Éditorial Sommaire Éditorial >> 3 Du plaisir sans dopamine Du plaisir sans dopamine E. Valjent E. Valjent (Institut national de la santé et de la recherche médicale et Université Pierre et Marie Curie U536, “Signal Transduction and Plasticity in the Nervous System”, Institut du Fer-à-Moulin, Paris) > Actualités >> 7 neurosciences Coordonné par S. Valerio et L. Calandreau 3 questions à... >> 14 La dopamine est neurotoxique dans la maladie de Huntington Entretien avec J. Caboche Prix de thèse 2005 >> 16 Étude d’efficacité et de tolérance de la stimulation électrique des noyaux subthalamiques dans la maladie de Parkinson : analyse de 100 cas au centre de Lille M. Tir L es neurones dopaminergiques du mésencéphale ventral (substance noire compacte et aire tegmentale ventrale) sont peu nombreux, mais ils jouent un rôle fondamental dans le contrôle de la motricité, de la motivation et dans l’apprentissage de conduites facilité par la récompense. Ils innervent le striatum, les régions limbiques et le cortex cérébral. De manière intéressante, tout comme la nourriture et le comportement sexuel, la quasi-totalité des substances ayant la propriété de susciter une consommation abusive chez l’homme facilitent la transmission dopaminergique chez l’animal en augmentant les taux de dopamine extracellulaire au niveau du striatum ventral ou noyau accumbens (NAcc). De fait, la dopamine est depuis longtemps considérée comme le “neurotransmetteur du plaisir”. Pourtant, une publication récente vient bouleverser l’idée communément admise selon laquelle les propriétés de “récompense” induites par les drogues toxicomanogènes nécessitaient l’intégrité du système dopaminergique. Pour tester cette hypothèse, les auteurs ont évalué certaines réponses comportementales induites par la morphine chez des souris déficientes incapables de synthétiser de la dopamine. Ainsi, les effets hyperlocomoteurs et analgésiques de la morphine sont respectivement abolis et fortement diminués chez ces souris. En revanche, en utilisant le modèle de préférence de place conditionnée, dans lequel les animaux apprennent à associer les effets “motivationnels” provoqués par une drogue à un contexte environnemental particulier, les auteurs ont montré que les propriétés de récompense induites par la morphine La Lettre du Neurologue - Suppl. Les Actualités au vol. IX - n° 10 - décembre 2005 3 Éditorial étaient intactes chez ces souris, suggérant par là que la dopamine n’est pas impliquée dans les propriétés “motivationnelles” induites par la morphine ou n’est pas nécessaire à l’apprentissage associatif entre les effets “plaisants” de la morphine et un environnement particulier. Ces résultats surprenants viennent renforcer les conclusions d’une précédente étude réalisée par le même groupe et démontrant que les propriétés de récompense induites par une substance naturelle comme le sucre étaient également préservées chez ces souris sans dopamine. Cet article vient renforcer l’idée selon laquelle la dopamine jouerait un rôle important dans le comportement de recherche de la récompense plutôt que dans l’effet “plaisant” de la récompense ou les apprentissages contrôlés par la récompense. Référence bibliographique > Hnasko TS et al. Morphine reward in dopamine-deficient mice. Nature 2005;438:854-7. 4 La Lettre du Neurologue - Suppl. Les Actualités au vol. IX - n° 10 - décembre 2005 ■