Exposition Enluminures en terre d`Islam

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Richelieu
7 juillet I 25 septembre 2011
Enluminures en terre d’Islam
entre abstraction et figuration
DOSSIER DE PRESSE
Sommaire
Communiqué de presse
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Renseignements pratiques
4
Présentation
5
Iconographie
6
Parcours de l’exposition
7
Publication
13
Exposition virtuelle
14
La Fondation Total
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Richelieu
COMMUNIQUE DE PRESSE
7 juillet I 25 septembre 2011
Enluminures en terre d’Islam
entre abstraction et figuration
La figuration est-elle totalement exclue de l’art islamique ? Fourmillantes de personnages
et de vie, les nombreuses miniatures qui ornent certains livres semblent prouver le
contraire. A travers quelque quatre-vingts prestigieux manuscrits arabes, persans et turcs,
l’exposition illustre le paradoxe entre un art excluant toute représentation d’êtres animés
et l’existence, dans les livres du monde islamique, de nombreuses miniatures.
A côté d’une esthétique commune édifiée autour du Coran et rejetant la figuration, coexistent,
dans les textes littéraires, historiques et scientifiques de nombreuses représentations figurées.
Même si elle ne fait pas l’objet d’un interdit explicite dans le Coran, l’image figurative est, dès
l’origine, totalement exclue du domaine religieux. Cette impossibilité va conduire à la formation
d’un art original basé sur la calligraphie, l’entrelacs géométrique et l’arabesque qu’on retrouvera
également dans le domaine du profane.
Exclue des sciences strictement religieuses, la figuration est restée limitée dans le monde arabe
à l’illustration de textes scientifiques et à de très rares œuvres littéraires comme les Maqamât
d’al-Harîrî ou Kalila wa Dimna, fables animalières venues d’Inde. Du fait sans doute de leurs
origines culturelles différentes, Persans et Turcs élargirent le champ des oeuvres illustrées au
domaine de l’histoire, de l’épopée et de la poésie. Le Shâhnâmeh, grande épopée nationale
iranienne en est le plus bel exemple. Dans certains contextes historiques, apparurent même
des représentations d’ordre religieux en dehors du Coran et des sciences qui lui sont associées.
Corans, albums de calligraphie, textes d’astronomie ou d’astrologie, de pharmacopée ou de
zoologie, grands textes littéraires, recueils de poésie, chroniques historiques et représentations
religieuses témoignent au fil du parcours de la riche activité culturelle du monde islamique du
VIIIe jusqu’au XIXe siècle. L’exposition qui comporte en outre cinq livres audiovisuels à feuilleter,
s’ouvre sur un magnifique Coran andalou du XIVe siècle et se clôt sur l’image emblématique du
Prophète chevauchant al-Burâq, sa monture fabuleuse.
Comptant parmi les plus beaux exemplaires de l’art du livre en terre d’Islam, les pièces présentées
dans l’exposition font partie d’un programme de numérisation intégrale de plus de trois cents
manuscrits arabes, persans et turcs, réalisée grâce au mécénat de la Fondation Total. Ils sont
accessibles en ligne dans Gallica, la bibliothèque numérique de la BnF (gallica.bnf.fr).
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Enluminures en terre d’Islam
entre abstraction et figuration
Dates
7 juillet I 25 septembre 2011
Lieu
BnF I Richelieu
5 rue Vivienne - Paris IIe
Métro : Bourse, Palais Royal, Pyramides
Bus : 20, 21, 27, 85, 74, 39
Horaires
Du mardi au samedi 10h-19h
Dimanche 12h-19h
Fermé lundi et jours fériés
A l’occasion de la fermeture annuelle de la Bibliothèque, l’exposition
sera également fermée du lundi 5 au samedi 17 septembre 2011 inclus.
