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LE ROLE DU FLUOR DANS LE CHIMISME VOLCANIQU E
(Mise au point )
par J .
MOMOT .
Le fluor, de numéro atomique 9, n'a été préparé dans un milie u
rigoureusement anhydre par MOISSAN que vers les années 1886, en électrolysant une solution de fluorure acide de potassium KF, HF dan s
l'acide fluorhydrique anhydre HF . Mais son existence avait, déjà, ét é
soupçonnée par SCHEELE, dès la fin du XVIIIB siècle (Mém . Acad .
Stockholm 1 (2) 1 . 1780) .
Cet élément appartient à la deuxième période, sous-groupe des halogènes, du groupe VII du tableau de MENDELEEV . La répartition de s
électrons autour du noyau est la suivante : 1S', 2S", 2p . 5 . Le rayon de
l'atome, pris comme étant la demi-distance intermoléculaire de la molécule F, serait voisin de 0,67 A .
Le rayon cristallin de l'ion F- est de 1,36 A (PAULING) . Celui de
l'ion F 7 + : 0,07 A.
La valeur trouvée intéressant l'affinité du fluor pour les électron s
est, en général, plus grande que celle des autres halogènes . Cett e
électro-négativité, d'après l'échelle de PAULING, est voisine de 4,1 eV.
D'ailleurs, la table d'électro-négativités, établie par GORDY et THOMAS,
montre bien que le fluor, étant l'élément le plus électro-négatif, ce t
halogène peut se combiner avec tous les éléments connus, exceptio n
faite, en principe, des gaz rares ; pourtant, il existerait, par exemple ,
des fluorures de xénon . (Studies M.E . Sloth E .M. J. Phys . Chem ., 1963 ,
67, 4, 925-927) .
Quant au potentiel d'ionisation en électron-volts, il est de 17,42 .
Le processus de déplacement d'un élément de son composé par l e
fluor est un phénomène exothermique .
Le fluor a 5 isotopes dont les nombres de masse s'échelonnent de
16 à 19 .
Par réactions nucléaires, le F' 8 peut être formé en bombardant d u
magnésium à l'aide de protons et de deutérons . Mais , on peut également
l'obtenir en soumettant des atomes d'oxygène, de fluor, d'aluminium, d e
chlore, de cuivre, d'argent et d'or, à l'action de protons ayant une énergie de 420 MeV .
D'après A .E . FERSMAN, l'écorce terrestre contiendrait 0,08 % de fluo r
en poids ou 0,07 atome pour cent . Pour A .P. VINOGRADOV, la teneur en
fluor dans la lithosphère serait de 0,028 atome pour cent . Suivant d'autres auteurs, il y aurait, pour cette même écorce terrestre, 0,078 % d e
fluor à l'état combiné . Le fluor serait plus abondant que le chlore :
0,055 % .
Les roches éruptives, les minéraux magmatiques contiendraient :
0,07 % de fluor, les roches et minéraux sédimentaires : 0,065 % .
Teneur en p .p .m . du fluor
du chlore
— Roche d'origine ignée . . . . 600 31 4
— Météorites
28 1 000-1 50 0
La teneur en fluor des météorites est encore une question asse z
obscure . Il est fort possible que d'assez fortes quantités de fluor aient
été perdues par un processus de volatilisation au moment de l'entrée
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de la météorite dans l'atmosphère terrestre . Cette perte par volatilisation est également valable pour les roches volcaniques, comme nou s
le verrons .
A .P . VINOGRADOV et V .V . DANILOVA notent que la présence du fluo r
dans le sol est essentiellement due à la destruction de roches contenan t
un total de 0,03 % de fluor . Le total en fluor des plaines russes, pa r
exemple, est égal à 0,02 % environ .
Certaines roches, on le sait, contiennent des minéraux assez riches
en fluor : l'apatite ; des micas, comme les fluoro-annites, les fluorobiotites, la lépidolite, etc . Des tourmalines, des topazes également, etc.
Le fluor entrant dans la composition de nombreux silicates naturels, l e
remplacement isomorphique de 0- - ou OH- par une certaine quantit é
de fluor est une opération fort probable de l'édifice cristallin de ce s
silicates .
Les gaz volcaniques sont assez riches en composés fluorés, surtou t
dans la phase initiale des émanations, qui a lieu entre 500° et 800° 1 . E n
principe, les émanations fumerolliennes , dont la température dépass e
500° C montrent des sublimés salins, tels que Nacl, Kcl, B 2 03 , des traces
de chlore et de fluor, etc. Des observations faites au Japon montreraien t
également que les quantités de Hcl, SO2 , H2 , HF et B, augmenteraien t
avec la température . De plus, certains gaz volcaniques du volcan Suelich
(U .R.S.S .), ayant une température initiale élevée (500°-800°) contiendraient de l'HF . Le dégagement des vapeurs riches en Hcl, H 2 , CO ,
H 2O et HF est un phénomène qui se rencontre tout particulièrement
le long des coulées de laves andésitiques et basaltiques de la région d u
Kamchatka .
