alcool et troubles mentaux alcohol and mental disorders

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Numéro 10 - Premier trimestre 2006 / 10th Issue - First quarter 2006
Institut de Recherches Scientifiques
sur les Boissons
ALCOOL ET TROUBLES MENTAUX
Abus, dépendance, troubles thymiques et anxiété
ALCOHOL AND MENTAL DISORDERS
Abuse, dependence, mood disorders and anxiety
Principaux résultats de l’étude NESARC
(National Epidemiologic Survey on Alcohol and Related Conditions, Etats-Unis Enquête épidémiologique nationale sur l’alcoolisme et les affections apparentées)
Avec une interview du Professeur Jean Adès, chef de service Psychiatrie adultes, CHU Louis Mourier (Colombes)
par le Professeur Philip Gorwood, psychiatre au CHU Louis Mourier, (Colombes)
et membre du comité scientifique de l’IREB
NESARC main results (National Epidemiologic Survey on Alcohol and Related Conditions, USA)
Including an interview with Professor Jean Adès, Head of the Adult Psychiatry Department,
Louis Mourier University Hospital Centre (Colombes)
by Professor Philip Gorwood, psychiatrist at the Louis Mourier University Hospital Centre, (Colombes)
and member of the IREB Scientific Committee
PRÉFACE
P
our les psychiatres, en première ligne dans la prise en charge des malades
alcooliques, l’enquête NESARC constitue un évènement majeur. Elle remet en
cause quelques repères jusqu’ici couramment admis. C’est la raison pour
laquelle le professeur Gorwood (psychiatre et membre du comité scientifique de
l’IREB) a souhaité interroger le professeur Adès, psychiatre, chef de service au CHU Louis
Mourier de Colombes (92), au sujet de cette étude.
Pour le lecteur non averti, il importe de rappeler que l’enquête fait appel à des notions parfois
complexes mais correspondant à des éléments tangibles. Ainsi, “abus” et “dépendance” liés
à une substance, ne sont pas à lire au sens commun ; en psychiatrie, ces notions renvoient
à des critères précis qui permettent de “classer” les sujets dans la bonne catégorie.
L’utilisation de ces critères s’avère néanmoins cruciale dans la mesure où il n’existe pas de
tests biologiques permettant de dire si un sujet abuse d’une substance ou s’il en est dépendant.
NESARC est une enquête réalisée auprès d’un échantillon de la population générale aux
Etats-Unis. Elle n’a pas été réalisée auprès de malades alcooliques, c’est pourquoi les
résultats peuvent paraître surprenants.
L’enquête met en lumière deux idées majeures :
- on peut être dépendant à une substance (notamment l’alcool) sans nécessairement avoir
abusé de ce même produit ;
- les troubles de l’humeur ou de l’anxiété peuvent perdurer même après le sevrage d’une
substance, indiquant que le lien causal entre consommation d’une substance et trouble
mental n’est pas systématique.
Intéressante à bien des égards, elle pose également le problème de la définition d’un seuil
au-delà duquel on peut considérer le sujet comme “malade”…
Marie Choquet,
Directeur de recherche INSERM
et vice-présidente du comité scientifique de l’IREB.
1
NESARC
NATIONAL EPIDEMIOLOGIC SURVEY ON ALCOHOL AND RELATED CONDITIONS 1
• POUR MIEUX COMPRENDRE…
■
NESARC est une étude épidémiologique qui a été conduite par le National Institute
on Alcohol Abuse and Alcoholism, National Institutes of Health (NIAAA-NIH, EtatsUnis) en deux vagues, 2001-2002 et 2004-2005. L’étude a pour objectif de mesurer la
prévalence et la comorbidité2 des troubles liés à l’utilisation de substances
(essentiellement l’alcool) et les pathologies psychiatriques parmi lesquels les troubles
thymiques3 et anxieux selon les critères du DSM-IV (Diagnostic and Stastistical manual of
Mental disorders)4.
Pour ce faire, l’étude distingue les troubles psychiatriques indépendants (préexistants
et autonomes) de ceux induits par une substance (secondaires et consécutifs à la
dépendance). Tous les troubles thymiques ou anxieux dus à des affections médicales
(constatées par un médecin) ou provoqués par un deuil, ont été exclus.
