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LA MONNAIE BINAIRE
SOLUTION AUX GRANDES
PATHOLOGIES ECONOMIQUES
(sous-développement, chômage endémique,
crises économiques, environnement, système
monétaire international)
Par Dieudonné ESSOMBA
Références
ESSOMBA Dieudonné
Ingénieur Principal de la Statistique - Chargé d’Etudes
MINISTERE DE L’ECONOMIE, DE LA PLANIFICATION ET DE L’AMENAGEMENT
DU TERRITOIRE DU CAMEROUN
Adresse: MINEPAT-DPPS Yaoundé-Cameroon
Tel. : 237.75.12.65.83
Courriel : [email protected]
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I. UNE NOUVELLE FORMULATION DU COMMERCE
INTERNATIONAL
I.1. INTRODUCTION
L’analyse traditionnelle considère les pays comme des réalités primaires
dont les caractéristiques suffiraient à elles seules à expliquer les échanges
internationaux. La connaissance fine des données macroéconomiques tels que le
PIB, les exportations ou les taux de change permettrait ainsi à les décrire avec une
bonne précision.
Une telle approche porte le défaut génétique d’intégrer insuffisamment la
nature organique des liens entre divers pays. Paris exerce une tutelle économique
aussi bien sur les régions françaises que sur les pays francophones d’Afrique et
toute entreprise capable de ravitailler cet ensemble s’y installe d’office. Autant
Marseille que Dakar n’ont guère de chance de la lui disputer avec le moindre
succès.
De telles hiérarchies dans l’implantation des entreprises imposent une
classe d’activités à chaque agglomération, chaque zone ou chaque pays et
assignent étroitement la marge de manœuvre des uns et des autres. On ne peut
donc les analyser de manière isolée, mais comme des éléments d’un vaste
organisme.
Tel est le fondement de la reformulation du commerce international, basé
sur trois motifs différents qui forment ses dimensions :
1. Le premier est la différence de rareté relative : le blé part des USA en UE
parce que son prix est moins élevé aux USA. Cette idée développée par le génial
Adam Smith constitue la dimension smithienne des échanges ou commerce de
complémentarité.
2. Le second est la variété des goûts : à prix égal, quelques Français
boivent la bière allemande et quelques Allemands boivent la bière française. Le
flux d’échanges n’est plus alimenté par la rareté relative, mais par des
particularités de goût. C’est la dimension variale des échanges géographiques ou
commerce de substitution.
3. Le troisième exprime l’extension internationale d’une même filière de
production : le coton est récolté et égrené au Burkina Faso, transformé en tissu en
France, puis ramené au Burkina Faso où il est cousu. Ce commerce n’est pas
différent des échanges existant entre les agglomérations d’un même pays, où les
plus petites envoient aux plus grandes des produits bruts en échange de produits
manufacturés qui en sont issus. Il exprime des hiérarchies entre les ensembles
économiques et représente la dimension hiérarchique des Echanges ou
commerce d’intégration
Les trois dimensions se présentent comme des types purs dont les
économies réelles sont des compositions plus ou moins complexes. Elles sont
indépendantes, nécessaires et suffisantes et expliquent les échanges
géographiques de manière universelle, en tout temps et en tout lieu.
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1.2. LE COMMERCE SMITHIEN
Le commerce smithien porte essentiellement sur les matières premières
dont la production est davantage déterminée par les données naturelles,
géographiques ou climatologiques que le niveau d’industrialisation. Quand le
cacao ivoirien s’échange contre le blé américain, nous sommes dans un monde
smithien, mais quand les pays sous-développés exportent les minerais en
contrepartie des biens manufacturés qui en sont issus, il n’en est plus de même.
Sa principale règle est la suivante : quel que soit le produit, chaque pays
dispose d’exploitations plus ou moins rentables. Pour un prix donné, seules les
exploitations capables de fonctionner avec bénéfice sont mobilisées, les autres
étant réduites à l’état de potentiel.
Dire que la production d’une tonne de blé vaut 250$ aux USA ne signifie
pas qu’il en est ainsi sur tout le territoire américain. Il s’agit d’une moyenne
calculée sur les exploitations dont certaines sont plus fertiles et d’autres plus
ingrates. Il en est de même pour le Japon : quoiqu’en moyenne, les coûts y soient
plus élevés qu’aux USA, quelques poches y présentent un rendement
particulièrement favorable.
