Où vont le taux de participation et le taux de chômage

publicité
24 février 2014
Où vont le taux de participation et le taux de chômage
aux États-Unis?
Le taux de chômage a considérablement diminué depuis son sommet de 10 % atteint en octobre 2009. Bien que le marché
du travail se soit amélioré, une grande partie de la baisse du taux de chômage provient d’une plus faible participation des
Américains à la population active. Cela est un autre symptôme de la reprise atypique de l’économie américaine depuis la
Grande Récession. Ce Point de vue économique cherche à comprendre les mouvements du taux de participation et leurs
effets sur le taux de chômage. Que veut dire une plus faible participation pour le potentiel de l’économie américaine et
quelles sont ses conséquences pour la politique monétaire de la Réserve fédérale américaine?
Hormis la déception causée par la faiblesse des embauches
en décembre 2013 et en janvier 2014, le marché du travail
se porte mieux aux États‑Unis. Depuis deux ans, la moyen‑
ne mensuelle des emplois créés selon l’enquête auprès
des entreprises s’établit à 182 000. Au printemps 2014, le
nombre d’emplois pourrait enfin dépasser le sommet de jan‑
vier 2008 (graphique 1). Rappelons qu’entre ce sommet his‑
torique et le creux cyclique de février 2010, il s’était perdu
8 736 000 emplois. Ce recul de 6,3 % représente la pire
baisse enregistrée depuis la Grande Dépression.
Graphique 1 – L’emploi se situe encore sous son sommet
d’avant la récession
En millions
En millions
Emplois selon l’enquête auprès des entreprises
138
138
137
137
136
136
135
135
134
134
133
133
132
132
131
131
130
130
129
129
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
amélioration, et cela se manifeste dans la baisse du taux de
chômage depuis le sommet de 10 % atteint en octobre 2009
(graphique 2). Rappelons que l’enquête auprès des ménages
est beaucoup plus volatile que celle auprès des entreprises,
ce qui se reflète dans de grandes variations mensuelles de
l’emploi. Toutefois, sur une plus longue période, la tendance
des deux enquêtes se ressemble (graphique 3 à la page 2).
Comme les variations de l’emploi selon l’enquête auprès des
ménages trouvent souvent écho dans des mouvements simi‑
laires de la population active, le taux de chômage demeure
généralement assez stable. Il est donc un indicateur géné‑
ralement apprécié par les marchés, la classe politique, les
observateurs de l’économie et les banques centrales.
Graphique 2 – Le taux de chômage est en nette diminution
En %
En %
Taux de chômage
10
10
9
9
8
8
7
7
6
6
5
5
4
4
2007
La deuxième enquête sur le marché du travail, celle ef‑
fectuée auprès des ménages, affiche aussi une bonne
François Dupuis
Vice-président et économiste en chef
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
Yves St-Maurice
Directeur principal et économiste en chef adjoint
514-281-2336 ou 1 866 866-7000, poste 2336
Courriel : [email protected]
Francis Généreux
Économiste principal
Note aux lecteurs : Pour respecter l’usage recommandé par l’Office de la langue française, nous employons dans les textes et les tableaux les symboles k, M et G pour désigner respectivement les milliers, les millions et les milliards.
Mise en garde : Ce document s’appuie sur des informations publiques, obtenues de sources jugées fiables. Le Mouvement des caisses Desjardins ne garantit d’aucune manière que ces informations sont exactes ou complètes. Ce document est communiqué
à titre informatif uniquement et ne constitue pas une offre ou une sollicitation d’achat ou de vente. En aucun cas, il ne peut être considéré comme un engagement du Mouvement des caisses Desjardins et celui-ci n’est pas responsable des conséquences
d’une quelconque décision prise à partir des renseignements contenus dans le présent document. Les prix et les taux présentés sont indicatifs seulement parce qu’ils peuvent varier en tout temps, en fonction des conditions de marchés. Les rendements
passés ne garantissent pas les performances futures, et les Études économiques du Mouvement des caisses Desjardins n’assument aucune prestation de conseil en matière d’investissement. Les opinions et prévisions figurant dans le document sont,
sauf indication contraire, celles des auteurs et ne représentent pas la position officielle du Mouvement des caisses Desjardins. Copyright © 2014, Mouvement des caisses Desjardins. Tous droits réservés.
