Risque de maladie veineuse thromboembolique chez la femme en

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mt 2011 ; 17 (3) : 213-33
Risque de maladie veineuse
thromboembolique chez la
femme en âge de procréer
Aurélien Delluc1,2,3, Emmanuelle Le Moigne1,2,3,
Dominique Mottier1,2,3
1Université européenne de Bretagne, EA 3878, GETBO, 29200 Brest, France
2Inserm CIC 0502, 29200 Brest, France
3CHU de Brest, hôpital de la Cavale-Blanche, département de médecine interne et de
pneumologie, Bd Tanguy Prigent 29609 Brest, France
Le risque de maladie veineuse thromboembolique (MVTE) chez la femme en âge de procréer
est faible, estimé à 0,5/1 000 femmes-années. De nombreux facteurs vont moduler ce risque :
l’âge, les thrombophilies constitutionnelles ou acquises, les facteurs hormonaux, l’obésité,
les circonstances à risque majeur de MVTE (chirurgie, immobilisation, cancer, hospitalisa-
tion) avec de nombreuses interactions. La contraception œstroprogestative multiplie le risque
de MVTE par3;lerisque est surtout marqué lors de la première année d’utilisation, il aug-
mente avec la dose d’œstrogènes et est différent selon le progestatif utilisé. Les thrombophilies
constitutionnelles, l’âge, l’obésité, les circonstances à risque classiques de MVTE voient leur
impact majoré chez les femmes sous contraception orale œstroprogestative. Il y a peu de
données sur le risque lié à la contraception progestative pure. La grossesse augmente le risque
de MVTE par de multiples mécanismes. L’incidence est estimée à une grossesse sur 1 000
avec une fréquence identique dans les périodes pré- et post partum. De nombreux facteurs
vont moduler le risque : l’âge, les thrombophilies constitutionnelles et surtout les antécédents
personnels de MVTE. La césarienne programmée majore peu le risque contrairement à la
césarienne en urgence. L’épidémiologie et les mécanismes des thromboses survenant lors des
procédures d’assistance médicale à la procréation (AMP) sont encore mal connus. Des études
épidémiologiques sont indispensables pour en préciser la fréquence et les facteurs de risque.
Le problème des antécédents familiaux est naturellement associé au problème des thrombo-
philies constitutionnelles. L’appréciation du risque familial doit être nuancée et ne peut se
limiter à l’identification d’une thrombophilie biologique connue. En effet, le risque familial
est fortement lié à l’âge du propositus, important avant 45 ans, minime ou nul après 70 ans,
que le propositus présente ou non une thrombophilie constitutionnelle repérée. La préven-
tion de la MVTE chez la femme enceinte, au cours des procédures d’AMP justifie des études
comparatives. En outre, la contraception hormonale chez les femmes à risque fait appel en
France aux microprogestatifs alors que dans les pays anglo-saxons, ils restent contre-indiqués.
La MVTE chez les femmes en âge de procréer soulève de nombreuses questions, non réso-
lues. Rare, elle est fortement influencée par les œstrogènes (contraception orale, grossesse,
AMP). Le rôle des thrombophilies, en particulier la mutation du facteur V, apparaît comme
un facteur modulateur du risque de premier épisode de MVTE. La prévention de la MVTE au
cours des situations à risque reste empirique et ne repose pas sur des études comparatives.
Mots clés : maladie veineuse thromboembolique, facteur de risque, femme
Risque global de
maladie veineuse
thromboembolique
Risque de thrombose
veineuse profonde et
d’embolie pulmonaire
Incidence
Les données de la littérature
sur le risque de maladie veineuse
thromboembolique (MVTE) chez les
femmes en âge de procréer sont très
hétérogènes selon :
les critères retenus pour
le diagnostic de MVTE (throm-
bose veineuse profonde [TVP] des
membres inférieurs ou autres loca-
lisations, embolie pulmonaire [EP],
idiopathiques...);
la méthodologie de l’étude, la
période (évolution des techniques
diagnostiques) et le lieu d’observa-
tion [1-9] ;
doi:10.1684/met.2011.0338
mt
Tirés à part : A. Delluc
213
Pour citer cet article : Delluc A, Le Moigne E, Mottier D. Risque de maladie veineuse thromboembolique chez la femme en âge de procréer. mt 2011 ; 17 (3) :
213-33 doi:10.1684/met.2011.0338
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enfin, dans la majorité des études, les morts subites
ne sont pas imputées à l’EP.