Elle rouvrira ses portes le dimanche 18 septembre 2011 à l’occasion des
Journées du patrimoine
Entrée : 7 euros, Tarif réduit : 5 euros
Réservations FNAC,
tél : 0892 684 694 (0.34 euros TTC/mn), www.fnac.com
Commissariat
Annie Vernay-Nouri, conservateur au département des Manuscrits, BnF
Coordination
Annie Gay et Valérie Prébot, chargées d’expositions, BnF
Scénographie
Véronique Dollfus
Graphisme : Atelier Jeanne Bovier-Lapierre
Visites guidées
Renseignements et réservations au 01 53 79 49 49
Publication
Enluminures en terre d’Islam
entre abstraction et figuration
Annie Vernay-Nouri
19,6 x 24 cm, broché,
96 pages, 70 illustrations couleur
Prix : 23 euros
Contacts presse
Claudine Hermabessière
chef du service de presse et des partenariats médias
01 53 79 41 18 - [email protected]
Isabelle Coilly
chargée de communication presse
01 53 79 40 11 - [email protected]
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Présentation
L’exposition illustre les relations complexes que le monde musulman, dans ses différentes
composantes, a entretenues au fil des siècles avec l’image. Si l’esthétique édifiée autour
du Coran exclut toute reproduction d’êtres animés, il existe en revanche dans le domaine
profane de nombreuses représentations figurées. Sans faire l’objet d’un interdit explicite
dans le Coran, l’image figurative est, dès l’origine de l’islam, totalement exclue du domaine
religieux. Un impératif qui conduit très tôt au développement d’un art original basé sur la
calligraphie et l’ornementation.
L’unité culturelle du monde islamique se décline diversement à travers l’art de l’enluminure.
En effet, si la figuration reste limitée dans le monde arabe, elle se développe plus largement
chez les Persans et les Turcs, du fait sans doute de leurs origines culturelles différentes.
L’exposition est construite à partir de quatre-vingt-sept manuscrits arabes, persans et
turcs choisis parmi les plus prestigieux des collections de la BnF. Ces manuscrits font partie
d’un plus vaste programme de numérisation mécèné par la Fondation Total. Ainsi, près de
trois cents manuscrits seront à terme accessibles en ligne dans Gallica, la bibliothèque
numérique de la BnF (gallica.bnf.fr).
Cet ensemble est enrichi de quelques objets issus des collections de la Bibliothèque,
d’institutions extérieures (Sèvres, Cité de la céramique) ou de collections particulières.
Comme en écho aux manuscrits, ces quelques objets montrent comment l’esthétique
propre à l’islam, révélée ici dans l’art du livre, se retrouve dans les arts du métal, de la
céramique ou du bois.
Le parcours, didactique, offre aux visiteurs les éléments pour appréhender le sujet dans
toute sa complexité. Les textes explicatifs principaux sont traduits en anglais. En outre,
plusieurs postes multimedia placés à coté des originaux proposent six livres virtuels à
feuilleter.
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Iconographie
Iconographie disponible dans le cadre de la promotion de l’exposition et pendant la durée de
celle-ci.
Les images ne peuvent faire l’objet d’aucune retouche ni d’aucun recadrage.
(1) Coran, Espagne, 1304. BnF, département des Manuscrits
(2) Mir Haydar, Miradg nameh, Herat, 1436. BnF, département des Manuscrits
(3) Coran, VIIIe - IXe siècle. BnF, département des Manuscrits
(4) Album de calligraphies, Iran, XVIe - XVIIe siècle. BnF, département des Manuscrits
(5) Coran, Iran, 1594. BnF, département des Manuscrits
(6) Recueil de Rachîd as-Dîn, Iran, 1310. BnF, département des Manuscrits
(7) Al-Juzuli, Dala’il al-khayrat, (Indication des bonnes œuvres), Maghreb, 1705.
BnF, département des Manuscrits
(8) Traité d’hippiatrique, Lucknow, vers 1750-1760. BnF, département des Manuscrits
(9) Sharaf al-Din Sabunju oghlu, Chirurgie des Ilkhans, Amasya (Turquie), 1466.
BnF, département des Manuscrits
(10) Mehmet el-Su’udî. Le lever des astres chanceux, Istanbul, 1582. BnF, département des
Manuscrits
(11) Tousi Salmânî, Merveilles des créatures, [ Bagdad ], 1388. BnF, département des Manuscrits
(12) al-Harîrî, al-Mâqâmât (les séances). [ Iraq ], vers 1240. BnF, département des Manuscrits
(13) Kalila wa Dimna, Egypte ou Syrie, milieu XIVe siècle. BnF, département des Manuscrits
(14) Ferdowsi, Shahnameh (Le livre des rois). Chiraz, 1444. BnF, département des Manuscrits
(15) Ferdowsi, Shahnameh ( Le livre des rois ), Chiraz, 1567. BnF, département des Manuscrits
(16) Nezami, Khamseh (Cinq poèmes), Bâghbâd et Ispahan, 1619 -1624. Shirin à son bain.
