
PARADISE / A Space for screen addiction 
Chapter 2. SPECULATIVE MATERIALISM Oo Oo 30.06.14 - 29.09.14
With : MANUEL FERNANDEZ, CAMILLE HENROT, PIERRE 
HUYGHE, TAKESHI MURATA
Curated by Charlotte Cosson & Emmanuelle Luciani
Fonds de dotation
LECLERE-Maison de Ventes
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LA CONTINGENCE
An de pouvoir «sortir de la corrélation», imaginer un dehors de la raison et penser un monde sans hommes, Quentin Meillassoux 
doit, à la manière de Descartes, trouver un absolu sur lequel refonder la pensée. L’absolu de Meillassoux est la contingence. Rien n’est 
nécessaire, sauf elle: tout ce qui existe est susceptible de ne pas être. Selon lui, il est possible que tout arrive et ce, sans qu’on puisse le 
prévenir. Aux questions métaphysiques «D’où venons-nous?» ou «Pourquoi existons-nous?» il répond ainsi «De rien.» et «Pour 
rien». En 2012, pour l’installation Untilled de Documenta (13), Pierre Huyghe a agencé dans un compost repéré au sein Karlsaue 
Park des éléments trouvées ou produits par lui. Sculptures, plantes, abeilles, chiens, jardiniers, restes d’anciennes œuvres, boue ont 
été disposés comme Mallarmé plaçait ses phrases sur les pages: d’une manière telle que l’on ne pourrait observer qu’a posteriori celles 
qui prendraient le pas sur l’autre. L’auteur ne fait que lancer les dés; le reste est laissé au hasard. Or, c’est un brillant décryptage de Un 
coup de Dés jamais n’abolira le Hasard de Mallarmé qui a été publié par Quentin Meillassoux en 2011, poursuivant ainsi sa quête de 
contingence. Les œuvres de Pierre Huyghe fonctionnent de plus en plus en l’absence de regardeur, elles n’ont pas besoin de lui pour 
exister: seule la contingence décidera de leur sort.
AUTONOMIE DE L’OBJET
La vidéo de Pierre Huyghe présentée à PARADISE est antérieure aux premiers écrits du Réalisme Spéculatif. Il serait donc inoppor-
tun de ne décrire ses œuvres – voire l’art en général – que via les concepts qu’il véhicule. On peut penser, au contraire, que le Réa-
lisme Spéculatif a su répondre à des questionnements qui traversaient son travail depuis longtemps. La pensée de Graham Harman 
– l’Object Oriented Ontology (O.O.O.) – ne pouvait de fait que résonner aux oreilles des artistes: elle appelle à penser la relation, non 
pas homme-objet, mais objet-objet. En plaçant au centre de sa réexion le monde matériel et non plus l’Homme, le Réalisme Spécu-
latif relance ainsi le débat sur l’autonomie des choses. Or, ne dit-on pas que l’œuvre d’art, une fois produite, échappe à son créateur et 
possède une autonomie propre?
ONTOLOGIE PLATE ET INTENSITE
La question de l’autonomie de l’œuvre d’art a rythmé le XXe siècle. Depuis les années 1960, pour des raisons autant artistiques que 
politiques, on s’est accordé à dire qu’une chose est toujours dépendante de son contexte, voire qu’il en fait partie intégrante. Pour 
Tristan Garcia, lui aussi attaché au Réalisme Spéculatif, tout ce qui habite le monde – pensées, objets, sentiments, personnes etc. – est 
une chose qui contient ou est contenue par au moins une autre chose. Sa philosophie découle d’une hypersensivité, puisque tout entre 
en résonnance avec son environnement. On comprend ainsi l’intérêt d’un artiste comme Pierre Huyghe pour les concepts de Garcia: 
l’ontologie plate et l’intensité. D’ailleurs, dans sa vidéo Untilled, chaque objet, chaque animal, chaque plante paraît animé de sa vie 
propre, au sein d’un milieu qui fourmille.
PRESENT PERMANENT
La notion d’intensité semble pourtant être attachée au «présent permanent» décrit par les philosophes de la postmodernité. Et 
Quentin Meillassoux paraît vouloir s’éloigner de cette immédiateté. En eet, il arme que si l’on pousse la corrélation jusqu’à ses 
retranchements, on ne pourrait plus penser autre chose que le présent; puisqu’impossible pour elle d’imaginer un monde qui précède 
ou succède l’humain. Son entreprise est ainsi de permettre de spéculer à nouveau sur le passé et le futur, via la réconciliation de la 
philosophie et de la science qui, elle, met en exergue des énoncés antérieurs au premier Homme.
Charlotte Cosson & Emmanuelle Luciani
PARADISE / A Space for screen addiction
Constructed by Marion Bernard