Cours de Marie Gillon - 1
Axes et symétrie chez les Métazoaires
I) Diversité des axes et symétries
1) Absence de symétrie
Les animaux les plus primitifs, les spongiaires, n'ont ni forme précise ni symétrie. En ce sens,
ils ressemblent plus à des végétaux qu'à des animaux. Ils en ont pourtant toutes les caractéristiques,
et notamment la disposition en 2 couches concentriques au stade embryonnaire, cette structure étant
ensuite conservée au stade adulte.
2) Symétrie radiée et/ou biradiée
Ce type de symétrie ne se rencontre que chez les Diblastiques, et notamment chez les cnidaires,
considérés comme les 1e animaux à symétrie radiaire ou circulaire. Ces animaux sont en fait des sacs
avec un orifice orienté vers le haut, la bouche, pourvue d'une couronne de tentacules. On ne peut
distinguer ni avant ni arrière, ni droite ni gauche. Cette morphologie simple ne signifie pas frustre
pour autant, car ils ont eu le temps d'évoluer. Ainsi certaines méduses sont dotées d'organes des sens
performants sur le pourtour de leur couronne, ce qui leur permet d'être des chasseurs actifs.
De plus, une symétrie biradiaire ou biradiale existe chez certains polypes, et notamment ceux
des Anthozoaires Hexacoralliaires. Dans ce cas, le stomodeum qui débute la cavité gastrale est
allongé et étroit, pourvu de 2 sillons gastriques, ce qui permet de définir 2 plans de symétrie.
Chez les Cténaires (= Cténophores), on peut également observer une symétrie radiale (ou
biradiales : dépend des auteurs). Ces animaux se distinguent des Cnidaires par 2 caractères : ils n'ont
pas de cellules venimeuses, et leur symétrie est tout à fait particulière. En effet, on distingue 2 plans
de symétrie : un plan tentaculaire passant par les tentacules et un plan qui lui est perpendiculaire
(= plan stomodéal), passant par le grand axe de la bouche.
On ne peut distinguer chez les Cténaires aucune tête ni mésoderme, mais le tube digestif
s'ouvre par 2 pores anaux situés à l'opposé de la bouche : les aliments se déplacent donc désormais
dans une seule direction à travers l'intestin. La plupart des Cténaires sont planctoniques (ils flottent
en haute-mer), mais d'autres sont rampants. Ils possèdent alors des palettes natatoires locomotrices
regroupées généralement sur 8 brandes méridiennes convergentes appelées cténidies.
3) Symétrie bilatérale
Dans la faune actuelle, la symétrie bilatérale est le propre des Triploblastiques. En effet, ce
type de symétrie, caractéristiques de tous les autres animaux, apparaît avec le 3e feuillet
embryonnaire : on dit que les Triploblastiques sont les bilatériens ou Bilateralia, et ils disposent d'un
avant et d'un arrière, de côtés droite et gauche, d'un haut et d'un bas.
La symétrie bilatérale est la somme de 3 polarités : antéro-postérieure, dorso-ventrale et
gauche-droite. La régionalisation du corps selon un axe AP est bien marquée, tant sur le plan
morphologique qu'anatomique. Cette polarité sera d'autant plus marquée qu'on a céphalisation et
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cérébralisation poussée, et que s'individualisent les différentes régions selon cet axe (cas des
Annélides et des Arthropodes).
Ces individus ne sont plis limités à une forme circulaire : on peut donc observer dans cette
lignée des morphologies très variées. Cependant, il existe plusieurs caractères dérivés propres aux
Triploblastiques :
- apparition du 3e feuillet embryonnaire, le mésoderme
- présence de la symétrie bilatérale et d'un axe de polarité AP
- présence d'un tube digestif complet et ramifié, le blastopore de la gastrula donnant au moins
un de ses orifices
- apparition de la protonéphridie
- apparition de synapses toutes unidirectionelles et des synapses avec un système
acétylcholine/acétylcholinestérase
- participation du système nerveux central au processus de neuro-céphalisation, associée à
une concentration des organes des sens et des organes de préhension autour de la bouche (= stomo-
céphalisation)
- regroupement en complexes des gènes de développement de la famille HOX (chez les
Diploblastiques, les gènes HOX ne sont pas regroupés en complexes).