BnF, département des Manuscrits
(17) Sa’di, Golestan, (La Roseraie). Bukhara (Ouzbékistan), milieu XVIe siècle.
BnF, département des Manuscrits
(18) Rachid ad-Dîn, Somme des histoires, Herat, vers 1430 - 1434. BnF, département des Manuscrits
(19) Qisas al-anbiya’ (Histoires de prophètes), vers 1595. BnF, département des Manuscrits
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Parcours de l’exposition
L’exposition est divisée en deux grandes parties qui illustrent le paradoxe de l’image en
terre d’Islam. La première est consacrée à l’absence de figuration dans l’art islamique,
particulièrement dans le domaine religieux. Elle montre la place centrale du Coran dans
l’élaboration d’une nouvelle esthétique. La seconde montre au contraire la présence
de nombreuses représentations figuratives dans le domaine profane. Elle est organisée
par genre (sciences, littérature, poésie, histoire et religion) et traite des grands thèmes
iconographiques.
Ce partage entre deux esthétiques est souligné par la scénographie : une longue
arabesque, constituée de voiles imprimés déroule d’un bout à l’autre ses courbes et
structure les parties. Les couleurs et les motifs des panneaux, inspirés par les manuscrits,
guident le visiteur à travers les différentes thématiques. Les objets présentés en regard
des manuscrits ainsi que des pièces disposées dans des vitrines verticales rompent la
linéarité des manuscrits exposés.
Le parcours s’ouvre et se clôt sur deux œuvres emblématiques, symbolisant les deux pôles
de l’exposition : un coran au décor géométrique (1) et le voyage nocturne au paradis de
Muhammad (2) montrant la représentation controversée du Prophète. Un environnement
visuel, projeté sur les murs autour du Coran, plonge le visiteur dès l’entrée dans des
compositions ornementales, spécifiques au monde musulman.
(1) Coran, Espagne, 1304
(2) Mir Haydar, Miradg nameh, Herat,
1436
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Une absence de figuration
Se dégageant progressivement des influences antérieures, un art propre à l’islam, basé
sur la calligraphie, l’ornement géométrique et l’arabesque, s’est construit en dehors de la
figuration. C’est dans les corans qu’il prend naissance et atteint sa plénitude.
Après la révélation coranique, l’écriture arabe, commune à l’ensemble du monde musulman,
prend une forte dimension symbolique et acquiert très vite une fonction décorative
magnifiant la parole divine comme en témoignent les corans en écriture coufique (3).
Dès le Xe siècle se met en place un savoir codifié qui formalise la construction des lettres
et définit des styles calligraphiques. Cultivé brillamment sous les Abbasides (750–1258)
et les Mamelouks (1250-1517), l’art de la calligraphie connaît une impulsion nouvelle avec
les Persans et les Ottomans. Il ornemente tous les manuscrits précieux et connaît un
nouveau développement au XVIe siècle dans des albums regroupant les plus belles pièces
calligraphiées (4).
L’art du décor obéit à une composition géométrique rigoureuse : d’une figure de base, en
forme d’étoile ou de polygone, partent des lignes qui génèrent et développent de nouvelles
constructions. Ce principe organisateur, qui orne de somptueuses « pages tapis », se
retrouve dans les arts du bois, du cuir ou de la céramique.
L’arabesque, issue du monde byzantin, est constituée d’éléments végétaux stylisés
enrichis d’influences venues d’Asie centrale (5 et 6). Apparemment opposés, l’arabesque,
tout en courbes, et l’entrelacs géométrique, composé de lignes droites, se fondent et se
complètent. Déployée avec virtuosité dans les corans, l’enluminure a ensuite gagné les
ouvrages profanes, particulièrement les manuscrits persans et turcs.
