Maroc et Afrique du Sud : des
situations comparables?
Analyste principal :
Patrick W Raleigh, London (44) 20-7176-7194; [email protected]
Analyste secondaire :
Ravi Bhatia, London (44) 20-7176-7113; ravi.bhatia@standardandpoors.com
Sommaire
Vue d'ensemble
Économie : l'Afrique du Sud affiche un revenu deux fois supérieur à celui du
Maroc, mais un taux de croissance moitié moindre
Flexibilité sur le plan extérieur : un déficit de la balance courante dans
chacun des pays, mais qui diminue au Maroc
Flexibilité monétaire : nette supériorité de l'Afrique du Sud
Évaluation budgétaire : les deux pays pourraient rester déficitaires pendant
les quatre prochaines années
Évaluation des institutions : l'Afrique du Sud est mieux classée dans tous les
indicateurs de gouvernance de la Banque Mondiale, mais présente des
inégalités plus marquées
Conclusion
Méthodologies et rapports associés
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Maroc et Afrique du Sud : des situations
comparables?
TRADUCTION POUR INFORMATION – cette traduction est destinée à faciliter la compréhension de notre étude en
langue anglaise et est fournie à titre d'information uniquement.
La dette souveraine du Maroc et de l'Afrique du Sud, situés aux deux extrémités de l'Afrique, présentent des
caractéristiques communes, mais également de nombreuses différences. Afin de fournir aux acteurs du marché des
données approfondies sur ces deux pays, Standard & Poor's Ratings Services les a analysés en fonction de ses cinq
principaux critères de notation souveraine: l'économie du pays, sa position sur le plan extérieur, sa flexibilité
monétaire, sa flexibilité budgétaire et la solidité de ses institutions.
Hormis le fait que les deux pays se situent sur le même continent, leur premier point commun est que leur note de
crédit souveraine à long terme en devises étrangères est notée « BBB- » et qu'ils sont les deux seuls pays d'Afrique, en
dehors du Botswana (noté « A- ») à figurer dans la catégorie dite d'« investissement ». Cela n'a toutefois pas toujours
été le cas. En 2010, nous avons relevé notre note de crédit à long terme en devises étrangères du Maroc de « BB+ »
(catégorie dite « spéculative ») à « BBB- » au vu de la tendance croissante de son économie. Nous avons parallèlement
abaissé d'un cran celle de l'Afrique du Sud, alors de « BBB+ », à deux reprises, en octobre 2012 et juin 2014. Cette
révision à la baisse reflétait notre opinion selon laquelle les mouvements de grève de l'époque ralentissaient l'économie
et que les déficits public et de la balance courante, très élevés, risquaient de persister.
Cependant, la note souveraine des deux pays présente toujours une différence majeure, que nous expliquerons en
détail plus loin, à savoir que la note de crédit à long terme en monnaie locale de l'Afrique du Sud, « BBB+ », demeure
supérieure de deux crans à celle du Maroc, qui reste au même niveau que la note de crédit en devises étrangères , à
« BBB- ».
Vue d'ensemble
La note de crédit souveraine à long terme en devises étrangères des deux pays est « BBB- », mais nous attribuons à
l'Afrique du Sud une note de crédit en monnaie locale supérieure de deux crans à celle du Maroc, à « BBB+ », en
raison de sa plus grande flexibilité monétaire.
Le revenu par habitant de l'Afrique du Sud est pratiquement le double de celui du Maroc en dollars, mais son
économie croit quasiment moitié moins vite que celle du Maroc.
D'une manière générale, le milieu des affaires et les institutions sont plus solides en Afrique du Sud qu'au Maroc,
mais les inégalités de revenus et la pauvreté y sont aussi plus marquées.
Le déficit de la balance courante, les besoins de financement extérieurs et l'endettement public des deux pays sont
similaires, mais le Maroc s'inscrit dans une tendance plus favorable.
La part de l'endettement public dans le PIB des deux pays est comparable et nous estimons qu'ils resteront tous
deux déficitaires pendant au moins les quatre prochaines années, même si leur déficit tendra à se consolider.
Tableau 1
Maroc et Afrique du Sud : catégories de scores sous-jacents aux notes
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Tableau 1
Maroc et Afrique du Sud : catégories de scores sous-jacents aux notes (cont.)
Maroc Afrique du Sud
Institutional assessment Neutral Neutral
Economic assessment Weakness Neutral
External assessment Neutral Neutral
Fiscal assessment: flexibility and performance Neutral Weakness
Fiscal assessment: debt burden Neutral Neutral
Monetary assessment Neutral Strength
Économie : l'Afrique du Sud affiche un revenu deux fois supérieur à celui du
Maroc, mais un taux de croissance moitié moindre
La situation économique de chacun des deux pays s'avère très différente, avec néanmoins quelques points communs.