Au Japon, la composition chimique de certains gaz volcaniques ,
montre la présence de Bore, chlore, fluor . La valeur en p .p .m . de ce
dernier halogène peut atteindre 238 . Au cours des différentes phases
du phénomène fumerollien, la présence du fluor reste constante .
Les produits fumerolliens du volcanisme de l'île Vulcano et du
Vésuve montrent une teneur en fluor qui peut s'élever à 5,16 % . Le s
groupes volcaniques de la région de Katmaï exhalent annuellemen t
135 000 tonnes de FH .
Le fluorure de silicium, le fluo-silicate d'ammonium ont été détecté s
par SACCHI dans les fumerolles du Vésuve . Au cours de l'éruption du
Paricutin, les produits fumerolliens dégagés contenaient de petite s
quantités de (NH4 ) 2 SiF6 . A . GAUTHIER a trouvé, en 1913, 0,110 mgrs d e
fluor libre dans les gaz du Vésuve . A Lardarello, en Toscane, les soffioni en renferment également . Il est présent dans les gaz volcanique s
à réaction acide .
De l'acide fluorhydrique a été signalé à l'état libre dans les fumerolles de volcans (Matteuci . C .R . 129-65-1899) (S .I . Naboko : Biill. Acad .
Sci . U .R .S .S . Ser . Geol . 1-50-1945) .
1 . Donnons, à titre d'exemple, la composition chimique de vapeurs fumerolliennes de haute température (650°) issues d ' un volcan du Japon (Showa Shinzan . Usu . Hokkaido) .
— H 2 O : 96,9 % en volumes . « La composante prédominante des gaz de fumerolles reste la vapeur d'eau surchauffée » .
— Gaz acides : Hcl, HF, H 3 BO3 : 2, 1
H2S : 0, 7
H2 : 0,3, etc .
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Pour le fluor et différents produits fluorés, les chiffres donnés pou r
ces dosages sont d'une valeur très relative, en effet, comme les gaz
magmatiques attaquent, bien souvent, les parois rocheuses, le fluor s e
fixe, en grandes parties, avant de parvenir à l'air libre .
Ainsi, les gaz d'origine volcanique contiennent, en général, de l'acid e
fluorhydrique qui, en retombant sur le sol, augmente sa teneur moyen ne qui, nous le savons, oscille autour de 0,03 % . Dans les régions, ayan t
ou ayant eu par le passé une activité volcanique on peut recueillir jus qu'à 2 gr . de fluor et de ses différents composés pour 100 m 2 de sol . C'es t
ainsi que les sols des régions voisines du Vésuve et de l'Hékla montren t
une plus forte proportion de fluor .
SHEPHERD évalua à 0,70 % la teneur en fluor des roches volcanique s
mais il faut, toutefois, noter que les laves perdant une grande partie d e
leur fluor, élément volatil, donnent des chiffres beaucoup plus bas .
D'après des études faites dans la région du Kamchatka, pour un total d e
28 échantillons de roches volcaniques analysées, la teneur en fluo r
s'élèverait de 0,03 % à 0,06 % en moyenne . Au cours de ces mêmes études, on a pu remarquer que les amphiboles appartenant à des coulée s
de roches basaltiques contenaient une assez forte proportion de fluor ,
Le fluor se trouverait, donc, tout spécialement, concentré dans le s
amphiboles de ces laves basaltiques .
Des verres volcaniques, riches en silice, du N .-O . des Etats-Unis
montrent des valeurs assez considérables en chlore et en fluor qui peu vent varier de 0,25 à 0,30 % .
Enfin, différentes combinaisons fluorées provenant de régions volcaniques ont été décrites . Vers 1872, SCACCHI a trouvé dans les laves d u
Vésuve du fluorure de magnésium « F,Mg » et a appelé ce sel « belonite », il est analogue à la « sellaïte » « MgF 2 » . La « zamboninite »
« CaF2i 2MgF2 » trouvée à l'Etna, aurait été formée par l'action d e
vapeurs riches en fluor sur des composés magnésiens et calciques . L a
« Ferrucite » qui est un fluo-borate de sodium « NaBF 4 » serait une production fumerollienne du Vésuve . Les laves d'un volcan russe du no m
de Klyuchevsky contiendraient un fluoro-aluminate complexe qui répondrait à la composition chimique suivante : Na Ca Mg A13 F, h , 4 H 2O, etc .