Les “substances” considérées sont les suivantes : alcool, médicaments, sédatifs, tranquillisants, opiacés, amphétamines, hallucinogènes, cannabis, cocaïne, solvant/inhalant.
L’étude est basée sur 9 troubles thymiques et anxieux indépendants classés de la
manière suivante :
Troubles de l’humeur :
• Dépression majeure
• Dysthymie5
• Manie
• Hypomanie6
Tout trouble anxieux :
• Trouble panique avec agoraphobie7
• Trouble panique sans agoraphobie
• Phobie sociale
• Phobie spécifique
• Trouble anxieux généralisé
1. Grant B.F., Stinson F.S., Dawson D.A., Chou S.P., Dufour M.C., Compton W., Pickering R.P., Kaplan K. Prevalence and
Co-occurrence of Substance Use Disorders and Independent Mood and Anxiety Disorders. Results From the National
Epidemiologic Survey on Alcohol and Related Conditions. Arch. Gen. Psychiatry 2004, vol.61 n°8, p. 807-816.
2. Existence concomitante d'une affection ou d'un facteur qui n'est pas lié à la maladie pour laquelle une personne reçoit des
soins, mais qui a des conséquences sur les chances de survie du malade.
3. Qui concerne les dispositions affectives, l'humeur en général.
4. Classification par catégorie des troubles mentaux fondés sur un ensemble de critères avec des propriétés définies.
Elle est produite par l'Association Psychiatrique Américaine.
5. Forme de dépression chronique caractérisée par un trouble de l'humeur de type dépressif.
6. Etat d’excitation passager ou habituel qui se caractérise par une humeur expansive, la surabondance des idées et des propos
et une certaine exubérance.
7. Peur irraisonnée liée au fait de se retrouver dans des grands espaces ou au milieu d’une foule (salles de cinéma, files
d'attente, trains, bus).
2
• MIEUX ANALYSER LES LIENS COMPLEXES QUI UNISSENT PATHOLOGIE
ADDICTIVE ET PATHOLOGIE PSYCHIATRIQUE
L’étude a rassemblé plus de 40 000 sujets américains incluant les régions de l’Alaska, des
Iles Hawaï et du district de Columbia. Tous ont été interrogés en face-à-face entre 2001 et
2002. Cette enquête est la plus large jamais réalisée sur ce sujet et dresse un tableau
représentatif de la situation des Etats-Unis. Surtout, c’est la première étude à se focaliser
sur la question de la comorbidité, en général mal exploitée dans les grandes études
épidémiologiques américaines récentes (Epidemiological Catchment Area, National
Comorbidity Survey).
La présence d’une comorbidité addictive rend en effet les entretiens plus compliqués
et plus longs du fait de la multiplicité des diagnostics dont la personne interrogée n’a
pas forcément conscience. Les réponses sont également moins fiables eu égard au
phénomène de déni souvent inhérent à la dépendance, mais également à cause du
manque de maîtrise des dates, de la sévérité et de l’intrication des symptômes par les
patients.
Le taux de réponse globale a atteint les 81% et les tests de fiabilité se sont révélés
concluants.
Les enquêteurs devaient justifier de 5 années d’expérience et ont bénéficié de 10 jours de
formation intensive. Les coordinateurs se sont chargés de la vérification des données et
de la qualité du travail.
L’étude NESARC a déjà fait l’objet d’une vingtaine de publications dans les plus grands
journaux, dont une demi-douzaine d’articles dans les Archives of General Psychiatry et
dans le JAMA (the Journal of the American Medical Association). Notons que l’un de
ces articles a été traduit dans la version française des Archives of General Psychiatry,
(www.jama-francais.com)8.
• QU’EST-CE QUE “L’ABUS” ? QU’EST-CE QUE LA “DÉPENDANCE” ?
Le DSM-IV propose une description extrêmement précise de ces deux notions, essentielles
dans l’étude NESARC. Au sein de la catégorie “Troubles liés à une substance”, le manuel
distingue les troubles induits par une substance (intoxication, sevrage, delirium,
démence, trouble psychotique, trouble de l’humeur, etc.) et les troubles liés à l’utilisation
d’une substance (abus ou dépendance).
