Sur l’ind´eterminisme de la m´ecanique quantique
J. Solomon
To cite this version:
J. Solomon. Sur l’ind´eterminisme de la m´ecanique quantique. J. Phys. Radium, 1933, 4 (1),
pp.34-37. <10.1051/jphysrad:019330040103400>.<jpa-00233130>
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SUR
L’INDÉTERMINISME
DE
LA
MÉCANIQUE
QUANTIQUE
Par
J.
SOLOMON.
Sommaire. 2014
On
discute
dans
ce
travail la
façon
dont
une
théorie
déterministe à
para-
mètres
cachés
peut
rendre
compte
de
l’indéterminisme
de
la
mécanique
quantique.
On
montre
l’impossibilité
mathématique
de
l’équivalence
des
deux
théories.
Le
but
de
cette
courte
note
est
de
préciser
et
de
réfuter
une
idée
qui
a
été
mise
en
avant
pour
«
sauver
»
le
déterminisme
cléfaillant
dans
le
domaine
subatomique.
Certes,
la
mécanique
quantique
(1)
forme
actuellement
une
doctrine
particulièrement
remarquable
par
son
développement
logique
et
libre
de
toute
contradiction.
Mais,
de
même
que
la
nouvelle
notion
relativiste
de
simultanéité,
liée
au
fait
que
la
vitesse
de
la
lumière
a
une
grandeur finie,
a rencontré de
nombreuses
résistances
avant
de
s’imposer,
(le
même
la théorie
quantique,
avec
sa
nouvelle
conception
de
la
causalité,
liée
à
la
valeur
finie
du
quantum
élémentaire
d’action,
se
heurte
de
façon
autrement
profonde à
nos
formes
d’intuition
basées
sur
l’expérimentation
macroscopique.
Ce
renoncement
peut
paraître
si
douloureux
qu’on
s’est
demandé
s’il
n’était
pas
possible
par
une
généralisation
convenable
(mais
res-
tant
toujours
sur
le
terrain
déterministe)
de
la
théorie
classique
de
l’éviter.
C’est
de
cette
hypothèse,
qui
semble ,la
seule
possible
et
que
nous
appellerons
théorze
des
paramètre
cachés,
que
nous
allons
nous
occuper
(2 J.
~
Par
théorie
des
paramètres
cachés
nous
entendrons
l’ordre
d’idées
suivant.
En
méca-
nique
classique
il
est
possible
de
suivre
le
développement
causal
d’un
système
tout
en
conservant
sa
description
par
les
concepts
spatio-temporels
usuels.
En
d’autres
termes, à
chaque
instant t
nous
poovons
mesurer
la
position
et
la
vitesse
du
mobile
considéré.
Par-
ticularisons
le
problème.
Considérons
le
point
matériel
de
la
mécanique
rationnelle,
défini
par
sa
coordonnée
(1) x
et
sa
vitesse
v, A
l’instant t
on
a
~
et v
ne
dépendent
que
de
t :
à
vrai
dire,
d’autres
paramètres
entrent
en
jeu,
ce
sont
la
vitesse
et
la
position
du
point
à
un
instant
quelconque t,,,
mais
ces
données
initiales
sont
fixées
une
fois
pour
toutes
et
n’entrent
pas
à
nouveau
en
jeu
à
l’occasion
de
chaque-
mesure.
Donc
une
fois
ce
choix
fait,
à
une
valeur
de t
correspondent
des
valeurs
parfaite-
ment
déterminées
de
.x
et
de
v.
Comme
il
est
bien
connu,
l’existence
du
quantum
élémentaire
d’action
crée
dans
le
(!)
Par
mécanique
quantique,
nous
entendrons
dans
ce
qui
suit
exclusivement
la
mécanique
quantique~
non
relativiste.
Seule
celle-ci
en
effet
forme
un
ensemble
libre
de
contradictions.
La
mécanique
quantique
relativiste
-
qui
n’existe
pas
encore -
semble
devoir
nécessiter
des
renoncements
encore
plus
profonds
à
nos
concepts
les
plus
habituels
(tels
que
la
conservation
de
l’énergie
par
exemple) :
Cf.