Estimé à 3 400 dollars en 2014, le revenu par habitant du Maroc atteint à peine plus de la moitié de celui de l'Afrique
du Sud, de l'ordre de 6 600 dollars. Le Maroc appliquant un régime de change indexé qui pourrait surévaluer le dirham,
son PIB par habitant pourrait se révéler encore inférieur en dollars si sa monnaie fluctuait selon un taux de change
flottant, comme le rand sud-africain.
Le Maroc peut toutefois se targuer d'enregistrer une croissance économique plus favorable. Nous estimons que le taux
de croissance de son PIB réel par habitant s'établit en moyenne à près de 3 % par an, soit le double de nos prévisions
concernant l'Afrique du Sud, qui sont de 1,5 %. Cette différence peut s'expliquer en partie par l'échelle plus réduite de
l'économie marocaine : les pays à faible revenu enregistrent généralement une croissance plus rapide que les pays plus
développés. Elle reflète également la réussite des nouvelles industries marocaines, favorisées par la politique
industrielle du gouvernement et qui attirent de plus en plus d'investissements privés. L'Afrique du Sud a en revanche
réalisé ces derniers temps des taux de croissance médiocres en raison notamment des grèves qui ont touché ses
principales industries et d'un approvisionnement en électricité insuffisant.
Tableau 2
Maroc et Afrique du Sud : Comparaison économique
Maroc Afrique du Sud
GDP per capita (US$) 2014 (est.) 3400 6600
Ten-year weighted annual average real GDP growth rate, % (2014) 2.92 1.42
Gini coefficient (where 0 represents perfect income equality and 1 perfect inequality) 0.41 0.63
Doing Business ranking 71 43
Economic Freedom Index ranking 89 72
Adult literacy rate (%) 67 93
Poverty rate (%) 2.6 9.4
Human Development Index ranking 129 118
En ce qui concerne leur structure économique, les services prédominent dans les deux pays : ils représentent plus de la
moitié de la production au Maroc et les deux tiers de celle de l'Afrique du Sud. Le Maroc dépend davantage de
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Maroc et Afrique du Sud : des situations comparables?
l'agriculture que l'Afrique du Sud, avec environ 15 % de sa production totale, contre 3 % pour l'Afrique du Sud.
Souvent soumise à des périodes de sécheresse et souffrant d'un manque d'irrigation, sa production agricole apparaît
plus instable que celle de l'Afrique du Sud, bien que cette dernière pourrait également pâtir de la sécheresse cette
année.
Important dans les deux pays, le secteur minier joue un rôle plus marqué en Afrique du Sud, producteur majeur de
minéraux, tels que le charbon, le fer, l'or, les diamants et le platine, dont elle est le plus gros producteur mondial. Le
seul minerai significatif exploité par le Maroc est le phosphate.
Le secteur manufacturier est d'une importance quasiment équivalente dans les deux pays et représente de 12 à 15 %
de leur revenu national. La production manufacturière de l'Afrique du Sud stagne toutefois depuis quelques années en
valeurs réelles, tandis que celle du Maroc a bondi dans certains domaines, comme l'aéronautique et l'automobile.
Depuis l'ouverture d'une vaste usine Renault-Nissan à Tanger en 2012, le Maroc, jusqu'alors relativement insignifiant
dans ce secteur, est devenu le deuxième plus gros constructeur automobile du continent, juste derrière l'Afrique du
Sud. La forte dévalorisation du rand survenue récemment pourrait toutefois stimuler les exportations de produits
manufacturiers du pays.
Comparaison du milieu des affaires des deux pays
En ce qui concerne le milieu des affaires, l'Afrique du Sud figure à la 43e place dans l'indice Doing Business de la Banque Mondiale, soit avant le
Maroc, qui se situe à la 71e place. Selon l'indice de la liberté économique calculé par le groupe de réflexion américain Heritage Institute, les deux
pays sont toutefois plus proches, même si l'Afrique du Sud reste en tête : elle se classe ainsi à la 72e position et le Maroc à la 89e (tous deux dans
la catégorie « modérément libre »).
D'après l'enquête de la Banque Mondiale, le milieu des affaires du Maroc souffre principalement des insuffisances du système judiciaire du pays. Il
est ainsi 122e mondial pour la protection des investisseurs minoritaires, 113e pour la prise de mesures contre l'insolvabilité et 81e pour
l'application des contrats, alors que l'Afrique du Sud est respectivement 17e, 39e et 46e.