La dépendance à une substance se caractérise ainsi par un ensemble de manifestations
comportementales et physiologiques indiquant que le sujet continue à utiliser la
substance malgré des problèmes significatifs liés à la substance. La dépendance suppose
8. Grant B.F., Stinson F.S., Dawson D.A., Chou S.P., Dufour M.C., Compton W., Pickering R.P., Kaplan K. Prévalence
et co-existence des troubles liés à l'utilisation d'une substance et des troubles anxieux et thymiques indépendants.
Résultats de l'Enquête NESARC. Arch. Gen. Psychiatry janvier 2005, p. 77-89.
3
l’apparition d’au moins trois des symptômes ci-dessous à un moment quelconque au
cours d’une période continue de douze mois9 :
1) tolérance définie par l’un des symptômes suivants :
a. besoin de quantités notablement plus fortes de la substance pour obtenir une
intoxication ou l’effet désiré
b. effet notablement diminué en cas d’utilisation continue d’une même quantité de la
substance
2) sevrage caractérisé par l’une ou l’autre des manifestations suivantes :
a. syndrome de sevrage caractéristique de la substance
b. la même substance (ou une substance très proche) est prise pour soulager ou éviter
les symptômes de sevrage
3) la substance est souvent prise en quantité plus importante ou pendant une période
plus prolongée que prévu
4) il y a un désir persistant, ou des efforts infructueux, pour diminuer ou contrôler
l’utilisation de la substance
5) beaucoup de temps est passé à des activités nécessaires pour obtenir la substance
(exemple : consultation de nombreux médecins ou déplacements sur de longues
distances), à utiliser le produit (exemple : fumer sans discontinuer), ou à récupérer de ses
effets
6) des activités sociales, professionnelles ou de loisirs importantes sont abandonnées ou
réduites à cause de l’utilisation de la substance
7) l’utilisation de la substance est poursuivie bien que la personne sache avoir un
problème psychologique ou physique persistant ou récurrent susceptible d’avoir été
causé ou exacerbé par la substance (par exemple, poursuite de la prise de la cocaïne bien
que la personne admette une dépression liée à la cocaïne, ou poursuite de la prise de
boissons alcoolisées bien que le sujet reconnaisse l’aggravation d’un ulcère du fait de la
consommation d’alcool).
9. American Psychiatric Association. DSM-IV : manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux. Masson ; 1996, 918 p.
4
L’abus d’une substance se caractérise par l’utilisation inadéquate d’une substance
entraînant l’incapacité de la personne à remplir des obligations majeures, une utilisation
dans des situations potentiellement dangereuses (conduite automobile, activités
sportives, etc.). Contrairement à la dépendance, l’abus n’implique pas les critères de
tolérance, de sevrage ou un mode compulsif d’utilisation.
L’abus est caractérisé par la présence d’au moins une des manifestations suivantes au
cours d’une période de douze mois :
1) utilisation répétée d’une substance conduisant à l’incapacité de remplir des
obligations majeures, au travail, à l’école, ou à la maison (par exemple, absences
répétées ou mauvaises performances au travail du fait de l’utilisation de la substance,
absences, exclusions temporaires ou définitives de l’école, négligence des enfants ou des
tâches ménagères)
2) utilisation répétée d’une substance dans des situations où cela peut être physiquement
dangereux (par exemple, lors de la conduite d’une voiture ou en faisant fonctionner une
machine alors qu’on est sous l’influence d’une substance)
3) problèmes judiciaires répétés liés à l’utilisation d’une substance (par exemple,
arrestations pour comportement anormal en rapport avec l’utilisation de la substance)
4) utilisation de la substance malgré des problèmes interpersonnels ou sociaux,
persistants ou récurrents, causés ou exacerbés par les effets de la substance (par exemple
disputes avec le conjoint à propos des conséquences de l’intoxication, bagarres).
5
Interview
Professeur Jean Adès,
chef de service Psychiatrie adultes, CHU Louis Mourier (Colombes)
• PHILIP GORWOOD : EN QUOI LA MÉTHODOLOGIE DU NESARC EST-ELLE À LA
FOIS INTÉRESSANTE ET ORIGINALE ?
