉ (lieu de l’amour possible) Mémoire esprit/intelligence/raison volonté (conscience) Intellect agent (et passif) Imagination Appétits Irascible concupiscible lutte jouit Connaissance par dématérialisation des choses sensibles reçues à l’état intentionnel dans l’esprit grâce à la lumière de l’intellect agent qui capte l’intelligibilité (essences) des choses. Sens commun (Synthétique des cinq sens) Cinq sens 12345 Choses matérielles XXXXXXX 11 Imagination, mémoire, entendement, volonté, raison sont les facultés de l’âme qui ne font qu’un avec elle. L’imagination représente les choses ou objet que la mémoire recueille et que l’entendement examine et présente à la volonté qui a pour lumière la raison. La volonté qui est la reine des facultés doit agir selon la raison sous le contrôle de la conscience qui est la voix de Dieu. L’esprit est la partie la plus subtile et la plus spirituelle de l’imagination. C’est le souffle qui met en mouvement toutes les autres facultés de l’âme. Il se transporte partout et est toujours en mouvement. L’esprit tire sa force de Dieu, mais peut l’augmenter par des connaissances acquises par l’étude et l’application. Le démon peut intervenir par des idées et des pensées qui contredisent la conscience. Toutes les facultés prêtent leur concours à l’esprit qui leur fait part de ce qu’il a acquis. La volonté est plus ou moins maîtresse de l’esprit qui siège dans la tête par les idées et dans le cœur par les pensées. Lorsqu’une idée est formée dans l’esprit il la présente à la mémoire qui la communique à l’entendement. Celui-ci consulte la raison qui juge et présente son jugement à la volonté qui consulte la conscience et la raison. 12 II La hiérarchie des savoirs et les causes La théorie des sciences commence par un tableau des différents savoirs classés selon leur universalité et en distinguant les activités purement immanentes et les activités transitives. Au plus haut degré d’abstraction : métaphysique (être en tant qu’être), mathématique (être de raison), philosophie de la nature (être sensible et mobile). Pour la pratique il faut distinguer l’agir ou praxis (éthico-social) et le faire (technique). Les sciences sociales, en réalité quasi-sciences, sont conditionnées par la contingence et non par la nécessité (du fait de la nature et de la liberté des acteurs). L’art et la production relèvent de critères d’adéquation différents de types émotionnel pour l’art et technique pour la production. La politique idéalement dirigée par la vertu de prudence peut aussi devenir une simple habileté dont les fins justifient les moyens. De nombreux savoirs se situent entre les plus hauts (métaphysique) et les plus concrets (technique). Par exemple la physique appliquée ou le droit. Le tableau d’inspiration aristotélicienne ci-DSUqV est donc organisé selon le critère de l’universalité ; Auguste Comte établit le sien en fonction du degré de complexité et Marx renverse celui d’Aristote en fonction d’une hiérarchie des valeurs inverse de la tradition classique qui est la suivante : 13 Croyances Culture Politique Économie Technique Dans le tableau classique, les savoirs les plus universels se subordonnent les savoirs qui le sont moins, par exemple, les mathématiques par rapport à la physique appliquée. Le physicien doit faire confiance au mathématicien en utilisant ses calculs. On notera aussi l’importante distinction entre la praxis et ce qu’Aristote appelle la poiésis qui équivaut à l’art et la technique (et non à la poésie). La praxis implique une dimension éthique qui n’est qu’indirecte avec la technique et l’art. La connaissance des causes est essentielle pour l’utilisation des savoirs, rappelons les quatre causes principales : Efficiente, formelle, matérielle et finale, auxquelles on peut ajouter la cause exemplaire. Un artiste, cause efficiente, peut sculpter une statue d’un héros à cheval, cause formelle, en utilisant la pierre, cause matérielle, pour honorer un grand homme, cause finale. Il peut s’inspirer de récits épiques, cause exemplaire. Les causes formelle et finale sont les plus métaphysiques, mais toutes les causes peuvent être évoquées pour une œuvre intellectuelle ou matérielle. Les différents savoirs peuvent être rangés sous des causes appropriées, c’est ainsi qu’en politique la cause efficiente caractérise l’État, la cause formelle le type de régime politique, la cause matérielle les ressources d’une nation et la cause finale le Bien commun d’une société. 