(3) Coran, VIIIe - IXe siècle
(4) Album de calligraphies,
Iran, XVIe - XVIIe siècle
(5) Coran, Iran, 1594
(6) Recueil de Rachîd as-Dîn,
Iran, 1310
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Coran et sciences religieuses
Né en Arabie au VIIe siècle, l’islam se fonde tout entier sur un livre sacré, le Coran.
Directement transmis par Dieu, pour les croyants, il est révélé oralement au prophète
Muhammad entre 610 et 632, et définitivement fixé sous le calife ‘Uthmân, vers 653.
Les premiers manuscrits conservés, incomplets, datent de la fin du VIIe siècle. Très
vite, calligraphie et décors embellissent le texte. Parant les débuts et fins de volume,
l’ornementation a aussi pour fonction de signaler les grandes divisions du texte, sourates
et versets.
Pas plus que le Coran, les ouvrages de sciences religieuses, hadîth (paroles et actes du
Prophète), droit islamique, exégèse coranique et théologie, ne comportent de représentions
figuratives.
Textes profanes et calligraphie
Qu’ils comportent ou non des miniatures figuratives dans leurs pages, des décors conçus
sur le modèle des corans enluminés ornent les doubles pages, les bandeaux ou les marges
des ouvrages précieux dans le domaine profane, particulièrement chez les Persans et les
Turcs. Le soin particulier apporté à l’écriture, au choix du papier, à la mise en page et à la
reliure contribue à la réalisation d’exemplaires rares et précieux.
A partir du XVIe siècle, les muraqqa’, rassemblent sous forme d’albums des pièces
calligraphiques choisies ou spécialement créées, montées sur des papiers précieux.
On y trouve des hadîths, de courtes sentences ou des exercices d’écriture déclinant les
différents styles calligraphiques.
Ces albums rencontrent un grand succès en Turquie, en Iran et en Inde.
(7) Al-Juzuli, Dala’il al-khayrat, (Indication des bonnes oeuvres)
Maghreb, 1705
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Un art de la figuration
Totalement exclue du Coran et des sciences religieuses, la peinture figurative va s’épanouir
dans les manuscrits profanes. Dans le monde arabe, elle reste limitée à l’illustration de
manuscrits scientifiques et à de très rares textes littéraires, principalement sous les
dynasties abbaside et mamelouke. Dès le XIVe siècle, Persans et Turcs élargissent en
revanche le champ des œuvres illustrées au domaine de l’épopée, de la poésie et de
l’histoire. On peut même trouver parfois des représentations de l’ordre du religieux.
D’abord traduits du grec en arabe, les ouvrages scientifiques s’agrémentent de dessins
destinés à expliciter le texte. Les plus anciens exemples connus remontent au XIe siècle.
Plusieurs grandes œuvres littéraires seront par la suite illustrées. Les éblouissantes
Séances (Maqâmât) d’al-Harîrî ne s’étendent pas au-delà du monde arabe, alors que Kalila
et Dimna, fables animalières venues d’Inde, sont traduites dans les trois langues. Quant à
la célèbre épopée iranienne du Livre des rois (Shahnameh) de Ferdowsi, elle fait l’objet de
centaines de copies peintes.
La poésie persane et turque, dans ses formes épique, amoureuse ou mystique, se pare
également de miniatures dans lesquelles les peintres ne cherchent pas à reproduire la
réalité, mais à représenter symboliquement un idéal de beauté.
Impensables dans le domaine strict des sciences religieuses, des représentations de
Muhammad et des prophètes bibliques figurent dans des chroniques historiques ou dans
des ouvrages à caractère mystique. Jamais produites dans le monde arabe, ces images
furent exclusivement l’apanage des aires culturelles persanes et turques.
Textes scientifiques
La science connaît dans l’islam médiéval un extraordinaire développement. Dès le XIIe
siècle, les premiers manuscrits peints s’inspirent de modèles grecs comme le De materia
medica de Dioscoride ou le Livre des étoiles fixes d’al-Sûfî. Ce dernier texte connaît
pendant des siècles de nombreux exemplaires illustrés dont deux sont présentés.