Quand les deux pays entrent en contact, il s’établit naturellement un prix
d’équilibre qui traduit les efforts fournis par les fermiers des deux pays pour
satisfaire la demande globale. Ce prix permet aux USA de satisfaire sa propre
demande, mais aussi de couvrir le solde de la demande japonaise.
Il en découle que pour un produit donné, chaque pays fournit une
production correspondant à ses exploitations capables de fonctionner avec le prix
international, le commerce international se chargeant de couvrir les soldes sur les
diverses demandes.
Le commerce smithien est le seul qui réalise les conditions de spécialisation
et uniquement dans le secteur primaire. Pour des raisons évidentes, il est naturel
que le Canada cultive la pomme adaptée au climat tempéré et que l’Afrique cultive
la mangue qui est un fruit tropical. Cette spécialisation, immédiate et passive, n’a
besoin d’aucune philosophie et d’aucune théorie quelconque pour être promue.
1.3. LE COMMERCE VARIAL
Le Canada exporte en Allemagne des voitures et des téléviseurs et en
importe des biens identiques. Ce commerce traditionnellement qualifié de biens
différentiés, s’oppose à la forme smithienne parce que les biens échangés sont
prêts à l’usage : bien de consommation, outils de production, etc.
Le commerce varial est entretenu par la variété intrinsèque de l’Humanité.
Imaginons que toutes les bières du monde se trouvent au Canada. Naturellement,
les Canadiens vont s’y éparpiller, certains consommant les marques locales,
d’autres préférant les étrangères.
Si maintenant, le Canada rentre en autarcie, les citoyens seront obligés de
se rabattre sur les bières nationales, mais il y aura des « trous », des qualités qui
n’existent plus et par suite, quelques clients qui, ne trouvant pas leur bière de
prédilection, seront obligés de se contenter des substituts locaux les plus proches
de leur goût.
Le commerce varial permet de boucher les « trous », les produits importés
étant consommés au prorata des trous couverts.
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Le commerce varial n’obéit pas à la spécialisation internationale, cette
notion étant interdite par la nature de la technologie. De toute évidence, la maîtrise
de la technologie des moteurs, des roues et des carrosseries permet de produire
simultanément les voitures, les camions, les trains, les chars, les tracteurs, les
moulins, les bateaux ou les machines-outils. De même, la maîtrise du transistor et
du tube à vide entraîne la capacité de fabriquer simultanément le téléviseur, le
poste radio, le téléphone ou le micro-ordinateur.
Tous ces produits n’étant que des combinaisons différentes des mêmes
composantes, on ne peut demander à un pays de se spécialiser dans les camions
et un autre dans les tracteurs, à celui-ci de se spécialiser en téléviseur et l’autre en
micro-ordinateur. Un pays est donc condamné à tout fabriquer ou à ne rien
fabriquer et la spécialisation est tout simplement impossible.
Pourtant, les échanges variaux présentent une configuration qui peut faire
illusion : les Japonais dominent dans la construction navale et on peut croire qu’ils
s’y sont spécialisés. Mais ces formes hégémoniques sont davantage l’expression
d’un oligopole international, où une firme japonaise a affirmé son autorité face à
des concurrentes venant d’autres pays.
Alors que le commerce smithien traduit des complémentarités entre les
économies, le commerce varial exprime des substitutions et son rôle est différent :
il transpose à l’échelle mondiale les concurrences locales et nettoie le marché des
firmes peu compétitives et peu adaptées, obligeant tous les acteurs à l’innovation
et la compétitivité.
Son volume est d’autant plus important que les pays sont développés. On
ne peut néanmoins l’additionner avec le commerce smithien pour élaborer un
quelconque raisonnement pertinent. Un échange des voitures contre des voitures
n’entraîne que des activités limitées au commerce alors que l’importation du
minerai de fer donne lieu à une longue chaîne d’activités intérieures. La
sommation des échanges extérieurs peut donc être utile pour évaluer le niveau
d’intégration des Economies, mais elle ne peut évaluer ni les gains du commerce
international, ni son intérêt.
