Influence du champ magnétique sur les constantes diélectriques des cristaux liquides M. Jezewski To cite this version: M. Jezewski. Influence du champ magnétique sur les constantes diélectriques des cristaux liquides. J. Phys. Radium, 1924, 5 (2), pp.59-64. <10.1051/jphysrad:019240050205900>. <jpa-00205135> HAL Id: jpa-00205135 https://hal.archives-ouvertes.fr/jpa-00205135 Submitted on 1 Jan 1924 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of scientific research documents, whether they are published or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. INFLUENCE DU CHAMP MAGNÉTIQUE SUR LES CONSTANTES DES CRISTAUX LIQUIDES (1. DIÉLECTRIQUES par M. JEZEWSKI Laboratoire de Physique de l’Université de Cracovie. Historique. -- On a essaye de constater à diverses reprises 1"influeiice du champ magnétique sur les constantes diélectriques des solides et des liquides, mais sans résultat. (~) Les expériences entreprises par divers savants démontrèrent que les constantes diét(-ctriques du verre, de la paraffine, du soufre, de l’ébonite, du sulfure de carbone et de quelques liquides organiques ne sont pas modifiées lorsque nous exposons ces substances à l’action d’un champ magnétique intense. En 190 i, MM. Cotton et Mouton découvrirent la biréfringence magnétique des liquides purs (1). Ce phénomène conduit à considérer comme possible l’influence d’un champ magnétique sur les constantes diélectriques des liquides. Cotton et Mouton expliquent la biréfringence magnétique en admettant que les molécules des liquides soient anisotropes. Comme les axes des [molécules sont orientés dans toutes les directions de l’espace, cette anisotropie ne produit point d’effet sensible; un champ magnétique, au contraire, détermine une orientation des molécules et le liquide devient anisotrope. Langevin et Born se seryirent de Fhypothèse de l’anisotropie des molécules clans leurs rechercllea théoriques; le premier admit que la symétrie des molécules est celle d’un ellipsoïde de révolution(’), le deuxième développa (J) une idée de M. Debyre d’après laquelle chaque molécule contiendrait un doublet électrique inyariable C’). Dans ion liquide qui se trouve dans un champ magnétique, une seule direction de l’espace est priyilégiée entre toutes, c’est celle des lignes de force du champ. Toutes les autres directions sont équivalentes, c’est pourquoi le liquide prend les propriétés d’un cris1. tal uniaxe. Les indices de réfraction des cristaux uniaxes sont différents pour les ondes polarisées parallèlement et pour celles polarisées perpendiculairement à l’axe. Suivant la théorie de Maxwell l’indice de réfraction n et la constante diélectrique s sont liés par l’équation On sait toutefois que cette formule n’est yraie que pour le soufre arthorhombique(’). Dans les cristaux uniaxes, les constantes diélectriques ~1 (parallèlement à l’axe optique) et 22 (perpendiculairement à l’axe) ont en général, des valeurs différentes l’une de l’autre le rapport lliquides - S2 placés étant Et quelquefois plus grand nf2 que le n2 2 (8) . dans un champ magnétique ont les propriétés optiques des cristaux Les est très petite, nous pouvons nous attendre à ce uniaxes. Puisque la différence n22 S2 aussi soit très petite. que la différence cri Les liquides étudiés par 0. Lehmann et appelés « cristaux liquides » acquièrent aussi, - -- (l j Extrait du Bulletin de l’Académie Polonaise des Sciences el des Lettres, juillet 1923. (2) SCHRODUGER. -Dielektrizi[at. llandbuch der Elektri:;itÜI und des Jlagnelisrnus, herausgeg. von L. Graetz, Band 1, p. 22G. (3) Biréfrin,-ence magnétique des liquides purs. Les progrès de la Physique J1foléculaire. Paris, Gauthier-Villars, (1914), p. 12-~. Le Radium, t. 9 (1910), p. 249. (4) t. 55 (~1915), p. 2LL (5) BoRx, Annalen der (f5) DEBYE. Physikalische Zeilscitrift, t. 13 (1912), p. 9 (7) SCHRODIXGER. Loc. cit., p. 194. (8) SCIIROI)INGEII. Loc. cil., p. 195. i.. , Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/jphysrad:019240050205900 60 dans un champ magnétique, les propriétés optiques des cristaux uniaxes, ils deviennent biréfringents et leur biréfringence dépasse souvencelle des cristaux solides les plus biréfringents (’). En l’absence d’un champ magnétique, ces liquides sont