L.
Landau
et
R.
Peierts,
Z.
(1931),56;
adaption
française
dans
les
Actualités
de
physique
théorique
(Hermann) ;
-- ’.
Bohr,
Faraday
Lecture,
Journal
of
the
cheniical
Society
(1932);
convegno
di
Fisica
1r’ucleare
(1931).
e)
Dans
un
livre
dont
j’ai
pris
connaissance
lorsque
ce
travail
était
déjà
terminé,
J.
von
Neumann
(Qlatliematische
Grundlagen
der
Quantenmechanik)
donne
une
démonstration
de
l’impossibilité
de
cette
théorie
qui
me
semble
distincte
de
celle
indiquée
ci-dessous.
Comme
celle-ci
n’utilise
pas,
à
ce
qu’il
me
semble,
le
formalisme
de
l’espace
de
Hilbert
qui
peut
paraître
à
certains
assez
éloigné
du
réel
physique,
il
nous
a
paru
qu’il
y
avait
peut
être
intérêt
à
publier
notre
démonstration.
Dans
ce
qui
suit,
pour
ne
pas
compliquer
les
notations,
nous
n’envisagerons
qu’un
continum
linidimensionnel.
Mais
les
résultats
se
laissent
immédiatement
généraliser
à
un
nombre
quelconque
de
dimensions.
Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/jphysrad:019330040103400
35
dom@tint
atomique
une
situation
bien
différente.
L’interréaction
de
l’appareil
de
mesure
et
de :
r
particule
étudiée
entraine
l’impossibilité
d’une mesure
simultanée
de v
et
de
z.
Si
iiou,
nous
permettons
une
erreur
possible à x
sur
la
position
de
la
particule,
on
sait
que,
d’après
Ileisenberg,
o
a
pYllT
possible
Ll v
sur
sa
vitesse,
lorsque v
est
faible
devant
la
vitesse
de
la
lumière;
dans
la
formule
IJrécédente, h
désigne
la
constante
de
Planck.
Au
contraire,
x
et v
sont
mesurables
avec
toute
la
précision
désirée
quand
ils
ne
se
rapportent
pas
au
instant
t.
De
ce
qui
précède
il
suit
que
le
groupe
de
relations
(1)
n’est
plus
valable
dans
le
domaine
de
la
mécanique
quantique.
Tout
ce
que
nous
pouvons
nous
donner,
ce
sont
des
probabilités
de
trouver
pour x
ou v
des
valeurs
déterminées.
La
probabilité
pour
que x
ait
une
valeur
comprise
entre
x
et
x
+ d
x
à
l’instant
t
sera
(où
l’astérisque
marque
que
l’on
passe
à
la
quantité
conjuguée
complexe)
et
de
même
la
probabilité
pour
que r
ait
une
valeur
comprise
entre v
est
v
+
dv
à
sera
La
ielation
iiiiplicite
filtre
x et v
comprise
dans
(1)
(par
élimination
de
1)
est
remplacée
par
selon
la
théorie
des
transformations
de
Dirac
et
Jordan.
Dans
ces
conditions,
il
est
peut-être
permis
de
se
poser
la
question
suivante :
en
mécanique
quantique,
1
étant
connu,
x
peut
être
déterminé,
mais v
alors
est
complètement
indéterminé,
et
réciproquement.
Est-il
possible
que
cet
état
de
choses
provienne
de
ce
que
notre
représentation
de
la
marehe
causale
des
phénomènes
est
incomplète ;
en
d’autres
termes
qu’un
(ou
plusieurs)
paramètre
supplémentaire
soit
nécessaire
pour
qu’une
lescrip-
tion
causale
complète
d’un
phénomène
ssoit
possible
C’est à
ces
paramètres
(de
nature
inconnue
pour
le
moment)
que
nous
donnerons
le
nom
de
pararnètres
cachés
(verborgene
Parameter).
