TOME 136
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N° 10
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DÉCEMBRE 2014
LE CONCOURS MÉDICAL
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779
Troubles des apprentissages du langage oral et écrit
CONSIDÏRER QUIL SAGIT DUN DOMAINE MÏDICAL
Où se situerait la limite entre le « normal » et le
iPATHOLOGIQUEw0OURLEMÏDECINNONFORMÏ
AUTANT DE QUESTIONS QUI CONTRIBUENT Ë LA COM-
plexité de ce thème transversal entre éducation,
société et médecine.
Le médecin de premier recours démuni
face à l’inquiétude des familles
%T POURTANT PUISQUIL ARRIVE AU MÏDECIN DE
famille de prescrire, à juste titre, des séances
d’ortho phonie, sa place mérite d’être reconsidé-
rée. Adresser de façon éclairée à l’orthophoniste
ou non, au psychologue ou non, suggérer une éva-
luation hospitalière dans un de ces fameux centres
référents des troubles du langage et des appren-
tissages (CRTLA), dont on n’a le plus souvent pas
décrit la nature et les missions, adresser à un collègue
QUISYINTÏRESSEÏCHANGERAVECLEMÏDECINSCOLAIRE
échanger pour guider la famille et revoir l’enfant,
n’est-ce pas exactement le rôle du médecin de l’en-
FANT#ONFRONTÏ ËUNELONGUE LISTEDALTERNATIVES
AUCURDELINQUIÏTUDEDESFAMILLESLEMÏDECINGÏ-
néraliste se sent aujourd’hui légitimement démuni.
$AUTANTQUELESMÏDECINSNESONTPASSANSSAVOIR
– tant les journaux tirent les sonnettes d’alarme –
QUELESAPPRENTISSAGESDESPETITS&RANÎAISSONTLOIN
de s’améliorer : les enfants ne maîtrisant pas la lec-
ture sont de plus en plus nombreux, leur niveau de
plus en plus faible, et l’écart entre « les bons et les
faibles » de plus en plus grand(1). Un avenir sombre
QUISEDESSINEPOUREUXDANSUNESOCIÏTÏMOINSIN-
dulgente avec la diversité des talents.
,ESMÏDECINSGÏNÏRALISTESSAVENTAUSSIQUELES
enfants « dys » font l’objet de plusieurs guides
RÏCENTS ÏMANANT PAR EXEMPLE DE LA $IRECTION
GÏNÏRALEDELOFFREDESOINS$'/3OUBIENDE
LA#AISSENATIONALEDESOLIDARITÏACTIVE#.3!
$EUXQUESTIONSLUNESOCIÏTALERELEVANTDEL²DU-
cation nationale, l’autre médicale fondée sur la
prescription du médecin. Il est aujourd’hui peut-
ÐTRE ENCORE PLUS QUE JAMAIS INDISPENSABLE DE
réfléchir à des filières de soins cohérentes pour
optimiser l’efficacité avec des coûts maîtrisés.
Un plan d’action cohérent en trois niveaux
de soins précédés d’un niveau préventif
s,APRÏVENTIONPÏDAGOGIQUEOUÏDUCATIVESEST
organisée dans de nombreux pays depuis plus de
vingt ans. Les programmes de stimulation du langa-
GEORALÏVALUÏSSCIENTIlQUEMENTEXISTENTDESTINÏS
aux parents, éducateurs, enseignants, orthopho-
nistes s’occupant d’enfants des milieux précaires.
Pour exemples, des programmes expérimentaux
américains(2) mais aussi français, tel le « Parler
bambin » développé par M. Zorman † (3). Il en est de
MÐMEDESENTRAÔNEMENTSPÏDAGOGIQUESËLAPPREN-
TISSAGEDELALECTUREQUIONTLARGEMENTPROUVÏLEURS
EFFETSAUX²TATS5NISCOMMEEN&RANCEPROGRAM-
ME0!2,%2OU032;=,ASEULEVRAIEQUESTION
ESTPOURQUOISONTILSSIPEUDIFFUSÏSEN&RANCE
s5NPARCOURSDESOINSCOHÏRENTETSTRUCTURÏ
des troubles des apprentissages a fait récemment
l’objet d’une réflexion d’un groupe de travail
ministériel(5) ;
– son objectif : permettre une égalité territoriale
et dans toutes les populations d’accès aux soins
si nécessaire ;
– son organisation : une gradation des soins et
une cohésion des filières selon la sévérité des
troubles et leur évolution ;
nSAMISEENPLACESOUSLADÏPENDANCEDES!23
– son caractère innovant : offrir à l’enfant et sa fa-
mille des réponses correspondant à leurs besoins ;
– son principe : assurer un niveau intermédiaire
entre les soins de ville prescrits par le médecin de
l’enfant (généraliste, pédiatre ou scolaire) et les
centres référents (CRTLA régionaux mis en place
par le Plan langage 2001). C’est là où réside l’en-
jeu majeur d’un parcours de soins cohérent fondé
sur trois niveaux (encadré 2). Ce dossier décrit
ces trois niveaux de soins, clarifiant ainsi le rôle
de chacun au bénéfice de l’enfant et sa famille. s
L’auteure signale comme seul lien avec le sujet de ce dossier du Concours médical qu’elle coordonne
le fait d’être un des auteurs de la batterie EDA citée.
1. Devant un développement inhabituel du langage oral ou écrit, donner aux médecins
généralistes les outils pour leur permettre de prescrire de façon éclairée les bilans com-
plémentaires et reconnaître les situations plus complexes, selon des référentiels clairs
(niveau 1). Ces évaluations et ces soins étant assurés selon le profil des troubles par
des rééducateurs ambulatoires (dont les orthophonistes) ou institutionnels (dont les
CMPP).
2. Développer, valoriser, créer un maillage territorial de réseaux ou structures de niveau 2,
qui serviront de recours aux généralistes et aux familles dès que la situation de l’enfant
ne paraît pas si simple ou n’évolue pas suffisamment favorablement.
3. Les CRTLA étant aujourd’hui débordés, recentrer leurs missions, au plan clinique,
vers les situations les plus complexes nécessitant leur hyperspécialisation, leur per-
mettant ainsi de mieux se consacrer à la recherche et à sa diffusion.
2. Les enjeux d’un parcours de soins selon
une gradation en trois niveaux
1. Enquête PISA 2012 www.oecd.
org/pisa/keyfindings/pisa-2012-
results-overview-FR.pdf
2. Quelques programmes http://
opensiuc.lib.siu.edu/gs_rp;http://
www.jstor.org/stable/30035543;
http://abc.fpg.unc.edu/
3. www.cognisciences.com/
IMG/001_008_ANAE_112_
Zorman_B.pdf
4. http://www.readinghorizons.
com/blog/post/2010/11/10/
Dr-Joseph-Torgesen-Presents-
Teaching-all-students-to-read-
Is-it-really-possible.aspx ; www.
cognisciences.com/rubrique.
php3?id_rubrique=8; http://
www.lemonde.fr/societe/
article/2014/02/03/les-enfants-
de-pauvres-sont-ils-condamnes-a-l-
illettrisme_4358954_3224.html
5. http://www.sante.gouv.fr/IMG/
pdf/Parcours_de_soins_des_
enfants_atteints_de_troubles_des_
apprentissages.pdf
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