Réalisation des simulations de contrôle
Cordex-Afrique
Lidia Mellul - Frédéric Hourdin
En parallèle de l’exercice CMIP5 d’intercomparai-
son des modèles de climat, l’exercice Cordex permet
pour la première fois d’intercomparer de façon as-
sez systématique les modèles à aire limitée, classique-
ment utilisés pour effectuer une descente en échelle
sur la base des simulations globales.
Plusieurs domaines ont été définis pour l’exercice
Cordex. Le domaine africain, couvrant l’ensemble du
continent depuis la Méditérannée jusqu’à l’Afrique
du sud, constituait la priorité de ce programme,
qui comprend une partie de simulations de contrôle,
réalisées sur la période dite ERA-Interim, en utilisant
cette réanalyse comme forçage au bord du domaine.
La contrainte était d’avoir une maille d’au plus 50 km
sur l’ensemble du domaine.
Une configuration de LMDZ, zoomée sur
l’Afrique, a été définie pour satisfaire ces contraintes
(Figure 1). Lidia Mellul a réalisé sur la base de
cette configuration deux simulations avec LMDZ : le
contrôle Cordex et une simulation en boucle de l’an-
née 2006. Dans les deux cas, la nouvelle physique a
été utilisée, dans sa configuration NPv3.1. Ces simu-
lations n’ont pas été une partie de plaisir, à cause à la
fois de la lourdeur de la configuration (280x280 points
et 39 niveaux verticaux) et de l’instabilité du modèle
dans cette configuration. Les simulations n’ont pas
pu être efffecutées avec des paramètres constants. En
pratique, c’est la longueur du pas de temps qui a
été allongée ou réduite au fil de la simulation et des
“plantages” successifs.
Ces simulations méritent cependant d’être analy-
sées en détail pour voir l’apport de la résolution sur la
simulation du climat en Afrique de l’ouest. Les pre-
mières analyses montrent que la version LMDZ5B-
Cordex se comporte de façon assez similaire à la
version LMDZ5B-LR, malgré la différence collossale
des résolutions spatiales des deux configurations sur
l’Afrique (50 contre 300 km, soit 36 fois plus de points
de grille environ). Ce résultat, mis en regard des ana-
lyses multi-modèles (Figure 2), suggère que les grands
biais observés dans les précipitations moyennes par
exemple dans les simulations CMIP5, ne sont pas le
résultat de la résolution trop grossière des modèles,
mais plutôt de leur contenu physique trop frustre.
On voit bien si on regarde les biais sur les flux
radiatifs au sommet de l’atmosphère (partie en bas à
droite de la figure 2) que les biais observés dépendent
davantage de la physique du modèle (LMDZ5A vs
B) que de la grille (LR vs MR pour LMDZ5A et LR
versus Cordex pour LMDZ5B). Les biais observés sur
ces flux radiatifs, y compris en ciel clair (non montré),
pourraient bien expliquer une partie de la dispersion
et des biais des simulations du climat en Afrique de
l’ouest.
Sur la base de ces premières constatations, il
appparaît plus que jamais essentiel de mettre en
garde contre l’idée (largement répandue) qui voudrait
que Cordex soit l’exercice à considérer pour les études
d’impact du changement climatique sur les sociétés.
Nombre de ces études dépendent au premier ordre des
cumuls de pluies. Or non seulement ces cumuls sont
aussi mal-menés par les simulations Cordex que par
les simulations CMIP5 (en configuration forcée par
les SSTs, simulations “amip”), mais en plus il n’est
pas du tout sûr que le fait de couper les ajustements
possibles aux bords du domaine Cordex n’affecte pas
la réponse climatique à l’intérieur du domaine. Car
beaucoup plus qu’un exercice de descente d’échelle,
Cordex est bien un exercice de modélisation régionale
du climat, dans lequel on laisse s’exprimer des
rétroactions climatiques à l’intérieur du domaine,
mais dans un système tronqué, dans lequel les
ajustements et échanges avec le reste du globe ne
peuvent pas s’exprimer.
Les simulations Cordex n’en restent pas moins
un très bon cadre pour essayer d’améliorer la
représentation du climat, évaluer la valeur ajoutée
par le rafinement de la grille (en ce qui concerne
notamment la distribution de la pluie à haute
fréquence spatio-temporelle) et anticiper également
les résolutions globales de demain.
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