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modèles professionnels et les
modes d’organisations collecti-
ves dans les activités de travail.
Dubar et Tripier partent des
multiples usages du terme
« profession », notamment la
différence entre les termes fran-
çais et anglais, afin d’expliquer
les raisons pour lesquelles cer-
taines activités de travail ob-
tiennent le statut juridique de
« profession » dans les pays an-
glo-saxons. Un statut qui impli-
que l’accès à des droits spécifi-
ques (auto-organisation, maîtrise
de la formation…). À partir de la
notion de profession utilisée en
France, Dubar et Tripier déga-
gent quatre sens correspondant à
quatre points de vue sur le tra-
vail, en termes d’identité, de po-
sition, de spécialisation ou de
classification professionnelle. La
sociologie des professions est
définie par rapport à la sociolo-
gie du travail et des organisations
et comporte un triple objet :
l’organisation sociale des acti-
vités de travail, la signification
subjective de celles-ci et les
stratégies économiques et socia-
les de monopolisation des mar-
chés du travail mises en œuvre
par des coalitions d’acteurs.
Dans la première partie de
l’ouvrage, trois modèles reli-
gieux-politiques, trois types
idéaux au sens de Weber sont
considérés comme à l’origine de
la sociologie des professions. Le
modèle catholique de la profes-
sion-corps correspond à la doc-
trine de l’Église-Corps du
Christ ; celle-ci a été transposée à
l’État et est à l’origine de la logi-
que corporative-étatique. Il s’agit
d’un modèle holiste (les corpo-
rations sont légitimées par
l’État), hiérarchisé (entre les
corps les plus nobles et moins
prestigieux), masculin (les
femmes en sont exclues) et cléri-
cal. Ce premier modèle s’est
développé sous l’Ancien régime
et, par la suite, dans les pays la-
tins de droit romain comme la
France, l’Espagne, l’Italie.
Le modèle de la profession-
collège ou confrérie est apparu
dans les pays de la Réforme
protestante ; il est centré sur
l’existence d’un « chemin voca-
tionnel » par lequel chacun doit
chercher ici-bas sa propre voie
du salut. La profession ici est
fondée sur le principe de
« l’autogouvernement » du
groupe professionnel et caracté-
risée par un « égalitarisme co-
gnitif et éthique » qui présente
différentes versions. Dans la ver-
sion luthérienne des pays ger-
maniques, l’égalité est construite
entre pairs de tradition nobi-
liaire ; la version calviniste en
Angleterre et aux États-Unis est
plus égalitariste puisqu’elle
s’étend à tous les croyants qui