24 février 2014
Point de vue économique
Graphique 3 – Les variations de l’emploi selon les deux enquêtes
sont similaires sur une grande période
Var. ann. en %
Var. ann. en %
Croissance de l’emploi
4
4
3
3
2
2
1
1
0
www.desjardins.com/economie
Graphique 4 – Le nombre de participants à la population active
est pratiquement stagnant
En millions
En millions
157
157
155
155
153
153
151
151
149
149
0
(1)
Shutdown du
gouvernement fédéral
en octobre 2013
(2)
(1)
(2)
(3)
(3)
(4)
(4)
(5)
(5)
(6)
2000
(6)
2002
2004
2006
2008
Enquête auprès des ménages
2010
2012
2014
147
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
147
2005
Enquête auprès des entreprises
2007
2008
2009
2010
2011
La présente situation de l’économie américaine n’est évi‑
demment pas si sombre, mais une bonne partie de la baisse
du taux de chômage au cours des dernières années provient
d’un mouvement de la population active. Malgré l’amélio‑
ration notable des conditions économiques, la population
active est pratiquement stagnante (graphique 4). En fait, si
l’on compare cette population avec celle de 16 ans et plus,
le taux de participation continue de diminuer (graphique 5).
L’encadré à la page 3 affiche les différences entre la popula‑
tion totale, la population civile et la population active.
Cette baisse du taux de participation masque la vraie situa‑
tion de l’emploi. Si l’on compare directement le niveau de
l’emploi à la population civile totale pour calculer un taux
d’emploi, on remarque qu’il n’a pratiquement pas bougé
depuis la fin de la récession (graphique 6). La situation du
marché du travail paraît ainsi bien plus sombre que ce que
nous indique le taux de chômage, qui lui est en baisse quasi
constante.
2
2013
2014
Graphique 5 – Le taux de participation est en baisse
En % de la population civile
En % de la population civile
66,5
66,5
66,0
66,0
65,5
65,5
65,0
65,0
64,5
64,5
64,0
64,0
63,5
63,5
63,0
63,0
62,5
62,5
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
Graphique 6 – Le taux d’emploi est stable
En % de la population civile
Baisse du taux de participation
2012
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
Les lacunes actuelles du taux de chômage
Le taux de chômage est un des indicateurs les plus véhicu‑
lés et utilisés. Pourtant, il comporte certaines lacunes qui
se font ces temps-ci de plus en plus importantes. Rappelons
que le taux de chômage est le ratio en pourcentage du
nombre de chômeurs sur la population active. Il subit donc
les variations de ces deux composantes. La grande volatilité
mensuelle de l’emploi selon cette enquête a déjà été souli‑
gnée. L’autre lacune importante vient des mouvements de
la population active qui peuvent fausser l’image que donne
le taux de chômage de la vraie situation de l’emploi. Dans
un cas extrême où il n’y aurait aucune nouvelle embauche,
mais un nombre grandissant de chômeurs découragés qui
abandonneraient leur recherche d’emploi, le taux de chô‑
mage diminuerait, et ce, même si la situation globale s’est
plutôt détériorée.
