transmission du signal sonore par l`oreille moyenne du cobaye

TRANSMISSION DU SIGNAL SONORE PAR
L’OREILLE MOYENNE DU COBAYE LORS DE
L’APPLICATION D’UNE PRESSION STATIQUE
DEVANT LE TYMPAN
A. Dancer, F. Devriere, R. Franke
To cite this version:
A. Dancer, F. Devriere, R. Franke. TRANSMISSION DU SIGNAL SONORE PAR L’OREILLE
MOYENNE DU COBAYE LORS DE L’APPLICATION D’UNE PRESSION STATIQUE
DEVANT LE TYMPAN. Journal de Physique Colloques, 1990, 51 (C2), pp.C2-107-C2-109.
<10.1051/jphyscol:1990225>.<jpa-00230579>
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COLLOQUE DE PHYSIQUE
Colloque C2, supplément au n02, Tome 51,
Février 1990
ler Congrès Français d'Acoustique 1990
TRANSMISSION DU SIGNAL SONORE PAR L'OREILLE MOYENNE DU COBAYE LORS DE
L'APPLICATION D'UNE PRESSION STATIQUE DEVANT LE TYMPAN
A. DANCER, F. DEVRIERE et R. FRANKE
Groupe Physiologie, Institut Franco-Allemand de Recherches de
Saint-Louis,
BP. 34, F-68301 Saint-Louis Cedex, France
Résumé - Les modifications de l'amplitude de la fonction de transfert de l'oreille moyenne du cobaye
entraînées par l'application d'une pression statique sur la face externe du tympan ont été mesurées. Pour
une surpression de
1 kPa, l'amplitude de la fonction de transfert diminue de 10 à 23 dB entre 0,2 et
20
kHz. Pour une dépression de 1 kPa, cette diminution est limitée aux fréquences proches de 1 kHz où
elle atteint 15 dB.
Abstract
- The modifications of the middle ear transfer function induced by a static pressure applied to
the outer auditory canal of the guinea pig have been measured. For an overpressure of
1 kPa, the
amplitude of the transfer function decreases by 10 to 23 dB in the 0,2 to 20
kHz range. For a negative
pressure of 1 kPa, a decrease of 15 dB occurs around 1 kHz only.
1 - INTRODUCTION
Pour que l'oreille moyenne puisse fonctionner dans les meilleures conditions, il faut que la pression statique qui
règne de part et d'autre du tympan soit la même. Dans la situation physiologique normale, cette condition est
réalisée grâce
à l'ouverture périodique de la trompe d'Eustache qui permet d'équilibrer la pression statique entre
la bulle tympanique et le milieu extérieur. Lorsque
la trompe d'Eustache ne s'ouvre plus de façon spontanée et
régulière, pendant une expérimentation réalisée sous anesthésie par exemple, la pression statique décroît très
rapidement dans la bulle tympanique, du fait de l'absorption des
gaz contenus dans cette cavité uar la muaueuse
qÛi la tapisse, et le tympan si rétracte. C'est pourquoi, dans toutes les expérimentations animalis qui son;
réalisées à bulle fermée, pour conserver une imuédance d'entrée du tvmuan éuuivalente à celle existant chez
l'animal éveillé il faut "véntiler" la bulle: c'est-àdire la relier au miliéu ixtériêur par un
tube qui prévient tout
déséquilibre de la pression statique de part et d'autre du tympan (les dimensions du tube doivent être déterminées
de façon
à ne pas modifier la pression acoustique dans la bulle à des fréquences supérieures à quelques Hertz).
L'application, dans le conduit auditif externe, d'une pression statique différente de celle qui existe dans le milieu
extérieur (auquel la bulle est reliée) entraîne des perturbations de la fonction de transfert de l'oreille moyenne qui
relie le signal de pression acoustique mesuré devant le tympan au signal de pression acoustique mesuré
à l'entrée
de la cochlée. En effet, la chaîne tympano-ossiculaire ne fonctionne plus autour de son point d'équilibre mais se
trouve déplacée, vers l'extérieur ou vers l'intérieur. Les forces de rappel qui agissent sur elle sont modifiées et
son fonctionnement devient asymétrique /1,2/.
Ce phénomène pourrait être mis à profit pour améliorer l'atténuation apportée par des dispositifs de protection
acoustique du type "bouchons d'oreilles". En effet, si l'on parvenait
à créer une modification permanente de la
pression statique dans la partie du conduit auditif comprise entre l'extrémité du bouchon et le tympan, on pourrait
espérer diminuer l'amplitude de la fonction de transfert de l'oreille moyenne, ce qui complèterait l'anénuation
passive apportée par les bouchons d'oreilles. Un dispositif de ce type (fonctionnement en dépression) a été
breveté par von Gierke dans les années cinquante.
