21 octobre 2004 Les effets indésirables des médicaments (iatrogénèse) sont beaucoup plus fréquents chez les sujets de plus de 65 ans. Or près des 2/3 de ces incidents sont évitables. La probabilité de survenue de tels effets est d'autant plus élevée que le médicament est mal utilisé. Or chaque phase de l'utilisation d'un médicament - prescription, dispensation, administration et prise par le patient lui-même - est décisif en termes de bon usage. Il importait donc de mobiliser l'ensemble des acteurs, professionnels de la santé, patients âgés et leur entourage, pour limiter ces effets indésirables, dont les conséquences peuvent être graves. Dans ce but, un groupe de travail, représentant les professionnels de la santé du secteur privé, médecins, pharmaciens, chirurgiens-dentistes, infirmières, masseurs-kinésithérapeutes, l'hospitalisation privée et les entreprises du médicament réunis au sein du mouvement Santé en Action, ainsi que des associations de patients et de consommateurs, mettent en place avec les professionnels concernés une action de prévention destinée à agir sur la iatrogénèse médicamenteuse évitable. Santé en Action : pour replacer le patient au centre de notre dispositif de soins Créé en Mars 2002, le mouvement Santé en Action regroupe 26 fédérations de professionnels de santé rassemblées au sein du CNPS1 (médecins, pharmaciens, chirurgiens-dentistes, infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes,…), les 1000 entreprises de la FEFIS2 (Entreprises du médicament, des dispositifs médicaux…) et les 1400 établissements de l'hospitalisation privée (FHP)3. Ce sont ainsi 450 000 acteurs de santé professionnels, libéraux ou du secteur privé, qui se sont engagés pour agir ensemble, afin de moderniser, préserver et optimiser notre système de santé. La iatrogénèse évitable du sujet âgé : un combat de santé publique Les médicaments soulagent, préviennent ou guérissent grâce à leurs propriétés pharmacologiques. Mais leur efficacité thérapeutique s'accompagne parfois d'effets indésirables, qui peuvent être d'autant plus sévères que le traitement est mal adapté ou mal suivi. Ceci s'observe hélas plus volontiers chez le sujet âgé, plus fragile, moins observant, présentant souvent des poly-pathologies. Le sujet âgé est plus fragile : les évènements de la vie auxquels chacun est exposé affectent davantage les personnes âgées. Ils sont de nature à déstabiliser la relation au traitement. Un deuil, un déménagement …, sont un véritable traumatisme. Une maladie infectieuse banale chez un sujet plus jeune peut déstabiliser gravement l'équilibre physiologique d'une personne avancée en âge. Sa réaction aux médicaments peut s'en trouver sérieusement affectée. 1 CNPS : Centre National des Professions de Santé FEFIS : Fédération Française des Industries de Santé 3 FHP : Fédération de l'Hospitalisation Privée 2 1 Une hospitalisation, une modification de l'environnement, un changement dans la prescription d'un traitement habituel, … sont autant de circonstances favorisant les erreurs, les défauts d'observance, or des études ont montré que plus d'un malade âgé sur deux est inobservant.4 Ainsi, pour le professionnel, qu'il soit médecin, pharmacien, dentiste, … il faut savoir ré-évaluer régulièrement les traitements pris au long cours, savoir "dé-prescrire", adapter les posologies, expliquer aux patients âgés le rôle et l'utilité de leurs médicaments, détailler leur mode d'utilisation, être attentif aux prises de médicaments simultanées, avec ou sans prescription… Il faut savoir aussi être vigilant aux premiers signes d'effets indésirables, et y penser devant des symptômes inhabituels survenant chez un malade vu régulièrement. Pour le malade, l'attitude à encourager est d'abord le dialogue, l'invitation à questionner les professionnels, l'incitation à la vigilance qui doit conduire à signaler sans délai au médecin, au pharmacien ou à l'infirmière tout signe anormal, tout symptôme inhabituel. Il faut en outre encourager les personnes âgées à respecter scrupuleusement leur prescription, et les dissuader de toute adaptation et de toute automédication "sauvages"… Précisons le : le bon usage, de la prescription à la prise, en passant par la dispensation, permettrait d'éviter plus de 60 % des accidents iatrogènes.5 Au sein de Santé en Action, un groupe de travail spécifique s'est créé, rassemblant des médecins, des pharmaciens, des spécialistes en gériatrie, thérapeutique, pharmacovigilance, auxquels se sont associés des représentants des malades et des consommateurs. Ce groupe a élaboré une campagne de communication destinée - d'une part aux professionnels, afin de renforcer leurs compétences sur la thérapeutique du sujet âgé et, surtout, les mobiliser dans une action majeure de prévention auprès des malades et de leur entourage, d'autre part aux malades eux-mêmes, afin de les alerter directement, améliorer l'usage de leurs médicaments, leur observance et leur vigilance, en les incitant au dialogue avec leur médecin et leur pharmacien. Deux documents ont ainsi été conçus, à l'intention de chacun de ces deux groupes. Les instances professionnelles et les associations membres de Santé en Action en assureront la diffusion. Le succès de cette action de santé publique repose sur la diffusion à et par l'ensemble des professionnels, en même temps que sur la sensibilisation du public le plus large autour de ce thème. Même si nous sommes jeunes et bien-portants, nous sommes tous des malades et des sujets âgés en puissance… Quant au médicament, il faut souligner que l'octroi par les autorités de santé d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) au vu d'études cliniques contrôlées témoigne d'un rapport bénéfice-risque offrant une marge de sécurité thérapeutique suffisante. Ce n'est pas le médicament en tant que tel qui est dangereux, mais son mésusage, tout particulièrement chez les sujets à risque que sont les personnes âgées. Cette action s'inscrit donc dans le cadre général de l'optimisation et de la promotion du Bon Usage du Médicament et concerne tous les acteurs de la santé, professionnels, mais aussi patients âgés et familles. 4 5 Jeandel C et la Revue de gériatrie 1991 et Corpus de Gériatrie 2000 Doucet J, APNET, 1998 et Queneau P, Bulletin de l’ Académie Nationale de Médecine 2003 2