2006
En % de la population civile
64
64
63
63
62
62
61
61
60
60
59
59
58
58
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
Une autre manière de voir l’influence des mouvements
récents de la population active sur le taux de chômage est
en combinant l’évolution réalisée de l’emploi tout en gar‑
dant constant le taux de participation. Si l’on fait l’exercice
depuis le sommet du taux de chômage en octobre 2009 en
conservant le taux de participation d’alors, soit 65,0 %, le
taux de chômage est resté bien plus élevé pendant toute la
24 février 2014
Point de vue économique
www.desjardins.com/economie
Estimation de la population américaine en janvier 2014
Population totale
317 612 000
•Militaires
•Population
en institution
Population civile
312 098 000
A. Population civile de 16 ans et plus
246 915 000
•15 ans
et moins
•Étudiants
•Retraités
•Personnes
au foyer
•Chômeurs
découragés
B. Population active
155 460 000
91 455 000
C. Chômeurs
(cherchent activement de l’emploi)
10 236 000
D. Travailleurs
145 224 000
Taux de chômage = C/B*100 = 10 236 000/155 460 000 = 6,6 %
Taux de participation = B/A*100 = 155 460 000/246 915 000 = 63,0 %
Taux d’emploi = D/A*100 = 145 224 000/246 915 000 = 58,8 %
Sources : Bureau of Labor Statistics, U.S. Census Bureau et Desjardins, Études économiques
reprise et n’est tombé qu’à 9,5 % en janvier 2014. Ainsi, de
ce niveau jusqu’au 6,6 % réalisé, la presque totalité de la
diminution du taux de chômage provient de la baisse du
taux de participation. Il faut toutefois souligner qu’au cours
des derniers mois de 2013, la baisse de la participation a été
amplifiée par le shutdown des activités du gouvernement
fédéral en octobre et par des conditions météorologiques
difficiles en décembre.
Comment évoluera le taux de participation?
On peut se demander si la participation des Américains à
la population active demeure atypique ou si elle prendra tôt
ou tard le chemin normalement parcouru lors des reprises
économiques et des cycles de croissance. Il est normal que
le taux de participation tombe en période de récession alors
que l’absence d’opportunité de travail décourage la recher‑
che d’emploi. À cause des grands mouvements démogra‑
phiques ou liés aux habitudes changeantes (changement de
cohorte des baby-boomers, entrée massive des femmes sur
le marché du travail durant les années 1970 et 1980), l’effet
de ce découragement n’est pas toujours très apparent (gra‑
phique 7 à la page 4), mais il se manifeste davantage lorsque
l’on compare le taux de participation à sa propre tendance
(graphique 8 à la page 4). Une fois la reprise bien entamée,
la participation progresse plus rapidement, ce qui tend à
ralentir la baisse du taux de chômage puisque les chômeurs
découragés reviennent s’ajouter aux chercheurs d’emploi
actifs. Par la suite, le taux de participation (toujours par
rapport à sa tendance) augmente tout au long du cycle de
croissance.
3
24 février 2014
Point de vue économique
Graphique 7 – Le taux de participation diminue en récession
En % de la population civile
En % de la population civile
68
68
66
66
64
64
62
62
60
60
58
58
1950 1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010
Récessions
Taux de participation
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
Graphique 8 – Le taux de participation est grandement influencé
par les cycles économiques
En % de la population civile
En % de la population civile
1,5
1,5
1,0
1,0
0,5
0,5
0,0
0,0
(0,5)
(0,5)
(1,0)
(1,0)
(1,5)
(1,5)
(2,0)
(2,0)
1950 1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010
Récessions
www.desjardins.com/economie
En dehors du premier point et des deux derniers qui de‑
vraient peu à peu s’écarter à mesure que la croissance éco‑
nomique s’améliore et que les capacités excédentaires de
production se réduisent, les autres facteurs devraient conti‑
nuer à limiter la croissance de la population active au cours
des prochaines années.