Dans des domaines aussi variés que la botanique, la pharmacologie, l’astronomie, la
zoologie, l’hippiatrie (science du cheval ) ou la médecine, les livres sont illustrés de dessins
à fonction didactique (8). Certains sont enrichis de scènes figuratives, particulièrement
les ouvrages plus tardifs, persans ou turcs. Pour exemple, le célèbre ouvrage de chirurgie
d’al-Zahrawî, nommé Abulcassis en Occident médiéval, ne comporte dans ses exemplaires
arabes que les dessins d’instruments alors que sa version turque présente les scènes
d’intervention opératoire (9).
L’astrologie donne lieu à des représentations originales des planètes, particulières au
monde musulman (10); les cosmographies décrivent les merveilles des mondes céleste et
terrestre (11); autant d’images propres à recueillir la faveur d’un public cultivé.
(8) Traité d’hippiatrique, Lucknow,
vers 1750-1760
(9) Sharaf al-Din Sabunju oghlu,
Chirurgie des Ilkhans, Amasya (Turquie),
1466
(10) Mehmet el-Su’udî
Le lever des astres chanceux,
Istanbul, 1582
(11) Tousi Salmânî,
Merveilles des créatures,
[ Bagdad ], 1388
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Grandes œuvres littéraires
Ecrites en arabe par al-Harîrî au XIe siècle, les Séances (Maqâmât) relatent, en 50 petits
récits (séances), les aventures d’un narrateur un peu naïf, al-Hârith, et d’Abû Zayd,
vagabond bohème et fripon qui use de son éloquence pour s’enrichir aux dépens de son
auditoire (12).
Né en Inde au IIIe siècle, Kalila et Dimna, recueil de fables animalières, fut adapté en arabe
par Ibn al-Muqaffa’ vers 750, avant d’être traduit en persan et en turc. Le livre appartient
au genre littéraire du « miroir des princes », destiné à l’édification de personnages de haut
rang.
Deux chacals, Kalila et Dimna, y racontent de nombreuses histoires, emboîtées les unes
dans les autres et se terminant par un précepte moral. La Fontaine s’en inspira pour ses
fables (13).
Symbole de la renaissance culturelle persane, le Livre des rois (Shâhnâmeh) écrit en
persan par Ferdowsi au Xe siècle, conte l’histoire mythique, héroïque et légendaire de la
Perse jusqu’à la conquête musulmane. Si cet énorme livre, composé de plus de 50000
distiques, est consacré pour l’essentiel aux luttes de pouvoir et aux récits guerriers des
épisodes amoureux sont néanmoins présents (14 et 15).
Grandes œuvres poétiques
Importante dans le monde arabe, la poésie religieuse ou profane n’est pourtant jamais
illustrée. Ce n’est pas le cas chez les Persans et les Turcs où miniatures, enluminures,
calligraphie et papiers précieux concourent à sublimer l’art de la poésie. Ces somptueuses
copies sont souvent décorées pour des mécènes princiers.
Souvent imités, les Cinq Poèmes (Khamseh) (16) de Nezâmi (1141-1209), maître du roman
en vers, rassemblent des poèmes appartenant à la forme du masnavi dont les sujets,
à caractère romanesque ou initiatique, puisent dans les légendes ou dans l’histoire :
ainsi le roman d’amour de Layla et Majnûn reprend une geste pré-islamique tandis que
l’Iskander- nameh retrace la quête mystique du grand conquérant Alexandre.
Farîd ad-Dîn ‘Attar (v. 1150-v. 1220), dans son Colloque des oiseaux (Mantiq at-Tayr)
développe avec brio la poésie mystique. Sa’di (1213- 1291) est connu pour deux livres
de morale, mêlant prose et poésie, Le Verger (Bustan) et La Roseraie (Gulistân) (17). Il
est, avec Hâfez (v. 1320-v. 1389) et Djâmi (1414-1492), l’une des grandes voix lyriques
persanes. Aux XVe et XVIe siècles, d’illustres poètes comme Mir ‘Ali Shir Nevâ‘i, Fozûli ou
le sultan Hoseyn Mirzâ Bayqarâ adaptent les grandes œuvres persanes en turc.
