OCTOBRE 2016 - N° 329 - L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE 43
Au cours du traitement
ÚD’une façon générale, l’utilisation
des AOD ne nécessite pas de suivi
de l’activité anticoagulante en rou-
tine. L’INR n’est pas adapté pour
surveiller l’effet anticoagulant des
AOD. Mais certains tests de routine
peuvent être effectués en cas de sus-
picion de surdosage, comme la
mesure de l’activité anti-Xa pour
l’apixaban et le rivaroxaban, et le
temps de thrombine dilué, le temps
d’écarine ou le temps de céphaline
activée pour le dabigatran. Il existe
des tests spécifiques de mesure du
taux plasmatique des AOD. Cepen-
dant, leur indication et leur inter-
prétation ne font pas l’objet de
recommandations consensuelles à
ce jour et ils sont peu accessibles en
pratique courante.
ÚUn bilan hépatique avec contrôle
du taux de transaminases et de
gamma-GT permet de rechercher
d’éventuels effets insirables pa-
tiques liés aux AOD et une éventuelle
altération de la fonction hépatique.
ÚLa fonction rénale et le dosage
de l’hémoglobine doivent être éva-
lués au moins une fois par an (voire
beaucoup plus fréquemment en cas
d’altération de la fonction rénale)
et, si besoin, en cas d’événements
intercurrents.
CARNET DE SUIVI
ÚUn carnet de suivi (téléchargeable
sur www.live-mtve.org) a é élabo
par la Ligue fraaise contre la mala-
die veineuse thrombo-embolique et
le Groupe interdisciplinaire Trous-
seau sur les antithrombotiques (Gita).
ÚIl rappelle au patient les notions
importantes pour utiliser correcte-
ment son traitement et
optimiser l’observance.
Le patient peut en outre
y consigner la posolo-
gie de son traitement,
les éventuels médica-
ments associés et la
survenue d’incident
ou d’accident.
À DIRE AU PATIENT
Pour éviter les accidents
morragiques
Prévenir les situations
à risque de blessure
Úconseiller la pratique de sports
violents (rugby, sports de combat) ou
à risque de chutes (équitation, ski...).
ÚConseiller le port de gants et de
protections adéquates pour jardiner
et bricoler.
Bannir lautodication
ÚCertains médicaments peuvent
modifier l’action de l’AOD: décon-
seiller au patient la pratique de l’au-
SURVEILLANCE
CLINIQUE
Elle consiste à rechercher des signes
dhémorragie (non seulement des sai-
gnements extériorisés, mais aussi des
signes de saignements occultes, lire
le tableau ci-contre sur les signes dhé-
morragie), en particulier chez les
patients à risque (plus de 75 ans, insuf-
fisants rénaux, poids inférieur à 50 kg)
et des troubles gastro-intestinaux
(dyspepsie, diarrhées, nausées).
SURVEILLANCE
BIOLOGIQUE
Avant mise sous
traitement
Avant la mise en route du traitement,
il faut évaluer la fonction rénale (afin
de déceler une insuffisance rénale
sére qui contre-indiquerait une ini-
tiation de traitement par dabigatran,
mais aussi d’adapter la posologie des
xabans à la clairance rénale), la fonc-
tion hépatique et doser lhémoglobine.
Les anticoagulants oraux directs
À la suite d’une thrombose
veineuse, Mme B., 41 ans, est
traitée par Xarelto, à la posologie
actuelle de 20 mg par jour.
Profitant d’un passage à
votre cabinet pour un rappel de
vaccination, vous remarquez sa
mine pâle. Elle vous fait d’ailleurs
part de sa grande fatigue et
se plaint d’essoufflements.
Vous décidez de contler
sa tension qui est à 100-70 mmHg.
Cette baisse inexpliquée de
la pression artérielle et ces signes
évocateurs d’anémie doivent
faire orienter la patiente vers
une consultation dicale
rapide afin de contler son taux
d’hémoglobine et de rechercher
un saignement occulte.
Suivi thérapeutique
d’un patient sous AOD
Saignements visibles Saignements occultes
- Gingivorragies
- Épistaxis
- Hématomes
- Hémorragie conjonctivale
- Hématurie (présence de sang dans les
urines)
- Hémoptysie (crachats sanglants)
- Hématémèse (vomissements de sang)
- Rectorragies (sang rouge dans les selles)
- Melæna (sang noir dans les selles)
- Ménorragies (gles anormalement
abondantes)
- Saignements de plaies instoppables
- Fatigue
- Dyspnée
- leur
- Sensation de malaise
- phaes inhabituelles, ne dant pas
au traitement
Les signes d’hémorragie
© Espaceinfirmier.fr, Initiatives Santé 2016
tomédication et l’encourager à
demander l’avis d’un médecin ou
d’un pharmacien avant de prendre
un nouveau médicament.