Le principal effet proviendra du vieillissement de la popu‑
lation. Le graphique 9 présente le changement dans la ré‑
partition de la population civile de 16 ans et plus en 1992,
en 2002, en 2012 ainsi que la prévision du Bureau of Labor
Statistics (BLS) pour 2022. En trente années, la proportion
des 55 et plus sera passée de 26,3 % à 37,9 %. Une impor‑
tante augmentation du taux d’activité à l’intérieur de cette
cohorte est déjà observable depuis plusieurs années, et ce,
même pendant la récession (graphique 10), mais ce n’est pas
assez pour contrebalancer le fait que, même en 2022, le taux
de participation y restera bien plus faible que celui de la
cohorte la plus active, soit les 25 à 54 ans. Le graphique 11
à la page 5 présente le taux de participation par âge en 1992,
en 2012 et en 2022.
Graphique 9 – La population plus âgée prend déjà
une plus grande place
En %
En %
Proportion de chaque catégorie d’âge à la population civile
25
25
20
20
15
15
10
10
Écart à la tendance
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
Quatre ans et demi après la fin officielle de la récession et
avec plus de 7,8 millions d’emplois créés depuis le creux du
cycle, le taux de participation est encore sur un parcours
baissier. Plusieurs facteurs expliquent ce mouvement :
• La faiblesse de la reprise économique qui alimente un
certain scepticisme des chômeurs découragés.
• Le vieillissement de la population alors que de plus en
plus de travailleurs et de chômeurs ne désirent plus participer activement au marché du travail.
• Une baisse dans la participation des jeunes au marché
du travail, notamment pour poursuivre des études plus
longtemps.
• Les changements technologiques qui provoquent une
divergence entre le type d’employés demandés et les
compétences des chômeurs.
• Les problèmes du marché immobilier qui ont pu limiter la
mobilité des travailleurs.
5
5
16 à 24 ans
25 à 34 ans
35 à 44 ans
2022*
45 à 54 ans
1992
2002
65 à 74 ans
75 et plus
2012
* Prévisions du Bureau of Labor Statistics.
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
Graphique 10 – Le taux de participation a augmenté depuis dix ans
chez les 55 ans et plus
En % de la population civile
En % de la population civile
41
41
40
40
39
39
38
38
37
37
36
36
35
35
34
34
33
33
32
2000
2002
2004
2006
2008
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
4
55 à 64 ans
2010
2012
32
2014
24 février 2014
Point de vue économique
www.desjardins.com/economie
Graphique 11 – Même si elle augmente,
la participation des personnes plus âgées demeure faible
En % de la population civile
Graphique 13 – Le taux de participation devrait continuer à reculer
En % de la population civile
En % de la population civile
En % de la population civile
100
67,5
90
67,0
80
80
66,5
66,5
70
70
66,0
66,0
60
60
65,5
65,5
50
50
65,0
65,0
40
40
64,5
64,5
30
30
64,0
64,0
20
20
63,5
63,5
10
10
63,0
63,0
0
62,5
62,5
100
Taux de participation par catégories d’âge
90
0
16 à 24 ans
25 à 34 ans
35 à 44 ans
45 à 54 ans
1992
2012
55 à 64 ans
65 à 74 ans
75 et plus
2022*
Graphique 12 – Les prévisions de croissance de la population
active américaine ont été revues à la baisse
En millions
Population active
165
165
160
160
155
155
Réalisé
Prévision du BLS* de novembre 2009
Prévision du BLS* de février 2012
Prévision du BLS* de décembre 2013
145
2005
2007
2009
2011
2013
2015
67,0
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
Il faut donc s’attendre à ce que la population active aug‑
mente très modestement au cours du reste de la décennie.
Il faut toutefois noter que les prévisions à ce sujet ont été
plutôt instables (graphique 12); outre les mauvaises prévi‑
sions quant à l’évolution démographique de la population
américaine, ces « erreurs » proviennent aussi des effets
conjoncturels et structurels engendrés par la récession.
Comme la population active progressera moins rapidement
que la population civile, il faudra tabler sur une réduction
graduelle du taux de participation. Continuant ainsi la ten‑
dance entamée depuis déjà plus de dix ans (graphique 13).
150
67,5
62,0
62,0
1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 2011 2013 2015 2017 2019 2021
* Prévisions du Bureau of Labor Statistics.