14 Le positivisme privilégie, parfois de manière exclusive, le comment des choses, tandis que le pourquoi insiste sur les finalités notamment sous leur aspect éthique. Tableau épistémologique Activités de connaissance Activité immanente (Intérieure) Activité transitive (Vers l’extérieur) T Métaphysique H Mathématique É Philosophie de la nature O R I E P R Éthico-sociale A Morale T I Q U Technique Logique E Linguistique Rhétorique PRAXIS POESIS 15 Néant Sociologie Politique Économie Arts Production III La Personne humaine La définition de la personne proposée par Boèce (455-626) : la substance individuelle d’un être raisonnable qui existe, est métaphysique alors que les anciens Grecs, notamment les stoïciens, se bornaient à une réflexion morale sur la personne. La personne humaine n’est pas, selon saint Thomas, une notion morale, mais une réalité métaphysique, c’est l’existence actuelle par soi d’une substance composée d’une forme spirituelle, l’âme, et d’une matière corporelle, le corps. L’agir de la personne n’est qu’une conséquence et la liberté n’est qu’une propriété de cette existence par soi qui dépend de l’ÊTRE par excellence, Dieu, dont l’essence est son existence elle-même. Au Moyen Âge la philosophie de la personne est surtout traitée dans les questions consacrées à la théologie de la Trinité (Gilson), mais le récit de la Genèse indique que l’homme est créé à l’image et à la ressemblance de Dieu et devient ainsi ce qu’il y a de plus parfait dans la nature3. Cette ressemblance implique la liberté qui fait partie de l’essence divine et qui est participée par la créature. Selon saint Thomas c’est la matière qui individualise la personne, mais elle n’est qu’une condition préalable pour la forme, c'est-à-dire l’âme qui fait exister la personne individuelle avec ses particularités concrètes uniques. On peut s’étonner de la rareté de la notion de personne dans les ouvrages médiévaux traitant de l’éthique. Pourtant le 3 Saint Thomas, Somme théologique, I,29,3, Resp. 17 personnalisme est partout et prend avec la personne du Christ la place centrale dans l’anthropologie chrétienne. Les Grecs ont parlé de la nature humaine, mais n’ont pas eu connaissance du mystère de sa création à l’image et à la ressemblance de Dieu. Pour eux l’homme est un animal raisonnable, rien de plus. Or la personne humaine est bien davantage. Il ne suffit pas de dire que l’homme est une âme qui informe un corps, ce qui n’est qu’une abstraction, mais que la personne humaine est une réalité métaphysique, une nature humaine individuée par le corps et qui existe de manière absolument unique. L’âme, masculine ou féminine, créée par Dieu informe le corps qui individualise la personne. Le savoir métaphysique porte sur l’être, sur ce qui existe et la seule existence d’une chose manifeste celle de Dieu. Le mal lui-même, qui est une privation, prouve l’existence de Dieu qui est l’Être pur. L’esprit humain connaît par les sens et son esprit dématérialise ce que les sens indiquent pour saisir l’essence des choses matérielles. Les substances des choses ont une essence distincte de leur existence, seul Dieu a pour essence son existence et c’est pour cela, à cause de son infinité, que nous ne pouvons pas le connaître par la seule raison, mais seulement savoir qu’Il existe. Notre esprit est très limité du fait de l’origine matérielle de ses sources, mais il saisit l’universel des choses et a la liberté, ce qui le rend capable, par la grâce, de croire et d’aimer Dieu4 . La nature humaine, c’est-à-dire une âme qui informe un corps, est ce par quoi quelqu’un possède l’existence, tandis que la personne humaine proprement dite est cela même qui possède l’existence. La personne humaine est donc davantage qu’une nature humaine individualisée par son corps, c’est un être qui existe par soi. Il ne suffit pas de dire 4 Cf. Aimé Forest, La structure métaphysique du concret selon Saint Thomas, Vrin, 1956. 