Les courants océaniques - Laboratoire d`Océanographie Physique

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Courant côtier
de Nouvelle-Guinée
Nouve
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Bretagnee
Bret
Courant côtier
de Nouvelle-Bretagne
PapouasieNouvelle-Guinée
Mer
des Salomon
Encore mal connus des océanographes, les courants
de bord situés le long des côtes des continents ont un
impact non négligeable sur les grands mécanismes
climatiques de la planète. En passant de l’océan Indien
dans l’Atlantique le courant des Aiguilles influence la
circulation océanique mondiale, alors que les courants de
bord situés dans la mer des Salomon et la mer de Corail
sont des acteurs majeurs de grands phénomènes climatiques
comme Enso (El Niño Southern Oscillation).
Îles Salomon
Jet Nord Vanuatu
Vanuatu
Australie
Courant
équatorial
Sud
Jet Nord Calédonien
Mer
de Corail
NouvelleNouvell
ouve
Calédonie
alédo
Les principaux courants en mer de Corail et mer des Salomon.
La valse des courants en mer des Salomon
argement influencée par
les mouvements des
masses d’eau océaniques, la variabilité climatique du Pacifique est fortement
dépendante des courants qui parcourent cet océan. Lionel Gourdeau,
océanographe à l’IRD, et ses collègues
de Toulouse et Nouméa1-2, donnent
pour exemple le phénomène Enso (El
Niño Southern Oscillation), qui représente la variabilité climatique la plus
marquante aux échelles interannuelles.
Cette oscillation climatique, qui tous
les 3 à 7 ans déplace le réservoir
d’eau chaude de l’ouest à l’est du
Pacifique équatorial, est largement
associée aux intenses courants de
bord le long des continents. Les
courants de bord ouest du Pacifique
Sud, qui longent les côtes est des
continents, alimentent le réservoir
d’eau chaude du Pacifique équatorial
et sont la principale source qui alimente le sous-courant équatorial
remontant en surface vers les côtes
d’Amérique.
Dans cette région du Pacifique Sud, la
complexité du relief sous-marin et
les chapelets d’îles ne sont pas sans
impacter ces courants de bord aux
caractéristiques encore mal connues.
La mer des Salomon, par laquelle ils
transitent, est une mer semi-fermée
entre la Papouasie-Nouvelle-Guinée à
l’ouest, la Nouvelle-Bretagne au nord
et les îles Salomon à l’est. Peu explorée, ce n’est que tout récemment,
sous l’égide du programme Clivar/
Spice dans lequel sont impliqués des
chercheurs du Legos, que cette mer
commence à dévoiler la complexité
des courants qui y transitent.
Les mesures de la pente de l’océan
par altimétrie satellitaire, le développement de modèles régionaux à haute
résolution ainsi que l’analyse des profileurs de courant s’accordent pour
confirmer le cheminement des eaux
remontant vers le nord. En se partageant entre les détroits de Vitiaz et
des Salomon pour atteindre la région
équatoriale, ces eaux forment un nouveau courant, baptisé Courant Côtier
de Nouvelle-Bretagne.
L’utilisation de planeurs sous-marins
par les chercheurs a encore révélé
les particularités du courant côtier
de Nouvelle-Guinée. En faisant la
navette entre les îles Salomon et la
Papouasie-Nouvelle-Guinée, ces planeurs ont permis d’identifier que ce
courant évolue à des profondeurs
largement supérieures à celles envisagées sans que les spécialistes ne
disposent d’une explication à cette
singularité.
L’importante activité tourbillonnaire
de la région entraîne une variabilité
des transports d’eau pouvant aller du
simple au double en quelques mois.
La valse de ces courants, leur variabilité tant en intensité qu’en température n’est pas sans relation avec
les grands phénomènes océaniques
comme Enso.
« La Niña de 2007-2008 est à l’origine d’une baisse significative des
transports en mer des Salomon qui
montre le lien étroit entre Enso et les
courants de bord pour l’alimentation
du réservoir d’eau chaude », souligne
Lionel Gourdeau.
La prochaine campagne Pandora,
avec la pose de mouillages dans les
différents détroits ainsi que la poursuite de l’utilisation « planeurs sousmarin » devrait mieux suivre ces anomalies climatiques dans la mer des
Salomon et aider à comprendre comment elles influencent les phénomènes climatiques à l’échelle du
Pacifique.
●
1. S. Cravatte et A. Ganachaud.
2. Laboratoire d’études en géophysique et
océanographie spatiales.