■
Jean Adès : NESARC est une grande étude épidémiologique portant sur plus de
43 000 sujets issus de la population générale. Cette étude est basée sur les critères
du DSM-IV-TR et notamment ceux qui concernent les abus de substances. Elle a utilisé des
catégories qui n’étaient pas dans la classification précédente (DSM-III) telles que les
troubles anxieux et les troubles de l’humeur “induits par une substance”.
Les études antérieures évaluant la prévalence des troubles anxieux ou des troubles dépressifs chez des sujets ayant un abus de substances ne faisaient pas aussi bien la distinction
entre troubles induits (par une substance) et troubles indépendants. L’étude utilise pour
ce faire un questionnaire spécifique nommé AUDADIS10, qui tient compte du problème de
la comorbidité pour les abus de substances. De plus, l’étude a pour originalité de se focaliser sur plusieurs minorités ethniques.
• Ph.G. : CETTE MÉTHODE OFFRE DE NOUVELLES PERSPECTIVES D’ÉVALUATION
ET REMET AU GOÛT DU JOUR LE PROBLÈME DE LA DISTINCTION ENTRE ABUS
ET DÉPENDANCE À L’ALCOOL. QU’EN PENSEZ-VOUS ?
■
J.A. : Une partie de l’étude NESARC expose les différences épidémiologiques entre
abus et dépendance. On voit alors qu’un certain nombre de sujets qui présentent
des critères de dépendance au cours de leur vie, n’ont pas les critères de l’abus. C’est une
donnée que je n’avais jamais vue auparavant, puisque l’idée selon laquelle on ne pouvait
pas être dépendant si l’on n’était pas d’abord “abuseur” était fréquemment répandue.
Dans un certain nombre de classifications, en France notamment, on note qu’il existait
plusieurs étapes dans le comportement de l’alcoolodépendant : des sujets vont
développer des comportements d’abus et certains d’entre eux vont devenir dépendants.
Or, NESARC montre qu’un patient dépendant sur sept (14%) n’a pas les critères de l’abus.
Il faudrait donc envisager une catégorie particulière, celle des sujets dépendants sans
abus, aussi bien pour les travaux cliniques, épidémiologiques que génétiques.
NESARC remarque également que ces “dépendances sans abus” sont beaucoup plus
10. Alcohol abuse and Alcoholism Use Disorder and Associated Disabilities Interview Schedule.
6
importantes au sein de certaines minorités ethniques aux Etats-Unis et notamment chez les
femmes d’origine hispanique (30%). L’étude NESARC ne s’est pas hasardée à interpréter
véritablement ce résultat, mais on peut néanmoins faire des hypothèses sur cette rapidité
d’installation : soit c’est une question de temps : certains sujets développeraient une
dépendance très rapidement ; soit ce sont des sujets qui, pour des raisons plus socioculturelles, se mettraient à consommer de l’alcool d’une manière particulière, développant
ainsi une dépendance.
• Ph.G. : QUELLE SERAIT CETTE NOUVELLE CLASSIFICATION QUI FERAIT BIEN LA
DISTINCTION ENTRE ABUS ET DÉPENDANCE ?
■
J.A. : Il ne s’agit pas forcément d’une nouvelle classification. L’idée serait d’inclure
dans les prochaines études, des sujets qui ont une dépendance avec les critères de
l’abus et des sujets qui ont une dépendance sans les critères de l’abus. Cela représente une
catégorie à part qui correspondrait peut-être à un phénotype11 plus homogène. Ceci
n’avait jamais été vraiment décrit auparavant.
• Ph.G. : LA DEUXIÈME GRANDE VAGUE DE RÉSULTATS CONCERNE LES LIENS
COMPLEXES ENTRE LES TROUBLES DE L’HUMEUR, LES TROUBLES ANXIEUX, LES
TROUBLES PSYCHIATRIQUES EN RÈGLE GÉNÉRALE ET L’ALCOOL. EST-CE QUE,
LÀ AUSSI, NESARC EST VENUE BOULEVERSER LES PRÉCÉDENTS RÉSULTATS ?
■
J.A. : En partie. Si on part des résultats antérieurs, une idée reste très répandue : la
plupart des troubles anxieux et des troubles dépressifs seraient associés à des abus
de substances et notamment à une alcoolisation massive. Tout ceci avait été confirmé par
des travaux sur la dépression et notamment par l’équipe de Schuckit. Cette dernière avait
constaté que 80% des patients alcoolodépendants dépressifs entraient en rémission au
moment de leur sevrage.
