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vienne
La Nouvelle République
Mercredi 15 avril 2009
l’événement
Poitiers : une mosquée...
et pourquoi pas deux ?
La future mosquée, dotée d’un minaret de presque 22 mètres, sera un repère
incontournable dans le paysage poitevin. Sur les blogs, le débat fait rage.
Dans quelques mois, la mosquée sera achevée. L’édifice est prévu pour accueillir 800 fidèles.
le billet
Le Poitou
terre de
conquêtes ?
Depuis 732, date à laquelle un
certain Charles Martel arrêta
les Maures au nord de
Poitiers, mettant un point
final aux incursions des
musulmans au nord des
Pyrénées, Poitiers s’est
construit une identité
chrétienne, jusqu’à partager
avec sept autres villes
françaises le surnom de ville
aux cent clochers…
Aujourd’hui elle doit faire sa
place à l’Islam, 2e religion de
France, et à ses symboles.
Attendue par certains depuis
des années, la grande
mosquée poitevine est sortie
de terre, tenue par la
puissante Union des
organisations islamiques de
France. Trop grande, trop
chère, disent certains en
émettant des doutes sur la
part étrangère de son
financement. A tel point que
l’idée d’une seconde mosquée
a germé dans leurs esprits. A
l’heure où chemine un peu
partout l’idée d’un islam
progressiste et tolérant,
Poitiers, terre de symboles,
serait-elle à nouveau devenue
terre de conquêtes ?
(Photo NR, Philippe Nominé)
E
teignez les Lumières,
l’Islam arrive !… «Pour
moi, toutes les religions se valent. C’est
l’usage que les uns et les autres
en font qui importe »… «Auparavant, le minaret de la mosquée de Poitiers pendait au nez
des habitants. Maintenant, ils
l’ont sous le nez »… Ces dernières semaines, des blogs citoyens aux sites internet des
officines de la droite extrême,
la toile grouille de commentaires plus ou moins violents
sur le chantier de la mosquée.
Un chantier qui avance sans
encombres et est désormais
bien visible dans le paysage
poitevin. Emblématique, son
minaret qui va culminer à une
hauteur de presque 22 mètres
est l’un des éléments qui fait
débat. « C’est un élément marquant mais en terme visuel, le
minaret ne débordera pas du
bâtiment d’une façon choquante ni provocante », affirmait il y a quelques semaines à
la NR l’imam de Poitiers, Boubaker El Hadj Amor, par ailleurs l’un des hommes forts de
l’UOIF. Pour les athées, le minaret n’est qu’un élément de
propagande religieuse, « pas
plus qu’une église » tandis que
d’autres auraient préféré une
architecture « plus européenne », à l’image de la mosquée de Bondy, avec un minaret symbolique. Autre sujet
« d’inquiétude », la sonorisation de ce minaret avec la présence d’un muezzin, ce fonctionnaire religieux chargé des
appels à la prière. Là encore,
l’imam se veut rassurant. Il
n’en est pas question. On sait
pour l’heure que le premier
étage du bâtiment abritera un
centre culturel islamique, une
salle de conférences et des bu-
reaux, le second étage la salle
de prière, le troisième et dernier étage, des bureaux. Mais
« La mosquée ne sera pas un espace clos entre musulmans »,
rappelle encore l’imam de Poitiers.
La lancinante
question
du financement
Au-delà de la question du minaret, celle du financement de
cet édifice suscite moins de
réactions chez les internautes.
Pourtant, on sait que celui de
la mosquée (son coût est estimé à 1,5 million d’euros) ne
peut reposer que sur la seule
contribution des fidèles. Et
compte tenu de la proximité
idéologique de l’UOIF avec
certains états du Golfe, ses dé-
tracteurs craignent l’arrivée
des pétrodollars…
La seule solution pour faire
émerger des lieux de culte décents ? Il est vrai que sur le
plan financier, l’islam, deuxième religion de ce pays, ne
bénéficie pas des mêmes soutiens que les autres grandes
confessions, juives et chrétiennes. Reste enfin que pour
l’heure, c’est encore la loi de
1905 qui régit tout cela. Même
si à gauche comme à droite,
certains veulent la « toiletter »,
ses deux premiers articles font
encore autorité : « La République assure la liberté de conscience et garantit le libre exercice des cultes » mais « La
République ne reconnaît, ne salarie, ne subventionne aucun
culte ».
Enquête de
Jean-Michel Gouin
la phrase
« Je ne veux pas m’immiscer
dans les relations entre les
différentes communautés
musulmanes de Poitiers. Je
n’ai par ailleurs pris aucun
engagement »
C’est pour l’heure la
position que semble avoir
adoptée Alain Claeys, le
député maire PS de
Poitiers.
Il y a quelques semaines, il a
répondu à l’invitation des
responsables de la
communauté marocaine de
Poitiers pour s’entretenir
avec eux de divers sujets,
dont celui de la mosquée.
Sans plus de précisions pour
le moment…
en savoir plus
La démocratie, une affaire de mètres carrés
En 2003 naissait le Conseil
français du culte musulman. Son
but : donner à l’islam une plus
grande visibilité dans la société.
Les quatre fédérations qui la
composent, la Fédération
nationale de la Grande Mosquée
de Paris, proche de l’Algérie, le
Rassemblement des musulmans
de France, proche du royaume
marocain, l’Union des
organisations islamiques de
France, réputée proche des
tenants d’un islam plus
fondamentaliste et le CCMTF,
Comité de coordination des
musulmans turcs de France sont
souvent en désaccord.
Ainsi pour le mode d’élection de
ses représentants. Dans chaque
région, le CFCM se décline en
CRCM, conseils régionaux,
constitués de délégués,
eux-mêmes issus des mosquées.
Leur nombre est fonction de la
surface de ces mosquées ou lieux
de culte : un délégué pour 100 m2,
trois pour une salle de prière de
200 à 300 m2 , etc. On en déduit
aisément que plus une mosquée
est vaste, plus elle a de
représentants.
Dans la région comme ailleurs, ce
système est vivement contesté,
dressant les uns contre les autres
car il ne « représente pas la
sociologie de l’islam ». Une
réflexion serait en cours pour
aboutir à plus de transparence.
Alain Claeys, député-maire
de Poitiers
(Photo NR)
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