2 - Le financement de l`économie

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2 - Le financement de l'économie
Cette fiche explique le fonctionnement de la monnaie, des institutions financières et
des marchés financiers. Elle montre en quoi les innovations des années 80, soutenues
par les gouvernements, favorisent l'accumulation et la domination du capital financier
et organisent l’incapacité pour l’Etat d’intervenir dans l’économie par des politiques
budgétaires et monétaires.
I) La monnaie et le système monétaire
1.1Les trois fonctions de la monnaie … +1
Au cours du temps la monnaie s’est présentée sous des formes diverses, des plus
matérielles comme le bétail, le sel ou les métaux précieux aux plus immatérielles comme
les avoirs inscrits sur des comptes bancaires aujourd’hui.
Mais quelque soit la forme adoptée un bien ou un support particulier ne devient monnaie
que s’il remplit 3 fonctions essentielles :
unité de compte (qui permet d’exprimer la valeur des marchandises)
intermédiaire de l’échange (utilisable dans les transactions)
réserve de valeur (cette dernière fonction est toujours menacée car rien ne permet de
garantir absolument le pouvoir d’achat futur d’une unité monétaire).
Si ces 3 fonctions sont reconnues par tous les manuels d’économie, il nous parait
important de faire la lumière sur une 4° en général laissée dans l’ombre :
• la monnaie est un moyen de « captation/transfert » de la richesse et
d’enrichissement privé par l’intermédiaire du profit et de l’intérêt.
1.2 Système bancaire et création monétaire
Le système bancaire remplit deux fonctions qui doivent être distinguées mais qui sont
complémentaires.
• la gestion des moyens de paiement dans l’économie, qui pour l’essentiel se trouvent
sous forme de dépôts à vue dans les banques : ainsi les « services de caisse »
comprennent la tenue des comptes des clients et les conseils de placements, la
circulation de la monnaie, la sécurité des dépôts, le change des devises …
• le financement des activités économiques par le biais des crédits aux entreprises et
aux ménages.
Deux modalités distinctes permettent aux banques de jouer ce rôle d’intermédiaire
financier : soit.
- prêter de la monnaie dont elles disposent « sur ressource d’épargne ». Dans ce cas les
banques jouent les intermédiaires financiers entre les épargnants à court terme (dépôts à
vue) et les emprunteurs : elles transforment de l’épargne court terme en épargne long
terme. Ce n’est pas un problème si les dépôts sont importants et que la probabilité que
tous les clients vident leur compte au même moment est faible.
- prêter de la monnaie qu’elles ne possèdent pas mais qu’elles vont créer à cette
l’occasion. Seule une catégorie de banques, les banques de dépôt qui sont inscrites à l’
AFB-association française des banques disposent de ce pouvoir de création monétaire :
(ex : le crédit Lyonnais, la société Générale, les Caisses d’Epargne et de Prévoyance, les
banques à statut coopératif ou mutualiste comme le crédit Agricole …)
- Certaines banques n’ont pas de pouvoir de création monétaire : ce sont des sociétés
financières, parfois filiales des banques de dépôt, de groupes de distribution ou de groupes
industriels. Elles proposent du crédit bail, du crédit à la consommation ou de la gestion de
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titres mais n’ont ni le droit de collecter des dépôts à court terme ni celui de créer de la
monnaie : elle doivent se financer en allant sur les marchés (marché monétaire pour le court
terme ou marché financier pour le long terme) ou emprunter les fonds dont elles ont
besoins en émettant des obligations (c’est ce que font le Crédit Foncier de France, Anténial
etc.).
1.3 La Banque centrale et l’évolution de ses missions
Les 3 grandes missions
Fondée en 1800 sous statut privé, elle s’impose comme unique émetteur de billets en 1945.
Indépendante depuis 1993, la BDF fait partie du système européen de banque centrale
(BCE ou SEBC) depuis la mise en place de l’euro (01/01/99)
Elle à dorénavant pour mission de :
• refinancer les banques commerciales quand elles ont besoin de liquidités et même
de jouer le rôle de prêteur « en dernier ressort » quand le crédit s’effondre,
• orienter la fixation des taux d’intérêt
• veiller sur la parité extérieure de la devise.
Le tout en veillant strictement au maintien du pouvoir d’achat de la monnaie par la lutte
contre l’inflation
Une orientation libérale…
L’organisation actuelle de la banque centrale est le résultat de l’orientation de plus en plus
libérale des économies européennes, soumises au diktats des théoriciens et autres experts
qui considèrent que les marchés sont à même de tout réguler, y compris la monnaie, et que
toute intervention volontariste de l’Etat dans l’ économie ne pourrait être que contre
productive. Ainsi la BC surveille la monnaie, dont le rôle est prétendument neutre, et laisse
aux mécanismes vertueux de l’offre et de la demande le soin de régler les problèmes de
chômage ou de croissance économique.