Les données d’incidence de la MVTE dans la popu-
lation de l’arrondissement de Brest concernent tous les
patients hospitalisés ou non [10]. Seules les TVP des
membres inférieurs et les EP sont prises en compte. Dans
la population globale, l’incidence de la MVTE est de
1,83/1 000 par an. Chez les femmes, l’incidence annuelle
est de 0,02/1 000 avant 19 ans, 0,58/1 000 entre 20 et
39 ans, 1,05/1 000 entre 40 et 59 ans. Chez l’homme
l’incidence est identique avant 20 ans, puis plus faible que
chez les femmes à 0,4/1 000 par an entre 20 et 39 ans ;
elle est ensuite plus élevée chez les hommes que chez
les femmes de 40 à 59 ans (1,52/1 000 par an). Un tiers
des femmes avait déjà un antécédent de MVTE [10]. Une
étude suédoise rapporte les mêmes données d’incidence
[1].
Plus récemment, une étude de population et une
étude de cohorte montrent des incidences comparables :
0,3/1 000 par an pour les femmes de 20 à 25 ans jusqu’à
0,8/1 000 par an pour les femmes de 45 à 50 ans [11, 12].
En conclusion, l’incidence de la MVTE chez la femme
en âge de procréer peut être estimée à :
<0,2/1 000 femmes par an chez les moins de
20 ans ;
0,3/1 000 femmes par an de 20 à 30 ans ;
0,45/1 000 femmes par an de 30 à 45 ans ;
0,6 à 1/1 000 femmes par an de 45 à 50 ans.
Présentation clinique
La présentation clinique de la MVTE chez la femme
jeune est une embolie symptomatique associée ou non à
une TVP dans 30 % des cas et une TVP seule dans 70 %
des cas. Les données sont les mêmes chez l’homme jeune
[10-14].
Caractéristiques de la maladie veineuse thromboembolique (pro-
voquée ou idiopathique)
Dans le registre RIETE et une cohorte brestoise,
46 % des épisodes survenant chez les femmes de moins
de 50 ans non utilisatrices de contraception œstropro-
gestative sont idiopathiques, contre 75 % d’épisodes
non provoqués chez les femmes utilisatrices de pilule
[14, 15].
Syndrome post-thrombotique
Un tiers des femmes, tous âges confondus, qui
présentent une TVP vont développer un syndrome post-
thrombotique et pour 5 à 10 %, il sera sévère [16]. Dans
une série rétrospective de 43 jeunes femmes, avec un suivi
moyen de 51 mois après TVP, 67 % des femmes avaient
un syndrome post-thrombotique léger et 7 % une forme
modérée [17].
Thromboses de siège inhabituel
Thromboses veineuses cérébrales
Les thromboses des veines cérébrales surviennent dans
75 % des cas chez la femme, le plus souvent dans la
troisième décennie. Cette différence entre l’homme et la
femme s’explique par l’influence des facteurs hormonaux :
ainsi dans une série de 381 malades de moins de 50 ans
présentant une thrombose cérébrale, 75 % des patients
sont des femmes. Parmi celles-ci, un facteur hormonal
est retrouvé dans 75 % des cas (contraception œstropro-
gestative : 54,3 % ; grossesse : 6,3 % ; post partum :
13,8 %) [18]. Dans une méta-analyse, l’exposition à une
contraception œstroprogestative chez les patientes pré-
sentant une thrombose des veines cérébrales est quatre fois
plus importante par rapport à des témoins sans thrombose
veineuse cérébrale : odds ratio [OR] = 4,79 (IC 95 % = 2,4-
9,58) [19].
Thromboses splanchniques
Les thromboses splanchniques surviennent de fac¸on
équivalente chez les femmes (42 %) et chez les hommes
dans une large cohorte colligée de 1980 à 2000 [20].