On
pourra
alors
se
représenter
les
choses
de
la
façon
suivante :
(1)
sera
remplacé
par
où ii,
représente
le
paramètre
caché.
Nous
avons
supposé,
pour
simplifier
les
notations,
qu’il
suffise
d’un
paramètre
caché,
mais
les
choses
se
passent
de
façon
identique
avec
plusieurs
paramètres.
A
une
valeur
déterminée
de t
correspond,
suivant
la
valeur
de
u,
une
infinité
de
valeurs
de x
et
l’on
comprend
que,
du
moment
que
ignorons
tout
de
u,
tout
ce
que
nous
pouvons
connaître
est
la
statistique
des
valeurs
possibles
de x,
corres
pondant à
la
donnée
d’une
certaine
fonction
de
répartition
(3).
D’autre
part,
lorsque
nous
faisons
une
mesure
de x,
nous
prenons
consciemment
un
certain
instant t,
et
inconsciem-
ment
une
certaine
valeur
du
paramètre
caché
iii ;
si
d’autre
part
nous
voulons
mesurer v
au
même
instant
t,,
rien
ne
peut
nous
certifier,
par
définition,
puisque
c’est
un
paramètre
qui
nous
échappe
actuellement,
que
nous
faisons
la
mesure
de v
avec
la
même
valeur
du
paramètre
Mi
que
pour
a. ;
à
une
valeur
déterminée
de x
sera
donc
associée
une
suite
infinie
de
valeurs
de v,
rendant
compte
ainsi
du
principe
d’indétermination.
Remarquons
que
par
inversion
des
relations
(3)
et
(4),
on
peut
écrire
et v
sous
une
forme
très
voisine
de
(6) :
36
Les
deux
paramètres ?u
et
~1
ne
sont
pas
indépendants,
mais
liés
implicitement
par
les
relations
(5).
Il
n’est
pas
très
difficile
(1)
de
montrer
que
cette
interdépendance
n’est
autre
chose
que
le
principe
d’inclétermination
(2).
Ainsi
donc
la
conception
des
paramètres
cachés
nous
permet
de
nous
rendre
assez
aisé-
ment
compte
de
façon
qualitative
de
l’inléterminisme
de
la
mécanique
quantiqae.
Sans
doute,
à
ce
stade,
elle
est
d’un
intérêt
assez
mince
puisqu’elle
ne
prétend
que
donner
un
ensemble
de
concepts
entièrement
équivalent
à
celui
de
la
mécanique
quantique.
En
somme,
nous
remplaçons
le
système
parfaitement
logique
de
la
mécanique
quantique,
mais
d’où
la
causalité
au
sens
classique
est
exclue,
par
un
autre
système
parfaitement
déterministe
mais
comportant
l’hypothèse
d’éléments
naturels
inconnus.
Irrationnel
pour
irrationnel,
l’avan-
tage
est
assez
médiocre.
En
réalité,
tout
l’intérêt
de
cette
théorie
des
paramètres
cachés
est
qu’elle
permet
de
formuler
l’espoir
cluc
ces
paramètresne
seront
pas
toujours
cachés
et
que
la
découverte
des
éléments
de
la
nature
auxquels
ils
correspondent
permettra
de
restituer
la
physique
dans
son
cadre
déterministe
d’antan.
La
démonstration
qui
suit
a
justement
pour
but
de
montrer
que
cette
espérance
est
vaine.
Il
est
en
effet
impossible
d’édifier
une
théorie
à
paramètres
cachés
qui
soit
équiva-
lente
du
point
de
vue
logique
à
la
mécanique
quantique.
Remarquons
tout
d’abord
que
le
fait
que co
et
mj
ne
présentent
pas
de
relation
simple
rend
déjà
improbable
l’existence
de
relations
telles
que
(6).
On
peut
préciser
ceci
de
la
façon
suivante.
Si
d’après
(2)
nous
pouvons
nous
attendre
à
trouver
pour x
toutes
les
valeurs
possibles,
il
n’en
est
pas
moins
vrai
que
certaines
valeurs
sont
plus
fréquemment
rencontrées
que
d’autres.