Cependant, il existe une exception à la symétrie bilatérale chez les Triploblastiques, celle des
Echinodermes (oursins, étoiles de mer…) : à l'état adulte, la symétrie bilatérale est en effet
abandonnée pour donner une symétrie radiée d'ordre 5 (= pentaradiée). Chez ces Coelomates
Deutérostomiens, la symétrie pentaradiée n'est pas considérée comme un stade primitif, mais plutôt
comme l'acquisition d'une morphologie associée au milieu de vie.
Les larves des Echinodermes présentent une symétrie bilatérale propre aux Bilateralia : le
changement de symétrie est associé à de profondes transformations s'accomplissant pendant une
métamorphose. Elle correspond à un changement de mode de vie et donc de niche écologie : c'est un
exemple de transition écologique.
Ce groupe est connu depuis longtemps sur le plan paléontologique : les fossiles montre que les
Echinodermes étaient initialement à symétrie bilatérale. La symétrie pentaradiée s'est installée plus
tard de manière très rapide, mais on a eu superposition de ces 2 types de symétrie pendant un laps de
temps très long (cf infra).
II) Mise en place de la symétrie au cours du développement
1) Mise en place des axes et symétrie pendant l'ontogenèse
a) Avant la fécondation : exemple de la drosophile
Chez la drosophile, les axes AP et DV composant la symétrie bilatérale sont détermoinés
durant l'ovogenèse. Cette détermination fait intervenir des interactions entre l'ovocyte et les cellules
qui l'entourent, qu'elles soient nourricières ou folliculaires. Au sein de l'ovocyte, le pôle antérieur
correspond à la zone ovocytaire en contact avec les cellules nourricières, la face dorsale est aplatie
alors que la face ventrale est arrondie… cf BGU10
b) Après la fécondation : exemple des Amphibiens
L'ovocyte est parfaitement sphérique : il présente une symétrie radiaire autour de l'axe animal-
végétatif. C'est le 1e globule polaire déjà émis et le fuseau très excentré qui déterminent le pôle
animal (et donc le pôle végétatif à l'opposé, là où le vitellus est le plus concentré).
Cet ovocyte présente donc une forte hétérogénéité cytoplasmique liée à 3 gradients : un
gradient de vitellus animal-végétatif, un gradient d'ARN végétatif- animal et un gradient pigmentaire
cortical formant une calotte au pôle animal. Les constituants cytoplasmiques seront transmis après la
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fécondation à l'œuf, dont la majeure partie du cytoplasme aura une origine maternelle. Les ARN
maternels assureront quant à eux le début de la segmentation jusqu'à la transition blastuléenne, après
laquelle le génome zygotique commence à s'exprimer.
Si l'axe AP est donc détermi avant même la fécondation, l'axe DV est déterminé par le point
de pénétration du spermatozoïde dans l'ovocyte, qui se localise en un point de l'hémisphère animal.
Cette pénétration déclenche une rotation du plasme cortical dite rotation de symétrisation : elle
s'accompagne du soulèvement de la calotte pigmentaire, dégageant à l'opposé un croissant gris
dépigmenté.
La symétrie devient alors bilatérale : elle passe par les 2 pôles de l'œuf, par le point d'entrée du
spermatozoïde et par le milieu du croissant gris. Ce point d'entrée détermine la future face ventrale,
et le crossant gris la future face dorsale.
2) Le déterminisme génético-moléculaire des axes et de la symétrie
Chez la drosophile, le gène bicoïd (gène à effet maternel) est transmis sous la forme d'ANRm
via les ponts cytoplasmiques reliant les cellules nourricières et l'ovocyte. Ces ARNm gagnent la
région antérieure de l'ovocyte, mais ils se répartiront selon un gradient AP décroissant après la
fécondation. La forte concentration antérieure détermine la partie antérieure, cad la future tête (si on
mute le gène bicoïd, on obtient 2 régions postérieures).