Dans une série de 163 cas de syndrome de Budd-
Chiari constituée entre 2003 et 2005, 38 % des femmes
étaient sous contraception orale et 6 % étaient en période
post partum [21]. Enfin, dans une étude cas-témoin,
concernant le syndrome de Budd-Chiari, le risque rela-
tif (RR) sous contraception œstroprogestative était de 2,37
(IC 95 % = 1,05-5,34) [22].
Thromboses veineuses des membres supérieurs
Les thromboses veineuses des membres supérieurs
sont rares et représentent4à11%descasdeTVPselon
les études et les thromboses étudiées (non provoquées
ou provoquées) [23-29]. L’incidence globale annuelle est
à 3,52/100 000 par an et à 2/100 000 par an pour les
thromboses non provoquées [23, 30]. Le risque d’EP est
évalué entre 3 et 9 % [26, 27, 29]. Il n’y a pas de diffé-
rence d’incidence selon le sexe [23, 25, 26]. Ilyapeu
de données s’intéressant spécifiquement aux femmes en
âge de procréer, chez qui les thromboses des membres
supérieurs représenteraient4à18%desthromboses vei-
neuses [13, 14]. Les facteurs de risque des thromboses
des membres supérieurs sont mal connus. Chez les sujets
jeunes, les traumatismes répétés de la veine axillaire ou
sous-clavière exposent au risque de thrombose d’effort
dans le cadre d’activités sportives ou professionnelles
(tennis, golf, natation, esthéticiennes, sacs à dos...). Ces
thromboses d’effort représenteraient 15 à 24 % des TVP
des membres supérieurs [31], les cathéters centraux, 50 %
et le cancer, 40 % [32]. La prévalence des thrombophilies
chez les patients présentant une thrombose des membres
supérieurs varie de8à61%[25]. Il s’agit essentiellement
de la mutation du facteur II et de la mutation du facteur V
(OR = 4,2 ; IC 95 % = 1,4-12,6) [23, 33, 34]. L’impact de la
214 mt, vol. 17, n3, juillet-août-septembre 2011
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contraception orale est discuté (OR = 1,2 ; IC 95 % = 0,6-
2,2) [33]. Dans les plus grandes séries de TVP des membres
supérieurs, l’assistance médicale à la procréation (AMP)
n’est pas citée [23, 32, 33].
Thromboses jugulaires
Les thromboses jugulaires posent des problèmes
proches des thromboses des membres supérieurs, aux-
quelles elles sont parfois associées [35]. Dans une série
franc¸aise portant sur 29 patients (dont 22 femmes), les cir-
constances favorisantes identifiées sont la présence d’un
cathéter (dix patients), un cancer (dix patients), un syn-
drome d’hyperstimulation ovarienne (cinq patientes), une
thrombophilie (trois patients) [36]. Le risque d’EP et la mor-
talité sont identiques à ceux des thromboses axillaires et
sous-clavières [35].
Mortalité
Mortalité globale
Les données sur la mortalité chez les patients qui ont
présenté une MVTE sont très différentes selon qu’il s’agit
de données issues d’essais thérapeutiques sur une popu-
lation sélectionnée, de données issues de cohortes ou de
bases de données. La mortalité dépend de la présentation
clinique de la MVTE, de l’existence initiale d’un état de
choc et des comorbidités [11, 37, 38].
Dans les essais thérapeutiques, la mortalité à trois
mois, imputée à l’EP est de 0 à 1,5 % [39-43].
Dans les registres, la mortalité toutes causes confon-
dues à trois mois est de 8 % pour l’ensemble des MVTE et
de 15 % pour l’EP [37, 38, 44]. La mortalité directement
liée à une EP est de 0,55 % après une TVP symptoma-
tique isolée [37]. En revanche, après une EP, le risque de
mort par EP à trois mois est de3à9%soit la moitié de la
mortalité toutes causes confondues. La mortalité est pré-
coce, survenant dans 75 % des cas avant 12 jours [37, 38].