isotropes à l’égard d’un champ électrique; pour les ondes lumineuses, ils se divisent en zones anisotropes d’orientations différentes dont les dimensions sont de l’ordre de c’est pourquoi ces liquides sont troubles. Les zones anisotropes consistent probablement en des agrégations de molécules dont les axes sont orientés parallèlement entre eux. La différence des liquides ordinaires et des cristaux liquides est donc la suivante : dans les liquides ordinaires, les zones d’orientations différentes se composent d’une ou de quelques molécules, les dimensions de ces zones sont quelques centaines de fois plus petites que la longueur d’une onde lumineuse. Dans les cristaux liquides, les dimensions des zones sont colnparables à la longueur d’une onde lulnineuse. Dans le champ magnétique, ces zones s’orientent de telle manière que leurs axes optiques deviennent parallèles aux lignes de force; le liquide se comporte ainsi comme un cristal unique homogène dont l’axe optique serait parallèle au champ. Puisque la différence des indices de réfraction (de l’indice ordinaire et de l’indice extraordinaire) atteint 0,3 à 0,4 pour les cristaux liquides nous pouvons espérer que leur anisotropie électrique sera nette. J’ai entrepris des expériences pour répondre à la question suivante : les liquides biréfringeiits, exposés à l’action d’un champ magnétique, deviennent-ils anisotropes pour des ondes électromagnétiques de longueur considérable, c’est-à-dire, leurs constantes diélectriques mesurées au moyen d’ondes électromagnétiques sont-elles différentes suivant que le champ magnétique est longitudinal ou transversale se distinguent-elles de celles que l’on observe en l’absence du champ 1 J’ai employé les liquides suivantes : l’azoxyanisol (para), l’azoxyphénétol (para), le benzène, l’éther, le chloroforme, l’aniline, le nitrobenzène. Les deux premiers sont des cristaux liquides, les autres, excepté l’éther, sont biréfringents lorsqu’ils sont placés en un champ magnétique (1). J’ai aussi étudié l’air liquide qui contient de l’oxygène fortement paramagnétique, qualité qui prouve que les molécules sont anisotropes. ’ ° ’ Il. Méthode. - J’ai employé la méthode de résonance électrique discutée dans un de mémoires précédents (~). La longueur des ondes utilisées était de 720 mètres. Deux condensateurs de mesure ;étaient en laiton, de capacités différentes ; dans chaque condensateur se trouvaient trois plaques. Les deux plaques extérieures formaient une boîte dans laquelle on versait le liquide examiné; cette boîte était reliée à la terre. Un condensateur est représenté dans la fig. 1. a est une plaque en verre; b, nue baguette qui sert à intercaler le condensateur clans le circuit oscillant- L’autre condensateur ne différai[ du premier que par la distance des plaques. Chaque condensateur se trouvait dans un vase en laiton (C, dans la fig. 1) dans lequel on faisait pénétrer le liquide à l’état d’ébullition à une température élevée; ce procédé était indispensable, l’azoxyanisol et l’azoxyphénétol étant liquides à des températures supérieures a ~18,J° C et t3fi,9° C. Le vase C était chauffé par un four électrique. Un électroaimant de Hartmann et Braun fournissait le champ magnétique. La distance des pôles, dans les expériences sur l’azoxyanisol, l’azoxyphénétol et l’air liquide, était de 4 cm environ ; dans toutes les autres, elle était de 0, 5 CHI. Le diamètre des pôles était de 4 cm. On déterminait l’intensité du champ au moyen d’une spirale de bismuth de Hartmann et Braun, et d’une bobine avec galvanomètre balistique. Pour éviter l’influence électrostaticlue de l’électroaimant sur le circuit oscillant, on avait relié les noyaux de celui-ci à la terre. L’action de l’induction n’était pas nuisible. mes (l) Jf Les cristaux der RadioaktivitÜt und (~) STUMPF. LOC. cil., p. 6. liquides. Les progrès de la physique t. 15 (1918), p, 1. (3) H. Mourox. £oc. cil., p. 144-149 Polonaise rles Sc. ("-’))1 JEzEI;aw. Bitll. de Raditini. série YI, Journrtl //.Me de Physique et le y?. VI, (1920), p. 88. /./r (1920), p. 88. /ae et t. 3 p. 7!. dps L. Cl. (les Sc. (1922), (1922) p. 293. - F. sTUaiPF, Jahrbuch el série A. 61 Le liquide remplissant une partie du condensateur, on devait déterminer la capacité de