Le gène dorsal (gène à effet maternel) est lui aussi transmis à l'œuf sous la forme d'ARMm : ils
sont traduits après la fécondation en une protéine dorsal, qui se répartit de manière uniforme dans
l'embryon syncitial. Elle ne pénètrera que dans les cellules ventrales au moment de la cellularisation,
où elle activera l'expression du gène Sog, impliqué dans la ventralisation et la neurogenèse.
Après cellularisation, d'autres gènes vont intervenir : on a notamment les gènes de
segmentation qui interviennent dans la mise en place des structures métamériques, réparties dans des
segments successifs. Après cette segmentation ordonnée du corps, on a intervention des gènes
homéotiques, qui permettent de donner une identité aux segments. Cette identité sera pérennisée
dans le cas d'une métamérie homonome mais elle sera remaniée dans le cas d'une métamérie
hétéronome ou encore effacée dans le cas d'une disparition secondaire de la métamérie.
Ces gènes sont largement distribués chez les Métazoaires, et se retrouvent aussi bien chez les
Insectes que chez les Vertébrés. Parmi les Deutérostomiens, ils ont été principalement étudiés chez
les Chordés, les Entéropneustes et les Echinodermes.
Les gènes homéotiques, qui contrôlent le développement de la partie antérieure du système
nerveux central des Céphalocordés sont les mêmes que ceux qui contrôlent la formation des 3
régions postérieures du cerveau des Vertébrés. On pense qu'un grand nombre de particularités
anatomiques des Vertébrés sont le fait d'une duplication de gènes déjà présents chez les
Céphalocordés et les Tuniciers.
III) Signification fonctionnelle des axes et symétries
1) Relations entre axes, symétries et mobilité de l'organisme
En règle générale, la symétrie radiaire est associée à un mode de vie sédentaire ou fixée.
L'apparition de l'axe AP est typique de l'association au mouvement alors que l'apparition de l'axe
DV est liée à la position de l'organisme par rapport au substrat (la face ventrale est celle qui fait face
au substrat). La symétrie droite-gauche est déduite des 2 précédentes lorsque l'on regarde un
organisme par la face dorsale et la tête vers l'avant.
pour d'autres infos : http://www.unice.fr/LEML/coursJDV/tp/tp4.htm
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2) Les modifications des axes et symétries
Elles peuvent être associées à 2 grandes tendances : soit aux modes de vie des organismes, soit
aux contraintes du plan d'organisation.
a) Chez les Protostomiens
De nombreux organismes à symétrie bilatérale qui vivent de façon sédentaire ou fixée tendent
à revenir vers une symétrie radiaire. C'est par exemple le cas des Annélides Polychètes fixés qui
tendent à présenter une symétrie axiale et une régression céphalique, associée à un mode de nutrition
passif de type microphage.
On peut également observer ce type d'évolution chez les Oligochètes mangeurs de substrats (=
limnivores) comme les Lombrics, mais aussi chez les Crustacés Cirripèdes qui tendent à préserver
une symétrie axiale et une régression céphalique là encore associée à un mode de nutrition
microphage.
De la même manière, certains Mollusques présentent une modification de leur symétrie
bilatérale sans passer à une symétrie radiaire : elle est dans ce cas liée au mode de vie posé ou fixé
sur le fond. Ainsi chez l'huître, les valves droite et gauche ne sont plus symétriques, mais le corps
conserve une symétrie bilatérale. La valve hypertrophiée devient ventrale et sera celle posée sur le
substrat.
La Coquille Saint-Jacques (Pecten) est un également un bon exemple de ce genre d'altération
de la symétrie initiale : le corps lui-même a une symétrie bilatérale, mais la coquille a une symétrie
radiaire très marquée, caractéristique des organismes fixés ou peu mobiles. De plus comme chez
l'huître, la valve hypertrophiée devient ventrale alors que la valve dorsale est de type operculaire?