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
En millions
Prévisions
de Desjardins
2017
2019
2021
150
145
2023
* Bureau of Labor Statistics.
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
Le Congressional Budget Office (CBO) a récemment prédit
que la mise en place de la réforme de la santé du prési‑
dent Obama aura des répercussions de long terme sur le
taux de participation. Dans leurs prévisions budgétaires, les
analystes du CBO ont estimé que le fait que les travailleurs
vont pouvoir disposer d’une assurance maladie abordable
d’une autre façon que celle fournie par les employeurs va
permettre à certains Américains de travailler moins, selon
leur préférence. Les subventions permettant aux moins
fortunés d’acheter une assurance maladie, dont la valeur
décroît selon les revenus des ménages, constituent égale‑
ment un incitatif à offrir moins d’heures de travail.
Les effets sur le taux de chômage
La diminution du taux de participation a évidemment
des implications sur le taux de chômage. Une hausse
plus modeste du nombre de personnes actives implique
aussi, à terme, une progression plus faible du nombre de
travailleurs. Le taux de chômage variera selon la vitesse
qu’évolueront ces deux taux de croissance. À court terme,
la progression de l’économie devrait favoriser une assez
bonne croissance de l’emploi. Avec une hausse annuali‑
sée du PIB réel de seulement 1,9 % en 2013, l’économie
américaine a réussi à créer 2 322 000 emplois. Un taux de
croissance plus rapide du PIB alors que l’économie améri‑
caine sera beaucoup moins freinée par la politique budgé‑
taire fédérale ( fiscal cliff, sequester, shutdown et risque de
défaut causé par le plafond de la dette) devrait amener de
bons gains du côté de l’emploi. Malgré les faiblesses récen‑
tes de décembre 2013 et de janvier 2014, le rythme d’envi‑
ron 200 000 embauches par mois devrait vite reprendre le
dessus. Si les fluctuations de l’enquête auprès des ménages
ne divergent pas trop de celles auprès des entreprises, on
peut s’attendre à une hausse continue du nombre d’emplois.
Comme, en moyenne, la population active devrait augmen‑
ter d’un peu moins de 100 000 personnes par mois en 2014
et en 2015, la proportion représentée par les détenteurs
d’emploi sera de plus en plus grande. Inversement, celle du
nombre de chômeurs s’amenuisera puisqu’ils seront de plus
en plus nombreux à se trouver des postes. Ainsi, le taux de
chômage devrait continuer à diminuer (graphique 14 à la
page 6). La croissance plus rapide de la population civile
que de la population active devrait par contre faire en sorte
que le taux d’emploi augmentera plus modestement (graphi‑
que 15 à la page 6).
5
24 février 2014
Point de vue économique
Graphique 14 – Le taux de chômage devrait continuer à reculer
à court terme
En %
En %
Prévisions
de Desjardins
10
9
www.desjardins.com/economie
Graphique 16 – À plus long terme, le taux de chômage
se stabilisera probablement autour de 5 %
En %
En %
11
10
Prévisions
de Desjardins
10
11
10
9
9
9
8
8
8
8
7
7
7
7
6
6
5
5
4
4
6
6
5
5
4
4
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
Graphique 15 – Le taux d’emploi augmentera très modestement
En % de la population civile
En % de la population civile
64
Prévisions
de Desjardins
63
64
63
62
62
61
61
60
60
59
59
58
58
57
57
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
À plus long terme, la croissance de l’emploi devrait être
de plus en plus ralentie par la faiblesse de la participation.
Ainsi, à la manière de ce que prévoit le BLS, la moyenne
des embauches mensuelles devrait être moins grande que
ce qu’elle nous a habitué récemment. De 2016 à la fin de
la décennie, ces gains devraient se rapprocher davantage
des 100 000 nouveaux travailleurs par mois. Cela devrait
stabiliser le taux de chômage tendanciel vers les 5 % (gra‑
phique 16). Évidemment, la conjoncture économique qui
prévaudra alors aura le pouvoir de faire diverger le taux
de chômage de cette tendance issue des mouvements
démographiques.