L'expérimentation présentée ici a pour but d'évaluer, chez le cobaye, l'importance des modifications de
l'amplitude de la fonction de transfert de l'oreille moyenne que l'on peut attendre de l'augmentation ou de la
diminution de la pression statique devant le tympan. Cette expérimentation doit servir de préalable
à une étude
qui sera réalisée ultérieurement chez l'homme.
2
- METHODE
L'expérimentation est conduite chez le cobaye tricolore. Les animaux, d'un poids moyen de 350 g, sont
anesthésiés profondément par injection intramusculaire
d'un mélange de ~ompun@ et de Kétalfl. La bulle
tympanique est ouverte par voie postéro-latérale et une électrode est posée sur la fenêtre ronde (cette électrode
servira à enregistrer le potentiel microphonique cochléaire: PMC). L'animal, placé sur un dispositif de
contention, est exposé
à la stimulation acoustique (sons purs de fréquence comprise entre 0,2 kHz et 20 kHz)
produite en circuit fermé par un microphone utilisé en émetteur par l'intermédiaire d'une barre d'oreille creuse.
Un dispositif connecté
à cette barre d'oreille permet d'établir sur la face externe du tympan une pression statique
Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/jphyscol:1990225

COLLOQUE DE PHYSIQUE
(p) de niveau compris entre -2 kPa (dépression) et +2 kPa (surpression) par rapport à la pression atmosphérique
ambiante (pa
= 100 kPa). La bulle tympanique étant laissée largement ouverte, la face interne du tympan est,
quant
à elle, soumise à la pression atmosphérique ambiante @;3. Pour une tension donnée appliquée aux bornes
du microphone émetteur, on vérifie que les dépressions ou les surpressions produites dans la cavité de la barre
d'oreille ne modifient pas le niveau sonore mesuré devant le tympan.
Pour une tension donnée aux bornes du haut-parleur (tension correspondant
à des niveaux de stimulation
suffisamment faibles pour que la réponse du PMC soit linéaire), on mesure, en fonction de la fréquence et chez
chaque animal, l'amplitude du PMC pour différentes valeurs de la pression statique appliquée devant le tympan
(la mesure du PMC est effectuée
à l'aide d'un filtre suiveur centré sur la fréquence de stimulation: la présence
éventuelle d'harmoniques dans la réponse n'est donc pas prise en compte). La réponse obtenue pour une
surpression (ou dépression) statique nulle est utilisée comme référence et est contrôlée après chaque application
d'une surpression ou d'une dépression. L'amplitude du PMC étant directement proportionnelle au niveau de
pression acoustique existant
à l'entrée de la cochlée (une augmentation de 10 dB de ce niveau se traduit par une
augmentation de 10
dB de l'amplitude du PMC), on peut directement déduire des enregistrements les
modifications de l'amplitude (en dB) de la fonction de transfert de l'oreille moyenne (FTOM) induites par telle ou
telle valeur de surpression ou de dépression appliquée devant le tympan.
3 - RESULTATS
Les modifications de l'amplitude de la FTOM entraînées par des surpressions comprises entre 0,l et
2 kPa sont
représentées sur la figure 1 (pour chacune des valeurs de surpression étudiées, le nombre d'animaux utilisé est
compris entre
6 et 11).
Fig. 1
- Modifications de l'amplitude de la fonction de transfert de l'oreille moyenne entraînées par l'application
de différentes surpressions au niveau du tympan.
On peut noter que même pour une surpression de 0,l kPa (équivalente
à 1 millibar ou à une hauteur d'eau de 1
cm) l'amplitude de la FTOM est diminuée sur la quasi-totalité de la gamme des fréquences et que cette diminution
atteint 5 dB environ entre 4 et
6 kHz. Lorsque la surpression passe de 0,4 à 1 kPa, l'amplitude de la FTOM
décroît brutalement sur toute l'étendue des fréquences (-20 dB entre
6 et 10 kHz). L'application de ces
surpressions n'a entraîné aucune modification macroscopique de l'état du tympan et les modifications de
l'amplitude du PMC étaient réversibles.
Les modiications entraînées par des dépressions comprises entre 0,l et 2 kPa sont représentées sur la figure 2
(pour chacune des valeurs de dépression étudiées, le nombre d'animaux est compris entre
7 et 9). A la différence
de ce que l'on observait précédemment, les modifications sont négligeables en dessous de 0,4 kPa.