(12) al-Harîrî, al-Mâqâmât (les
séances)
[ Iraq ], vers 1240
(13) Kalila wa Dimna,
Egypte ou Syrie, milieu XIVe siècle
(14) Ferdowsi, Shahnameh (Le livre
des rois)
Chiraz, 1444
(15) Ferdowsi, Shahnameh ( Le livre
des rois ),
Chiraz, 1567
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Chroniques historiques
Les écrits historiques arabes ne sont jamais illustrés. C’est sous les Ilkhanides et les
Timourides, dynasties originaires d’Asie centrale qui ont régné du XIIIe au XVe siècle, que
le genre des annales historiques s’illustre de miniatures. Ministre sous les Ilkhanides, le
célèbre Rashîd ad-Dîn (vers 1247-1318) écrit une chronique des Mongols qui s’intègre
dans une histoire du monde depuis sa création. Elle sera beaucoup copiée et imitée sous
les Timourides (18).
À partir du XVIe siècle, de nouveaux genres historiques voient le jour avec le sultanat
ottoman : des manuscrits peints narrent les conquêtes et retracent les généalogies
princières, tandis que de grands cycles racontent en détail des événements contemporains,
liés à la vie des sultans.
Représentations religieuses
Les représentations figuratives à caractère religieux sont restées marginales dans
le monde musulman. Elles se limitent chez les Arabes à de rares images symbolisant
la personne du Prophète. Livres de prières et manuels de pèlerinage présentent aussi
quelques évocations codifiées des lieux saints, plus ou moins stylisées.
Quelques ouvrages persans ou turcs comme les Histoires de prophètes mettent en scène
les vingt-cinq prophètes de l’islam, d’Adam à Muhammad, représentés entourés d’un
halo de flammes (19). D’autres ouvrages à caractère mystique, reprennent eux aussi des
histoires bibliques et quelques épisodes de la vie de Muhammad. Parmi les très rares
livres illustrés entièrement consacrés à ce dernier, le plus prestigieux, un Miradjnameh
(Livre de l’ascension céleste), copié à Hérat en 1436, chef d’œuvre de l’art timouride relate
le voyage extraordinaire, réel ou imaginaire, du Prophète.
(16) Nezami, Khamseh (Cinq poèmes),
Bâghbâd et Ispahan, 1619 -1624.
Shirin à son bain
(17) Sa’di, Golestan, (La Roseraie)
Bukhara (Ouzbékistan), milieu
XVIe siècle
(18) Rachid ad-Dîn, Somme des histoires,
Herat, vers 1430 - 1434
(19) Qisas al-anbiya’ (Histoires de
prophètes),
vers 1595
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Publication
Enluminures en terre d’Islam.
entre abstraction et figuration
Annie Vernay-Nouri
19,6 x 24 cm, broché,
96 pages, 70 illustrations couleur
Prix : 23 euros
La figuration est-elle totalement exclue de l’art islamique comme on le pense bien
souvent ? Fourmillantes de personnages et de vie, les nombreuses miniatures qui ornent
manuscrits arabes, turcs et persans semblent témoigner du contraire. Ce catalogue
propose de découvrir à travers de prestigieux manuscrits arabes, persans et turcs
conservés à la BnF comment dès le début de l’islam s’est constitué, hors de la figuration,
un art original basé sur la géométrie, l’arabesque et la calligraphie. Magnifiant la parole
de Dieu, cet art qui apparaît dès les premiers corans, s’étend vite à d’autres domaines.
La miniature est néanmoins présente : côtoyant l’enluminure abstraite, elle s’épanouit
dans de nombreux textes profanes, scientifiques ou littéraires. A travers les images et
les textes d’autres oeuvres aussi variées que Kalila et Dimna, contes d’origine indienne, le
Shah-nameh, la grande épopée nationale iranienne, le Livre des étoiles fixes d’al-Sûfî, les
grandes chroniques historiques persanes et ottomanes et bien d’autres encore, l’ouvrage
déroule les multiples facettes d’une figuration qui a pris des formes variées selon les
époques et les lieux. Car c’est bien dans son rapport à l’image que le monde musulman,
dont l’unité s’est construite autour d’une religion, déploie sa multiplicité, traversé d’Est
en Ouest par des influences culturelles diverses qui se traduiront dans une iconographie
parfois différente dans les mondes arabe, persan et turc.