Vers un potentiel de croissance plus faible
pour l’économie américaine?
Le potentiel d’une économie repose surtout sur deux fac‑
teurs : les heures travaillées par la main-d’œuvre et la
productivité de celle-ci. La productivité des travailleurs a
fait des bonds énormes au cours des dernières décennies
grâce aux avancées technologiques. La haute productivité
a même eu un certain effet pervers au début de la reprise :
l’économie a pu s’accélérer sans que l’emploi ne progresse
6
3
3
1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 2011 2013 2015 2017 2019 2021
vraiment. Par exemple. Le PIB réel a rejoint son sommet
d’avant la crise au printemps de 2011 alors que l’emploi n’a
même pas encore regagné tout le terrain perdu.
Il y a plusieurs façons d’estimer le niveau potentiel de l’éco‑
nomie américaine. Une des plus utilisées est celle calculée
par le CBO. Selon celui-ci, le PIB réel américain se trouvait
au dernier trimestre de 2013, 3,8 % sous le PIB potentiel
réel. Il reste donc encore beaucoup de capacités inutilisées
de production aux États‑Unis, et ce, même si la croissance
du potentiel est beaucoup plus lente maintenant qu’elle ne
l’était avant la récession. Le CBO estime que cette crois‑
sance était de 3,2 % entre 1982 et 2001, aidée par une forte
progression de la population active dans les années 1980 et
par une bonne productivité dans les années 1990. Ces deux
facteurs ont toutefois ralenti depuis, et le CBO estime que
la croissance du potentiel sera de 2,0 % entre 2014 et 2017 et
de 2,2 % par la suite (graphique 17). C’est surtout la faibles‑
se de la croissance de la population active qui expliquera la
faiblesse future du potentiel (graphique 18 à la page 7).
Graphique 17 – La croissance du PIB réel potentiel a ralenti
Var. ann. en %
Var. ann. en %
Prévisions
du CBO*
4,5
4,5
4,0
4,0
3,5
3,5
3,0
3,0
2,5
2,5
2,0
2,0
1,5
1,5
1,0
1960
1,0
1970
1980
1990
* Congressional Budget Office.
Sources : Congressional Budget Office et Desjardins, Études économiques
2000
2010
2020
24 février 2014
Point de vue économique
www.desjardins.com/economie
Graphique 18 – La faiblesse de la population active amène
une croissance plus faible du PIB potentiel
En points de %
3,5
Contributions à la croissance annuelle moyenne
du PIB réel potentiel
En points de %
3,0
3,0
2,5
2,5
2,0
2,0
1,5
1,5
1,0
1,0
0,5
0,5
0,0
0,0
1991-2001
2002-2013
Population active
2014-2017*
2018-2024*
Productivité
* Prévisions du Congressional Budget Office.
Sources : Congressional Budget Office et Desjardins, Études économiques
Un taux plus faible de croissance du potentiel implique
qu’il faudra s’habituer à voir les indicateurs économiques
progresser moins rapidement, une offre globale plus lente
impliquant également une demande globale moins rapide.
Tant que l’équilibre entre les deux est relativement respecté,
il ne devrait toutefois pas y avoir trop de pression sur les
prix et les salaires. En fait, on ne s’attend pas à ce que l’écart
entre le PIB réel et son potentiel ne se referme avant 2019.
Ainsi, un potentiel plus faible n’implique donc pas néces‑
sairement plus d’inflation, comme le cas extrême du Japon
le démontre.