celle-ci. Pour la trouver, on mesurait la capacité du condensateur vide et celle du condensateur rempli du liquide dont la constante diélectrique était connue. Soit C~, la capacité du C". cette capacité lorsque le condensateur est rempli de liquide ; soit , diélectrique du liquide. La formule suivante donne la capacité cherchée. condensateur vide ; constante la IfI. Mesures. - Pour obtenir une température permettant la mesure de constantes diélectriques de Fazoxyanisol et de l’azoxyphénétol, le yase C était rempli des liquides bouillants aux températures exigées. Ces liquides étaient : trois fraclions de xylène technique dont les températures d’ébullition étaient de i2’2°, 1:j5°, 1430 C et une fraction de SolventC. pétrole dont la température d’ébullition était de 5° C. phase trouble existe entre les températures 118, 51 et L’azoxyanisol a été fourni par la lnaison hahlbaum colnlne chimiquement pur. On plaçait le condensateur rempli d’azoxyanisol fondu entre les pôles de l’électroaimant, de telle manière cjue les armatures du condensateur étaient perpendiculaires aux lignes de force La 62 En faisant passer un courant dans les spires constatait que la du condensateur diminuait; la diminution 3 000 de 7 L’exactitude de la méthode employée en un 100 gauss. champ atteignait pour dans cette expérience et les suivante était de 0, 2 pour 1 OIJ. Le tableau 1 contient les résultats des mesures faites avec le champ longitudinal. Ac- désigne la variation de la constante diélec- du de champ magnétique (champ longitudinal). l’électroaimant, on capacité trique. TABLEAU I. Les courbes A et B de la figure 2 représentent les résultats expérimentaux ; la courbe A se la température 135° C ; la courbe B, à la température 122° C. Notre méthode permet de déterminer la valeur de la constante diélectrique avec une erreur de 0, 2 pour cent: en considérant toutefois l’erreur inévitable dans la mesure du champ et la variation de la rapporte à 1’ig. 2. aller jusqu’à 0, 5’C, dans une série d’expériences, on ne peut attribuer résultats une exactitude dépassant 0,3 à 0,4 pour 100. C’es[ pourquoi la courbe ~~. est tracée en pointillé, la valeur de 3c ne dépassant pas l’erreur des déterminations. Dans le champ transversal d’intensité 4000 gauss. à une température de 122° C, on ne constatait aucune variation de la constante diélectrique. température, qui peut aux La phase trouble existe entre les températures 13G, 9° et tG7,;)0 C. L’azoxyphénétol a été fourni par la maison lîahlbaum comme chimiquement pur. La constante diélectrique diminuait, dans un champ de 7 000 gauss, à la température de 1430 C, ’ 63 de 6 pour iOO à peu dinal. près. Le tableau II contient les résultats obtenus avec le champ longitu- TABLEAU Il Les courbes C et D de la figure :2 représentenl ces résultats. La courbe D se rapporte à C. température 1430 C; la courbe C, à la température Dans un champ trausversal d’intensité de 1000 gauss, à la température de 1430 C, on n’a constaté aucun changement dans la valeur de la constante diélectrique. la expériences sur l’air liquide, je me servais du condensateur avec une capacité Le vase C était rempli d’air liquide qu’on versait pendant l’évaporation. Dans plus grande. un champ de Il 000 gauss, on n’a pas réussi à constater une variation de la constante diélectrique supérieure à 0, 001 de la valeur primitive. Les déterminations dont il s’agira dans la suite ont été faites à la température ambiante. On éloignait C, les pôles de l’électro-aimant pouvaient par conséquent être rapprochés l’un de l’autre. Par là-même, on peut obtenir un champ d’intensité atteignant jusqu’à 25 000 gauss. Il était facile de prévoir que la variation de la constante diélectrique des liquides à examiner serait très peu considérable; j’ai donc eu recours au procédé suivant. Je déterminais en premier lieu la capacité du condensateur rempli de liquide, je choisissais ensuite les éléments de la courbe de résonance pour lesquels celle-ci monte le plus rapidement. Je faisais alors passer un courant dans les spires de l’électro-aimant en observant le fil du galvanomètre de Einthoven employé. En procédant de cette manière, on pouvait constater une variation de quelques dix lnillièmes de la valeur de la constante diélectrique. Les