ÚEn particulier, rappeler au patient
de ne pas prendre de sa propre ini-
tiative de laspirine ou des anti-inflam-
matoires non stéroïdiens (AINS) et
que lantalgique/antipyrétique de pre-
mière intention est le paracétamol.
ÚLa prise de millepertuis (plante
améliorant lhumeur) est déconseillée
car c’est un inducteur enzymatique
qui peut diminuer les concentrations
plasmatiques et l’efficacité des AOD
et exposer à un risque thrombotique.
Le cas échéant, la prise de milleper-
tuis doit être signalée au médecin.
Signaler son traitement
ÚDire au patient de porter sur soi
la “carte d’identifiant”, mentionnant
son traitement anticoagulant, fournie
par le prescripteur.
ÚÉduquer le patient à signaler son
traitement à tout professionnel di-
cal et paramédical.
Il est cessaire de signaler son trai-
tement avant de subir une interven-
tion chirurgicale ou un acte invasif
afin que le médecin puisse décider
de la conduite à tenir et de l’arrêt du
traitement. Par ailleurs, les injections
intramusculaires et les infiltrations
sont contre-indiquées. De même, le
patient doit alerter son dentiste et
son decin avant de subir une inter-
vention bucco-dentaire. « Il est d’au-
tant plus important que le patient
signale son traitement avant tout acte
invasif que tous les AOD ne modifient
pas les tests globaux de coagulation »,
souligne le PrLudovic Drouet.
Informer sans affoler
«Lors des dispensations, j’insiste sur
le risque hémorragique, je renseigne
sur les signes cliniques qui cessitent
une consultation et je remets au
patient les fiches dinformation éditées
par les fabricants. Il faut aussi être
particulièrement vigilant sur les inter-
actions avec des dicaments acces-
sibles sans ordonnance tels que l’as-
pirine ou certains AINS, comme
l’ibuprofène notamment, ainsi que le
44 L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE - N° 329 - OCTOBRE 2016
Cahier de
formation n° 94
La gestion péri-opératoire
des AOD dépend du risque
hémorragique l au geste
et à la poursuite de lAOD,
mais il doit prendre aussi
en compte le risque
thrombotique du patient
augmen par larrêt
de lAOD. D’après les
propositions du GIHP
(Groupe d’intérêt en
hémostase riopératoire),
actualisées en septembre
2015:
en cas de risque
morragique faible
(chirurgie cutanée,
chirurgie de la cataracte,
certains actes
bucco-dentaires,
d’endoscopie digestive
ou de rhumatologie...):
pas de prise de l’AOD la
veille au soir ni le matin
de l’intervention. Reprise
de lAOD à l’heure
habituelle et au moins six
heures aps l’acte invasif
(en l’absence d’accident
morragique);
en cas de risque
morragique moré
ou majeur, c’est-dire
considéré comme
élevé (biopsie, chirurgie
abdominale ou
thoracique, neurochirurgie
intra-crânienne…): arrêt
de l’AOD trois à cinq jours
avant l’intervention
(en fonction de l’AOD
et de la fonction nale
du patient). La reprise
de l’AOD est possible
six heures (AOD dans
la prévention de
la maladie TEV) ou 24 à
72 heures (AOD aux doses
curatives, dans la FA ou le
traitement de la TVP/EP)
aps l’intervention,
si l’hémostase le permet.
Durant la fenêtre
thérapeutique
post-chirurgicale,
un relais par héparine
peut être envisagé en cas
de risque thrombotique
élevé et/ou de nécessité
d’anticoagulation
prophylactique
post-chirurgicale.