Chez les Chlamidés et les Pectenidés, la différenciation des 2 valves permet un mode de locomotion
très particulier en pleine eau, par claquement des valves…
Chez les Mollusques Streptoneures ou Prososbranches et chez les Pulmonés, la symétrie
bilatérale est perdue au niveau de la masse viscérale et de la coquille. En effet, on assiste à des
phénomènes de torsion du tube digestif (entraîne avec lui les autres organes), ce qui amène l'anus à
proximité de la bouche et provoque l'enroulement de la masse viscérale autour de la columelle
interne de la coquille hélicoïdale. L'asymétrie interne sera alors plus ou moins marquée : certains
organes deviennent impairs (on ne retrouve plus qu'une seule oreillette, un seul rein et une seule
branchie).
Cette altération de la symétrie disparaît chez les Gastéropodes Euthyneures Opisthobranches
Nudibranches (Doridiens et Eolidiens) et chez les Tectibranches (Aplyses) : ce sont en effet des
organismes nectoniques à mobilité importante et orientée. Par contre chez les Mollusques et les
Crustacées endoparasites, les bouleversements du plan d'organisation de l'adulte parasite sont
associée à l'absence de symétrie.
b) Chez les Deutérostomiens
Chez les Echinodermes (épithélioneuriens), la symétrie a priori radiaire est légèrement
bilatéralisée du fait de la présence de la plaque madréporique au sein de l'interradius C-D. On a
donc introduction d'un axe de symétrie bilatérale passant par l'interradius C-D et le radius A.
La majorité des Echiurides (= Oursins) présentent une symétrie classique de type pentaradiée :
ce sont des oursins réguliers. Cependant, une symétrie bilatérale peut s'ajouter à la symétrie radiale
originelle des adultes : ce sont alors des oursins irréguliers.
Cette particularité semble être liée à une mobilité orientée dans un substrat meuble, voire à un
enfouissement et à un mode de nutrition associée. Le corps s'allonge en même temps que le tube
digestif se modifie : l'anus quitte la région apicale et migre en région postérieure. La bouche peut
rester en position inférieure ou migrer aussi, mais cette fois-ci vers la région antérieure. Tous les
termes existent entre les oursins réguliers et les oursins irréguliers.
Chez les Urochordés Thaliacés, la larve a une symétrie bilatérale, alors que les adultes
acquièrent après la métamorphose une forme de tonneau et dont une symétrie circulaire. On ne peut
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pourtant pas parler de transition écologique comme dans le cas de l'oursin car la larve et l'adulte sont
tous deux planctoniques.
Chez tous les vertébrés, la symétrie bilatérale interne est affectée par la disposition de certains
organes axiaux internes : c'est ainsi le cas du cœur à gauche, du foie à droite, des anses intestinales
allant d'un coté et de l'autre…La symétrie externe est cependant toujours strictement conservée.
Quelques modifications existent pourtant, et elles sont toujours associées à des modes de vie
spécialisés :
- chez les Poissons Pleuronectiformes (Limande, Sole, Turbot), la larve présente une symétrie
bilatérale et vit en pleine eau. L'adulte obtenu après une métamorphose vit couché sur l'un de ses
côtés : cela entraîne une asymétrie très marquée. Ainsi, le côté inférieur est blanchâtre et aplati alors
que la face supérieure bombée et pigmentée présente les 2 yeux et les 2 narines. Lors de la
métamorphose, les yeux et les narines migrent en effet d'un côté ou l'autre selon les espèces : vers le
flanc gauche chez les Turbots, vers le flanc droit chez la Plie, la Sole et la Limande.
- Chez les Ophidiens, l'allongement exceptionnel du corps a pour conséquences des
modifications anatomiques sont certains conduisent à une asymétrie interne. Ainsi, on observe une
atrophie du poumon gauche
- Chez les Oiseaux, seul le tractus génital droit est conservé chez le femelles : la possession
d'énormes oeufs télolécithes à coquille dure semble incompatible avec la présence des 2 tractus (la
place n'est pas suffisante…).
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