Les conséquences pour la politique
monétaire
Depuis décembre 2012, la Réserve fédérale américaine
(Fed) identifie trois facteurs qui l’incitent à garder les taux
directeurs inchangés à un taux très bas. Deux de ces fac‑
teurs touchent l’inflation, l’autre le taux de chômage. La
Fed juge que les taux doivent rester au niveau actuel (entre
0,00 % et 0,25 %) tant que le taux de chômage demeure
au-dessus de 6,5 %. La baisse du taux de chômage au cours
des derniers trimestres a beaucoup rapproché cette « cible »
et elle pourrait même être atteinte dans les prochains mois.
Ce développement s’est fait beaucoup plus rapidement que
ce que prévoyait la Fed lorsqu’elle a dicté ses conditions : à
la réunion du 12 décembre 2012, les membres du comité de
politique monétaire de la Fed estimaient que la moyenne du
taux de chômage au quatrième trimestre de 2013 se situerait
entre 7,4 % et 7,7 %. Il s’est plutôt situé à 7,0 %. Comme
nous l’avons vu, une grande partie du recul plus important
que prévu du taux de chômage au cours de la dernière année
provient de la baisse du taux de participation et du fait que
celui-ci n’a pas évolué comme à l’habitude en période de
reprise.
La baisse rapide du taux de chômage complique donc la
tâche de la Fed qui n’est évidemment pas prête à entamer
une hausse des taux directeurs alors qu’elle vient à peine de
commencer à réduire ses achats de titres obligataires. Pour
le moment, elle peut argumenter que les autres composantes
de son indication prospective continuent de militer pour la
patience : l’inflation reste sous le seuil de 2,0 % et les antici‑
pations inflationnistes sont toujours bien ancrées.
À court terme, la Fed pourrait aussi décider de réviser
à la baisse le seuil de 6,5 % identifié pour le taux de
chômage. Elle gagnerait ainsi du temps. On sent toutefois
que Janet Yellen et ses collègues cherchent plutôt à élargir
officieusement ce qui constitue le tableau du marché du
travail américain. Dorénavant, l’accent sera probablement
de moins en moins sur le taux de chômage, mais davantage
sur d’autres indicateurs. Dans un récent discours,
Janet Yellen en a mentionné certains, comme le chômage
de longue durée (graphique 19) et le nombre de personnes
travaillant involontairement à temps partiel (graphique 20).
Le taux d’emploi dans la principale catégorie d’âge des
Graphique 19 – Le chômage de longue durée demeure
très problématique
En %
Proportion des chômeurs depuis plus de 27 semaines
50
En %
50
45
45
40
40
35
35
30
30
25
25
20
20
15
15
10
10
5
5
0
1990
0
1992
1994
1996
1998
2000
2002
2004
2006
2008
2010
2012 2014
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
Graphique 20 – Beaucoup de travailleurs occupent un travail
à temps partiel alors qu’ils préféreraient un emploi à temps plein
En millions
10
Nombre de travailleurs involontairement à temps partiel
En millions
10
9
9
8
8
7
7
6
6
5
5
4
4
3
1990
3
1992
1994
1996
1998
2000
2002
2004
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
7
2006
2008
2010
2012 2014
24 février 2014
Point de vue économique
travailleurs (graphique 21) ou les statistiques concernant le
nombre de nouveaux postes disponibles ou les cessations
involontaires d’emploi sont aussi des indicateurs permettant
de juger de la santé du marché du travail. Ainsi, même si
le taux de chômage est presque rendu au seuil identifié par
la Fed, celle-ci dispose d’assez d’arguments pour attendre
longtemps avant de commencer un début de normalisation
des taux directeurs. On n’attend pas de hausse avant
septembre 2015.
Graphique 21 – Malgré la récente amélioration, le taux d’emploi
demeure faible chez les 25 à 54 ans
En % de la population civile
En % de la population civile
82
82
81
81
80
80
79
79
78
78
77
77
76
76
75
75
74
1990
74
1992
1994
1996
1998
2000
2002
2004
2006
2008
2010
2012 2014
Sources : Bureau of Labor Statistics et Desjardins, Études économiques
Francis Généreux
Économiste principal
8
www.desjardins.com/economie
Téléchargement