A partir de
cette valeur on observe une diminution de plus en plus importante de la
FTOM, cette diminution affecte
principalement les fréquences proches de 1
kHz (-15 dB pour une dépression de 2 Pa), les fréquences élevées
n'étant pratiquement pas touchées. Pour les dépressions les plus importantes (1 et 2 Pa) on a noté chez certains
animaux (non retenus dans les résultats) des modifications de la structure du tympan au niveau du manche du
marteau.

Fig. 2 - Modifications de l'amplitude de la fonction de transfert de l'oreille moyenne entraînées par l'application
de différentes dépressions au niveau du tympan.
4
- DISCUSSION
L'application de surpressions ou de dépressions modérées sur la face antérieure du tympan modifie de façon très
importante l'amplitude de la FTOM du cobaye. Ces modifications sont vraisemblablement dues
à une limitation
des déplacements de la chaîne tympano-ossiculaire et peut-être, dans une moindre mesure,
à des modifications de
la compliance du tympan lui-même du fait de sa conformation en forme de cône
à génératrices incurvées (les
variations de pression qui apparaissent dans l'oreille interne de part et d'autre de la membrane basilaire
à la suite
d'un déplacement lent de la platine de l'étrier s'équilibrent en quelques dixièmes de secondes
à travers
l'hélicotrème). Cette liitation a pour origine la mise sous tension des éléments de la chaîne tympano-ossiculaire
(membrane tympanique, ligaments s'insérant sur les osselets, ligament annulaire...). Cette contrainte augmente
très fortement la compliance de la chaîne (non-linéaire aux fortes élongations
/1,2/). L'augmentation asymétrique
de la compliance pourrait être
à l'origine d'harmoniques dans la réponse microphonique cochléaire 131.
Si l'on désire diminuer l'amplitude de la FTOM les résultats obtenus indiquent qu'il est préférable, tout au moins
chez le cobaye, d'appliquer une surpression au niveau du tympan, plutôt qu'une dépression.
Dàns nos expériences, la bulle tympanique était laissée ouverte. Le déplacement du tympan n'était donc pas
limité par la surpression (ou la dépression) qu'un tel déplacement provoque dans la bulle lorsque elle est fermée
(aux fréquences inférieures
à 0,2 kHz et pour un niveau de stimulation donné, le déplacement du tympan est
environ 7 fois plus faible
à bulle fermée qu'à bulle ouverte 144. Cette situation expérimentale correspond bien
au cas où une pression statique est appliquée par exemple dans l'espace compris entre l'extrémité d'un bouchon
d'oreille et le tympan car l'augmentation de pression entraînée dans la bulle par le déplacement du tympan
disparaît dès l'ouverture de la trompe d'Eustache. Par contre, si l'on s'intéresse
à l'amplitude de la FTOM dans
le cas de l'exposition
à un bruit d'arme comportant une phase de pression positive de forte amplitude mais de
courte durée (quelques millisecondes au plus), la diminution de l'amplitude de la FTOM entraînée par cette phase
positive serait beaucoup plus réduite car la pression
à l'intérieur de la bulle fermée contrebalancerait partiellement
celle appliquée sur la face externe du tympan. Dans ce cas les modifications de la FTOM mesurées plus haut ne
devraient survenir que pour des variations de la pression statique environ 7 fois plus importantes
141.
L'étude des modifications de l'amplitude de la fonction de transfert de l'oreille moyenne du cobaye au cours de
l'application de surpressions ou de dépressions statiques devant le tympan pourrait permettre d'expliquer
certaines caractéristiques relatives
à la protection acoustique apportée par des bouchons d'oreilles ainsi qu'une
partie des mécanismes lésionnels survenant au niveau de l'oreille lors de l'exposition
à des bruits impulsionnels
de niveau très élevé. Elle pourrait également fournir des indications quant aux phénomènes qui accompagnent
l'apparition d'une surpression ou d'une dépression statique dans la bulle tympanique (trompe d'Eustache
imperméable, opération de Valsalva...).
REFERENCES
111 Kobrak, H.G., J. Acoust. Soc. Am. 20 (1948) 125.
121 Dancer, A., Franke, R. et Pfeiffer, H.J., Rapport ISL (1974) 7/74.
/3/ Pong, W. et Marcaccio, W., J. Acoust. Soc. Am. (1963) 679.
141 Franke R., Dancer A., Lenoir M., Evrard G. et Buck K., Rapport ISL (1982) 121182.