D’autres études avaient déjà montré que l’on trouvait un certain nombre de troubles
anxieux ou dépressifs primaires indépendants (notamment trouble bipolaire ou phobie
sociale des troubles anxieux), chez les patients alcoolodépendants.
Or, l’étude NESARC montre qu’à peu près 10 % des sujets abusant de substances ont des
troubles de l’humeur indépendants et seulement 1 % présentent des troubles de l’humeur
induits. Ce qui va à l’encontre de ce que nous pensions. On retrouve d’ailleurs le même
résultat pour les troubles anxieux induits.
Reste à démontrer si oui ou non, l’abus de substances est consécutif à la pathologie psychiatrique.
11. Le phénotype est l'ensemble des caractères anatomiques, morphologiques, physiologiques, éthologiques caractérisant un
être vivant donné.
7
• Ph.G. : COMMENT PEUT-ON EXPLIQUER CLINIQUEMENT QUE LES PATIENTS
SOUFFRANT D’ALCOOLODÉPENDANCE ET DÉPRIMÉS AMÉLIORENT LEUR ÉTAT
MENTAL AU SEVRAGE ?
■
J.A. : Mon hypothèse personnelle est que nous ne portons pas assez d’attention aux
éventuelles pathologies anxieuse ou dépressive prémorbides. Devant un sujet
alcoolodépendant et déprimé, il convient de rechercher une pathologie anxieuse ou
dépressive antérieure indépendante et ne pas se contenter d’une vision clinique parfois
parcellaire.
D’ailleurs, l’étude NESARC conclut sur la nécessité, face à un sujet dépressif, anxieux et
présentant des signes d’abus de substances, de prendre en compte les deux. Autrement
dit, et ce point ne fait pas consensus, l’abus de substances doit être pris en charge par un
addictologue et la pathologie anxieuse ou dépressive par un psychiatre.
Qu’en est-il de la France ?
■
Il n’existe malheureusement aucune étude épidémiologique de cette envergure
sur la prévalence de l’alcoolodépendance, en France. En effet, les études
françaises chiffrent principalement la consommation d’alcool et trop peu la maladie
alcoolique en elle-même.
Il serait par ailleurs difficile de transposer les résultats de NESARC à la France, pays
dans lequel la consommation de boissons alcoolisées est plus importante. On peut donc
simplement émettre l’hypothèse que les liens entre la consommation d’alcool et les
troubles mentaux seraient plus perceptibles dans l’hexagone.
8
PREFACE
F
or psychiatrists, who are the first involved in the management of alcoholic
patients, the NESARC is a major event. It calls into question some hitherto
widely accepted tenets. This is why Professor Gorwood (psychiatrist and
member of the IREB Scientific Committee) intended to interview Professor Adès,
psychiatrist and head of department at the Louis Mourier University Hospital Centre in
Colombes (92), about this survey.
For the uninformed reader, it is important to remember that this survey involved notions
which are sometimes complex but correspond to tangible elements. Thus “abuse” and
“dependence”, when related to a substance, should not be given their normal meaning. In
psychiatry, these notions refer to precise criteria classifying subjects into the appropriate
category. Use of these criteria is nonetheless crucial, insofar as there is no biological test
to tell us whether a subject suffers from substance abuse or dependence.
NESARC was a survey conducted on a sample from the general population of the United
States of America. It was not performed in alcoholic patients, so the results may sometimes
appear surprising.
The survey highlighted two important points:
- one can be dependent on a substance (particularly alcohol) without necessarily abusing
this substance;
- mood or anxiety disorders may persist, even after withdrawal, suggesting that the causal
relationship between consumption of a substance and mental disorders is not systematic.
Interesting in many respects, it also raises the problem of defining a threshold above which
a subject can be considered as “suffering from a disease”…
Marie Choquet,
INSERM Research director
and Vice President of the IREB Scientific Committee.