La mortalité à court terme varie de moins de 5 % pour les
patients stables sur le plan hémodynamique à plus de 50 %
en cas d’arrêt cardiorespiratoire [45]. Les autres facteurs
de risque associés à la mortalité sont l’âge (supérieur à 70
ou 75 ans : hazard ratio [HR] = 1,6 ; IC 95 % = 1,1-2,3),
le cancer (HR = 2,3 ; IC 95 % = 1,5-3,5), l’insuffisance car-
diaque (HR = 2,4 ; IC 95 % = 1,5-3,7), la BPCO (HR = 1,8 ;
IC 95 % = 1,2-2,7), l’immobilisation pour une pathologie
neurologique (HR = 2,8 ; IC 95 % = 1,6-4,8) [37, 38]. Ces
données concernent des patients d’âge moyen de 63 ans,
dont plus de la moitié sont des femmes.
Deux études de population montrent des résultats
comparables [11, 46].
Impact de la contraception œstroprogestative et de la grossesse
sur la mortalité liée à la maladie veineuse thromboembolique
Dans un registre de décès suédois, la mortalité
liée à la MVTE chez les femmes entre 15 et 44 ans
est plus importante chez les femmes sous contracep-
tion œstroprogestative (7,5/million de femmes-années
[IC 95 % = 4,7-10,3]) et chez les femmes enceintes
(8,9/million de grossesses-années [IC 95 % = 4,1-17,0])
par comparaison à la mortalité des femmes non enceintes
et non exposées à la contraception œstroprogestative
(5/million de femmes-années [IC 95 % = 3,7-6,2]) [47].
Facteurs modulant le risque de maladie
veineuse thromboembolique
chez la femme en âge de procréer
Contraception œstroprogestative
En France, plus de 80 % des femmes auront utilisé une
contraception orale au moins une fois au cours de leur vie
reproductive [48]. En 2000, en France, 60 % des femmes
utilisaient la pilule œstroprogestative comme contracep-
tion contre 25 % en Autriche, et 19 % en Espagne et en
Italie [49, 50].
Risque global lié à la contraception œstroprogestative
En Europe, deux études (une cohorte et un cas-témoin)
ont évalué le risque de MVTE associé à la contraception
orale [12, 13]. Dans ces deux études, un tiers des patientes
sont sous contraception orale. Les données d’incidence
sont résumées dans le tableau 1. La contraception hor-
monale est associée à un risque accru de MVTE (risque
multiplié par 2,83 dans la cohorte et multiplié par 5 dans
le cas-témoin). La présentation clinique de la MVTE sous
contraception orale est une EP dans 44 % des cas versus
36 % chez les non-utilisatrices [14, 15].
Facteurs de modulation du risque de maladie veineuse
thromboembolique chez les femmes sous contraception orale
œstroprogestative
Les facteurs de risque majeurs (chirurgie, immobilisation
plâtrée, hospitalisation, cancer)
Un facteur de risque majeur transitoire additionnel est
retrouvé chez 25 % des femmes qui ont présenté une
MVTE sous contraception orale œstroprogestative [14, 15]
alors qu’un facteur de risque majeur transitoire est retrouvé
chez 50 % des femmes non enceintes qui présentent une
MVTE et qui ne prennent pas de contraception orale œstro-
progestative. Dans les recommandations, la contraception
orale œstroprogestative est un motif de prophylaxie de la
MVTE par HBPM chez les femmes exposées à une chirur-
gie à risque modéré ou à une immobilisation plâtrée du
membre inférieur [51].
Le tabac
L’influence du tabac sur le risque de MVTE lié à la
contraception orale est controversée [52, 53]. Dans la
MEGA Study, le risque est multiplié par 3,9 chez les
patientes non fumeuses sous contraception, il est multi-
plié par 2 chez les fumeuses sans contraception et par
mt, vol. 17, n3, juillet-août-septembre 2011 215
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Tableau 1. Risque de maladie veineuse thromboembolique (MVTE) lié à la contraception hormonale
chez les femmes de moins de 50 ans ayant présenté un premier épisode de MVTE.