…En rupture par rapport aux 3 décennies précédentes
Pendant les trois décennies d’après guerre ( les fameuses « trente glorieuses »), la pensée
économique dominante influencée par la théorie keynésienne considérait la gestion de la
monnaie et des taux d’intérêt comme un des outils majeurs de la politique économique, aux
côtés de la politiques des revenus, de la politique fiscale et de la politique industrielles. Un
gouvernement pouvait alors décider de dévaluer sa monnaie pour stimuler ses exportations
et redresser un déficit extérieur ou relancer l’activité économique par des commandes
publique, même au prix d’un déficit public financé par une avance de la banque centrale
(création monétaire).
Au cours des dernières décennies la BC a perdu une partie de ses prérogatives
traditionnelles : elle ne fixe plus la parité externe de la devise depuis 1971 (abandon du
système de change fixe et passage au flottement généralisé des devises), elle n’est plus
autorisée à financer les déficits de l’Etat par création monétaire (l’Etat doit financer ses
déficits en vendant ses titres sur les marchés bancaires et financiers). Avec ces deux
interdits « on » renonce à utiliser la Banque centrale comme instrument de politique
économique.
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II) Le processus de création monétaire :
2.1 une histoire en trois actes
I°acte : A l’origine il ya une création de monnaie scripturale
La Banque « A » crédite le compte de son client et reçoit de celui-ci une reconnaissance de
dette ou créance. Le client peut être une ménage, une entreprise, l’Etat, une économie
étrangère (quand le compte du client est crédité en contrepartie d’un rachat de devise
étrangère).
Le client utilise son crédit pour effecteur des opérations avec d’autres agents : chèques,
virements etc. avec des clients de la même banque ou avec des clients d’autres banques,
par ex la banque « B » ou pour retirer des billets.
2°acte :Retour vers la BC et compensation interbancaire
La Banque « A » est obligée de se procurer des billets auprès de la BDF, elle doit aussi
demander à la banque « B » de créditer le compte du client destinataire du chèque ou du
virement, en lui transférant l’équivalent en monnaie banque-centrale . Cette opération
s’appelle la « compensation ».
3°acte : approvisionnement du compte à la banque centrale et taux directeur du
crédit
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Chaque banque secondaire dispose d’un compte auprès de la BC . Elle l’alimente en
monnaie centrale en déposant une partie des créances qu’elle détient sur les agents
économiques pour une durée plus ou moins longue. La BC prélève à cette occasion un taux
d’intérêt, qui sera le taux directeur du crédit (si il s’élève la banque secondaire relèvera le
taux qu’elle impose à ses clients). C’est à partir de leur compte auprès de la BC que les
banques secondaires règlent les soldes de leurs opérations interbancaires.
2.2 Le rôle du marché monétaire
La révolution des 3 D et l’essor du marché monétaire
Fini le temps où la BC contrôlait le volume et la nature des crédits distribués par les
banques. Depuis la décennie 80 et la libéralisation des marchés (déréglementation,
dérégulation, décloisonnement : les « 3D »), les banques peuvent se procurer la monnaie
dont elles ont besoin sur le marché monétaire. Mais en quoi consiste ce marché ? Tout
simplement la rencontre des offres et des demandes émanant des agents à capacité de
financement (ils offrent de la monnaie et achètent des titres de créance) et des agents à
besoin de financement (ils vendent des titres contre de la monnaie). De cette confrontation
entre offre et demande résulte un prix de la monnaie : le taux d’intérêt.
Le pouvoir résiduel de la BC
Bien que réduit, il reste important : la BC garde une relation privilégiée avec les banques
secondaires (le marché interbancaire) et cela lui permet d’influer sur le niveau des taux
d’intérêt : en achetant un plus ou moins grand volume de créances proposées par les
banques secondaires la BC rend plus ou moins facile leur refinancement et alimente plus ou
moins le marché en monnaie centrale, ce qui influe indirectement sur le niveau du taux
d’intérêt… , puisque si la monnaie est rare le taux monte et si elle est abondante…il baisse.
Le rôle de la BC devient encore plus important en cas de crise de liquidité : quand plus
personne ne veut se risquer à acheter des créances, la BC joue le rôle de prêteur « en
dernier ressort » ! (cf. en 2009 ).
Qui sont les « agents excédentaires » sur le marché monétaire ?