9
NESARC
NATIONAL EPIDEMIOLOGIC SURVEY ON ALCOHOL AND RELATED CONDITIONS 1
• FOR A CLEARER UNDERSTANDING…
■
NESARC was an epidemiologic survey carried out by the National Institute on
Alcohol Abuse and Alcoholism at the National Institutes of Health (NIAAA-NIH,
USA). It was carried out in two waves: in 2001-2002 and in 2004-2005. The aim of the study
was to determine the prevalence and comorbidity2 of substance use disorders (essentially
alcohol) and psychiatric conditions, including mood anxiety and disorders3, according to
the criteria of DSM-IV (Diagnostic and Statistical manual of Mental disorders)4.
To achieve this, the survey made a distinction between independent psychiatric disorders
(pre-existing and autonomous) and disorders induced by a substance (secondary and
consecutive to dependence). All mood or anxiety disorders due to medical conditions
(observed by a physician), or provoked by someone’s death, were excluded.
The “substances” considered were: alcohol, medications, sedatives, tranquillizers,
opiates, amphetamines, hallucinogens, cannabis, cocaine, solvents/inhalants.
The study was based on nine independent mood and anxiety disorders, classified as follows:
Mood disorders:
• Major depression
• Dysthymia5
• Mania
• Hypomania6
Any anxiety disorders:
• Panic attacks with agoraphobia7
• Panic attacks without agoraphobia
• Social phobia
• Specific phobia
• Generalised anxiety
1. Grant B.F., Stinson F.S., Dawson D.A., Chou S.P., Dufour M.C., Compton W., Pickering R.P., Kaplan K. Prevalence and
Co-occurrence of Substance Use Disorders and Independent Mood and Anxiety Disorders. Results From the National
Epidemiologic Survey on Alcohol and Related Conditions. Arch. Gen. Psychiatry 2004, vol.61 n°8, p. 807-816.
2. Co-occurrence of a disorder or factor which is not linked to the disease for which a person is receiving care, but which has
consequences on the chances of survival of that patient.
3. Which concerns emotional characteristics, mood in general.
4. Classification by category of mental disorders based on a series of criteria with defined properties. It is issued by the
American Psychiatric Association.
5. Type of chronic depression characterised by a mood disorder with a depressive pattern.
6. State of transient or habitual excitation characterised by an expansive mood, an overabundance of ideas, volubility and
a certain exuberance.
7. Unreasoned fear related to being in large open spaces or in the middle of a crowd (cinema, queues, trains, buses).
10
• IMPROVING ANALYSIS OF THE COMPLEX LINKS BETWEEN ADDICTIVE
DISEASES AND PSYCHIATRIC DISORDERS
The survey concerned more than 40,000 American citizens, including those in Alaska,
Hawaii and the District of Columbia. Face-to-face interviews took place between 2001 and
2002. It was the largest survey ever carried out on this subject, and provides a
representative picture of the situation in the United States. Above all, it was the first study
to focus on the question of comorbidity, which has generally been poorly exploited during
recent major American epidemiologic surveys (Epidemiological Catchment Area, National
Comorbidity Survey).
Indeed, interviews were more complicated and took more time due to the presence of an
addictive comorbidity, because of the multiplicity of diagnoses of which the interviewee
was not necessarily aware. The answers were also less reliable with respect to the denial
often inherent in dependence, and also because of a lack of control by patients over the
dates, severity and intricacy of symptoms.
The overall response rate attained 81%, and tests of reliability proved to be conclusive.
Survey agents were required to have five years' experience in the field, and underwent a
10-day intensive training course. The coordinators were responsible for checking the data
and the quality of work.
The NESARC has already been the subject of some twenty publications in the most
renowned journals, including some six articles in the Archives of General Psychiatry and
the JAMA (Journal of the American Medical Association). It should be noted that one of
these articles was translated and published in the French version of the Archives of General
Psychiatry, (www.jama-francais.com)8.
• WHAT IS “ABUSE”? WHAT IS “DEPENDENCE”?
The DSM-IV gives an extremely precise description of these two notions, essential to the
NESARC. Within the category “substance-related disorders”, the manual makes a
distinction between disorders induced by a substance (intoxication, withdrawal, delirium,
dementia, psychotic disorders, mood disorders, etc.) and those related to the use of a
substance (abuse or dependence).
