
 
A) PETITE HISTOIRE DE L’OPÉRA ALLEMAND AU 19
E
 SIÈCLE 
 
a) Au 18
e
 siècle, le Singspiel 
 
L’Europe du 18
e
 siècle est dominée par l’opéra italien.  
En pays germaniques, l’opéra italien cohabite cependant avec un 
genre populaire chanté en allemand : le Singspiel. Le Singspiel alterne 
passages parlés (« spielen ») et chantés (« singen »), et se constitue 
dans un élan nationaliste, contre l’opéra italien : 
 
[Le  Singspiel]  est  né  du  désir  de  s’émanciper  de  l’italianisme 
culturel et de créer un opéra authentiquement national, un genre 
dans  lequel  les  scènes  d’action  seraient  parlées,  au  lieu  d’être 
chantées  en  récitatif.  […]  Mozart  va  révéler  toutes  les 
potentialités et toute la richesse de ce type d’œuvres.
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En 1791, Mozart compose pour le Theater auf der Wieden, situé 
dans un faubourg de Vienne, La Flûte  enchantée, l’un des Singspiels 
les  plus  aboutis,  et  sans  doute  le  plus  célèbre  de  l’histoire  de  la 
musique. 
Au  début  du  19
e
  siècle,  les  compositeurs  ne  se  placent  plus 
seulement dans le sillage de l’opéra italien mais aussi dans celui du 
grand opéra français. Des compositeurs allemands tentent toutefois 
d’échapper à cette alternative. 
En  1814,  Beethoven  marque  une  première  rupture  avec  son 
opéra Fidelio : il  abandonne l’esprit d’accompagnement à l’italienne 
de l’orchestre et confère à son Singspiel un aspect symphonique. 
                     
1
 Timothée  PICARD  dans  Tout  Mozart  (sous  la  direction  de  Bertrand  Dermoncourt, 
Robert Laffont, 2006 (Bouquins) 
Au même moment, Carl Maria von Weber fait du Singspiel une 
manifestation identitaire et crée l’opéra romantique allemand. 
 
b) Weber, créateur de l’opéra allemand 
 
Dans l’histoire de la musique, Carl Maria von Weber (1786-1826) est 
considéré comme le créateur de l’opéra allemand. Son œuvre maîtresse, 
Le Freischütz, est donnée pour la première fois à Berlin le 18 juin 1821 et 
remporte  un  immense  succès.  Elle  incarne  les  aspirations  nationales 
d’un peuple en mal d’identité. 
Au  Saint-Empire  romain  germanique,  regroupement  politique  des 
terres  d'Europe  occidentale  et  centrale  qui  se  voulait  l’héritier  de 
l’Empire d’Occident des Carolingiens disparu au 10
e
 siècle et de l’Empire 
romain  de  l’Antiquité,  succède  la  Confédération  du  Rhin  imaginée  par 
Napoléon 1
er
 et constituée de seize États : 
 
En 1806, un mois après la création de la Confédération du Rhin 
placée  sous  le  protectorat  de  Napoléon,  l’Empire  millénaire 
d’Allemagne [le Saint-Empire romain germanique] s’effondrait. 
La  ruine  de  ce  vieil  édifice  allait  alors  dégager  une Allemagne 
intemporelle :  une  « germanité »  que  philosophes  et  poètes 
s’efforcèrent de définir. 
 
En 1815, l’Empire déchu, les vainqueurs de Napoléon redessinent la 
carte  de  l’Europe  et  redonnent  aux  pays  leurs  frontières  d’avant  la 
Révolution  française.  C’est  dans  ce  contexte  qu’est  composé  Le 
Freischütz. 
Ardent défenseur du concept romantique d’union des arts, Weber 
envisage ses opéras, en réaction à l’esthétique italienne, comme « une