Place du diagnostic biologique de l’herpès
virose B (cehv1) chez le macaque dans la
gestion du risque de transmission à
l’homme
E. COUTROT1, M. BLANCHER-SARDOU2, B. MARCHOU3, P-A. APOIL1, J. DUCOS DE LAHITTE4, A. BLANCHER1*
1Laboratoire d’Immunogénétique Moléculaire, Faculté de Médecine de Rangueil, Bâtiment A2, 133 Route de Narbonne, 31062, Toulouse cedex 4, FRANCE.
2Laboratoire d’analyse médicale, 16 Boulevard de Strasbourg, 31000, Toulouse, FRANCE
3Service des Maladies Infectieuses, CHU de Toulouse Hôpital Purpan, Place du Docteur Baylac, TSA 40031, 31059 Toulouse cedex 9, FRANCE
4Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse, 23, Chemin des Capelles, 31076 Toulouse cedex, FRANCE
Auteur char
gé de la corr
espondance : E-mail : blancher
[email protected] - Tél : 05 61 32 34 32
RÉSUMÉ
Le virus de l’herpès virose B du macaque (Cercopithecine Herpes Virus 1,
CeHV1) du genre Simplexvirus (famille des Herpesviridae et sous-famille
Alphaherpesvirinae), endémique chez tous les macaques asiatiques, est le
seul herpès virus de primate pathogène pour l’homme. Bien que peu de cas
d’infection humaine ait été rapportés, la sévérité de la maladie, une méningo-
encéphalite mortelle en l’absence de traitement, oblige à prendre en compte
le risque que représente cette zoonose. Le portage viral étant le plus souvent
asymptomatique chez les macaques, le diagnostic biologique de cette infec-
tion joue un rôle prédominant dans la gestion du risque. Nous confrontons aux
données de la littérature notre expérience pratique de la sérologie anti-her-
pétique chez les macaques. Par ailleurs nous présentons les résultats de di-
verses techniques de PCR destinées à mettre en évidence chez les macaques
le génome du CeHV1 dans divers prélèvements muqueux et de tissus ner-
veux. Le diagnostic biologique de l’infection chez le macaque participe à la
conduite à tenir lors d’accident d’exposition à un macaque.
Mots-clés : Cercopithecine herpes virus 1, zoonose, ma-
caque, herpès virose b, sérologie, pcr.
SUMMARY
Place of biological diagnostic of macaque B virus (CeHV1) infection in
handling of the transmission risk to humans.
The macaque herpes B virus (Cercopithecine Herpes Virus 1, CeHV1) of
the Simplexvirus gender (Herpesviridae family and Alphaherpesvirinae sub-
family), endemic in all Asiatic macaques is the only primate Simplexvirus pa-
thogenic for humans. Although few cases of human infection have been
reported, the severity of the human disease, a meningo-encephalitis lethal wi-
thout treatment, leads to take into account the risk of this zoonosis. Because
the virus carriage in macaques is most of the time asymptomatic, the biolo-
gical diagnostic of the infection plays a predominant role in the risk handling.
We confront here the literature data to our own experience of herpes sero-
logy in macaques. Moreover, we present our results of various PCR tech-
niques aimed to evidence the CeHV1 genome in various samples of mucosa
and nervous tissues. Examples of practical handlings are detailed in annexes.
The biological diagnostic of this infection in the macaque participates to the
practical handling in the case of accidental exposition to a macaque.
Keywords : Cercopithecine herpes virus 1, zoonosis, ma-
caque, b virus, serology, pcr.
Introduction
Le virus de l’herpès virose B du macaque (ou Cercopithe-
cine Herpes Virus 1, CeHV1) appartient à la famille Herpes-
viridae, plus précisément à la sous-famille Alphaherpesvirinae
et au genre Simplexvirus [1]. Ce virus est endémique chez tous
les macaques asiatiques à l’état sauvage [2]. Parmi toutes les
populations de macaques asiatiques seule celle des macaques
crabiers (Macaca fascicularis) de l’île Maurice est réputée
exempte du virus. Cette population est en fait un isolat géné-
tique constitué à partir d’animaux juvéniles originaires de Java
importés par les bateaux marchands portugais au début du
17ème siècle [3]. Par ailleurs tous les individus de la seule
espèce de macaque africaine (le magot ou Macaca sylvanus)
testés jusqu’à présent sont indemnes du virus CeHV1 [résul-
tats non publiés]. Il est très probable que cette espèce afri-
caine, y compris la colonie du rocher de Gibraltar, soit
indemne du virus.
Le CeHV1 est phylogénétiquement très proche d’autres
virus du genre Simplexvirus : les virus herpès simplex 1 et 2
humains (HSV1 et 2) et du chimpanzé (ChHV), le “Simian
agent 8” (SA8) des singes verts africains et l’Herpes virus
papio 2 (HVP2) des babouins. Les pathologies cutanéo-mu-
queuses chez les macaques sont similaires aux maladies hu-
maines dues aux HSV1 et HSV2 [4]. Contrairement aux virus
humains, le CeHV1 n’a pas de tropisme préférentiel pour la
sphère buccale (HSV1) ou génitale (HSV2), les deux terri-
toires étant le plus souvent touchés chez le même animal.
Après une primo-infection souvent asymptomatique le
CeHV1 persiste à vie dans les neurones des racines sensitives
innervant les territoires cutanés et muqueux sièges de l’infec-
tion initiale : les ganglions trijumeaux pour la face et les gan-
glions des racines postérieures lombosacrés pour la sphère
ano-génitale. Comme les HSV1 et 2, le CeHV1 est transporté
de manière rétrograde dans les axones des neurones sensitifs
où il se trouve à l’abri de l’action neutralisante des anticorps
anti-CeHV1 [5]. Dans les neurones, le virus reste latent mais
peut, dans certaines circonstances, reprendre des cycles de ré-
plication aboutissant à la réinfection endogène des muqueuses
buccales et génitales. Ces réinfections endogènes appelées
herpès de sortie sont le plus souvent asymptomatiques. En de-
hors de certaines circonstances particulières (infection néo-
Revue Méd. Vét., 2007, 158, 7, 367-379