Divers fluorures d'aluminium , de calcium et de magnésium ont ét é
déterminés dans les régions volcaniques de l'U .R.S .S .
Le fluor, étant un élément fort actif, les sels de cet halogène son t
nombreux et d'une très grande diversité chimique .
Pour les éléments du groupe I de la classification de MENDELEEV, on
obtient ces fluorures par voie humide en faisant agir l'acide fluorhydrique sur les hydroxydes et les carbonates de ces éléments . Avec un
certain nombre de fluorures métalliques, le fluor peut donner des fluorures de valences supérieures . BODE a observé que l'action du fluor à
140°-220° sur les halogénures de K, Rb, Cs, donne les fluorures perhalogénés, suivants : KF2 , RbF3 , CsF3 .
Pour le groupe II, le fluorure de Beryllium diffère des autres fluorures de ce groupe par sa solubilité dans l'eau .
Tous les éléments du groupe III donnent des trifluorures . Le trifluorure de base se classe à part des autres fluorures de ce groupe par s a
nature gazeuse . Quant au trifluorure d'aluminium, il est obtenu par
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l'action du fluor ou de l'acide fluorhydrique sur le métal à haute température ou par fusion du fluorure de solium avec un sulfate d'aluminium . Le fluorure d'aluminium se dissout dans l'acide fluorhydrique
pour former l'acide H 3A1F, . Le radical (A1F,) - - - a été étudié aux
rayons X ; ces fluoro-aluminates présentent une structure octoédrique ,
six d,Sp3 liaisons étant distribuées autour de l'atome d'aluminium . L e
fluorure d'aluminium tri-hydraté a de nombreux isomères : A1F3 (11 2 0)3 ,
A1F (112 0)5, AlF, (11 2 0), etc. expérimentalement leur existence n'a pa s
été prouvée . Mais A1F3i 3,5 H0O existe sous deux formes «insoluble» e t
« soluble » . Les structures cristallines des fluoro-aluminates se présentent sous forme de couches, d'écailles , de chaînes d'octoédres d'AlF,- - accolées les unes aux autres par leurs atomes de fluor .
Les fluorures du groupe IV . Il existe un tétrafluorure de carbone e t
un hexafluoroéthane qui sont des substances très stables par rappor t
aux deux fluorures de silicium : SiF4 et Si,F 2 .
Le carbone se combine plus ou moins facilement au fluor suivan t
la variété considérée . Le graphite brûle au rouge sombre dans une
atmosphère fluorée . W . et G . RÜDORFF auraient obtenu, par action sur du
graphite d'acide anhydre en milieu oxydant ou en présence de fluor, u n
composé cristallisé de formule C4F . MOISSAN n'avait décrit, autrefois ,
aucune réaction ni entre le fluor et l'oxyde de carbone, ni entre le fluor
et l'anhydride carbonique . Il existe pourtant de l'oxy-fluoro-chlorure d e
carbone : COFcl, de l'oxy-fluorure de carbone : COF 2 , etc . Notons également l'existence de fluorure de cyanogène FCN et de difluorure d e
carbone CF, .
Pour ce groupe IV, la propriété la plus caractéristique du fluor es t
l'attaque de la silice (SiO 2 ) avec formation de fluorure de siliciu m
(SiF,) et d'eau . La silice précipitée est attaquée beaucoup plus facilemen t
que le quartz . Chez ce dernier une facette parallèle à l'axe principal es t
rapidement attaquée, alors que les faces du rhomboèdre primitif ou le s
facettes perpendiculaires à l'axe principal sont pratiquement inaltérées .
Les vitesses d'attaque sont différentes suivant l'état cristallin . Ajouton s
que le silicium cristallisé s'enflamme spontanément au contact du fluo r
en donnant du fluorure de silicium .
Le rôle du fluor dans la genèse des minéraux silicatés naturels es t
particulièrement important . De plus, la formation des silicates dans le s
phénomènes post-volcaniques ou intéressant de près les phénomènes volcaniques, en particulier la cristallisation du quartz en phase pneumatolytique, est à rattacher à des réactions gazeuses en milieu hétérogène .
La réaction d'équilibre de la silice avec la vapeur d'eau et d u
tétrafluorure de silicium comme produit formé a été particulièremen t
SiF4 + 2 H 2O ,
étudié par F . BAUR . Suivant l'équation : SiO 2 + 4 11F
nous avons le rapport :
C .SiF, . C 2 .H2 O
C 4 .HF
qui est constant à une température donnée . C : étant la concentration
moléculaire des produits réagissant par litre , si le quartz solide (SiO 2 )
est en équilibre avec le mélange gazeux .