constantes diélectriques des liquides varient sensiblement avec la température. Il y avait donc lieu de craindre des variations soudaines de la température lorsqu’on faisait passer un courant dans les spires de l’électro-aimant. A l’aide d’une batterie de 6 couples thermoélectriques de constantan est de fer, je m’assurais cependant que cette variation reste toujours inférieure à 0,01° C. Pour les ’ Les résultats qui suivent ont été obtenus avec un champ longitudinal. Un champ de 2 000 gauss ne provoquait pas une variation supérieure à 0,000 6 de sa valeur primitive. de la constante diélectrique ¥ Le mêlne champ de 23 000 lectrique supérieure à 0,000 3 de ne sa provoquait pas une x.ariationde primiti;e . valeur n lIL.!t ..., la constante dié- , 64 à Le même champ ne provoquait pas 26 de sa valeur primitive. Le même rieure à 0,000 champ ne provoquait pas 2 de sa valeur primitive. --. - à variation de la constante une diélectrique supérieure 0,000 Le même champ ne provoquait pas 16 de sa valeur primitive . une , - vne variation de la constante , -.. diélectrique supé- -, variation de la constante diélectrique supérieure 0,000 IV. Conclusion. - Ces résultats prouvent clue les cristaux liquides sont électriquement El augmente avec le champ, mais elle atteint une limite dans anisotropes. La différence s un champ de ~ 000 gauss environ. La différence des conductibilités, parallèlement et perpendiculairement aux lignes du champ magnétique, suit une marche analogue (1). La différence e - ci diminue lorsque la température s’élève. Dans le champ transversal, on ne pe’ut constater aucune variation de la constante diélectrique. Si une différence E existe, elle est inférieure à 0,002 s dans un champ de 4000 gauss. La théorie de la biréfringence électrique et magnétique développée par 3IM, Langevin - et Born prévoit que les indices ordinaire et cxtraorclinairQ diffèrent de l’indice suivant la formule ’ priinitil il Si les expériences confirmaient cette forillule, on pourrait s’attendre à ce que les constantes diélectriques dans la direction parallèle et dans la direction perpendiculaire aux lignes du champ magnétique fussent différentes de la constante diélectrique primitive. Certaines expériences sont en désaccord avec cette formule. Kerr, pour le sulfure de carbone et quelques huiles, trouva un des indices égal à l’indice primitif. M. Pockels montra que les variations de densité liées à l’électrostriction et à la magnétostriction peuvent provoquer des variations d’indice du même ordre que les variations dans le champ magnétique (2), ce qui explique les résultats de Kerr. La magnétostriction, cependant, ne provoque que de très petites yariations de densité qui ne sont perceptibles que dans les corps ferromagnétiques (~’), elle ne peut donc pas expliquer mes résultats. Pour causer un changement de constante diélectrique du même ordre que ceux que j’ai obtenus, le changement de densité ne pourrait pas être inférieur à quelques centièmes. Pour provoquer d’aussi grandes vaiiations, il faudrait exercer sur le liquide des pressions de plusieurs centaines d’atmos- phères (~). Dans les liquides ordinaires biréfringents placés dans un champ magnétique, je n’ai constaté aucune anisqtropie pour les ondes électromagnétiques de 720 m de longueur. Comme la biréfringence magnétique est très petite, même pour des champs très intenses, il est probable que l’exactitude de la méthode employée est trop petite pour mettre en évidence l’anisotropie électrique. En terminant je désire exprimer ma reconnaissance à l’I. le professeur C. Zakrzevski qui mit à ma disposition les ressources de l’Institut de Physique de l’Université Jaguellonne et qui a toujours témoigné un bienveillant intérêt à la marche de mon travail. Je dois aussi adresser mes remerciements au Ministère de l’Instruction Publique, dont la subvention m’a permis d’acquérir les composés chimiques nécessaires à mes recherches. THE SVEDBERG. Ann. der Phys., t. 44 (1914), p . 1133. POCKELS. Le Radium, t. 9 (avril 1912). p. 148-150. (3) R. V. HIRSCH, Electrostriktion und Magnetostriktion. Handbuch der El. und des von L. Graetz, t. 1, p. 270. (4) E. SCHRODINGER. Loc. cit., p. 224 (1) (2) Magn. herausgeg. -BIanusci,it recu le 1?&#x3E; août