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Exposition virtuelle
http://expositions.bnf.fr/islam/
L’exposition virtuelle permet une visite guidée de la collection numérique des manuscrits arabes, turcs et persans conservés à la BnF. Elle propose un accès commenté aux
quelques 300 manuscrits numérisés dans Gallica, la bibliothèque numérique de la BnF.
Une visite guidée par la commissaire de l’exposition, téléchargeable en MP3, permet de
bénéficier d’un commentaire sonore des principaux documents de l’exposition.
Une exposition en images et un dossier posent la question de l’image en Islam.
Sept livres interactifs proposent d’explorer les pages de manuscrits, accompagnées de
commentaires sonores :
- trois manuscrits arabes : Le Livre des Séances (al-Maqâmât) - Kalila et Dimna, contes
d’origine indienne, et un coran ;
- deux manuscrits turcs : Le Livre de l’ascension du Prophète et Le Livre du Bonheur
(traité d’astrologie) ;
- deux manuscrits persans : Le Livre des rois (Shâh-nâmeh) et les Cinq poèmes de Nezâmi.
Des albums permettent de feuilleter l’iconographie de manière thématique, reprenant
des éléments caractéristiques du décor ou approfondissant par exemple la place du jardin
dans la représentation.
Chaque image, chaque livre interactif renvoie systématiquement à l’intégralité de l’ouvrage numérisé dans Gallica. Par ailleurs, un accès direct aux manuscrits est proposé
avec une présentation synthétique de chacun.
Enfin, un parcours enfants à travers une sélection d’œuvres est proposé aux plus jeunes.
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La Fondation Total est partenaire de l’exposition Enluminures en terre d’Islam, entre abstraction
et figuration et mécène du programme de numérisation de manuscrits arabes, turcs et persans.
Premier partenariat entre la BnF et la Fondation Total
La Fondation Total inaugure son partenariat avec la BnF en soutenant l’exposition et le programme de numérisation intégrale de plus de trois cents manuscrits arabes, persans et turcs.
Parce qu’il lui tient à cœur de valoriser les arts et traditions des pays dans lesquels Total développe ses activités, la Fondation Total s’est naturellement rapprochée de la BnF pour accompagner cette exposition de quelque quatre-vingts prestigieux manuscrits ayant fait l’objet d’une
numérisation. Cette exposition représente pour la Fondation l’opportunité de célébrer la diversité et la richesse culturelle du monde islamique.
Le programme de numérisation systématique des manuscrits les plus précieux et les plus représentatifs des cultures du monde musulman est une nouvelle occasion pour la Fondation Total de
contribuer à tisser des liens entre les civilisations, de favoriser le dialogue des cultures et d’offrir
à un large public l’accès à des siècles de connaissances.
A propos de la Fondation Total
Créée en 1992, la Fondation Total développe aujourd’hui ses programmes autour de quatre thématiques :
•
La culture, au travers d’un partenariat majeur avec la Fondation du Patrimoine et du
soutien de grandes institutions culturelles (Musée du Louvre, Musée du Quai Branly, Institut du
Monde Arabe…) pour faire rayonner les cultures du monde en France. Ces partenariats s’accompagnent d’une démarche d’ouverture des expositions aux publics éloignés de la culture.
•
La solidarité, au travers de l’engagement de Total aux côtés du Ministère de la Jeunesse
et des Solidarités actives dans le développement de projets de terrain financés par le Fonds
d’expérimentation pour la jeunesse. Total soutient ainsi des actions innovantes visant à faciliter la réussite scolaire et l’insertion professionnelle des jeunes à travers toute la France. Ces
actions sont coordonnées par la Fondation Total.
•
La santé, au travers d’un partenariat de long terme avec l’Institut Pasteur. Les programmes soutenus par la Fondation portent sur la prévention et le traitement de maladies infectieuses et de grandes pandémies en soutenant la recherche, la formation et l’action de terrain
dans les pays dans lequel Total est présent.
•
L’environnement, et plus particulièrement, la protection de la biodiversité marine au travers du soutien à des programmes de recherche visant à renforcer la connaissance des écosystèmes marins et côtiers, des actions de réhabilitation d’écosystèmes et d’espèces menacés et
des actions d’information et de sensibilisation.
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