
qu’un signal de récompense puisse être diffusé largement dans le système exécutif et ainsi
renforcer les actions précédemment exécutées.
La dopamine (DA) paraît jouer ce rôle de signal de récompense, comme le montrent
de très nombreuses expériences. Outre son implication dans la plupart des addictions, ce
neuromodulateur répond en phase à la présentation de stimuli positifs comme de la nourriture,
de la boisson ou un partenaire sexuel. L’activation de la dopamine induit indéniablement une
modification des efficacités synaptiques, corrélat biologique indispensable à toute forme
d’apprentissage. Et si le rat peut en pressant un levier exciter directement ses fibres
dopaminergiques (self-stimulation), alors il le fera, et même plutôt que de jouir de toute autre
récompense naturelle présentée en concurrence. Par ailleurs, des antagonistes de la dopamine
bloquent le comportement dirigé vers ces stimuli naturels ou artificiels, comme si la
nourriture, le sexe et les drogues ne présentaient plus pour l’animal de valeur hédonique.
Enfin, la théorie du renforcement prévoit qu’un signal de renforcement est émis dès lors que
l’animal est sûr de recevoir une récompense, et non pas seulement au moment de la
récompense. Cette propriété a été retrouvée lors d’enregistrements de neurones
dopaminergiques chez le singe : lorsque les récompenses peuvent être prédites par un signal
déterminé, alors la dopamine répond cette fois à la présentation de ce stimulus prédicteur et
non plus à la récompense subséquente. C’est cette dernière observation qui a précipité le lien
entre les expériences en neuroscience et le modèle théorique de renforcement.
La théorie du renforcement par la dopamine a rencontré un succès à la hauteur de sa
puissance : la dopamine réalise selon ses dires tout l’apprentissage opérant « à elle toute
seule ». Il s’agirait désormais de l’enrichir de cette notion essentielle qu’est le coût de
l’action. Tout animal est amené en effet à effectuer à chaque instant un compromis entre ces
objectifs antagoniques que sont la recherche de récompenses et la préservation de ses réserves
énergétiques. Or la prise en compte de ce dernier paramètre a remis en cause des résultats
fondamentaux de la théorie de la dopamine. Il apparaît notamment qu’à faible dose, des
antagonistes de la DA peuvent altérer le comportement dirigé vers des récompenses sans
affecter la réponse hédonique à ces stimuli, comme si la DA ne jouait pas sur le plaisir associé
à un stimulus mais sur l’aptitude à se motiver pour y parvenir. Par exemple des rats ainsi
traités préfèreront toujours une grosse récompense à une plus petite, mais choisiront la plus
petite si pour y accéder la marche à franchir est moins élevée. Au-delà de la simple fonction
de la dopamine, c’est la viabilité toute entière des modèles de comportement qui pâtit de cette
remise en cause.
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