Contact
Du nouveau
en mer de Corail
En mer de Corail, l’image classique qu’un large courant équatorial sud alimenterait les courants de bord ouest ne correspond pas à la réalité. En rencontrant
les nombreuses petites îles qui forment l’archipel du Vanuatu et de la NouvelleCalédonie, le courant équatorial sud se scinde en différents « jets zonaux » se
propageant vers les côtes australiennes. Dans le cadre des campagnes Secalis,
menées entre 2004 et 2006, les premières observations des jets nord Vanuatu
et nord Calédonien ont été menées grâce à un planeur sous-marin.
Le jet nord Calédonien, d’une largeur de 100 km environ, représente presque la
moitié des transports entrant en mer de Corail. En cherchant à trouver l’origine
de ce jet, grâce à des analyses récentes de l’ensemble des résultats des campagnes Secalis, les spécialistes ont mis en évidence la présence d’un nouveau
courant de bord le long de la Nouvelle-Calédonie, le courant est Calédonien.
Les particularités du flux entrant en mer de Corail ont aussi motivé les équipes
de l’IRD à entreprendre, dans le cadre du projet Secargo, des mesures à haute
résolution spatiale entre la Nouvelle-Calédonie, le Vanuatu et les îles Salomon.
Les océanographes espèrent
ainsi améliorer les connaissances en climatologie portant sur la région et en
observer la variabilité saisonnière.
Cette campagne est aussi
l’occasion de déployer des
flotteurs Argo afin d’étudier
le devenir des jets à leur
bifurcation dans les différents courants de bord ouest
australien.
●
Contact
[email protected]
[email protected]
© IRD/Christophe Maes
Recherches
Les courants
océaniques
Sous-courant équatorial
© IRD/L .Corsini
23/12/10
Glider (ou planeur sous-marin)
servant à étudier les courants
en mer de Corail.
Un acteur de la circulation
océanique atlantique
a fonte des glaces dans
l’Atlantique Nord due
au réchauffement climatique va-t-elle impacter
les grands courants marins qui redistribuent eaux chaudes et froides
entre le Nord et le Sud ? Les spécialistes restent prudents, mais des
hypothèses sur un ralentissement de
cette circulation océanique, voire son
arrêt, sont avancées. Quand les eaux
chaudes et salées des tropiques
remontées par le Gulf Stream se
refroidissent au Groenland, elles
gagnent en densité et coulent. Ce
mouvement initie un courant de fond
qui descend le long des côtes américaines jusqu’à l’Antarctique. Cette
circulation pourrait bien ralentir,
voire s’arrêter, si la fonte des glaces
d’eau douce de l’Arctique venait à
rendre la mer moins salée et donc
moins dense, limitant ainsi cette coulée. Avec des conséquences majeures
pour le climat planétaire.
« Le courant des Aiguilles chaud et
salé qui descend à l’ouest de l’océan
Indien pourrait en partie contrebalan-
cer cette perte de sel dans l’Atlantique et ainsi soutenir la circulation
atlantique », suggère Pierrick Penven,
chercheur à l’IRD. Descendant jusqu’à
la pointe sud de l’Afrique, il se
retourne alors sur lui-même pour
revenir dans l'océan Indien, une portion pénétrant l’Atlantique sous forme
de tourbillons (voir schéma).
Alors que des études en paléoocéanographie montrent une corrélation entre le passage du courant
des Aiguilles dans l’Atlantique et le
climat planétaire, Mathieu Rouault
de l'Université de Cape Town et ses
partenaires ont identifié au niveau de
la zone de retournement du courant
un pic de réchauffement. Ces travaux
de modélisation, menés dans le cadre
d’une coopération entre l’UCT, l'IRD et
le CNRS, suggèrent que le flux de
chaleur et de sel passant vers l'Atlantique a doublé ces 25 dernières années.
Le réchauffement climatique viendrait
alors augmenter le flux de chaleur et
de sel réinjecté dans l’Atlantique par
le courant des Aiguilles, soutenant
ainsi la circulation atlantique pour-
Sciences au Sud - Le journal de l’IRD - n° 57 - novembre/décermbre 2010
tant impactée négativement par ce
même réchauffement.
« D’autres travaux soulignent une
augmentation similaire de la pénétration du courant des Aiguilles en Atlantique Sud, mais les processus
impliqués restent encore discutés »,
souligne Pierrick Penven. Plus localement, des travaux sont en cours pour
© Cartes : IRD/L .Corsini
000_007_010_IRD57
Gu
stream
comprendre son rôle dans les remontées d’eau le long des côtes africaines
(systèmes d’upwelling
g), des zones
particulièrement riches en plancton
et donc importantes en terme de
ressources halieutiques. Ces recherches menées par l’IRD pourraient présenter des résultats importants pour
la gestion des pêcheries au sud de
l’Afrique.
●
Contact
[email protected]
UMR Laboratoire de Physique des
Océans (CNRS-Ifremer-IRD-Université
de Bretagne occidentale).
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