Journal Identification = MET Article Identification = 0469 Date: March 9, 2015 Time: 8:40 am
asthénie, fièvre et toux. Un diagnostic de tuber-
culose disséminée avec atteinte pleuro-pulmo-
naire, ganglionnaire et hépatosplénique est retenu et
confirmé bactériologiquement : mise en évidence de
M. tuberculosis multisensible dans les crachats et le
liquide pleural. On lui découvre une infection par le VIH
(charge virale à 150 000 copies/mL), il est sévèrement
immunodéprimé (lymphocytes TCD4+ à 105/mm3). Trois
semaines de quadrithérapie antituberculeuse permettent
une amélioration clinique et radiologique avec un retour à
l’apyrexie, une stérilisation des crachats et une disparition
de l’épanchement pleural. Un traitement antirétroviral
efficace (HAART) par zidovudine, lamivudine et éfavirenz
est alors débuté. Soixante-douze heures après le début
de ce traitement, le patient signale la réapparition de
la fièvre avec syndrome pleural, réaugmentation du
syndrome inflammatoire biologique. La nouvelle enquête
microbiologique, incluant la recherche de BAAR dans
les crachats et le LBA reste négative éliminant une
autre infection ou la résistance au traitement. Il n’y a
pas d’argument pour un effet toxique des traitements.
Parallèlement, une réponse immunovirologique au trai-
tement antirétroviral est confirmée par la diminution de
la charge virale à 400 copies/mm3et l’augmentation
des lymphocytes T CD4+ à 178/mm2. Le diagnostic de
syndrome inflammatoire de reconstitution immunitaire
de la tuberculose associé aux antirétroviraux a ainsi été
retenu. L’adjonction d’une corticothérapie générale a
permis l’amélioration rapide des symptômes.
Historique
Les aggravations paradoxales de tuberculoses sous trai-
tement antituberculeux bien conduit sont décrites depuis
l’utilisation de la rifampicine en 1955 [1]. Toutefois, ce
syndrome a été clairement identifié, caractérisé et défini
depuis l’utilisation d’antiprotéases dans le traitement de
l’infection par le VIH en 1996. On le connaît depuis sous
le nom d’Immune Reconstitution Inflammatory Syndrome
(IRIS) [2].
L’IRIS ou SRI (syndrome de reconstitution immunitaire)
est donc la manifestation clinique d’une réponse immu-
nitaire disproportionnée inflammatoire dans un contexte
de reconstitution immune après une immunosuppression
réversible.
Épidémiologie
L’arrivée de la trithérapie antirétrovirale amène à la
publication d’un premier cas d’IRIS chez un patient traité
pour une rétinite à CMV en 1997 [3]. Un an plus tard, en
1998, les mycobactéries et le cryptocoque ont été imputés
comme pathogènes d’IRIS dans trois autres cas cliniques
[4-6]. En 2012, 20 ans plus tard, le mot clé «immune
reconstitution syndrome »réunit 1 151 publications dans
PubMed.
Les données épidémiologiques existent seulement
dans le cadre du contexte de l’infection par le VIH. Dans
une récente méta-analyse, Muller et al. estiment que l’IRIS
complique l’introduction d’une trithérapie antirétrovirale
dans 16 % de cas [7] variant3à63%selon la localisa-
tion, l’agent pathogène et les moyens diagnostiques mis
en œuvre [8-10].
En dehors de l’infection par le VIH, les incidences sont
mal connues et reposent sur des séries rétrospectives [11] :
10 à 30 % dans les tuberculoses simples, 7 % sous anti-
TNF [12].
Physiopathologie
La physiopathologie de l’IRIS n’a elle aussi été étudiée
que dans le contexte de la restauration immunitaire
sous HAART des patients infectés par le VIH. Il a été
démontré que l’IRIS était associé à la restauration d’une
réponse immune très inflammatoire dirigée contre l’agent
pathogène-infectieux présent [13, 14] (tableau 1). Cette
réponse spécifique implique, selon le type d’agent patho-
gène, des lymphocytes T CD4 ou CD8 et/ou d’autres
acteurs de la réponse immune (Cf. tableau 2) [15]. Cette
réponse intense est associée à un «syndrome inflamma-
toire »ou «orage cytokinique »[16-19]. Elle implique
aussi la réponse immune innée : cellules NK, lympho-
cytes T ␥␦, complément [20], macrophages [21, 22]
probablement par des dysfonctions de la présentation
antigénique, et du contrôle de la réponse spécifique.
Ces dysfonctions semblent être le lit d’une susceptibilité
génétique.
Ces éléments de physiopathologie ne permettent pas
à ce jour d’avoir un test diagnostic positif d’IRIS mais la
réapparition d’une IDR phlycténulaire, d’un granulome
histologique et d’un test Quantiféron positif au cours d’une
tuberculose traitée, et contemporaine d’une reconstitution
quantitative, seront des arguments.
Formes et présentations cliniques
Les premiers critères diagnostiques d’IRIS ont été éta-
blis par Martyn French en 2004 (tableau 3) puis confirmés
par un consortium international (ISNIH).
On décrit deux formes d’IRIS sous HAART selon leur
chronologie :
–l’IRIS paradoxal correspond à la ré-détérioration
clinique lors de la restauration immunitaire d’une patho-
logie déjà connue et traitée, paradoxale car survenant
malgré un traitement efficace de l’infection illustré par le
l’observation no1 [23, 24] ;
mt, vol. 21, n◦1, janvier-février 2015 9
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