Références Lidegaard et al. [12] van Hylckama Vlieg et al. [13]
Type d’étude Cohorte Cas-témoin
Période 1995-2005 1999-2004
Critères d’inclusion Contraception hormonaleaContraception hormonalea
MVTE, n 4 213 1 524
Incidence (1 000/an)
Non-utilisatrices 0,3 0,18
Utilisatrices 0,62 0,9
Risque relatif (versus non-utilisatrices) 2,83 (2,65-3,00) 5,0 (3,8-6,5)
En fonction de la durée d’utilisation
<1 an 0,64
Risque relatif (versus non-utilisatrices) 4,17 (3,73-4,66) 7,5 (4,7-12,2)
1-4 ans 0,54
Risque relatif (versus non-utilisatrices) 2,98 (2,73-3,26) 5 (3,7-6,8)
>4 ans 0,76
Risque relatif (versus non-utilisatrices) 2,76 (2,53-3,02) 5,2 (4,3-6,2)
En fonction du progestatif associé
Lévonorgestrel 0,54
Risque relatif (versus non-utilisatrices) 2,02 (1,75-2,34) 3,6 (2,9-4,6)
Désogestrel/gestodène 0,68
Risque relatif (versus non-utilisatrices) 3,55 (3,3-3,83) 7,3 (5,3-10)
Drospirénone 0,78
Risque relatif (versus non-utilisatrices) 4 (3,26-4,91) 6,3 (2,9-13,7)
Contraception par progestatif seul
Lévonorgestrel 0,18
Risque relatif (versus non-utilisatrices) 0,59 (0,33-1,04)
Désogestrel 0,33
Risque relatif (versus non-utilisatrices) 1,1 (0,35-3,41)
DIU progestérone 0,33
Risque relatif (versus non-utilisatrices) 0,89 (0,64-1,26)
aContraception hormonale (œstroprogestative, progestative, stérilet à la progestérone). DIU : dispositif intra-utérin.
8,8 chez les fumeuses sous contraception [54]. La HAS
contre-indique la prescription des œstroprogestatifs chez
les femmes fumeuses de plus de 35 ans.
L’âge
Dans la MEGA study, le RR de MVTE chez les femmes
sous contraception orale augmente avec l’âge (3,1 pour les
femmes de moins de 30 ans [0,37 versus 0,12/1 000 par
an], 5 pour les femmes de 30 à 40 ans [1 versus 0,2/1 000
par an] et 5,8 pour les 40 à 50 ans [1,33 versus 0,23/1 000
par an]) [13].
Les varices
Elles n’augmentent pas le risque dans les études qui
l’ont évalué [55].
Le surpoids
Chez les patientes sous contraception orale, deux
études récentes mettent en évidence une augmentation
du risque pour les patientes ayant un indice de masse
corporelle (IMC) supérieur ou égal à 25 kg/m2[56, 57].
Les thrombophilies constitutionnelles et les antécédents
familiaux
Il existe une interaction entre les thrombophilies cons-
titutionnelles et la contraception orale œstroprogestative.
En effet, dans une étude cas-témoin où les témoins sont
des femmes indemnes de MVTE [58] :
le risque de MVTE d’une femme qui prend une
contraception œstroprogestative est multiplié par 3,8
(IC 95 % = 2,4-6) ;
216 mt, vol. 17, n3, juillet-août-septembre 2011
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ce risque est multiplié par 7,9 (IC 95 % = 3,2-19,4)
chez les femmes porteuses de la mutation ;
enfin, il est multiplié par 34,7 (IC 95 % = 7,8-154)
chez les femmes prenant une contraception œstroproges-
tative et porteuses de la mutation du facteur V.
Dans les familles de patients présentant une mutation
du facteur V, le RR chez les femmes porteuses de la muta-
tion et sous pilule est de 15,6 (IC 95 % = 8,7-28,1) par
rapport aux femmes ayant cette mutation mais ne prenant
pas la pilule [55].
Les autres thrombophilies biologiques lorsqu’elles
sont associées à la contraception œstroprogestative aug-
mentent également le risque de MVTE : OR = 12,6
(IC 95 % = 1,4-115,8) pour le déficit en antithrombine,
OR = 6,3 (IC 95 % = 1,7-23,9) pour le déficit en protéine C,
et OR = 4,9 (IC 95 % = 1,4-17,1) pour le déficit en pro-
téine S [55].
Les recommandations franc¸aises pour la recherche
d’une thrombophilie avant la prescription d’une contra-
ception œstroprogestative ne concernent que les femmes
qui ont des antécédents familiaux au premier degré [59].
Dans le cadre des études familiales, l’appréciation du
risque chez les apparentées doit prendre en compte le
caractère informatif de la famille défini comme deux appa-
rentés de premier degré avec MVTE. Celui-ci confère déjà
un risque augmenté de MVTE aux individus asymptoma-
tiques en dehors de toute mise en évidence d’un facteur
biologique de risque.