En cas de chirurgie
programmée
Point de vue
« Attention à la fonction rénale
en cas de forte chaleur ! »
PrLudovic Drouet, responsable du Centre de référence
et d’éducation des antithrombotiques d’Île-de-France
« Il est important que les infirmières lirales sassurent
que la clairance de la créatinine soit contrôlée régulrement, en
particulier en cas d’affections intercurrentes ou de forte chaleur. Une règle
pratique de fréquence de contrôles systématiques de la clairance renale
est fréquemment utilisée par les riatres: la fréquence mensuelle
est done par le premier chiffre de la clairance (par exemple, pour une
clairance à 40 mL/min, c’est tous les quatre mois). Chez un sujet â,
il faut aussi sassurer qu’il ne prend pas en autodication des AINS, non
seulement susceptibles d’augmenter le risque morragique, mais aussi
d’altérer la fonction rénale. Il faut préconiser la prise de paracétamol. »
DR
© Espaceinfirmier.fr, Initiatives Santé 2016
OCTOBRE 2016 - N° 329 - L’INFIRMIÈRE LIBÉRALE MAGAZINE 45
Ú«Lorsque nos patients sous AOD
partent en vacances, ils sont ravis de
ne pas avoir à prévoir une prise de
sang pendant leur séjour, eux qui ont
déjà un capital veineux en mauvais
état et qui oubliaient de reprendre
rendez-vous avec les laboratoires
quand leurs résultats d’INR n’étaient
pas bons. Les familles sont également
rassurées et partent l’esprit plus libre
avec leurs parents. Mais nous leur
rappelons l’intérêt de prendre les
AOD à heures régulières, de ne sur-
tout pas les oublier (en vacances, cer-
taines prises de médicaments sont
souvent oubliées) et de signaler toute
apparition d’hématomes ou de sai-
gnements anormaux », souligne
Cécile Vouloir, infirmière en Service
de soins infirmiers à domicile à Rueil-
Malmaison (Hauts-de-Seine). <
millepertuis. Le tout est d’informer
le patient sans l’affoler! », nuance le
Dr Stéphane Tchikirian, pharmacien.
Surveiller et consulter
ÚConseiller au patient de vérifier
qu’il n’y ait pas de sang dans ses
urines ou dans ses selles.
ÚInciter le patient à prendre contact
avec son decin en cas de blessure,
de chute et systématiquement en
cas de choc sur la tête.
ÚLa survenue de signes cliniques
de saignements visibles ou d’hé-
morragie occulte impose une consul-
tation dicale. En cas dmorragie
importante, faire le 15 et signaler le
traitement AOD à l’urgentiste.
En cas de voyage
ÚDire au patient de conserver sur
lui son ordonnance (rédie en DCI)
et sa carte mentionnant son traite-
ment. Penser à emporter une quan-
ti suffisante de médicaments. Gar-
der son AOD dans son bagage à
main, de façon à ne pas se trouver
sans traitement à l’étranger en cas
de perte de valise.
ÚConserver au mieux des horaires
réguliers de prise (une ou deux
heures d’écart restent acceptables).
Les anticoagulants oraux directs
Avec mon traitement anticoagulant, vais-je pouvoir me faire
vacciner contre la grippe? Dans le carnet-conseil, j’ai lu que
les injections intramusculaires étaient contre-indiqes.
Les injections intramusculaires sont en effet contre-indiquées en cas
de traitement anticoagulant, mais la vaccination anti-grippale est
tout à faitalisable par voie sous-cutae profonde.
Question de patient
Mémento à
l’usage des Idels
Administration
L’Idel doit être à même
de repérer un schéma
thérapeutique inapproprié
qui doit l’amener à prendre
contact avec les prescripteur:
pas de posologie surieure
à deux prises par jour et
jamais plus de deux compris
par prise;
l’AOD ne doit pas être
associé à un autre
anticoagulant (sauf en riode
de chevauchement lors
des relais AOD/AVK).
Surveillance
L’idel doit être particulièrement
vigilante chez le sujet â,
de faible poids ou en cas d’IR.
S’assurer que la fonction rénale
du patient est bien contrôlée
au moins une fois par an.
Éducation du patient
Labsence de surveillance
biologique de routine ne devant
pas amener à banaliser
le traitement, l’Idel doit
éduquer le patient à:
être bien observant;
ne pas pratiquer
l’automédication;
alerter son dentiste ou
le chirurgien avant toute
intervention;
avoir dans son portefeuille
une carte d’identifiant.
Point de vue
« Attention aux saignements,
même mineurs ! »
DrRachid Mahamdia, gériatre, praticien hospitalier,
groupe hospitalier Sainte-Périne, AP-HP
« L’Idel doit évaluer la capaci du patient à gérer
lui-me son traitement et surveiller l’observance thérapeutique
car le saut de prise peut exposer à un risque d’inefficaci compte tenu
de la courte demi-vie des AOD. Elle doit aussi veiller à une bonne
hydratation, notamment en cas de forte chaleur qui risque d’entraîner
une déshydratation et d’alrer la fonction rénale, et rendre par
conséquent le patient iligible au traitement. Une Idel doit être attentive
en cas de signes morragiques, me mineurs (ecchymoses,
matomes, épistaxis, gingivorragies), car ces signes peuvent être
annonciateurs de complications plus graves. »
DR
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