Substance dependence is characterised by a series of behavioural and psychological
symptoms suggesting that the subject continues to use the substance despite significant,
substance-related problems. Dependence entails the appearance of at least three of the
symptoms listed below occurring at any time in the same 12-month period9:
8. Grant B.F., Stinson F.S., Dawson D.A., Chou S.P., Dufour M.C., Compton W., Pickering R.P., Kaplan K. Prévalence et
co-existence des troubles liés à l'utilisation d'une substance et des troubles anxieux et thymiques indépendants.
Résultats de l'Enquête NESARC. Arch. Gen. Psychiatry January 2005, p. 77-89.
9. American Psychiatric Association. DSM-IV - Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders. 4th ed. American
Psychiatric Association; 1994, 886 p.
11
1) tolerance, as defined by either of the following:
a. need for markedly increased amounts of the substance to achieve intoxication or
desired effect
b. markedly diminished effect with continued use of the same amount of the substance
2) withdrawal, as manifested by either of the following:
a. the characteristic withdrawal syndrome for the substance
b. the same (or a closely related) substance is taken to relieve or avoid withdrawal
symptoms
3) the substance is often taken in larger amounts or over a longer period than was
intended
4) there is a persistent desire or unsuccessful efforts to cut down or control substance use
5) a great deal of time is spent in activities necessary to obtain the substance (e.g., visiting
multiple doctors or driving long distances), use the substance (e.g., chain-smoking), or
recover from its effects
6) important social, occupational, or recreational activities are given up or reduced
because of substance use
7) the substance use is continued despite knowledge of having a persistent or recurrent
physical or psychological problem that is likely to have been caused or exacerbated by the
substance (e.g., current cocaine use despite recognition of cocaine-induced depression,
or continued drinking despite recognition that an ulcer was made worse by alcohol
consumption).
12
Substance abuse is characterised by the inappropriate use of a substance which results in
a failure to fulfill major role obligations, or use in potentially hazardous situations (driving
an automobile, sports activities, etc.). Unlike dependence, criteria of tolerance,
withdrawal or a compulsive mode of use are not met with abuse.
Abuse is characterised by the manifestation of one or more of the following, occurring
within:
1) recurrent substance use resulting in a failure to fulfill major role obligations at work,
school, or home (e.g., repeated absences or poor work performance related to substance
use; substance-related absences, suspensions, or expulsions from school; neglect of
children or household)
2) recurrent substance use in situations in which it is physically hazardous (e.g., driving
an automobile or operating a machine when impaired by substance use)
3) recurrent substance-related legal problems (e.g., arrests for substance-related
disorderly conduct)
4) continued substance use despite having persistent or recurrent social or interpersonal
problems caused or exacerbated by the effects of the substance (e.g., arguments with
spouse about consequences of intoxication, physical fights).
13
Interview
Professor Jean Adès,
Head of the Adult Psychiatric Department, Louis Mourier University Hospital Centre
(Colombes).
• PHILIP GORWOOD: WHY IS THE NESARC METHODOLOGY BOTH INTERESTING
AND ORIGINAL?
■
Jean Adès : NESARC was a major epidemiologic survey involving more than 43,000
subjects from the general population. This study was based on DSM-IV-TR criteria,
and particularly those concerning substance abuse. The latter refers to categories not
included in the previous classification (DSM-III), such as anxiety or mood disorders
“induced by a substance”.
Previous studies assessing the prevalence of anxiety or depressive disorders in subjects
abusing substances had not made such a clear distinction between disorders induced (by
a substance) and independent disorders. To achieve this, a specific questionnaire was
used. It is called AUDADIS10 and took account of the problem of comorbidity with substance
abuse. Furthermore, the originality of the study lies in its focus on several ethnic
minorities.
• Ph.G.: THIS METHOD OFFERS NEW PERSPECTIVES FOR EVALUATION AND
REVIVES THE PROBLEM OF A DISTINCTION BETWEEN ALCOHOL ABUSE AND
DEPENDENCE. WHAT IS YOUR OPINION?
■
J.A. : Part of the NESARC survey revealed epidemiologic differences between abuse
and dependence. It was possible to see that a certain number of subjects who met
with dependence criteria during their life did not meet with abuse criteria. I have never
observed this point before, because it was widely thought that one cannot be dependent
if one had not previously been an “abuser”. In a certain number of classification systems,
particularly in France, there were several stages in the alcohol-dependent subject’s
behaviour: subjects would develop abusive behaviour and some of them would become
dependent.