La recherche de facteur de risque biologique, identifié
au préalable chez un cas-index, sera envisagée avant la
prescription d’une contraception orale œstroprogestative,
selon les modalités suivantes [59] :
en cas de déficit en antithrombine (AT) chez le
cas-index (hors variant à faible risque thrombotique),
une étude familiale est recommandée, notamment avant
la prescription d’une contraception orale (grade B) et
un traitement par œstroprogestatif chez l’apparentée est
contre-indiqué en cas de mise en évidence d’un déficit en
AT chez l’apparentée ;
la recommandation est généralement la même en
cas de déficit en protéine C ou en protéine S, même si le
consensus est moins clair, notamment en cas de déficit en
protéine S (grade C) ;
la recherche d’un polymorphisme du gène du fac-
teur V et du gène du facteur II peut également être
envisagée dans les familles doubles hétérozygotes ou
homozygotes. Si un polymorphisme est ainsi mis en évi-
dence, il semble légitime, comme dans les autres cas,
de discuter des risques et des alternatives possibles à la
prescription d’œstroprogestatifs (grade C). Cette recom-
mandation est discutable en cas d’exposition préalable
à des œstroprogestatifs pendant de nombreuses années
si on admet que la plupart des MVTE surviennent dans
les six à 12 mois après l’introduction de la contraception
œstroprogestative ;
l’étude familiale en cas de polymorphisme simple du
gène du facteur V ou du gène du facteur II hétérozygote
chez le cas-index est plus discutable et envisagée au cas
par cas (accord professionnel).
dans tous les cas, si un facteur de risque génétique est
mis en évidence chez le cas-index et que la recherche est
négative chez l’apparentée asymptomatique, la décision
thérapeutique d’utilisation de la contraception œstropro-
gestative doit être modulée par le caractère informatif de
la famille et donc le risque conféré par les antécédents
familiaux seuls (grade B).
Les voyages
Il existe une augmentation du risque de MVTE chez
les femmes sous contraception œstroprogestative après
un voyage en avion, train ou voiture par rapport aux
femmes non utilisatrices [60-62]. Dans une cohorte de
sujets jeunes (âge moyen de 40 ans), employés de compa-
gnies internationales voyageant régulièrement, le risque
de MVTE survenant dans les huit semaines suivant un
vol de plus de quatre heures est de 3,2/1 000 personnes-
années, soit 1/4 656 vols. Ce risque est plus important :
chez les femmes (4,4/1 000 personnes-années versus
2,7/1 000 personnes-années pour les hommes) ;
chez les sujets de moins de 30 ans (IRR = 7,7 ;
IC 95 % = 1,6-38,4 [par comparaison aux sujets plus
âgés]) ;
en cas de surpoids (si IMC >25 4,7/1 000 PA versus
1,9/1 000 PA) ;
sous œstroprogestatifs (6,6/1 000 soit un IRR à 3,6
(IC 95 % = 0,8-14,9) par rapport aux femmes prenant une
contraception œstroprogestative mais n’ayant pas voyagé).
Le risque absolu est évalué à un événement thrombo-
tique pour 1 808 vols de plus de quatre heures chez les
utilisatrices de la pilule ;
le risque dépend aussi de la durée du vol, de
la fréquence des vols, du temps écoulé depuis le vol,
les deux premières semaines étant les plus à risque
[62].
La période du post partum
Le risque de MVTE chez les femmes utilisant une
pilule œstroprogestative en post partum n’est pas connu.
Il existe une augmentation du risque de thrombose pen-
dant les six semaines suivant l’accouchement (surtout
dans les trois premières semaines). Le retour à la fer-
tilité étant peu probable avant six semaines, l’OMS
recommande d’éviter la contraception œstroprogestative
pendant les trois premières semaines du post partum,
surtout s’il existe d’autres facteurs de risque associés
(antécédent de thrombose, thrombophilie, immobilisa-
tion, transfusion, IMC supérieur ou égal à 30 kg/m2,
hémorragie de la délivrance, césarienne ou prééclampsie)
[63, 64].
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