Des entreprise, des compagnies d’assurance, des groupes financiers, des individus
opulents…Deux exemples parmi d’autres : les centrales d’achat de groupes comme
Carrefour, Auchan profitent du décalage entre la vente des produits aux consommateurs et
le paiement des fournisseurs et placent leur abondante trésorerie à court terme sur le
marché monétaire. De même les compagnies d’assurances mettent à profit le décalage
entre le paiement des primes par leurs clients et le remboursement des sinistres.
III) Les limites de la création monétaire
3.1 Il faut se garder de l’inflation et de la déflation.
Formellement la quantité de monnaie que peut créer un système bancaire ne doit pas
excéder la valeur du volume de la production qui sera présentée à l’échange,
• Si la création de monnaie est excessive
le pouvoir d’achat de chaque unité monétaire s’effondre (inflation). Cette inflation pénalise
particulièrement les détenteurs de revenus fixes qui ne peuvent renégocier leur contrat :
bailleurs de logement ou de commerce, prêteurs à long terme, retraités etc., en revanche
les acteurs qui peuvent répercuter les hausses de prix s’en sortent bien. On assiste donc à
une modification de la répartition de la valeur ajoutée, comme cela fut le cas dans les
années 70. Mais l’inflation entraine d’autres conséquences : elle peut dissuader les
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entrepreneurs de développer leurs outils de production et les prêteurs potentiels de prêter
puisqu’il ya incertitude sur le rentabilité réelle de leur opération (inflation déduite)
• Si la création de monnaie est insuffisante
Si la monnaie manque les vendeurs de biens et services devront baisser leurs prix
(déflation). Le consommateur pourrait commencer par s’en réjouir mais il constaterait
rapidement que la déflation entraine le ralentissement de l’activité économique encore plus
vite que l’inflation. En effet, plutôt que d’accepter une diminution de la rentabilité de leur
capital, les entreprises, renonceraient à produire, réduiraient les salaires de leurs salariés,
tailleraient dans les effectifs etc.
• Il y a donc nécessité d’une croissance conjointe et correspondante de ces deux
variables : la production de biens et services et la masse monétaire.
Qu’il faille appliquer ce principe de manière rigide, quoi qu’il arrive, comme le voudraient
les libéraux ou de manière plus souple, pour dynamiser la croissance comme le proposent
les keynésien, c’est un des points du débat quand on discute de politique monétaire.
3.2 Les mécanismes qui régulent le rythme de la création monétaire
Même s’il suffit qu’une banque crédite un compte client pour créer de la monnaie, cela ne
signifie pas qu’on est dans l’arbitraire total…
Les réserves obligatoires
D’abord il faut que ce soit une banque à qui ce pouvoir a été octroyé, ensuite le pouvoir de
création monétaire de cette banque est limité par la nécessité de garder sur son compte
des réserves de monnaie centrale (réserves obligatoires) dont le volume augmentera
mécaniquement avec l’augmentation des crédits qu’elle vend à ses clients : ainsi plus une
banque distribue des crédits, plus elle doit déposer auprès de la BC des créances et se voir
prélever un taux d’intérêt qui ampute une partie de l’intérêt qu’elle a elle-même prélevé.
Les règles prudentielles
D’autres dispositifs devraient protéger, à priori , contre le risque de voir les banques se
lancer dans une spirale de développement des crédits jusqu'à atteindre un niveau tel
qu’elles ne seraient plus capables d’amortir les défaut de remboursement d’emprunteurs
insolvables : C’est le but des « règles prudentielles » établies par le Comité de Bâle : ainsi
le « ratio Cooke » fait dépendre le montant total des prêts que peut accorder une banque du
montant de ses fonds propres (son capital).
IV) les marchés financiers.
4.1 description
Aujourd’hui une grande partie du crédit se traite directement sur les marchés financiers et
les banques y servent alors de simples intermédiaires.
Les marchés financiers sont les lieux où se négocie le capital financier. Concrètement cela
recouvre les bourses mais aussi les marchés virtuels où les transactions se font par internet.
La monnaie s’y loue, s’y échange contre des titres négociables appelés aussi actifs
financiers ou capitaux financiers. A la différence du marché monétaire qui sert au
financement à court terme, le marché financier est dédié aux opérations à long terme.
4.2 Développement des marchés financiers et nouvelles pratiques
Le développement des marchés financiers est à la fois une des causes et une
conséquence de l’ouverture des économies et de l’émergence d’une économie globalisée.