Le Maroc a entrepris des réformes de grande ampleur de son système judiciaire, qui pourraient apporter une certaine amélioration. Toujours selon
la même enquête, il se trouve aussi très loin derrière l'Afrique du Sud concernant l'accès au crédit.
L'enquête désigne les difficultés à se procurer de l'électricité comme le principal obstacle auquel est confronté le milieu des affaires sud-africain. Le
pays est 158e mondial pour ce critère de mesure, le Maroc, 91e. Les coupures de courant opérées par Eskom, compagnie nationale en difficultés,
ont augmenté ces derniers mois, compte tenu des retards importants qui pèsent sur la mise en service de nouvelles capacités et de l'augmentation
rapide de la demande. Nous estimons que le manque de fiabilité de l'approvisionnement en électricité constitue un handicap majeur pour le pays
et contribue à maintenir la croissance à un niveau médiocre. Le Maroc a pour sa part réussi à éviter de grosses coupures de courant et investi
massivement pour diversifier sa production énergétique de manière à accroître la part de la production issue des sources renouvelables.
Les relations difficiles qu'entretient l'Afrique du Sud avec le secteur industriel affaiblissent également son milieu des affaires. Ses principaux
domaines économiques, en particulier le secteur minier, subissent régulièrement des grèves qui les paralysent totalement et ont de lourdes
conséquences sur l'économie. Les grèves prolongées de 2014 ont coûté cher au pays, limitant la croissance du PIB réel à 1,4 % à peine. Il convient
toutefois de signaler que le Maroc s'est lancé dans une réforme controversée de son système de retraite, à laquelle sont opposés les syndicats et
qui pourrait entraîner des grèves.
Les deux pays déploient des efforts pour créer de l'emploi, notamment pour les jeunes. Le taux de chômage du Maroc,
de 10 %, demeure toutefois nettement inférieur à celui de l'Afrique du Sud, qui ressort à 24 %. Les inégalités
apparaissent également plus marquées en Afrique du Sud. Ainsi, selon le Programme de Développement des Nations
Unies (PNUD), elle affiche l'un des coefficients de Gini (égal à 0 dans une situation d'égalité parfaite et à 1 dans la
situation le plus inégalitaire possible) les plus élevés du monde, à 0,63, contre 0,41 pour le Maroc. Il s'agit là en partie
d'un héritage de l'ancien régime de l'apartheid, qui excluait volontairement la population noire de l'économie. Cette
situation reflète toutefois aussi l'absence de progrès en matière de réduction des inégalités depuis les premières
élections démocratiques, en 1994. Selon les dernières données de la Banque Mondiale, le taux de pauvreté -
proportion de la population vivant avec moins de 1,25 dollar par jour aux taux de change à parité de pouvoir d'achat -
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Maroc et Afrique du Sud : des situations comparables?
est plus élevé en Afrique du Sud (9,4 %) qu'au Maroc (2,6 %).
Le niveau de scolarité diffère fortement dans les deux pays. D'après le PNUD, le taux d'alphabétisation des adultes est
de 67 % seulement au Maroc, contre 93 % en Afrique du Sud. Cette différence s'explique largement par le faible taux
d'alphabétisation des femmes marocaines. Selon la Banque Mondiale, 58 % à peine des jeunes Marocaines savent lire,
contre 89 % des jeunes hommes. Le niveau de développement humain global est toutefois similaire dans les deux
pays. Ainsi, le Maroc figure à la 129e place de l'indice du développement humain du PNUD, l'Afrique du Sud, à la 118e
place.
Flexibilité sur le plan extérieur : un déficit de la balance courante dans chacun
des pays, mais qui diminue au Maroc
Si l'on analyse la position extérieure des deux pays, l'on constate qu'elle montre un déficit de la balance courante par
rapport au PIB d'une ampleur comparable. Nous estimons qu'il atteindra 3,5 % du PIB au Maroc en 2015 et 4,7 % en
Afrique du Sud. Ces déficits suivent toutefois des tendances différentes.
En 2010, l'Afrique du Sud enregistrait un déficit modeste, de 1,5 % à peine de son PIB. Il n'a cessé de se creuser
depuis, en raison principalement de l'aggravation du déficit commercial, les exportations s'étant révélées décevantes,
en partie à la suite des grèves du secteur minier. Parallèlement, le montant des importations s'est envolé, en particulier
pour des produits comme le pétrole, du moins jusqu'à la chute des prix survenue récemment à l'échelle mondiale.
Nous estimons que le déficit de la balance courante de l'Afrique du Sud restera aux alentours de 4,5 à 5,0 % du PIB au
cours des quatre prochaines années.
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