I.4. LES ECHANGES HIERARCHISES
Dans un pays, l’implantation des entreprises obéit à une règle précise : à
coûts de production identiques, elles s’installent dans l’agglomération la plus
importante qui dispose du plus grand avantage en termes de marché.
Une entreprise dont le rayonnement est national s’installe de préférence
dans la plus grande ville du pays, une entreprise de taille régionale dans l’une des
capitales provinciales, et ainsi de suite.
L’espace économique s’organise ainsi en un vaste réseau arborescent,
sous l’autorité de la ville centrale qui domine les villes provinciales, lesquelles à
leur tour dominent les villes départementales, suivant un processus récurrent.
Cette organisation assigne aux diverses agglomérations un rôle bien
précis dans la chaîne de production. Les plus petites ouvrent la chaîne avec les
produits agricoles, de pêche, d’élevage ou les minerais bruts et les expédient vers
les plus grandes qui les transforment en biens manufacturés. Ceux-ci sont alors
disséminés dans l’ensemble du pays, où ils donnent lieu à des activités de
commerce et de service.
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Le processus reproduit sur le plan économique la hiérarchie administrative
à laquelle elle se superpose souvent et contribue à renforcer. L’ensemble forme
ainsi une structure organique où chacun a sa place et ne peut, sans intervention
énergique des pouvoirs publics, prendre celle de l’autre.
Le commerce hiérarchisé reproduit, sur le plan international, les rapports
d’autorité reliant les agglomérations d’un pays : contrairement aux hiérarchies
administratives qui se limitent à l’intérieur des frontières, l’autorité économique
d’une grande ville peut s’étendre au-delà des continents. Abidjan s’impose ainsi à
sa compatriote Bouaké, mais aussi à Ouagadougou et Bamako qui ressortent
d’entités politiques différentes et confisque les entreprises capables de desservir
l’ensemble de ces territoires.
A une échelle plus élevée, Paris exerce une puissante autorité sur Marseille
et Lyon, mais aussi sur Dakar, Lagos ou Kinshasa, car, à coûts de production
identiques, toute entreprise capable de desservir simultanément le marché
français et africain s’installe à coup sûr à Paris.
L’ensemble géographique formé des pays liés par le commerce
hiérarchique forme ainsi une entité organique dont les règles reproduisent celles
d’un même pays et que nous appelons Firmose.
Une Firmose apparaît donc comme un ensemble de pays dans lesquels les
agglomérations exercent les unes sur les autres une autorité hiérarchique. La
faible mobilité des facteurs de production entre pays différents d’une même
Firmose n’en modifie pas les règles fondamentales, elle se présente simplement
comme un paramètre analogue à la distance géographique.
Le concept de Firmose est à l’origine du sous-développement.
I.5. STRUCTURE DUNE FIRMOSE
Si une boulangerie peut s’implanter dans une petite ville de 5.000 habitants,
une usine d’automobiles requiert déjà un marché des centaines de millions de
personnes et une firme comme Airbus ne peut survivre qu’avec des milliards
d’habitants.
Une entreprise dont le marché recouvre les pays développés et les pays
sous-développés s’installe naturellement dans les premiers, avantagés par leur
marché plus important, la plus grande disponibilité des équipements et la
concentration de l’expertise. Leur avantage initial a tendance à se renforcer par
concentration itérative des arguments de production.
Prenons une industrie automobile qui s’implanterait actuellement à Dakar et
dont la vocation serait de couvrir le même marché que Renault. Elle est d’abord
confrontée à un environnement moins favorable que sa rivale française, car si
celle-ci a choisi Paris plutôt que Dakar, c’est bien parce qu’à ce moment, Paris
présentait plus d’arguments économiques que son implantation a contribué à
renforcer. Et il est extrêmement difficile que la situation puisse changer du jour au
lendemain.
A cette pénalité de localisation s’ajoute la nature des firmes de la taille de
Renault qui sont des redoutables rescapées de vieilles guerres féroces. Elles ont
développé une expertise pointue, un puissant réseau de distribution, des filiales et
des collusions politiques qui leur permettent d’évacuer facilement toute menace
pesant sur leur marché.
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