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Pour attirer une épargne disponible d’autant plus croissante qu’elle provient du monde
entier de nouveaux instruments de placement diversifiés ont été élaborés. Nous en
parlerons plus en détail dans la fiche sur la financiarisation de l’économie, mais disons le
tout net : la complexité de ces nouveaux produits est telle que les experts de la finance euxmêmes se sont déclarés incapables de dire ce que recouvrait exactement les engagements
de Goldman Sachs au moment de son effondrement en 2007…
4.3 Bilan de l’évolution du système bancaire et financier depuis les années 80.
L’indépendance de la BC posée comme un principe fondamental lors du passage à
l’euro a été le moyen d’assurer la domination des forces du marché sur la monnaie.
La seule Europe qui fonctionne vraiment c’est le grand marché européen avec liberté de
circulation des produits et des capitaux.
Tout concoure à son développement : une fiscalité de moins en moins pesante sur les
profits des groupes industriels et financiers dominants, un alignement des coûts salariaux
sur les niveaux les plus bas, un démantèlement de la protection sociale, la mise en pièce
des services publics, le bradage des entreprises publiques revendues au privé.
En même temps que la perte de souveraineté monétaire, la révolution libérale a aussi
organisé la dépendance de l’Etat vis-à-vis des marchés financiers
Acculé au déficit par la réduction méthodique de ses recettes et ne pouvant plus se
financer par création monétaire auprès de la banque centrale, l’Etat doit emprunter sur les
marchés financiers : sa crédibilité vis-à-vis des prêteurs et la conformité de sa politique à
leurs attentes prend le pas sur la satisfaction des besoins collectifs, fussent-ils
solennellement reconnus lors des campagnes électorales.
A terme, le seul rôle que l’économie libérale consent à accorder à l’Etat, c’est celui d’Etat
gendarme, pour maintenir ce qu’elle appelle « la paix sociale » , la seule intervention dans
l’économie qu’elle lui confie et lui impose c’est la socialisation des pertes (naturel
contrepartie de la privatisation des profits…)
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Les titres de propriété sont des titres de propriété d'entreprises, plus communément
appelés des actions. Chaque actionnaire est le propriétaire d'une partie de l'entreprise qui
a émis ces actions. A ce titre, il bénéficie d'une part de ses profits, elle lui est distribuée
sous forme de dividendes. La valeur d'une action est fonction de l'offre et de la demande.
Cette valeur dépend certes des dividendes versés par l'entreprise, mais est surtout
largement conditionnée par les perspectives de profits à venir. Contrairement aux
obligations qui ont une durée de vie déterminée, et dont le capital est remboursé à
expiration, les actions ne voient leur vie limitée que par celle de l'entreprise.
Les titres de créance correspondent à du crédit. On prête sa monnaie et, en contrepartie,
on reçoit un titre de créance qui rapporte des intérêts. Cette opération peut se faire
directement sur les marchés financiers, ou indirectement par l'intermédiaire d’une banque.
Plus simplement, on peut prêter sa monnaie à la banque en la déposant sur des comptes
sur livrets ou sur d'autres types de placements proposés à leur clientèle. La banque se
charge alors de prêter cette monnaie, et de la transformer en titres de créances.
Les obligations sont des tires de créances émis par les entreprises ou l’Etat. Acheter une
obligation de 100 euros revient à prêter 100 euros pour une durée définie à l’entreprise en
contrepartie du service d’inintérêt annuel. Au la fin du contrat l’obligation est remboursé à
sa valeur nominale (son prix d’émission). L’obligation est une valeur mobilière, elle peut être
revendue au cours de son existence à un prix qui dépend de l’offre et de la demande
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Les différents marchés traditionnels de capitaux
Financement à long terme ( 7 à 25 ans)
Financement à court terme (moins de 7
ans )
Marché financier
Marché monétaire
Marché obligataire/marché des
actions
On distingue
- marché primaire : émission de titres
avec un prix d’émission
-marché secondaire : négociation des
titres avec un prix variant en fonction
de l’offre et de la demande
Les actions : des titres de propriété
rémunérées par un dividende variable.
Les obligations : des titres d’emprunt
au taux d’intérêt fixe.
Marché des titres
et des créances
négociables
Certificats de
dépôt des
banques
Billets de
trésorerie des
entreprises
Bons du Trésor
Marché accessible à tous les agents économiques
Entreprises
Banques et établissements de crédit, compagnies
d’assurance
Fonds d’investissement: OPCVM, SICAV, FCP, Fonds de
pension ou « hedge funds » spécialisés dans les
placements à risque
Ménages (opulents !)
Etats
Marché
interbancaire
Achat ou vente de
créances contre
monnaie entre la
banque centrale et
les banques
secondaires.
Marché réservé
aux banques et à
la BDF
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