18 de quelqu’un qu’il a une âme et un corps, mais il faut préciser qu’il s’agit d’une âme et d’un corps déterminés avec leurs particularités. C’est le fait d’exister qui fait que l’âme et le corps constituent un tout unique avec toutes ses particularités et un tout ouvert sur l’universel en raison de la spiritualité de l’âme qui doit pourtant utiliser les sens du corps pour connaître5. Le Christ a une nature humaine, mais n’est pas une personne humaine ; Il est une personne divine, dite composée, en tant qu’une seule réalité subsiste en deux (natures) (saint Thomas, III, qu2.a.4)6. L’unité de la personnalité du Christ se réalise dans son être divin, une des trois personnes de la Trinité, et non par une nature humaine recevant l’existence comme les autres humains. La personne du Christ subsiste en deux natures. Aussi, bien qu’il y ait un seul subsistant, le mode de subsister est double. La personne (du Christ) est donc divine7. 5 Voir l’excellente synthèse de Joseph Rassam, La métaphysique de Saint Thomas, PUF, 1968, p. 88 et s. 6 Ajoutons ici l’admirable doctrine de Maxime le Confesseur : Qu’y at-il de plus admirable que, étant Dieu par nature et acceptant de se faire homme par nature, Il n’ait passé les bornes d’aucune de ces natures ? Dieu tout entier Il demeure, tout en étant homme tout entier ; être Dieu ne l’empêche pas de se faire homme ; ni le fait d’être homme ne diminuait celui d’être Dieu ; Il reste tout entier un et le même en ces deux (natures) ; Il est véritablement, naturellement en toutes deux ; la différence essentielle des parties ne le divise pas parce qu’elles ne se confondent pas, et la fusion des natures en l’extrême unicité de l’hypostase ne le détourne pas vers la nature inférieure ni en la chute vers le non être (…) Il s’est uni effectivement, proprement, véritablement à la nature humaine par hypostase, sans changement, intégralement, sans diminution ni division, en la gardant intacte par le verbe et la limite de son essence. Saint Maxime le Confesseur, Ambigua, Les Éditions de l’Ancre, 1994, p. 303. 7 Par ailleurs les âmes, saintes ou non, qui sont séparées de leur corps par la mort, ne sont plus des personnes, elles le redeviendront à la résurrection des morts, car une personne humaine c’est l’unité d’une âme informant un corps. 19 Ce mystère de la personne humaine est illuminé par la christologie. Vrai Dieu et vrai homme, le Christ a deux natures, humaine et divine, mais Il n’est qu’une Personne, une personne divine, une des Trois de la sainte Trinité. Il n’y a pas chez lui de personne humaine (c’est l’erreur de Nestorius)8. La nature humaine du Christ est parfaite et Il est aussi Dieu : Il est l’image du Dieu invisible, c’est en Lui que tout a été créé (…) par Lui et pour Lui (…) Il est aussi la Tête du Corps c'est-à-dire de l’Église (…) Dieu a voulu que dans le Christ toute chose ait son accomplissement total (…) (Col 1, 15). La personne humaine est ainsi appelée à ne faire qu’une avec l’humanité du Christ qui est une avec sa divinité. C’est la divinisation, dessein éternel de Dieu, par l’Incarnation du Fils unique. Sa réalisation exige le libre accord de chaque personne humaine qui pendant le court espace d’une vie humaine s’associe ou fait obstacle au plan de Dieu. L’Apocalypse décrit cette épopée qui est merveilleuse pour les uns, tragique pour les autres : trois cités, Jérusalem, Babylone et la cité humaine qui se partage à chaque instant entre les deux autres. L’histoire connaît des moments de lumière et des moments de ténèbres, et la croissance des deux est concomitante jusqu’à la fin, c’est-à-dire le retour du Christ et les Noces de l’Agneau. 8 Il y a deux volontés, divine et humaine, mais un seul Moi qui parle tantôt selon sa nature humaine tantôt selon sa nature divine, mais dans tous les cas, Il est Dieu. Dans saint Jean, Jésus évoque alternativement ce qu’Il a écouté chez son Père (comme Homme) et ce qu’Il a vu chez son Père (comme Dieu). Après avoir déclaré qu’en le voyant on voit son Père, puisqu’Il est Dieu comme Lui, Il déclare que son Père est plus grand que Lui (en tant qu’Homme). 20