But the NESARC showed that one in seven dependent subjects (14%) did not meet with
abuse criteria. It is therefore necessary to consider a specific category for dependent
subjects without abuse, for use in clinical, epidemiologic and genetic studies.
10. Alcohol abuse and Alcoholism Use Disorder and Associated Disabilities Interview Schedule.
14
The NESARC authors also observed that these cases of “dependence without abuse” were
much more numerous in certain ethnic minorities in the United States, and particularly
amongst women of Hispanic origin (30%). The NESARC did not try to interpret this finding
in depth, but some hypotheses can nonetheless be advanced concerning this rapidity of
onset: either a question of time, where certain subjects will develop dependence very
rapidly, or subjects who, for more sociological and cultural reasons, start consuming
alcohol in a particular fashion and thus develop dependence.
• Ph.G.: WHAT WOULD THIS NEW CLASSIFICATION BE IF A CLEAR DISTINCTION
BETWEEN ABUSE AND DEPENDENCE WERE NECESSARY?
■
J.A. : It may not be necessary to make a new classification. The idea would be to
include subjects meeting with dependence and abuse criteria and those meeting
with dependence but not with abuse criteria, in future studies. This represents a separate
category which may correspond to a more homogeneous phenotype11, and has never
previously been described properly.
• Ph.G.: THE SECOND MAJOR WAVE OF RESULTS CONCERNED THE COMPLEX
LINKS BETWEEN MOOD DISORDERS, ANXIETY, PSYCHIATRIC DISORDERS IN
GENERAL AND ALCOHOL. HAS THE NESARC, ONCE AGAIN, OVERTURNED ALL
PREVIOUS RESULTS?
■
J.A. : Partly, yes. Based on previous results, one idea was very widespread: most
anxiety and depressive disorders would be associated with substance abuse, and
particularly massive alcoholism. This has been confirmed by work on depression, and
particularly by Schuckit's team, who observed that 80% of depressive, alcohol-dependent
patients went into remission at the time of withdrawal.
Other studies had already shown that a certain number of primary and independent
anxiety or depressive disorders (particularly bipolar disorders or social phobia related to
anxiety disorders) were found in alcohol-dependent patients.
The NESARC showed that around 10% of subjects abusing substances suffered from
independent mood disorders and only 1% presented with induced mood disorders. This is
the opposite to what we had thought. Indeed, the same result was found for induced
anxiety disorders.
It remains to be shown whether or not substance abuse occurs consecutively to psychiatric
disease.
11. The phenotype is the whole series of anatomical, morphological, physiological and ethological factors characterising a given
living being.
15
• Ph.G.: HOW CAN WE EXPLAIN CLINICALLY THAT DEPRESSED,
ALCOHOL-DEPENDENT PATIENTS SEE AN IMPROVEMENT IN THEIR MENTAL
STATE DURING WITHDRAWAL?
■
J.A. : My own hypothesis is that we do not pay enough attention to the
possibility of pre-morbid anxiety or depressive disorders. Faced with a
depressive, alcohol-dependent subject, it is necessary to determine the presence of a
prior, independent anxiety or depressive condition and not restrict oneself to a clinical,
perhaps partial, view.
Furthermore, the NESARC concluded as to the need, in depressive, anxious patients
presenting with signs of substance abuse, to take both into account. In other words, and
although consensus has not been reached on this point, substance abuse must be
managed by a specialist in addiction disorders, and anxiety or depression by a
psychiatrist.
What is the situation in France?
■
Unfortunately, no epidemiologic studies on this scale have been performed on the
prevalence of alcohol dependence in France. Indeed, French studies have mainly
focused on alcohol consumption, and little attention has been paid to alcoholic disease
itself.
In fact, it would be difficult to transpose the results of the NESARC to the situation in
France, where the consumption of alcoholic drinks is higher. We can only put forward the
hypothesis that the links between alcohol consumption and mental disorders may be
more easily perceptible in France.
16
Institut de Recherches Scientifiques
sur les Boissons
19, avenue Trudaine - 75009 Paris
33
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Base documentaire de l’Ireb consultable
sur Internet : www.ireb.com
ISSN 1628-2744
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