A température élevée, l'hydrolyse du SiF 4 dans la vapeur d'eau
donne la réaction d'équilibre suivante :
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SIF4 gaz + 2 H2O gaz »»'''; SiO2 solide + 4 HF gaz .
Avec du tétrafluorure de silicium dissous en phase aqueuse, nous avon s
du SiO2 hydraté .
Il est possible de calculer que l'enthalpie d'hydrolyse du tétrafluorure de silicium avec la formation de quartz B est de 22,54 kcal, tandi s
que, avec la formation d'acide silicique amorphe, elle est de — 27,7 kcal ,
Les fluosilicates sont des sels fort divers et d'une très grande complexité . Il existe des fluosilicates alcalins, alcalino-terreux (Ca SiF6 ,
2 H 2O, en particulier) et de cations divers, Cu, Mn, Ni, Co, Fe (l e
fluosilicate ferreux, par exemple, FeSiF 6 , 6 112 0), etc .
L'équilibre de dissociation de SiF,- - en tétrafluorure de silicium e t
F- à l'état d'ion est le suivant : SiFs - - '<» ,%H SiF 4 + 2F- . L'existence d e
silico-fluoro-hydroxy-complexes [(Si F, OH)]- - ou [SiF, (OHM- - est à
signaler . Il en est de même des systèmes : HF — HZSiF6 — HD, HOSiF ,
— H 2O et HF — H0O, etc . Les fluosilicates contiennent l'ion octaédriqu e
(SiFs )- - .
(A suivre) .
BIBLIOGRAPHI E
Hervé HARANT et Daniel JARRY . — Guide du Naturaliste dans le Midi d e
la France . II : La garrigue, le maquis, les cultures . Editions Delachaux et Niestlé, Neuchâtel (Suisse) .
Nous avons, lors de la parution de la première partie de ce Guide, signal é
son intérêt pour tous ceux qui ont l'occasion de se pencher sur la richesse et l a
diversité de la flore et de la faune méditerranéennes . Le deuxième volume, d'un
chapitre à l'autre, nous entraîne d'abord dans la garrigue languedocienne avec
ses associations végétales caractéristiques, ses sclérophytes . ses plantes à essences et sa faune où voisinent Gastéropodes, Myriapodes, Arachnides (Scorpions e n
particulier), Insectes (les Orthoptéroïdes sont particulièrement intéressants) e t
Vertébrés . Les plantes acclimatées en Provence et sur la Côte-d'Azur (Palmiers ,
Agaves . Yuccas, Cactées et bien d'autres qui donnent une touche d'exotisme à
ces régions baignées de lumière) sont ensuite étudiées, ainsi que la vie végétal e
dans les bosquets et bois méditerranéens. L'influence humaine, sur cette terre d e
vieille civilisation, n'est évidemment pas oubliée et nous voici au milieu de s
Figuiers, des Oliviers, des Vignes et des plantes à parfum avec bien entendu u n
regard de naturaliste sur la végétation adventice . Nous visitons, avec les touristes, les parcs et les jardins mais nous n'omettons pas la faune, parfois curieuse ,
qui se glisse dans les maisons et leurs dépendances : ainsi ces larves de Diptère s
(appartenant au genre Vermileo) qui présentent une convergence singulière ave c
certaines larves de Fourmilions . Afin d'établir un « calendrier » de la natur e
méditerranéenne les Auteurs nous proposent successivement une promenad e
automnale dans les environs d'une ville, puis le long d'un chemin en hiver pou r
assister ensuite aux floraisons bleues et jaunes du printemps et à la « fête d e
lumière » du plein été . Quelques itinéraires nous sont proposés, avec indicatio n
des récoltes possibles, de la Côte Vermeille à l'Estérel : le massif de la Sainte Baume, dont la forêt célèbre au pied d'une magnifique falaise calcaire est u n
pélerinage que tout naturaliste se doit d'avoir fait, figure en bonne place dan s
ce programme d'excursions ; à ce propos le rappel de la phrase de GIoNo : « I l
n'y a pas de plus puissant moyen d'approche et de fréquentation que la march e
à pied » n'est pas inutile.
Naturellement tout ceci est très abondamment illustré (photographies et trè s
nombreux dessins) et s'accompagne d'un petit lexique patois (provençal o u
languedocien) qui permet au lecteur non averti d'apprendre par exemple qu'u n
« Biju » est une Ascidie comestible et que le « Prégadiou » n'est autre que l a
Mante Religieuse .
J. FIASSON .
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