Cornée
Images en Ophtalmologie
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Vol. VII
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mars-avril 2013
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Mots-clés. Kératite neurotrophique • Greffe de
membrane amniotique • Thérapie matricielle • Cicatrisa-
tion cornéenne.
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Keywords. Neurotrophic keratitis • Amniotic membrane
transplantation • Matrix therapy • Corneal wound healing.
Focus
Conduite à tenir devant un ulcère trophique
de la cornée
Trophic ulcer of the cornea
J. Gueudry, A. Aifa, M. Muraine
(Service d’ophtalmologie, hôpital Charles-Nicolle, Rouen)
La kératite neurotrophique est une atteinte
dégénérative chronique de l’épithélium cornéen
caractérisée par un retard de cicatrisation
épithéliale lié à la diminution de la sensibilité
cornéenne. La survenue d’un ulcère trophique cornéen
est une pathologie rare qui nécessite un traitement
rapide et agressif afi n d’éviter la progression de l’ulcère
épithélial vers la fonte stromale et la perforation
cornéenne.
L’hypoesthésie cornéenne est responsable
d’une souffrance de la surface oculaire
La cause la plus fréquente d’hypoesthésie ou d’anesthésie
cornéenne est représentée par les séquelles d’infections
cornéennes herpétiques ou zostériennes
(tableau)
.
L’hypoesthésie cornéenne aboutit à un trouble majeur de la
surface oculaire. Ainsi, le fi lm lacrymal se trouve altéré par
une diminution de la sécrétion lacrymale, une augmentation
de sa viscosité et une diminution du réfl exe de clignement.
Les cellules épithéliales cornéennes perdent leurs microvil-
losités entraînant un défaut d’adhésion du fi lm lacrymal et la
régénération cellulaire est ralentie. Cela a pour conséquence
une vulnérabilité épithéliale et une mauvaise régénération
cellulaire, aboutissant à la souffrance épithéliale cornéenne.
La kératite neurotrophique évolue
selon différents stades cliniques de gravité
Les signes fonctionnels associent une baisse de l’acuité visuelle,
une hyperhémie conjonctivale, un larmoiement et une douleur
absente ou modérée. Le tableau clinique débute par une insta-
bilité du fi lm lacrymal et une irrégularité de la surface épithé-
liale, puis par une kératite ponctuée superfi cielle. Ensuite,
l’ulcère épithélial apparaît, caractérisé par sa forme ovalaire,
au niveau de la moitié inférieure de la cornée, et ses bords
qui s’enroulent avec le temps. Il est parfois compliqué d’un
œdème stromal et d’un effet de Tyndall cellulaire et protéique
en chambre antérieure. Enfi n, l’ulcère stromal survient.
La priorité est l’éviction de tout agent local
toxique pour la surface oculaire
Le traitement habituel des ulcères trophiques s’avère souvent
diffi cile. La priorité est l’éviction de tout collyre toxique pour la
surface oculaire comprenant les collyres avec conservateurs,
les anti-infl ammatoires non stéroïdiens (AINS) en collyre
(1)
et les pommades ou collyres antiviraux et/ou antibiotiques.
Les agents lubrifi ants sans conservateurs sont recommandés,
auxquels un collyre antiseptique sans conservateur peut
être ajouté. Selon l’évolution, la pose d’une lentille souple à
visée thérapeutique peut être proposée. Le collyre au sérum
autologue, riche en facteurs de croissance et en inhibiteurs
de protéases, peut également être envisagé. Cependant, la
réglementation contraignante ne le rend disponible que dans
certains centres. L’administration en collyre de NGF
(Nerve
Growth Factor)
semble effi cace, mais son utilisation est encore
du domaine de la recherche.
Tableau. Étiologies principales des ulcères cornéens trophiques.
Virus de la varicelle et du zona
Herpes Simplex Virus
Paralysie de la cinquième paire crânienne
– Anévrismes
– Post-traumatique
– Postchirurgicale, etc.
Brûlures chimiques
Abus médicamenteux : anesthésiques locaux,
collyres anti-infl ammatoires non stéroïdiens (AINS)
Postopératoires
– Traumatisme chirurgicaux ou par laser des nerfs ciliaires, LASIK, etc.
Diabète, défi cit en vitamine A