C’est
ainsi
que
si
nous
mesurons
la
position
de
l’électron
dans
un
atome
d’hydro-
gène
situé
dans
un
certain
état
quantique,
nous
trouverons
une
prédominance
très
sensible-
pour
le
voisinage
de
l’ancienne
orbite
de
Bohr
correspondant
à
cet
état
quantique.
Les
préceptes
généraux
de
la
mécanique
quantique
nous
indiquent
que
la
valeur
moyenne
de
-
n
x,
x
est
donnée
par
de
même
pour
v
le
3x
et
le
àv
qui
figurent
dans
(2)
étant
définis
par
De
façon
plus
générale
(2)
la
valeur
moyenne
de xn
est
donnée
par
,
Passons
maintenant
à
la
théorie
des
paramètres
cachés.
Soit
une
grandeur F (t,
Il
va
sans
dire
que
aussi
nous
devons
retrouver
la
notion
de
valeur
moyenne,
qui
résultera
évidemment
d’une
moyenne
prise
sur
toutes
les
valeurs
possibles
de
u.
En
d’autres
termes,
la
valeur
moyenne F
(t)
de
/11
sera
donnée
par
U
représente
un
opérateur.
Il
est
d’autre
part
évident
que
la
moyenne
de
F
~-
G
doit
être
égale
à
F +
(T
L’opérateur U
est
donc
linéaire
et
il
est
possible,
sous
des
conditions
(1)
W.
HEISEXBERG,
Physikalische
Prinzipien
der
Quantentheorie,
p.
12.
(2)
On
sait
que
la
donnée
des
valseurs
moyennes
successives
x,
x2,
...,
...
est
équivalente
à
la
donnée
de la
fonction ~
(x,
t).
C’est
le
célèbre
problème
des
moments
auquel
reste
attaché
le
nom
de
Slieltjes.
37
très
générales
de
continuité
(toujours
vérifiées
dans
les
problèmes
physiques)
de
mettre
l’opération
(~~~
sous
forme
intégrale :
où G
(u)
désigne
le
noyau
de
l’opérateur
U.
Par
un
simple
changement
de
variable,
on
obtient .
Appliquons
cette
relation
à
la
grandeur x,t
-
f n
(t,
ir) :
Comparons
maintenant
avec
le
résultat
de
la
mécanique
quantique
(1 i)
que
nous
écri-
rons,
en
changeant
simplement
le
nom
des
lettres
Les
deux
valeurs
de xn
données
par
(15)
et
( 16)
devant
être
identiques
quel que
soit t,
on
doit
avoir
identiquement
Or
cette
relation
ne
peut
être
vérifiée
quel
que
soit &#x3E;1
que
lorsque
ce
qui
n’a
évidemment
lieu
que
dans
des
conditions
très
spéciales.
Il
est
donc
impossible
d’obtenir
une
équivalence
générale
entre
la
théorie
quantique
et
la
théorie
des
paramètres
cachés.
Si
l’on
remarque
que
la
donnée
des
valeurs
moyennes
sucçessives
x,
xl...,
est
équi-
valente
à
celle
de
la
probabilité m
(x,
t),
le
sens
de
la
démonstratiou
précédente
est
que,
quelle
que
soit
l’analogie
qualitative
qui
existe
entre
(6)
et
(3)
(et
sur
laquelle
nous
avons
déjà
insisté)
une
identité
quantitative
est
impossible,
on
ne
retrouve
pas
la
loi
de
proba-
bilité
(3).
,
Comme
les
hypothèses
dont
nous
sommes
partis
pour
définir
la
théorie
des
para-
mètres
cachés
nous
semblent
bien
être
les
plus
larges
possibles,
compatibles
avec
la
théorie
quantique,
la
démonstration
qui
précède
nous
semble
être
de
nature
à
éliminer
définitive-
ment
ce
dernier
espoir
d’une
théorie
déterministe
des
phénomènes
atomiques.
Manuscrit
reçu
le
13
novembre
1932.
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