La Lettre du Sénologue • n° 50 - octobre-novembre-décembre 2010 15
DOSSIER THÉMATIQUE
Imagerie des cancers du sein
triple-négatifs
TNBC features
R. Gilles*, C. Feger*
L'
analyse des cancers du sein a permis de
mieux comprendre la biologie de ces
lésions et aussi de déterminer des sous-
groupes de patientes dont le pronostic est différent.
Parmi ces tumeurs, les récepteurs estrogènes, la
progestérone et le statut HER2, tous trois néga-
tifs, forment un sous-groupe particulier appelé
“tumeur triple-négative” (TNBC) dont le pronostic
est extrêmement défavorable. Ces lésions ne sont
pas rares, elles surviennent chez environ 15 à 20 %
des patientes européennes et chez 30 à 35 % des
patientes d'origine africaine. Ces lésions TNBC,
de type basal, bien qu'elles soient diagnostiquées
à un stade équivalent aux autres tumeurs, sont
très agressives avec un index de prolifération élevé
ainsi qu'une association fréquente avec le gène
BRCA1. Leur traitement ne peut pas comporter
d'antiestrogènes ou d'herceptine compte tenu de
leurs caractéristiques histologiques.
Analyse de la littérature
Cette classification histologique et pronostique
relativement récente explique certainement le
faible nombre de travaux publiés sur l'imagerie de
ces cancers TNBC. Cependant, ces articles mettent
en évidence des caractéristiques intéressantes qui
doivent être connues des différents acteurs en charge
du diagnostic des cancers du sein (1-5) [figure].
Dans un article paru en 2008 dans Breast Cancer
Research and Treatment (6), sur 198 femmes prémé-
nopausées diagnostiquées durant la même période,
Yang et al. décrivent l'aspect mammographique chez
38 d’entre elles (19 %) ayant un cancer du sein TNBC.
La particularité mammographique de ces patientes
TNBC est l’association à une masse dans 85 % des
cas versus 17 %, mais jamais à une distorsion archi-
tecturale ou à des calcifications isolées. De plus,
l'aspect mammographique est bénin dans 36 %
des cas versus 5 % pour l'ensemble des patientes.
Yang et al. concluent que l'aspect mammographique
est expliqué par l'agressivité de ce sous-groupe de
cancer du sein et soulignent le faible pourcentage
de lésions in situ associé aux lésions invasives, ce
qu'ils rapprochent des patientes ayant une mutation
de type BRCA1.
Wang et al. (7), dans un article paru dans Radiology
en 2008, rapportent leur expérience sur 33 des 56
patientes RE– avec un cancer du sein TNBC dont ils
analysent l'aspect mammographique et échogra-
phique. Dans 19 % des cas, la mammographie est
normale. Wang et al. retrouvent sur les mammogra-
phies une masse dans 70 à 75 % des cas versus 25 %,
des calcifications isolées dans 10 % et l'absence de
distorsion architecturale. De plus, l'aspect mammo-
graphique est bénin dans 35 % des cas versus 10
à 15 % pour l'ensemble des patientes. Wang et al.
retrouvent un faible pourcentage de calcifications
sur les mammographies et les corrèlent à l'existence
d'un composant in situ associé à une lésion invasive.
Chez les patientes comportant un composant in
situ associé à une lésion invasive, les calcifications
ne sont présentes que dans 26 % des cas chez les
patientes TNBC versus 65 %. L'analyse échogra-
phique ne retrouve aucune anomalie dans environ
20 % des cas. L'aspect échographique est d’ailleurs
considérée comme bénin ou indéterminée dans tous
les cas. Aucune des lésions parmi les patientes TNBC
ne présentait un aspect échographique typique de
malignité.
Dogan et al. (8), dans un article publié dans American
Journal of Radiology en 2010, étudient les examens
mammographique, échographique et l’IRM avant
tout traitement de 44 patientes ayant une tumeur
TNBC. L'aspect mammographique est normal chez
9 % des patientes. Les auteurs retrouvent une masse
(58 %), une asymétrie de densité (21 %), une distor-
* Clinique de Bordeaux Nord.
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